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29/11/2017 | FRANCE | N°16-85490

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 novembre 2017, 16-85490


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° E 16-85.490 FS-P+B

N° 2896

FAR
29 NOVEMBRE 2017

REJET

M. X... président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

IRRECEVABILITE et rejet des pourvois formés par M. Xavier Y..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de

la cour d'appel de Rouen, en date du 12 juillet 2016, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'assassinat, l'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° E 16-85.490 FS-P+B

N° 2896

FAR
29 NOVEMBRE 2017

REJET

M. X... président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

IRRECEVABILITE et rejet des pourvois formés par M. Xavier Y..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rouen, en date du 12 juillet 2016, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'assassinat, l'a déclaré irresponsable pénalement pour cause de trouble mental, a ordonné son admission en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète ainsi que des mesures de sûreté, et a prononcé sur les intérêts civils AR ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 18 octobre 2017 où étaient présents : M. X..., président, Mme Z..., conseiller rapporteur, MM. Castel, Raybaud, Moreau, Stephan, Guéry, conseillers de la chambre, MM. Laurent, Béghin, conseillers référendaires ;

Avocat général : M. A... ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de Mme le conseiller Z..., les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général A... ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I - Sur la recevabilité du pourvoi formé le 15 juillet 2016 par maître Julia sous le numéro 32/2016 :

Attendu que le demandeur, ayant épuisé, par l'exercice qu'il en avait fait le même jour sous le numéro 31/2016, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seul est recevable le pourvoi formé le 13 juillet 2016 sous le numéro 31/2016 ;

2 - Sur le pourvoi formé formé le 13 juillet 2016 par maître Julia, substituant maître Arnold, sous le numéro 31/2016 :

Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le 17 octobre 2013, à 8h10, le corps ensanglanté du docteur B..., médecin psychiatre, était découvert sous le porche d'entrée de l'immeuble de Rouen dans lequel il exerçait sa profession, le décès étant dû à [...] plaies thoraciques provoquées par un instrument tranchant ; qu'une information a été ouverte le 25 octobre 2013 ; qu'un ancien patient de la victime, M. Y..., a été mis en examen du chef d'assassinat ; que les experts commis par le magistrat instructeur ont conclu que le discernement de M. Y..., souffrant de schizophrénie et de paranoïa dangereuses, était aboli au moment des faits, et préconisé des soins dans le cadre d'une hospitalisation sous contrainte ;

Attendu qu'au terme de l'information, le juge d'instruction, faisant application de l'article 706-120 du code de procédure pénale, a, par ordonnance du 19 janvier 2016, dit qu'il existait charges suffisantes contre M. Y... d'avoir commis les faits reprochés et ordonné la transmission de la procédure au procureur général aux fins de saisine de la chambre de l'instruction ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, 14.3 g) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 3.1 e) de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales, préliminaire, 406, 442, 591, 593 et 706-122 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a dit qu'ont été réunies des charges suffisantes contre le mis en examen d'avoir, avec préméditation, volontairement donné la mort à Laurent B..., a prononcé des mesures de sûreté à son endroit et sur les intérêts civils ;

"1°) alors que le droit de se taire et le droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination sont des normes internationales généralement reconnues qui sont au coeur de la notion de procès équitable ; que les Etats membres de l'Union européenne veillent à ce que les suspects et les personnes poursuivies reçoivent rapidement des informations concernant leur droit de garder le silence de façon à permettre son exercice effectif ; que lorsque la chambre de l'instruction est saisie d'une procédure relative à l'irresponsabilité du mis en examen pour cause de trouble mental, par laquelle elle est amenée à se prononcer sur l'existence de charges suffisantes à son encontre d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés, son président ou l'un de des assesseurs, par lui désigné, l'informe de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; que la méconnaissance de l'obligation d'informer la personne mise en examen du droit de se taire lui fait nécessairement grief ; qu'en l'espèce, il ne résulte ni de l'arrêt ni des notes d'audience que le mis en examen a été informé de son droit de se taire et que la chambre de l'instruction a, ainsi, méconnu les textes susvisés ;

"2°) alors qu'il résulte de l'article 706-122 du code de procédure pénale que le président procède à l'interrogation de la personne mise en examen, si elle est présente, conformément à l'article 442 du code de procédure pénale ; que cette disposition qui prévoit que le président interroge le prévenu et reçoit ses déclarations est indissociable de celles de l'article 406 selon laquelle le président informe le prévenu de son droit de se taire et que faute d'avoir donné cette information à la personne mise en examen qui a cependant été entendue, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés" ;

