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02/07/2018 | FRANCE | N°16MA02020

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 02 juillet 2018, 16MA02020


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Entreprise Malet a demandé au tribunal administratif de Montpellier :

1°) à titre principal, de condamner l'office public de l'habitat de l'Aude, dénommé Habitat audois, au paiement d'une somme de 434 712,62 euros hors taxes en exécution du marché pour la construction de la résidence " Croix de Planasse ", de condamner l'office Habitat audois à lui restituer la somme de 25 238,28 euros au titre des pénalités retenues, d'assortir lesdites sommes des intérêts légaux à compter du 19

août 2013 et de leur capitalisation ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner solidai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Entreprise Malet a demandé au tribunal administratif de Montpellier :

1°) à titre principal, de condamner l'office public de l'habitat de l'Aude, dénommé Habitat audois, au paiement d'une somme de 434 712,62 euros hors taxes en exécution du marché pour la construction de la résidence " Croix de Planasse ", de condamner l'office Habitat audois à lui restituer la somme de 25 238,28 euros au titre des pénalités retenues, d'assortir lesdites sommes des intérêts légaux à compter du 19 août 2013 et de leur capitalisation ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner solidairement la SAS Omnium technique d'études de la construction et de l'équipement en Languedoc Roussillon, la SCMF..., la SAS Terrell et l'Agence d'architecture Filiatre Mansour au paiement d'une somme de 255 177,02 euros hors taxes, d'assortir cette somme des intérêts légaux à compter du 19 août 2013 et de leur capitalisation.

Par un jugement n° 1400955 du 18 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande, a mis les frais d'expertise à la charge définitive de la société Entreprise Malet à hauteur de 5 000 euros et de l'office Habitat audois à hauteur de 22 825,44 euros, et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 mai 2016 et le 24 novembre 2017, la société Entreprise Malet, représentée par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 mars 2016 ;

A titre principal :

2°) de condamner l'office Habitat audois au paiement d'une somme de 434 712,62 euros hors taxes en exécution du marché pour la construction de la résidence " Croix de Planasse " ;

3°) de condamner l'office Habitat audois à lui restituer la somme de 25 238,28 euros au titre des pénalités retenues ;

4°) d'assortir lesdites sommes des intérêts légaux à compter du 19 août 2013 et de leur capitalisation ;

5°) à titre subsidiaire, de condamner solidairement la SAS Omnium technique d'études de la construction et de l'équipement en Languedoc-Roussillon, la SCMF..., la SAS Terrell et l'Agence d'architecture Filiatre Mansour au paiement d'une somme de 255 177,02 euros hors taxes, d'assortir cette somme des intérêts légaux à compter du 19 août 2013 et de leur capitalisation ;

6°) en tout état de cause, de mettre à la charge de tout succombant une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne le moyen tiré de l'impossibilité d'effectuer une compensation ;

- elle n'était tenue que de livrer des plateformes répondant à l'altimétrie exigée par les plans du dossier de consultation des entreprises ;

- l'utilisation de déblais en remblais était possible ;

- le terrassement réalisé par ses soins est conforme à l'article 5.1.3 du cahier des clauses techniques particulières s'agissant de la possibilité d'utiliser tant des déblais que des remblais, et il est exempt de déchets ;

- les exigences du cahier des clauses techniques particulières priment sur l'étude réalisée par la société Fugro, qui s'avère incompatible avec les clauses dudit cahier ;

- le remblai technique homogène d'un mètre devait être réalisé par le titulaire du lot gros oeuvre ;

- l'expert conclut à la réalisation de travaux supplémentaires par la société Entreprise Malet, non prévus initialement ;

- elle est en droit d'être indemnisée au titre des difficultés rencontrées dans l'exécution de son marché à forfait, compte tenu du bouleversement de l'économie du contrat intervenu à la suite de l'avenant n° 1 consistant en des modifications majeures des conditions de réalisation ;

- le comptable public a indûment effectué la compensation entre le marché en cause et le marché du foyer J. Costes, la somme de 25 238,28 euros n'étant pas une créance certaine et exigible, en l'absence de décompte général définitif dans la présente instance.

