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09/10/2017 | FRANCE | N°16MA03096

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 09 octobre 2017, 16MA03096


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Foch Automobiles a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner la communauté d'agglomération des pays de Lérins, venant aux droits du syndicat intercommunal des transports publics (SITP) de Cannes, à lui verser la somme de 18 000 euros en réparation des dommages résultant des travaux d'aménagement de la première ligne de bus à haut niveau de service, la somme de 12 000 euros en réparation des dommages résultant de l'éviction de l'occupation d'une pa

rtie d'une dépendance du domaine public de l'Etat et la somme de 10 000 euros ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Foch Automobiles a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner la communauté d'agglomération des pays de Lérins, venant aux droits du syndicat intercommunal des transports publics (SITP) de Cannes, à lui verser la somme de 18 000 euros en réparation des dommages résultant des travaux d'aménagement de la première ligne de bus à haut niveau de service, la somme de 12 000 euros en réparation des dommages résultant de l'éviction de l'occupation d'une partie d'une dépendance du domaine public de l'Etat et la somme de 10 000 euros au titre des dommages-intérêts pour résistance abusive, avec intérêts et capitalisation.

Par un jugement n° 1400955 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 29 juillet et 13 décembre 2016, la SAS Foch Automobiles, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision du SITP du 30 décembre 2013 de rejet de sa demande d'indemnisation ;

3°) de condamner la communauté d'agglomération des pays de Lerins à lui verser, à titre principal, les sommes de 18 000 euros pour dommages causés par les travaux publics et la gêne d'exploitation commerciale et de 12 000 euros pour occupation précaire de la parcelle, sommes assorties des intérêts et de leur capitalisation, et, à titre subsidiaire, la somme de 11 630 euros hors taxes ;

4°) de condamner la communauté d'agglomération des pays de Lérins à lui payer la somme de 10 000 euros pour résistance abusive, somme assortie des intérêts et de leur capitalisation ;

5°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération des pays de Lérins une somme de 2 500 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la communauté d'agglomération a engagé sa responsabilité contractuelle en s'engageant à l'indemniser par envoi de protocoles ; elle a été subrogée dans les obligations de l'Etat ;

- il résulte des écritures de première instance un aveu judiciaire de l'existence d'un accord ;

- l'indemnisation du préjudice subi a un caractère forfaitaire ;

- elle a subi un préjudice commercial et une gêne commerciale.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 novembre 2016 et 4 janvier 2017, la communauté d'agglomération des pays de Lérins, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la SAS Foch Automobiles au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les documents transmis n'établissent pas l'existence d'un contrat l'engageant ou de promesses de versement des sommes en litige ;

- la société n'a subi aucune perte indemnisable ;

- la responsabilité sans faute du syndicat ne trouve pas à s'appliquer ;

- elle n'a formulé aucun aveu judiciaire ;

- la demande indemnitaire n'est pas fondée ;

- les conclusions additionnelles sont irrecevables dès lors qu'elles ont été présentées après l'expiration du délai d'appel.

Par ordonnance du 16 mai 2017 la clôture de l'instruction a été fixée au 6 juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... Steinmetz-Schies, président-assesseur ;

- les conclusions de M. C... Thiele, rapporteur public ;

- et les observations de Me D... représentant la communauté d'agglomération des pays de Lérins.

Une note en délibéré présentée par Me D...a été enregistrée le 26 septembre 2017.

1. Considérant que la SAS Foch Automobiles a été autorisée par l'Etat, par une convention du 23 juillet 2009, à occuper 860 m² d'une parcelle cadastrée AC n° 490 sis sur la commune de Cannes pour une durée de cinq ans ; que par arrêté du 27 janvier 2012, l'aménagement de la première ligne de bus à haut niveau de service reliant le Cannet à Mandelieu-la-Napoule a été déclaré d'utilité publique ; que par une convention du 5 août 2013, l'Etat a autorisé le syndicat intercommunal des transports publics (SITP) de Cannes, Le Cannet, Mandelieu-la-Napoule, maître d'ouvrage des travaux, à occuper, pour une durée de cinq mois, une surface de 543 m² de la parcelle cadastrée AC n° 490, faisant perdre à la SAS Foch Automobiles la jouissance de 104 m² ; que la SAS Foch Automobiles relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande de condamnation de la communauté d'agglomération des pays de Lérins, venant aux droits du SITP, à lui verser la somme de 18 000 euros en réparation des dommages résultant des travaux d'aménagement, la somme de 12 000 euros en réparation des dommages résultant de l'éviction de l'occupation d'une partie d'une dépendance du domaine public de l'Etat et la somme de 10 000 euros au titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, avec intérêts et capitalisation ;

Sur la responsabilité contractuelle :