Attendu qu'il ne saurait être fait grief au président de la chambre de l'instruction d'avoir méconnu l'article 406 du code de procédure pénale en n'informant pas le mis en examen de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire, dès lors que cette disposition ne s'applique pas devant la chambre de l'instruction statuant dans le cadre de la procédure de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, une telle limitation n'étant pas contraire aux dispositions conventionnelles invoquées;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 168, 591, 593 et 706-122 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense :

"en ce que l'arrêt attaqué a dit qu'ont été réunies des charges suffisantes contre le mis en examen d'avoir, avec préméditation, volontairement donné la mort à Laurent B..., a prononcé des mesures de sûreté à son endroit et sur les intérêts civils ;

"aux motifs que M. Michel C..., expert psychiatre inscrit près la cour d'appel de Paris, a été entendu en ses dépositions et qu' est visé le rapport d'expertise de MM. Michel C..., expert psychiatre inscrit près la cour d'appel de Paris, et Serge D..., expert honoraire en neuropsychiatrie près la Cour de cassation, reçu par courrier le 17 mai 2016 au greffe ;

"alors que les experts ayant examiné la personne mise en examen doivent être entendus par la chambre de l'instruction ; qu'en l'espèce, le mis en examen a été examiné tant par M. C... médecin que par M. D... médecin ; que seul M. C... médecin a été entendu par la chambre de l'instruction à l'exclusion de M. D... médecin ; qu'à défaut d'avoir respecté l'obligation d'entendre les deux experts, la chambre de l'instruction a rendu un arrêt qui ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du procès-verbal d'audience que seul M. C..., médecin expert commis avec M. D..., a rendu compte de l'exécution de leur mission commune ; que le demandeur, qui n'a formulé, personnellement ou par l'intermédiaire de ses avocats, aucune observation sur l'absence à l'audience de M. D..., ne saurait se faire un grief de ce que la chambre de l'instruction ait procédé à la seule audition de M. C..., chacun des experts désignés pour exécuter une mission commune ayant qualité pour exposer à l'audience le résultat de l'ensemble des opérations techniques auxquelles ils ont procédé ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 122-1, 132-72, 221-1, 221-3 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense :

"en ce que l'arrêt attaqué a dit qu'ont été réunies des charges suffisantes contre le mis en examen d'avoir, avec préméditation, volontairement donné la mort à Laurent B..., a prononcé des mesures de sûreté à son endroit et sur les intérêts civils ;