Une mise en demeure a été adressée le 1er décembre 2016 à l'office Habitat audois, à la SCM BlancF..., à la société Terrell, à l'agence d'architecture Filiatre Mansour, ainsi qu'à la société Omnium technique d'études de la construction et de l'équipement en Languedoc-Roussillon.

Par des mémoires enregistrés le 19 décembre 2016, le 24 novembre 2017 et le 26 janvier 2018, la SCM BlancF..., la société Terrell et l'agence d'architecture Filiatre Mansour, représentées par la SCP Levy Balzarini Sagnes Serre, concluent au rejet de la requête, et à titre subsidiaire, à la condamnation in solidum de la société OTCE Languedoc Roussillon et de la société Arbonis à les relever et à les garantir de l'intégralité des condamnations prononcées à leur encontre, et à ce que soit mise à la charge de la société Entreprise Malet une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Elles font valoir que les moyens soulevés par la société Entreprise Malet sont infondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 décembre 2016 et le 24 janvier 2018, l'office Habitat Audois, représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Entreprise Malet une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Entreprise Malet sont infondés.

Par des mémoires enregistrés le 29 décembre 2016, le 26 janvier 2018 et le 26 mars 2018, la société Omnium technique d'études de la construction et de l'équipement en Languedoc Roussillon, représentée par la SCP Raffin et associés, conclut à titre principal au rejet de la requête de la société Entreprise Malet, à titre subsidiaire, à la condamnation de la société BlancF..., de la société Agence d'architecture Filiatre Mansour et la société Terrel venant aux droits de la société Terrel Maurette à la relever et à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, et à ce que soit mise à la charge de la société Entreprise Malet une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société Entreprise Malet sont infondés.

Par ordonnance du 2 novembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 24 novembre 2017.

Par ordonnance du 9 janvier 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 26 janvier 2018.

Par ordonnance du 12 mars 2018, l'instruction a été rouverte et la clôture a été fixée au 26 mars 2018.

Par ordonnance du 26 mars 2018, l'instruction a été rouverte et la clôture d'instruction a été fixée au 16 avril 2018.

Vu :

- l'ordonnance n° 1200094 du 20 février 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a ordonné une expertise ;

- l'ordonnance n° 1201937 du 18 juin 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a étendu la mesure d'expertise prescrite par ordonnance n° 1200094 au contradictoire de la société Entreprise Malet, de la société Avuclu, de la société Satob, de la société Mie, de la société Cassan, de la société Amcc, de la société Chinaud, de la société Carrelages et Revêtements Audois, de la société Menuiserie Tiquet et de la société Lanz Elec ;

- l'ordonnance n° 1203836 du 14 septembre 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a modifié la mesure d'expertise prescrite par ordonnance n° 1200094 ;

- le rapport d'expertise déposé au greffe du tribunal le 23 août 2013 ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné, par arrêté du 29 mars 2018, Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président assesseur, pour présider par intérim la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille à compter du 1er avril 2018.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. G...Grimaud, rapporteur ;

- les conclusions de M. C...Thiele, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., représentant la société Entreprise Malet, de Me E...pour la société Omnium Technique d'études de la construction et l'équipement, de Me H... pour la SCM BlancF..., la société Terrell et l'agence d'architecture Filiatre Mansour, et de Me B..., représentant l'office Habitat audois.

Une note en délibéré présentée par la société Entreprise Malet a été enregistrée le 22 juin 2018.

