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23/10/2018 | FRANCE | N°16DA01279

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 23 octobre 2018, 16DA01279


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Résidence de la Forêt a demandé au tribunal administratif d'Amiens de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ou, à défaut, de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er mars 2009 au 31 décembre 2012 et des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1401779 du 23 juin 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 11 juillet 2016, 30 septembre 2016, 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Résidence de la Forêt a demandé au tribunal administratif d'Amiens de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ou, à défaut, de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er mars 2009 au 31 décembre 2012 et des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1401779 du 23 juin 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 11 juillet 2016, 30 septembre 2016, 10 octobre 2016 et 5 juillet 2018, la SAS Résidence de la Forêt, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er mars 2009 au 31 décembre 2012 et des pénalités afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive n° 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.

1. La SAS Résidence de la Forêt exploite un établissement hospitalier pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) à Chantilly, dans le département de l'Oise. En 2013, elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er mars 2009 au 31 décembre 2012. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale, d'une part, a critiqué la mise en place de secteurs distincts opérée par la société et a calculé pour chaque période vérifiée, un coefficient de taxation situé entre 0, 73 et 0, 79 et, d'autre part, a remis en cause la déduction effectuée à tort au titre d'une année de la taxe figurant sur des factures payées au cours de l'année précédente. Il en est résulté des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période courant du 1er mars 2009 au 31 décembre 2012. La société, tant devant le premier juge que devant la cour, tout en présentant des conclusions à fin de décharge et non de réduction, ne conteste que l'application d'un coefficient de taxation par l'administration fiscale sans revenir sur la remise en cause de déductions effectuées à tort au titre d'une année donnée.

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

2. Aux termes du 1 du I de l'article 271 du code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération ". Aux termes du 1 de l'article 273 du même code : " 1. Des décrets en Conseil d'Etat déterminent les conditions d'application de l'article 271. / Ils fixent notamment : / (...) - les modalités suivant lesquelles la déduction de la taxe ayant grevé les biens ou services qui ne sont pas utilisés exclusivement pour la réalisation d'opérations imposables doit être limitée ou réduite ". Aux termes de l'article 205 de l'annexe II au code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction. ". Aux termes de l'article 206 de cette même annexe : " I. - Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission. II. - Le coefficient d'assujettissement d'un bien ou d'un service est égal à sa proportion d'utilisation pour la réalisation d'opérations imposables. Les opérations imposables s'entendent des opérations situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des articles 256 et suivants du code général des impôts, qu'elles soient imposées ou légalement exonérées. ".

3. Il résulte des dispositions visées au point précédent, à la lumière, notamment, de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 29 octobre 2009, Skatteverket c/ AB SKF, C-29/08, relatif à l'interprétation des dispositions communautaire dont elles assurent la transposition et qui figurent, pour la période litigieuse, aux articles 1er, 168 et 173 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, en premier lieu, que le droit à déduction existe dans le cas où l'opération en amont soumise à cette taxe se trouve en lien direct et immédiat avec une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction, en deuxième lieu, que, si tel n'est pas le cas, il y a lieu d'examiner si les dépenses effectuées pour acquérir des biens ou des services en amont font partie des frais généraux liés à l'ensemble de l'activité économique de l'assujetti et, en troisième lieu, que, dans l'un ou l'autre cas, l'existence d'un lien direct et immédiat présuppose que le coût des prestations en amont est incorporé respectivement dans le prix des opérations particulières en aval ou dans le prix des biens ou des services fournis par l'assujetti dans le cadre de ses activités économiques. Par suite, si, en règle générale, la déductibilité n'est que partielle, à hauteur du prorata de déduction, lorsque les biens ou services sont utilisés concurremment pour la réalisation d'opérations taxées et pour la réalisation d'opérations exonérées, elle est intégrale dans l'hypothèse particulière où l'assujetti est tenu de répercuter l'intégralité du coût de ces dépenses dans le prix de ses seules opérations taxées, alors même que les dépenses seraient aussi utilisées pour les opérations exonérées.

4. Les dépenses d'administration générale d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et de fonctionnement et d'entretien général de ses bâtiments concourent tant à la réalisation des prestations de soins qu'à la réalisation des prestations d'hébergement et de restauration et des prestations liées à la dépendance. Toutefois, en vertu des articles R. 314-158 à R. 314-163 du code de l'action sociale et des familles et de l'annexe 3-2 à ce code, l'ensemble de ces dépenses est obligatoirement incorporé dans les tarifs afférents à l'hébergement et à la dépendance, lesquels sont imposés à la taxe sur la valeur ajoutée, et non dans le tarif afférent aux soins, qui n'incorpore que les charges relatives aux prestations de soins, à l'emploi du personnel assurant les soins et au matériel médical. Dès lors, ces dépenses ne peuvent être regardées comme faisant partie des éléments constitutifs du prix des prestations de soins, qui sont les seules à être exonérées de la taxe.

5. En l'espèce, il n'est pas contesté que les frais et charges d'administration générale, de fonctionnement et d'entretien général des bâtiments de la SAS Résidence de la Forêt, au titre desquels les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ont été mis à la charge de cette société, ont été intégralement incorporés dans le prix des prestations relatives à l'hébergement et à la dépendance. Ainsi, l'administration ne pouvait remettre en cause, par l'application du coefficient prévu à l'article 205 code général des impôts, la déduction intégrale de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les frais et charges ci-dessus mentionnés.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Résidence de la Forêt est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er mars 2009 au 31 décembre 2012 et des pénalités afférentes.

7. La société Résidence de la Forêt ne présentant aucun moyen relatif à la remise en cause par l'administration fiscale de la déduction effectuée à tort au titre d'une année de la taxe figurant sur des factures payées au cours de l'année précédente, le surplus de ses conclusions, à fin de décharge, doit être rejeté.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante pour l'essentiel, le versement de la somme de 1 500 euros à la SAS Résidence de la Forêt au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la SAS Résidence de la Forêt au titre de la période du 1er mars 2009 au 31 décembre 2012 et les pénalités afférentes sont réduits à hauteur des conséquences de la rectification des bases d'imposition résultant de l'application d'un coefficient de taxation inférieur à 1 aux frais et charges d'administration générale, de fonctionnement et d'entretien général des bâtiments au lieu du coefficient de 1 qui était légalement applicable.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SAS Résidence de la Forêt est rejeté.

Article 3 : Le jugement du 23 juin 2016 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la SAS Résidence de la Forêt au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Résidence de la Forêt et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

4

N°16DA01279


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01279
Date de la décision : 23/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Xavier Fabre
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SCP ARCIL MARSAUDON et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-10-23;16da01279 ?
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