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20/09/2017 | FRANCE | N°16-19643

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 septembre 2017, 16-19643


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 avril 2016), que Mme Y..., à laquelle a été prescrit du Mediator, entre le 9 février 2006 et le 17 octobre 2009, pour remédier à une tryglicéridémie, présente une insuffisance aortique ; qu'après avoir sollicité une expertise judiciaire, elle a assigné la société Les Laboratoires Servier, producteur du Mediator (la société), en réparation du préjudice subi et mis en cause la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn (la caisse) qui a demandé l

e remboursement de ses débours ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 avril 2016), que Mme Y..., à laquelle a été prescrit du Mediator, entre le 9 février 2006 et le 17 octobre 2009, pour remédier à une tryglicéridémie, présente une insuffisance aortique ; qu'après avoir sollicité une expertise judiciaire, elle a assigné la société Les Laboratoires Servier, producteur du Mediator (la société), en réparation du préjudice subi et mis en cause la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn (la caisse) qui a demandé le remboursement de ses débours ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de sursis à statuer, alors, selon le moyen :

1°/ que, si l'action civile en réparation du dommage causé par une infraction pénale peut être exercée devant une juridiction civile, il doit toutefois être sursis au jugement de cette action tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ; qu'il doit, notamment, en aller ainsi lorsque le fait générateur de responsabilité civile repose sur les mêmes éléments matériels que ceux de nature à constituer l'infraction pénale faisant l'objet des poursuites ; qu'en l'espèce, la société est poursuivie devant les juridictions pénales des chefs de tromperie, homicides et blessures involontaires, parce qu'elle aurait trompé les patients sur les qualités substantielles et les risques inhérents à l'utilisation du Mediator en n'informant pas ces derniers, ainsi que les médecins, de tous les effets indésirables susceptibles d'être liés à la consommation du médicament ; que l'action en responsabilité civile engagée par Mme Y..., qui est partie civile à l'une des instances pénales, repose à la fois sur la démonstration par cette dernière d'un prétendu défaut du produit, tenant à une absence d'information sur les effets indésirables induits par sa consommation, et sur le fait que la société ne puisse de son côté s'exonérer en invoquant le risque de développement, c'est-à-dire le fait que l'état des connaissances scientifiques au moment du traitement de la patiente ne permettaient pas de déceler l'existence du défaut ; que ces différents éléments étant les mêmes que ceux qui font l'objet de la procédure pénale dans laquelle Mme Y... s'est portée partie civile, il s'en déduit que l'action en responsabilité civile engagée par cette dernière est bien une action en réparation du dommage qui lui aurait été causé par les infractions pénales reprochées à la société, ce qui imposait donc aux juges du fond de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure pénale ;