1. Considérant que par un acte d'engagement du 27 juin 2008, l'office Habitat audois a confié à la société Entreprise Malet la réalisation des travaux du lot n° 1 " VRD - Espaces Verts " du chantier de construction de la résidence " Croix de Planasse " à Gruissan ; qu'à la suite de la notification du décompte général du marché, la société Entreprise Malet a présenté le 19 août 2013 une réclamation d'un montant de 434 712,62 euros hors taxes, au titre des préjudices qu'elle estimait avoir subis au cours de l'exécution du marché ; que la société Entreprise Malet relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant, à titre principal, à la condamnation de l'office Habitat audois à lui verser cette somme et à lui restituer la somme de 25 238,28 euros retenue au titre des pénalités de retard encourues au titre de ce marché ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;

3. Considérant que le jugement attaqué ne comporte en ses points 13 à 17 aucun élément de réponse au moyen tiré de l'impossibilité pour le maître de l'ouvrage de procéder à une compensation entre les créances relatives au marché en cause et à un autre marché, faute de caractère liquide et exigible des créances concernées ; que la société Entreprise Malet est dès lors fondée à soutenir que le jugement est insuffisamment motivé sur ce point et qu'il y a lieu de l'annuler en ce qu'il rejette ses conclusions à fin de restitution des pénalités ; qu'il y a lieu, par la voie de l'évocation, de statuer immédiatement sur cette partie de la demande présentée par la société Entreprise Malet devant le tribunal administratif ;

Sur les conclusions aux fins d'indemnisation et de fixation du décompte du marché :

En ce qui concerne les travaux supplémentaires de terrassement :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1.4.1 du cahier des clauses techniques particulières " lot VRD " : " l'entreprise a à sa charge (...) le débroussaillage et l'abattage des arbres dans l'emprise des voiries et bâtiments et leur évacuation aux décharges publiques, le décapage de la terre végétale sur l'emprise des bâtiments et des voiries avec mise en stock d'une partie pour réutilisation ultérieure sur les espaces verts et mise en décharge de l'autre partie, les terrassements pour l'établissement des fonds de forme des voiries et des espaces verts avec évacuation des terres et gravats aux décharges, les terrassements en déblais et remblais des bâtiments " ; qu'aux termes de l'article 5.1.3 du même cahier : " (...) Les terrassements seront précédés des démolitions de revêtement et de toutes évacuations de matériaux si nécessaires (...) Tous les déblais excédentaires seront évacués aux décharges publiques dont la recherche et le coût sont à la charge du présent lot. " ; que le point 3.3.1 " Réglage de la plateforme " de l'étude géotechnique, document contractuel en vertu de l'article 2 du cahier des clauses administratives préalables précise qu'" au préalable, il sera nécessaire de décaper l'horizon végétal et tout éventuel remblai de nature putrescible. Le remblai existant ayant été réalisé par simple régalage de matériaux, il convient de le reprendre sur au moins 1m d'épaisseur pour constituer un remblai technique présentant des caractéristiques mécaniques homogènes. Les matériaux impropres à la constitution du remblai technique seront purgés (débris végétaux, gravats de dimension supérieure 200 mm, etc.) " ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ces stipulations, telles qu'analysées notamment par le rapport de l'expert commis par le tribunal et combinées avec les plans de fondation du 16 février 2009 insérés au dossier de consultation des entreprises, que l'obligation de la société Entreprise Malet ne consistait pas, comme elle le soutient, à livrer des plateformes terrassées d'une altitude 1,2 mètres NGF, mais à purger le remblai existant, d'une altitude de l'ordre de 1,5 mètre NGF à 2 mètres NGF, de tout gravas ou matière impropre et à compléter ce remblai de manière à constituer un remblai technique homogène d'une hauteur de 1 mètre s'étageant approximativement entre les altitudes de 0,9 mètre NGF et 1,9 mètre NGF, de manière à permettre au titulaire du lot gros oeuvre de créer une fouille atteignant l'altitude 1,2 mètre NGF dans ce remblai afin d'y ancrer le fond de la couche de forme à une altitude inférieure d'un mètre au niveau fini des bâtiments, soit 1,2 mètre NGF ; que la société Entreprise Malet, contrairement à ce qu'elle soutient, ne démontre nullement que l'aménagement de ce remblai aurait incombé au titulaire du lot gros oeuvre ; qu'il résulte également des stipulations précitées que les déblais devaient être évacués et ne pouvaient être utilisés pour remblayer le terrain, la mention, par l'article 5.1.3 du cahier des clauses techniques particulières, de terrassements " en déblais et remblais " ne pouvant à elle seule être comprise comme autorisant l'utilisation des matériaux extraits pour remblayer dès lors que les autres stipulations du marché prévoyaient l'évacuation des déblais et la reprise du remblai existant pour en assurer la purge ; que contrairement à ce que soutient la société Entreprise Malet, les documents de consultation n'étaient entachés sur ce point d'aucune contradiction ou imprécision de nature à l'empêcher de formuler une offre pertinente, et qu'elle avait d'ailleurs la possibilité de faire précéder de questions au maître de l'ouvrage ou au maître d'oeuvre ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que deux entreprises concurrentes ont présenté des offres comprenant un montant de travaux de terrassement cinq à sept fois plus élevé que la requérante ; que, si l'expert souligne dans son rapport que la solution technique consistant à créer un remblai d'un mètre de hauteur pour y procéder à des affouillements sur une hauteur de 80 cm était " peu cohérente ", il ne résulte ni des termes du rapport de l'expert, ni d'aucune autre pièce soumise à la Cour, ni de l'argumentation de la requérante, que cette solution aurait été contraire aux règles de l'art ; qu'enfin, la société requérante n'établit pas le caractère homogène du remblai de faible hauteur qu'elle avait réalisé alors que les investigations menées par le maître d'oeuvre après sa réalisation ont révélé qu'il n'avait pas été expurgé ; qu'il s'ensuit que la société Entreprise Malet n'est pas fondée à soutenir que la constitution de ce remblai et la purge des matériaux inappropriés, qui lui ont été imposés par l'ordre de service n° 2 du 7 septembre 2009 émis après les réunions de chantier n° 09 du 4 août 2009 et n° 10 du 11 août 2009, constitueraient des travaux supplémentaires par rapport à ceux prévus au marché, la circonstance que la non-conformité de ses travaux n'ait été signalée par les maîtres d'oeuvre qu'après leur exécution étant sans incidence sur ce point ; que, de même les modifications de remblai liées à l'altimétrie variable des différentes parties du terrain d'assiette ou aux variations mineures de la méthode d'ancrage des ouvrages ne constituent pas des travaux supplémentaires dès lors que les plans de fondation fournis au dossier de consultation mentionnaient leur caractère indicatif, de telle sorte que la société était à même d'anticiper la possibilité d'adaptation du niveau des terrassements sur les différentes parties de la parcelle ;