"aux motifs que si les développements du mémoire au soutien des intérêts de M. Y... relatifs aux temps et aux facilités nécessaires à la préparation de sa défense s'entendaient dans la perspective de la première audience initialement fixée pour le 25 mai 2016, force est de constater que le renvoi alors ordonné et la faculté également accordée de procéder à la citation des témoins souhaités ont permis en définitive le parfait respect des droits de la défense dans la préparation et le cours de l'audience du 23 juin 2016 ; que les circonstances de la mort de la victime, plus particulièrement le nombre important de coups délibérément portés dans une zone vitale par un tiers (puisque l'arme n'a pas été retrouvée entre les mains du défunt) démontrent que, sous réserve de la responsabilité pénale de leur auteur, les faits de l'espèce répondent en tous leurs éléments matériels et intentionnels à la définition légale du meurtre (mort d'autrui volontairement donnée) ; que l'appel téléphonique de la veille après une si longue interruption de tout contact, la très courte durée utile du séjour à Rouen après une nuit de sommeil et précisément dans une période contemporaine des faits, le déni, dans un premier temps, de la réalité de ce séjour, la possession d'un objet compatible avec le mode opératoire et, à domicile, des moyens de l'affûter, les recherches accomplies en ligne sur la victime et sur les faits constituent un faisceau d'éléments ne laissent place à aucune hypothèse raisonnable de coïncidence et emportant charges suffisantes contre M. Y... de commission des faits ; que l'appel téléphonique de la veille et l'attente au petit matin de l'arrivée de la victime démontrent que M. Y... a projeté à l'avance son passage à l'acte, puisqu'il n'est fait état d'aucun autre dessein qui pourrait les expliquer, de sorte que la circonstance aggravante de la préméditation doit être retenue en l'espèce ; que la convergence de deux collèges d'experts dans ces conclusions impose de retenir que M. Y... était sous l'emprise d'un trouble psychique ou neuropsychique (en l'espèce une schizophrénie paranoïde) ayant aboli son discernement et le contrôle de ses actes lors de la commission des faits, ce qui emporte son irresponsabilité pénale ; que les analyses expertales les plus récentes, qui font état au 2 mai 2016 d'une évolution déficitaire sous fort traitement de la symptomatologie dont souffre M. Y... (ce qui établit la nécessité de soins à plus long court) et d'une dangerosité psychiatrique de l'intéressé liée à sa méconnaissance de la pathologie (ce qui établit la compromission consécutive de la sûreté des personnes), démontrent la nécessité d'une admission en soins psychiatriques sous forme d'hospitalisation complète dans un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du code de la santé publique ; que les mêmes considérations de dangerosité psychiatrique au long cours, notamment le retentissement à craindre (alors que le sujet est le siège d'un mécanisme interprétatif) des décisions prises ce jour sur la représentation qu'il ce fait de ceux qui réclament justice (et qui fréquentent les lieux retenus ci-après) et la fixation érotomaniaque relevée plus haut imposent, à titre de mesure de sûreté, le prononcé pour vingt ans d'une interdiction de détenir ou de porter une arme, d'une interdiction de paraître en Seine Maritime, à Grenoble et à Paris et d'une interdiction d'entrer en relation d'une part avec les parties civiles et d'autre part avec Mme Séverine E... ; que rien de ne s'oppose à la restitution à M. Bertrand F..., qui en a fait la demande à l'audience, des vêtements rouges (cinq scellés provisoires distincts) et des paires de gants (deux scellés provisoires distincts) saisis lors de la perquisition effectuée à son domicile le 22 octobre 2013 (cotes D234 à D236) ; que faute de précision permettant d'en délimiter le périmètre et la contenance, la demande de restitution de scellés formulée in abstracto pour le compte des parties civiles à l'audience ne peut être reçue en l'état (...) ;

"1°) alors que la chambre de l'instruction s'est fondée sur "l'appel téléphonique de la veille après une si longue interruption de tout contact, la très courte durée utile du séjour à Rouen après une nuit de sommeil et précisément dans une période contemporaine des faits, le déni, dans un premier temps, de la réalité de ce séjour, la possession d'un objet compatible avec le mode opératoire et, à domicile, des moyens de l'affuter, les recherches accomplies en ligne sur la victime" ; qu'en s'appuyant sur ce "faisceau d'éléments", lesquels pris ensemble ou isolément ne permettent pas d'imputer un homicide volontaire avec préméditation au mis en examen, la chambre de l'instruction n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle ;

"2°) alors que, pour retenir qu'il existerait des charges suffisantes contre le mis en examen d'avoir assassiné Laurent B..., la chambre de l'instruction a relevé qu'il possédait "un objet compatible avec le mode opératoire et, à domicile, des moyens de l'affûter" ; qu'en statuant ainsi quand il résultait de l'enquête que cet objet n'était pas l'arme ayant servi à la commission du meurtre puisque les analyses "faites sur les tournevis et couteau appartenant à M. Y... (...) ne faisaient pas ressortir l'empreinte génétique de Laurent B...", la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

"3°) alors qu'en s'appuyant, pour retenir qu'il existerait des charges suffisantes contre le mis en examen d'avoir commis le meurtre de Laurent B..., sur "les recherches accomplies en ligne sur la victime" quand il résultait de l'enquête qu'aucune date associée à ces consultations n'était retrouvée, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

"4°) alors qu'il résulte des éléments de l'enquête que les expertises génétiques ne permettaient ni d'identifier le profil génétique du mis en examen sur les effets de la victime ni de faire ressortir l'empreinte génétique de la victime sur les effets du mis en examen, que l'expertise informatique des GPS saisis ne permettait pas de retrouver la trace de déplacements sur Rouen au moment des faits, qu'il n'y avait aucun témoin des faits et que la présence du mis en examen n'a pas "pu être formellement confirmée au matin du crime devant le cabinet du praticien" et qu'aucun mobile n'a pu être défini ; qu'en s'abstenant de prendre en compte ces éléments à décharge, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;