2. Considérant que la société SEGC foncier, titulaire d'une mission d'assistance à maîtrise foncière auprès du SITP, a adressé à la SAS Foch Automobiles, le 6 août 2013, une " convention d'indemnisation au titre de l'occupation temporaire " et une " convention d'indemnisation au titre des travaux " ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société SEGC ait eu mandat pour engager le SITP ; que, par suite, aucun lien contractuel n'a pu valablement naître entre le SITP et la SAS Foch Automobiles ; que dès lors cette société n'est pas fondée à rechercher la responsabilité contractuelle du syndicat ;

Sur la responsabilité extracontractuelle :

En ce qui concerne le préjudice subi du fait de l'éviction d'une partie de la parcelle AC n° 490 :

3. Considérant que la SAS Foch Automobiles a conclu avec l'Etat, le 23 juillet 2009, une convention l'autorisant à occuper la parcelle cadastrée AC n° 490 ; que l'Etat a signé, le 5 août 2013, une convention autorisant le SITP à occuper pour une durée de cinq mois une surface de 543 m² de cette même parcelle ; que, dans ces conditions, le préjudice de perte d'exploitation que la société invoque du fait de cette éviction résulte de la décision prise par l'Etat d'autoriser le syndicat à utiliser cette fraction de la parcelle ; que, par suite, la demande indemnitaire de la société, exclusivement dirigée contre le SITP, est, à cet égard, mal dirigée ;

En ce qui concerne le préjudice subi du fait des nuisances résultant du voisinage des travaux :

4. Considérant qu'il n'est pas contesté qu'à l'occasion des travaux d'infrastructures réalisés sur l'avenue Saint-Exupéry à Cannes, le SITP, maître d'ouvrage, a occupé une partie de la parcelle cadastrée AC n° 490, où la SAS Foch Automobiles exploitait un établissement de vente de véhicules d'occasion, afin d'y stationner des engins de chantier ; que l'évolution de ces engins aux abords ou sur la parcelle a créé une gêne des clients potentiels pour accéder au lieu d'exposition des véhicules et a conduit plusieurs concessionnaires automobiles à retirer des véhicules placés en dépôt-vente ; qu'il suit de là que les travaux d'aménagement réalisés sur l'avenue Saint-Exupéry ont causé à la SAS Foch Automobiles, tiers à ces travaux, un préjudice grave et spécial de nature à engager la responsabilité sans faute du SITP à son égard ;

5. Considérant qu'en l'absence de production de pièces comptables par la SAS Foch Automobiles de nature à préciser la perte d'exploitation subie, il sera fait une juste appréciation du préjudice résultant des nuisances engendrées par les travaux, compte tenu, notamment, d'une évaluation, non contestée par les parties, du "trouble commercial" à 11 630 euros hors taxes par la brigade des évaluations domaniales de la direction générale des finances publiques, consultée par le SITP, en condamnant ce syndicat à verser à la société une indemnité de 10 000 euros ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice et de condamner la communauté d'agglomération des pays de Lérins, venant aux droits du SITP, à verser à la SAS Foch Automobiles une indemnité de 10 000 euros ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

7. Considérant d'une part, que la SA Foch Automobiles a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 10 000 euros, qui courront à compter du 22 février 2014, date d'introduction de sa demande devant le tribunal administratif ;

8. Considérant d'autre part, que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année ; qu'en ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière ; que la capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois le 22 février 2014 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 22 février 2015, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'indemnité pour résistance abusive :

9. Considérant que la société requérante ne fait état d'aucun préjudice distinct de celui réparé par les intérêts moratoires ; que, dès lors, sa demande tendant au paiement d'une indemnité pour résistance abusive au paiement, qui doit être regardée comme fondée sur l'article 1231-6 du code civil, ne peut être accueillie ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle que soit mise à la charge de la SAS Foch Automobiles, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la communauté d'agglomération des pays de Lérins ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération des pays de Lérins, le versement à la SAS Foch Automobiles d'une somme de 2 000 euros à ce même titre ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 28 juin 2016 est annulé en tant qu'il rejette la demande de la SAS Foch Automobiles tendant au versement d'une somme de 10 000 euros majorée des intérêts.

Article 2 : La communauté d'agglomération des pays de Lérins est condamnée à verser à la SAS Foch Automobiles une somme de 10 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 février 2014. Les intérêts échus à la date du 22 février 2015, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La communauté d'agglomération des pays de Lérins versera une somme de 2 000 euros à la SAS Foch Automobiles au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Foch Automobiles et à la communauté d'agglomération des pays de Lérins.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2017, où siégeaient :

- Mme Isabelle Carthé Mazères, président,

- Mme E... Steinmetz-Schies, président-assesseur,

- M. Philippe Grimaud, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 9 octobre 2017.

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N° 16MA03096


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA03096
Date de la décision : 09/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-01-03-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute. Responsabilité encourue du fait de l'exécution, de l'existence ou du fonctionnement de travaux ou d'ouvrages publics. Victimes autres que les usagers de l'ouvrage public. Tiers.


Composition du Tribunal
Président : Mme CARTHE-MAZERES
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : MUSCAT--

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-10-09;16ma03096 ?
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