Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère et l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne " ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 6 mai 2013 du préfet de l'Isère valant règlement d'eau relatif à l'exploitation d'un aménagement hydroélectrique sur le ruisseau de La Bonne à Valjouffrey, au bénéfice de la société Valhydrau et mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1403798 du 4 octobre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistrés le 6 décembre 2016 et le 30 mars 2018 la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère et l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne ", représentées par Me Le Gulludec, avocat, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 4 octobre 2016;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 mai 2013 du préfet de l'Isère valant règlement d'eau relatif à l'exploitation d'un aménagement hydroélectrique sur le ruisseau de La Bonne à Valjouffrey, au bénéfice de la société Valhydrau ;
3°) de mettre à charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- l'étude d'impact est insuffisante en ce qu'elle ne présente pas les caractéristiques du projet et son insertion dans l'environnement ; l'analyse de l'étude est limitée au tronçon affecté ; aucune analyse des zones de frayères n'a été conduite ; l'inventaire des espèces est insuffisant et ne mentionne pas la présence de Bythinella, de Chabot ; il a été réalisé en dehors des périodes de migration de la faune piscicole et les moyennes de truites passant par le tronçon en période de migration ne sont pas fournies ; les atteintes à la continuité écologique n'ont pas été étudiées du fait que la prise d'eau affecte le débit ; l'impact de l'accumulation d'ouvrages hydroélectriques n'a pas été étudié ; les conséquences du projet sur le peuplement piscicole ne sont pas étudiées ; les caractéristiques, l'efficacité et le coût du dispositif permettant la migration des poissons ne sont pas mentionnées ; ces insuffisances ont été reconnues par l'autorité environnementale et le préfet ;
- les insuffisances de l'étude d'impact ont nui à l'information de la population et du préfet ;
- l'avis conforme du directeur du parc national des Ecrins devait être sollicité ;
- l'arrêté est incompatible avec l'objectif 8 du schéma d'aménagement et de gestion du sous-bassin de la Bonne ;
- le projet porte atteinte à la continuité écologique en violation des dispositions de l'article L. 217-1 du code de l'environnement et de la disposition 61-08 du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux en absence de dispositif de montaison/dévalaison ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2018, un mémoire enregistré le 30 mars 2018 et un mémoire non communiqué enregistré le 6 avril 2018, la société Valhydrau, représentée par Me Remy, avocat, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère et l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne " à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la demande de première instance est irrecevable et qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête ;
Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Clément, premier conseiller,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Djeffal, avocat, suppléant Me Le Gulludec, avocat, pour la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère et pour l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne " et, de Me Remy, avocat, pour la société Valhydrau ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 mai 2018 présentée pour la société Valhydrau ;
1. Considérant que la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère et l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne " relèvent appel du jugement du 4 octobre 2016 du tribunal administratif de Grenoble ayant rejeté leur demande d'annulation de l'arrêté du 6 mai 2013 du préfet de l'Isère valant règlement d'eau relatif à l'exploitation d'un aménagement hydroélectrique sur le ruisseau de La Bonne à Valjouffrey ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Considérant que la société Valhydrau soutient que la demande de première instance de la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère est irrecevable, dès lors que son conseil d'administration a décidé d'engager l'action devant le tribunal par une délibération du 14 juillet 2014 alors que le bureau, en vertu de l'article 30 des statuts de l'association, était seul compétent ; que la délibération du 14 juillet 2014 du conseil d'administration de la fédération a été prise à l'unanimité ; que les membres du bureau siègent au conseil d'administration ; qu'en vertu des stipulations de l'article 19 des statuts de la fédération, le conseil d'administration prend toutes décisions à l'exception de celles réservées à l'assemblée générale ; que dès lors, la fédération pouvait valablement par la délibération du conseil d'administration du 14 juillet 2014 décider de contester devant le tribunal administratif l'arrêté en litige ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué et la légalité de la décision en litige :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 212-5-2 du code de l'environnement : " Lorsque le schéma a été approuvé et publié, le règlement et ses documents cartographiques sont opposables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de toute installation, ouvrage, travaux ou activité mentionnés à l'article L. 214-2. / Les décisions applicables dans le périmètre défini par le schéma prises dans le domaine de l'eau par les autorités administratives doivent être compatibles ou rendues compatibles avec le plan d'aménagement et de gestion durable de la ressource en eau dans les conditions et les délais qu'il précise. " ;
4. Considérant que par un arrêté inter-préfectoral du 13 août 2010, le schéma d'aménagement et de gestion des eaux du Drac et de la Romanche a été approuvé ; que l'objectif 8 du schéma précise au point 1.c que tout nouvel aménagement hydroélectriques est interdit sur le sous bassin versant de la Bonne ; que par suite, les requérantes sont fondées à soutenir que l'aménagement en litige est incompatible avec les dispositions du schéma d'aménagement et de gestion des eaux du Drac et de la Romanche ;
5. Considérant que si la société Valhydrau soutient que l'interdiction formulée par le schéma d'aménagement et de gestion des eaux du Drac et de la Romanche est illégale, elle n'assortit pas son moyen de précisions suffisantes en se référant seulement aux motifs de la décision attaquée pour en apprécier le bien-fondé ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère et l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne " sont fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ;
Sur les frais liés au litige :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère et l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne " qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, soit condamnées à verser à la société Valhydrau la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés par la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère et l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne " dans la présente instance et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1403798 du 4 octobre 2016 du tribunal administratif de Grenoble et l'arrêté du 6 mai 2013 du préfet de l'Isère valant règlement d'eau relatif à l'exploitation d'un aménagement hydroélectrique sur le ruisseau de La Bonne à Valjouffrey, au bénéfice de la société Valhydrau sont annulés.
Article 2 : Le surplus de la requête de la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère et de l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne " et les conclusions de la société Valhydrau sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Isère, l'association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique du Valbonnais " La truite de La Bonne ", la société Valhydrau et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 7 mai 2018 à laquelle siégeaient :
M. Hervé Drouet, président de la formation de jugement,
M. Marc Clément, premier conseiller,
Mme B... A..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 29 mai 2018.
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N° 16LY04051
mg