"5°) alors qu'en relevant, d'un côté, que le mis en examen aurait "projeté à l'avance son passage à l'acte" et que "la circonstance aggravante de préméditation doit être retenue en l'espèce", ce dont il résulte qu'il aurait sciemment mis en oeuvre un mécanisme en vue d'un assassinat, et, de l'autre, que "M. Y... était sous l'emprise d'un trouble psychique ou neuropsychique (en l'espèce une schizophrénie paranoïde) ayant aboli son discernement et le contrôle de ses actes lors de la commission des faits", ce dont il s'infère que le mis en examen n'avait pas sciemment commis les faits reprochés, y compris ceux d'où résulterait la préméditation, la chambre de l'instruction s'est contredite ;

"6°) alors que la chambre de l'instruction s'est bornée à relever que "l'appel téléphonique de la veille et l'attente au petit matin de l'arrivée de la victime démontre que M. Y... a projeté à l'avance son passage à l'acte, puisqu'il n'est fait état d'aucun autre dessein qui pourrait les expliquer" ; qu'en statuant ainsi au motif inopérant qu'aucun autre dessein pourrait expliquer l'appel téléphonique et la prétendue attente de l'arrivée de la victime sans rechercher si ces actes avaient été accomplis dans le dessin de donner la mort à la victime, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

"7°) alors que pour retenir la préméditation, la chambre de l'instruction a relevé que le mis en cause aurait attendu "au petit matin l'arrivée de la victime" ; qu'en statuant ainsi quand l'enquête ne permettait d'établir que le mis en examen aurait été présent sur les lieux des faits, sa présence n'ayant pas "pu être formellement confirmée au matin du crime devant le cabinet du praticien", la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés" ;

Attendu qu'après avoir exposé les faits de la cause, examiné les éléments à charge et à décharge, et analysé les conclusions des experts, la chambre de l'instruction, par un arrêt qui répond aux conclusions des parties, a fait application des dispositions de l'article 122-1, alinéa 1, du code pénal ;

Attendu que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, de l'existence de charges suffisantes à l'encontre de la personne mise en examen d'avoir commis les faits reprochés et de l'abolition, au moment de ceux-ci, de son discernement ou du contrôle de ses actes, ne saurait être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 591, 593, 706-135, 706-136 et D. 47-29 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense :

"en ce que l'arrêt attaqué a prononcé l'admission en soins psychiatriques du mis en examen sous la forme d'une hospitalisation complète dans un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du code de la santé publique, l'interdiction pendant vingt ans d'entrer en relation avec Mme Marie-Noëlle G..., M. Félix B..., Mmes Hélène B..., Louise B..., Dominique B..., Florence B... et Séverine E..., l'interdiction pendant de vingt ans de paraître en Seine Maritime, à Grenoble et à Paris et l'interdiction pendant vingt ans de détenir ou de porter une arme ;

"aux motifs que la convergence de deux collèges d'experts dans ces conclusions impose de retenir que M. Y... était sous l'emprise d'un trouble psychique ou neuropsychique (en l'espèce une schizophrénie paranoïde) ayant aboli son discernement et le contrôle de ses actes lors de la commission des faits, ce qui emporte son irresponsabilité pénale ; que les analyses expertales les plus récentes, qui font état au 2 mai 2016 d'une évolution déficitaire sous fort traitement de la symptomatologie dont souffre M. Y... (ce qui établit la nécessité de soins à plus long court) et d'une dangerosité psychiatrique de l'intéressé liée à sa méconnaissance de la pathologie (ce qui établit la compromission consécutive de la sûreté des personnes), démontrent la nécessité d'une admission en soins psychiatriques sous forme d'hospitalisation complète dans un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du code de la santé publique ; que les mêmes considérations de dangerosité psychiatrique au long cours, notamment le retentissement à craindre (alors que le sujet est le siège d'un mécanisme interprétatif) des décisions prises ce jour sur la représentation qu'il ce fait de ceux qui réclament justice (et qui fréquentent les lieux retenus ci-après) et la fixation érotomaniaque relevée plus haut imposent, à titre de mesure de sûreté, le prononcé pour vingt ans d'une interdiction de détenir ou de porter une arme, d'une interdiction de paraître en Seine Maritime, à Grenoble et à Paris et d'une interdiction d'entrer en relation d'une part avec les parties civiles et d'autre part avec Mme E... ;