6. Considérant toutefois, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que le mode de fondation des constructions a été modifié au cours du chantier et que cette évolution s'est traduite par l'accroissement de la hauteur du remblai destiné à asseoir les constructions ; qu'il résulte du rapport de l'expert ainsi que des différentes versions du plan n° 506, et notamment du plan 506 indice E du 22 septembre 2009, que la société a été contrainte de constituer un remblai d'environ un mètre de hauteur entre les niveaux haut et bas des plateformes, lequel devait être regardé comme étant à sa charge en vertu de son marché ainsi qu'il a été dit au 5 ci-dessus, surmonté d'un remblai de même composition de 45 à 50 cm afin d'y ancrer la couche de fond de forme et le radier ; que cette dernière prestation, qui n'avait pas été prévue au contrat, doit être regardée comme relevant de travaux supplémentaires ; que ces travaux ayant été commandés par ordre de service, la société Entreprise Malet est fondée à en demander le paiement ;

7. Considérant qu'il résulte des plans des ouvrages que cette prestation supplémentaire supposait l'apport et le terrassement de matériaux supplémentaires sur une surface d'environ 5 000 m² et une hauteur moyenne de 45 à 50 cm ; que la société Entreprise Malet peut dès lors être regardée comme ayant exécuté des travaux de déblai, remblai, purge et terrassement pour environ 2 500 mètres cubes ; que le prix de cette prestation peut dès lors être évalué, sur la base de son devis n° 09-97 03, à environ 102 000 euros hors taxes ;

