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09/05/2017 | FRANCE | N°16BX03973

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 09 mai 2017, 16BX03973


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 10 juin 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un certificat de résidence algérien d'une validité d'un an, en qualité tant d'étranger malade que de salarié, sur le fondement des dispositions des articles 6-7 et 7 b de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°

1602967 du 18 novembre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 10 juin 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un certificat de résidence algérien d'une validité d'un an, en qualité tant d'étranger malade que de salarié, sur le fondement des dispositions des articles 6-7 et 7 b de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1602967 du 18 novembre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 décembre 2016, M. A...C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 18 novembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 juin 2016 susmentionné ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé au regard de la loi du 11 juillet 1979 dans la mesure où l'ensemble des raisons pour lesquelles sa situation n'entrerait dans le champ d'application d'aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas exposé, ce qui révèle un défaut d'examen particulier de la demande ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il ne remplissait pas les conditions requises pour obtenir de plein droit la délivrance du titre de séjour sollicité en qualité d'étranger malade, sur le fondement des dispositions de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dès lors qu'il souffre de graves troubles psychiatriques, pour lesquels il fait l'objet d'un suivi régulier depuis août 2013 auprès du centre hospitalier Charles Perrens, qui doit être poursuivi. A cet égard, si le médecin de l'agence régionale de santé, dans son avis en date du 25 mars 2016, a relevé qu'il existe un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine, il n'en va pas de même dans les circonstances particulières de l'espèce, puisque cette pathologie est en réalité essentiellement causée par les évènements traumatisants qu'il a vécus en Algérie, ce qui rend impossible la poursuite de ses soins dans ce pays. En outre, au regard de la nécessité de la combinaison de traitements psychiatrique et psychothérapeutique et du suivi faisant intervenir différentes spécialités médicales, son état de santé ne peut pas y faire l'objet d'un traitement approprié ;

- le préfet de la Gironde, qui s'est borné à reprendre intégralement les termes de cet avis du 25 mars 2016 sans prendre en compte les nombreux certificats médicaux produits, s'est senti lié par cet avis et ainsi a méconnu sa compétence ;

- à titre subsidiaire, l'arrêté contesté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle et aux conséquences particulièrement disproportionnées de son éloignement.

Une pièce a été produite pour M. C...le 11 janvier 2017.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 20 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, désormais reprise dans le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Axel Basset a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le 25 août 2015, M.C..., ressortissant algérien né le 22 novembre 1987 à Emir Abdelkader (Algérie), a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien d'une validité d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", en qualité d'étranger malade, sur le fondement de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, puis, le 26 mai 2016, un certificat d'une durée analogue portant la mention " salarié ", sur le fondement de l'article 7 b de cet accord. L'intéressé relève appel du jugement du 18 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 juin 2016 du préfet de la Gironde refusant de faire droit à ses demandes, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.

2. En premier lieu, l'arrêté contesté, qui vise les textes applicables à la situation de M. C... et explicite les motifs pour lesquels sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions susmentionnées de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 est rejetée, comporte un exposé suffisant des considérations de droit et de fait qui le fondent, alors même, contrairement à ce qu'il soutient, qu'il ne précise pas l'ensemble des raisons pour lesquelles sa situation n'entrerait dans le champ d'application d'aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le moyen tiré du caractère insuffisamment motivé de cet arrêté doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet, qui s'est livré à un examen de la situation personnelle de M.C..., se soit estimé lié par l'avis rendu le 25 mars 2016 par le médecin de l'agence régionale de santé. Dès lors, le moyen tiré de ce que cette autorité administrative aurait méconnu l'étendue de sa compétence et entaché, ce faisant, la décision contestée d'erreur de droit, doit être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) " . Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux demandes de certificats de résidence formées par les ressortissants algériens en application des dispositions précitées de l'accord franco-algérien : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " . Aux termes des dispositions de l'article 4 de l'arrêté ministériel susvisé du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis est transmis au préfet (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge médicale risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

6. En l'espèce, et ainsi qu'il a déjà été dit au point 3, la décision rejetant la demande de titre de séjour de M. C...a été prise au vu d'un avis du médecin inspecteur de l'agence régionale de santé en date du 26 mars 2015 qui a relevé que si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé pour sa prise en charge médicale. Pour contester cet avis, l'appelant soutient que la pathologie psychiatrique dont il souffre, pour laquelle il fait l'objet d'un suivi régulier depuis août 2013 au centre hospitalier Charles Perrens qui doit être poursuivi, est essentiellement causée par les évènements traumatisants qu'il a vécus en Algérie, ce qui rend impossible la poursuite de ses soins dans ce pays. Toutefois, les pièces produites par l'appelant, et, notamment, le certificat médical du Docteur Lagabrielle du 15 décembre 2015 dont il se prévaut tout particulièrement, qui se borne à indiquer que : " il présente par périodes des recrudescences de cauchemars à type de réviviscences de la mort de son père tué quand il avait 8 ans, de sang vu lors des conflits de la guerre d'Algérie ", ne suffisent pas à infirmer l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé ni, davantage, à établir la réalité des évènements traumatisants que M. C...allègue avoir vécus dans son pays d'origine. Ainsi, l'intéressé ne démontre pas l'existence d'un lien entre le lieu de ces événements et les troubles dont il se plaint et qui ferait obstacle à ce que les troubles psychiatriques qui l'affectent puissent être traités dans son pays d'origine. En outre, si le requérant ajoute qu'au regard de la nécessité de la combinaison de traitements psychiatrique et psychothérapeutique et du suivi faisant intervenir différentes spécialités médicales, son état de santé ne peut pas y faire l'objet d'un traitement approprié, il n'apporte, par ses seules allégations, aucune précision quant à l'éventuelle indisponibilité, en Algérie, des médicaments qui lui sont prescrits. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté.

7. En dernier lieu, compte tenu de l'ensemble des éléments déjà mentionnés au point 6, le préfet de la Gironde n'a pas, en refusant de délivrer à M. C...le titre de séjour sollicité, entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 13 février 2017, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, président-assesseur,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 mai 2017.

Le rapporteur,

Axel BassetLe président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N° 16BX03973


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03973
Date de la décision : 09/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Axel BASSET
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : LANDETE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-05-09;16bx03973 ?
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