"1°) alors que lorsque la chambre de l'instruction ordonne, conformément à l'article 706-35 du code de procédure pénale, l'hospitalisation d'office de la personne mise en examen dans un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du code de la santé publique, elle prend à cette fin une ordonnance motivée aussitôt après avoir rendu l'arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour trouble mental ; qu'en déclarant le mis en examen irresponsable pénalement et en prononçant son hospitalisation d'office dans le même arrêt, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;

"2°) alors que l'hospitalisation d'office constitue une privation de liberté ; que la privation de liberté est une mesure si grave qu'elle ne se justifie que lorsque d'autres mesures, moins sévères, ont été considérées et jugées insuffisantes pour sauvegarder l'intérêt personnel ou public exigeant la détention ; qu'en prononçant l'hospitalisation d'office du mis en examen sans expliquer pourquoi d'autres mesures moins sévères auraient été insuffisantes pour sauvegarder l'intérêt personnel ou public exigeant la privation de liberté du mis en examen, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

"3°) alors que lorsque la chambre de l'instruction prononce un arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, elle peut ordonner à l'encontre de la personne l'interdiction de paraître dans tout lieu spécialement désigné ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction a prononcé à l'encontre du mis en examen l'interdiction de paraître en Seine Maritime, à Grenoble et à Paris ; qu'en lui interdisant ainsi de paraître dans tout un département et dans deux villes, la chambre de l'instruction n'a pas spécialement désigné les lieux qui lui sont interdits en méconnaissance des textes susvisés" ;

Sur le moyen, pris en sa première branche :

Attendu que si c'est à tort que la chambre de l'instruction n'a pas rendu l'ordonnance motivée prévue par l'article D. 47-29 du code de procédure pénale, la cassation n'est cependant pas encourue dès lors que l'admission en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète a été légalement décidée par un arrêt motivé conformément à l'article 706-135 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le grief doit être écarté ;

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Attendu qu'il se déduit des dispositions combinées des articles 706-135 et D. 47-29 du code de procédure pénale que la chambre de l'instruction, après avoir constaté l'irresponsabilité pénale de la personne concernée pour cause de trouble mental, peut ordonner son admission en soins sous forme d'une hospitalisation complète, mais ne dispose d'aucun autre pouvoir et n'a pas à rechercher si des mesures alternatives auraient pu être appliquées à l'intéressé ;

D'où il suit que le grief n'est pas encouru ;

Sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu qu'en faisant interdiction à M. Y... de paraître en Seine-Maritime, à Grenoble et à Paris, la chambre de l'instruction a spécialement désigné les lieux qui lui sont interdits, en application de l'article 706-136 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le grief manque en fait ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

I - Sur le pourvoi formé le 15 juillet 2016 par maître Julia sous le numéro 32/2016 :

Le DECLARE IRRECEVABLE ;

2 - Sur le pourvoi formé le 13 juillet 2016 par maître Julia, substituant maître Arnold, sous le numéro 31/2016 :

Le REJETTE DAR ;

FIXE à 2 000 euros la somme globale que M. Y... devra payer à Mme Marie-Noëlle G..., M.Félix B..., Mme Hélène B..., Mme Louise B..., M. Dominique B... et Mme Florence B..., au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-neuf novembre deux mille dix-sept ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-85490
Date de la décision : 29/11/2017
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité et rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Pouvoirs - Etendue - Constat d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental - Mesures complémentaires - Hospitalisation d'office - Recherche de mesures alternatives (non)

La chambre de l'instruction, après avoir constaté l'irresponsabilité pénale de la personne poursuivie pour cause de trouble mental, peut ordonner son admission en soins sous forme d'une hospitalisation complète, mais ne dispose d'aucun autre pouvoir et n'a pas à rechercher si des mesures alternatives auraient pu être appliquées à l'intéressé


Références :

Sur le numéro 1 : ARTICLE 706-120 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
Sur le numéro 2 : ARTICLES 168 ET 706-122 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
Sur le numéro 3 : articles 706-135 et D. 47-29 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rouen, 12 juillet 2016

N2 Sur une application du principe selon lequel chacun des experts désignés pour exécuter une mission commune a qualité pour exposer le résultat de l'ensemble des opérations techniques auxquelles tous ont procédé à l'audience devant la cour d'assises, à rapprocher : Crim., 30 septembre 1998, pourvoi n° 97-86532, Bull. Crim. 1998, n° 244 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 nov. 2017, pourvoi n°16-85490, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Soulard
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.85490
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