8. Considérant toutefois que les personnes morales de droit public ne peuvent jamais être condamnées à payer une somme qu'elles ne doivent pas ; que cette interdiction est d'ordre public ; qu'en l'espèce, l'office Habitat audois fait valoir que le marché complémentaire d'un montant de 136 400 euros hors taxes confié à la requérante a été conclu à un prix surévalué et que cette circonstance s'oppose au règlement de toute somme à la société Entreprise Malet ; qu'il résulte en effet du rapport de l'expert, qui n'est pas sérieusement contredit par la requérante sur ce point, que les prestations objet du marché complémentaire confié à la requérante comprenait un poste " installation de chantier " d'un montant de 19 642,50 euros hors taxes dont l'expert estime qu'il n'avait pas lieu d'être, un poste " terrassement voie ouvrage béton " assorti d'un prix de 73,90 euros hors taxes alors que le prix du marché initial était de 41,85 euros hors taxes et un poste " assainissement " d'une valeur de 5 580 euros hors taxes lié à un raccordement pluvial non réalisé, soit une surévaluation totale estimée à 48 458,75 euros hors taxes ; qu'il y a lieu dès lors, de tenir compte de cette somme indûment versée à l'entreprise pour déterminer la somme devant lui être accordée au titre des travaux supplémentaires de terrassement, la circonstance que le décompte général du marché complémentaire soit devenu définitif, à la supposer établie, étant sans incidence sur la possibilité d'effectuer cette compensation dès lors que le décompte du marché en cause dans le présent litige n'a, pour sa part, pas acquis un tel caractère ; qu'en conséquence, il y a lieu d'octroyer à la société Entreprise Malet une somme de 55 000 euros hors taxes tous préjudices confondus au titre de ces travaux supplémentaires, soit 65 780 euros toutes taxes comprises ;

En ce qui concerne la modification de la couche de voirie :

9. Considérant que la société Entreprise Malet ne soulève aucun moyen de fait ou de droit de nature à remettre en cause le jugement attaqué, qui a rejeté sa demande sur ce point en son considérant 9 ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement sur ce point et d'adopter ses motifs ;

En ce qui concerne les difficultés rencontrées dans l'exécution du marché :

10. Considérant que les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics ;

11. Considérant que la requérante se borne, pour demander l'indemnisation de l'ajournement qui aurait été décidé à compter d'avril 2010, dont le maître de l'ouvrage et le maître d'oeuvre contestent au demeurant la matérialité, à faire référence à son mémoire en réclamation du 19 août 2013 ; que celui-ci invoque des coûts d'immobilisation des moyens de l'entreprise, un surcoût de frais de chantier, une perte d'amortissement des frais généraux ainsi qu'une perte de marge, sur la base d'évaluations forfaitaires des coûts de ses matériels et personnels et de taux de frais généraux et de marge qui ne sont appuyés d'aucune pièce justificative et dont la société Entreprise Malet ne démontre pas qu'ils auraient été effectivement encourus au cours du chantier ; qu'elle n'établit dès lors pas la réalité des préjudices qu'elle dit avoir subis à ce titre ; que sa demande ne peut dès lors qu'être rejetée sur ce point ;

En ce qui concerne les pénalités et la compensation opérée par le comptable public :

12. Considérant que si le rapport de l'expert mentionne de manière erronée, en sa page 94, un retard de dix-neuf jours s'agissant des travaux de la société Entreprise Malet, il constate à plusieurs reprises qu'un total de soixante-dix-neuf jours de retard lui est imputable et que le maître de l'ouvrage peut valablement lui infliger des pénalités de retard à cette hauteur ; que si la société Entreprise Malet conteste ce retard, elle n'apporte aucun élément de fait précis de nature à remettre en cause l'analyse de l'expert, qui est d'ailleurs confirmée par le rapport de fin de chantier de M.F..., chargé de la coordination et de l'ordonnancement des travaux ; que, par ailleurs, l'ordre du service n° 2 a ordonné la réalisation des travaux de reprise des plateformes sans accorder à la société Entreprise Malet de délai d'exécution supplémentaire, de telle sorte qu'il n'y a pas lieu de déduire du retard qui lui est imputé le délai de réalisation des travaux de terrassement invoqués au point 5 ci-dessus ; qu'à cet égard, si l'expert indique qu'une partie du retard découlant de ces travaux supplémentaires n'est pas imputable à la société Malet, il résulte de l'instruction, et notamment des termes de son rapport, qu'il a évalué le nombre de jours de retard qu'il estime découler des fautes de la société Entreprise Malet après avoir déduit le délai de réalisation de ces travaux supplémentaires ; que la société Entreprise Malet n'est dès lors pas fondée à demander à être déchargée de la somme de 25 238,28 euros mises à sa charge au titre des pénalités de retard ;

