Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Carfos a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le titre exécutoire émis le 17 mai 2010 par le Grand port maritime de Marseille en tant qu'il porte paiement de la somme de 179 336,36 euros et de la décharger par voie de conséquence de l'obligation de payer cette somme.
Par un jugement n° 1201570 du 31 mai 2016, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande de la société Carfos.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, et un mémoire enregistré les 22 juillet 2016 et 29 mars 2017, le Grand port maritime de Marseille, représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de rejeter la demande de la société Carfos ;
3°) de mettre à la charge de la société Carfos une somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le président du directoire le représente de plein droit devant toutes les juridictions aux termes de l'article R. 5312-32 du code des transports ;
- les bases de liquidation de la créance pour laquelle un titre exécutoire a été émis ont été indiquées dans un courrier du 24 février 2010 et par une facture du 3 mars 2010 transmis à la société ;
- la créance est fondée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2017, la société Carfos (établissement maritime de Caronte et de Fos), représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du Grand port maritime de Marseille au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors que le requérant ne rapporte pas la preuve d'une qualité et d'une habilitation régulière de son représentant légal en exercice ;
- le titre exécutoire n'indique pas les bases de liquidation de la créance pour laquelle il a été émis ;
- la créance n'est pas fondée.
Par ordonnance du 27 février 2017 la clôture de l'instruction a été fixée au 3 avril 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des transports ;
- le code des marchés publics ;
- le code des ports maritimes ;
- le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... Steinmetz-Schies, président-assesseur ;
- les conclusions de M. B... Thiele, rapporteur public ;
- et les observations de Me D... représentant le Grand port maritime de Marseille, et Me A... représentant la société Carfos.
1. Considérant que le Port autonome de Marseille, auquel s'est substitué le Grand port maritime de Marseille, a conclu le 6 juillet 2007, avec la société Carfos, une convention de mise à disposition des ouvrages, équipements et terre-pleins du terminal minéralier de Fos ; que le 1er décembre 2008, au cours d'une opération de déchargement d'un navire, le portique " P+ ", appartenant à la société Carfos, conduit par un agent du Grand port maritime de Marseille, a endommagé le portique " C2 ", appartenant à cet établissement public, situé sur le terminal minéralier de Fos ; que par courrier du 24 février 2010, le Grand port maritime de Marseille a adressé à la société Carfos une facture de réparation d'un montant de 214 486,29 euros toutes taxes comprises ; que le 17 mai 2010, cet établissement public a émis à l'encontre de la société Carfos un titre exécutoire du même montant ; que le Grand port maritime de Marseille relève appel du jugement du 31 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, annulé le titre exécutoire émis le 17 mai 2010 en tant qu'il porte sur un montant de 179 336,36 euros hors taxes et, d'autre part, déchargé la société Carfos de l'obligation de payer cette somme ;
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Considérant qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la dette, alors même qu'il est émis par une personne publique autre que l'Etat pour lequel cette obligation est expressément prévue par l'article 81 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ; qu'en application de ce principe, le Grand port maritime de Marseille ne peut mettre en recouvrement une créance sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge du redevable ;
3. Considérant que l'état exécutoire émis le 17 mai 2010 pour la somme de 179 336,36 euros par le Grand port maritime de Marseille n'indique pas les bases de la liquidation de la dette ; que si cet acte se réfère à des factures émises, celles-ci ne comportent pas non plus l'indication de ces bases ; que si le courrier du 24 février 2010, adressé à la société, comporte, en annexe, des factures et décomptes des prestataires ayant effectués des travaux de reprise, l'état exécutoire ne se réfère pas à ce courrier ; que, dès lors, le Grand port maritime de Marseille n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, les premiers juges ont annulé le titre exécutoire litigieux pour le motif tiré du défaut d'indication des bases de la liquidation de la dette, et déchargé la société Carfos de l'obligation de payer la somme de 179 336,36 euros hors taxes, objet de cet acte ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête d'appel du Grand port maritime de Marseille doit être rejetée, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Carfos ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle que soit mise à la charge de la société Carfos, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par le Grand port maritime de Marseille ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de cet établissement public une somme de 2 000 euros à verser à la société Carfos au titre de ces dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête du Grand port maritime de Marseille est rejetée.
Article 2 : Le Grand port maritime de Marseille versera une somme de 2 000 euros à la société Carfos au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Grand Port Maritime de Marseille et à la société Carfos.
Délibéré après l'audience du 25 septembre 2017, où siégeaient :
- Mme Isabelle Carthé Mazères, président,
- Mme E... Steinmetz-Schies, président-assesseur,
- M. Philippe Grimaud, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 9 octobre 2017.
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N° 16MA02976