13. Considérant en revanche que s'il est possible au maître de l'ouvrage d'opérer une compensation entre les soldes de marchés distincts, c'est à la condition que les créances correspondantes soient certaines et exigibles ; qu'en l'espèce, le décompte général du marché en cause dans le présent litige ayant été contesté par l'entreprise et étant dépourvu de caractère définitif, la créance représentative des pénalités de retard n'était ni certaine ni exigible ; que l'office n'était dès lors pas fondé à procéder à cette compensation ; que la société Entreprise Malet est dès lors fondée à demander la condamnation de l'office Habitat audois à lui restituer la somme de 25 238,28 euros objet de la compensation indue ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de fixer le solde du décompte général du marché en cause à la somme de 40 541,72 euros toutes taxes comprises ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

15. Considérant qu'en vertu de l'article 1153 du code civil, les intérêts au taux légal courront sur les sommes mentionnées ci-dessus à compter du 21 août 2013, date de réception du mémoire en réclamation adressé par la requérante à l'office ; qu'en vertu de l'article 1154 du même code, lesdits intérêts seront capitalisés au 21 août 2014, date à laquelle une année d'intérêts était due, puis à chaque échéance annuelle pour produire eux-mêmes intérêts ;

Sur les frais d'expertise :

16. Considérant que la société Entreprise Malet ne soulève aucun moyen de fait ou de droit de nature à remettre en cause le jugement attaqué sur ce point ; qu'il y a lieu dès lors de confirmer le jugement sur ce point en adoptant ses motifs ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Entreprise Malet est fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 mars 2016 en ce qu'il a de contraire au présent arrêt ;

Sur les appels en garantie :

18. Considérant qu'en l'absence de toute condamnation prononcée à leur encontre, les conclusions aux fins de garantie de la SCM BlancF..., de la société Terrell, et de l'agence d'architecture Filiatre Mansour, ainsi que celles de la société Omnium Technique d'études de la construction et de l'équipement sont sans objet ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

19. Considérant que ces dispositions s'opposent à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de la société Entreprise Malet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par l'office Habitat audois, la société Omnium Technique d'études de la construction et de l'équipement, la société Blanc Terrasse, la société Ferrell et l'agence d'architecture Filiatre Mansour dans l'instance ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de l'office Habitat audois, à verser à la société Entreprise Malet au même titre ;

D É C I D E :

Article 1er : L'office Habitat audois est condamné à verser la somme de 40 541,72 euros toutes taxes comprises à la société Entreprise Malet au titre du décompte général du marché. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 21 août 2013. Les intérêts échus le 21 août 2014 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 2 : L'office Habitat audois est condamné à verser la somme de 25 238,28 euros à la société Entreprise Malet au titre de la restitution des pénalités de retard. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 21 août 2013. Les intérêts échus le 21 août 2014 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 3 : L'office Habitat audois versera une somme de 2 000 euros à la société Entreprise Malet en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le jugement n° 1400955 du tribunal administratif de Montpellier du 18 mars 2016 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent jugement sera notifié à la société Entreprise Malet, à l'office Habitat audois, à la société omnium technique d'études de la construction et de l'équipement, à la SCM BlancF..., à la société Terrell et à l'Agence d'architecture Filiatre Mansour.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2018, où siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président,

- M. G...Grimaud, premier conseiller.

- M. Allan Gautron, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 juillet 2018.

2

N° 16MA02020


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA02020
Date de la décision : 02/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Indemnités - Travaux supplémentaires.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Compensation.


Composition du Tribunal
Président : Mme STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : MAGRINI

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-07-02;16ma02020 ?
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