2°/ que le droit à un procès équitable implique que le respect des droits de la défense de chacun des plaideurs soit effectivement assuré ; que tel n'est pas le cas lorsque l'une des parties, poursuivie devant les juridictions pénales pour certaines infractions, est attraite devant les juridictions civiles sur le fondement des mêmes faits et se retrouve dans l'impossibilité d'invoquer au soutien de sa défense les éléments rassemblés dans le cadre de l'information judiciaire, indispensables pour apprécier la matérialité des faits qui lui sont reprochés, mais couverts par le secret de l'instruction ; qu'en l'espèce, la société faisait expressément valoir qu'elle était dans l'impossibilité de communiquer en vue de sa défense un nombre très important de pièces du dossier pénal couvertes par le secret de l'instruction, dont une expertise scientifique de huit cents pages et quatre annexes, réalisée de concert par trois experts, relative aux caractéristiques scientifiques et pharmacologiques du Mediator, à ses propriétés, à ses parentés chimiques et pharmacologiques, à ses effets indésirables, ainsi que de multiples autres pièces nécessaires à l'appréciation tant du caractère défectueux du Mediator que de l'état des connaissances scientifiques et techniques durant la période pendant laquelle ce médicament a été prescrit à Mme Y... ; qu'en énonçant, pour juger que la société n'aurait pas été privée du droit à un procès équitable, qu'il « n'est pas précisé en quoi ces pièces seraient pertinentes dans le cadre du débat particulier intéressant Mme Y... », la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de la société et violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ que le droit à un procès équitable implique que le respect des droits de la défense de chacun des plaideurs soit effectivement assuré ; que tel n'est pas le cas lorsque l'une des parties, poursuivie devant les juridictions pénales pour certaines infractions, est attraite devant les juridictions civiles sur le fondement des mêmes faits et se retrouve dans l'impossibilité d'invoquer au soutien de sa défense les éléments rassemblés dans le cadre de l'information judiciaire, indispensables pour apprécier la matérialité des faits qui lui sont reprochés, mais couverts par le secret de l'instruction ; qu'en l'espèce, la société faisait expressément valoir qu'elle était dans l'impossibilité de communiquer en vue de sa défense un nombre très important de pièces du dossier pénal couvertes par le secret de l'instruction, dont une expertise scientifique de huit cents pages et quatre annexes, réalisée de concert par trois experts, relative aux caractéristiques scientifiques et pharmacologiques du Mediator, à ses propriétés, à ses parentés chimiques et pharmacologiques, à ses effets indésirables, ainsi que de multiples autres pièces nécessaires à l'appréciation tant du caractère défectueux du Mediator que de l'état des connaissances scientifiques et techniques durant la période pendant laquelle ce médicament a été prescrit à Mme Y... ; qu'en énonçant, en l'espèce, pour décider que la société n'aurait pas été privée du droit à un procès équitable, que le débat sur les effets néfastes du Mediator apparaît largement dépassé, cependant que la communication des pièces litigieuses couvertes par le secret de l'instruction était indispensable pour apprécier tant le caractère défectueux du médicament que l'existence d'un risque de développement exonératoire de la responsabilité du fabricant, tous éléments qui, loin d'appartenir à un débat dépassé, étaient au contraire au coeur du litige dont les juges du fond étaient saisis, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que l'article 4 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007, n'impose à la juridiction civile de surseoir à statuer, en cas de mise en mouvement de l'action publique, que lorsqu'elle est saisie de l'action civile en réparation du dommage causé par l'infraction ; que, dans les autres cas, quelle que soit la nature de l'action civile engagée, et même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil, elle apprécie dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire s'il y a lieu de prononcer un sursis à statuer ;

Et attendu qu'après avoir constaté que l'action introduite devant la juridiction civile par Mme Y... n'était pas fondée sur les infractions pour lesquelles une information était ouverte contre la société des chefs de tromperie, homicides et blessures involontaires, mais sur la responsabilité sans faute de celle-ci au titre de la défectuosité du Mediator, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action dont elle était saisie était indépendante de l'action publique ; que c'est sans méconnaître les exigences d'un procès équitable et en l'absence de démarche de la société aux fins que soient versées à la procédure civile les pièces du dossier pénal qu'elle considérait comme nécessaires aux besoins de sa défense, que la cour d'appel a décidé, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, sans dénaturation et abstraction faite du motif surabondant critiqué par la troisième branche, qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir au pénal ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du même pourvoi :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de retenir que l'insuffisance aortique présentée par Mme Y... est imputable au Mediator alors, selon le moyen :

1°/ que, si en matière de produits de santé, il est permis au demandeur, en l'absence de certitude scientifique, de rapporter la preuve de l'imputabilité du dommage à l'administration du produit par de simples présomptions de fait, celles-ci ne peuvent être retenues par les juges du fond qu'à la condition d'être graves, précises et concordantes ; que de telles présomptions ne peuvent être réunies qu'à la condition que le produit incriminé puisse être une cause génératrice du dommage, qu'il soit hautement probable qu'il ait été à l'origine de celui-ci et que les autres causes possibles du dommage soient exclues ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont eux-mêmes constaté que « l'atteinte valvulaire de Mme Y... étant indétectable à l'examen clinique, elle pouvait très bien préexister sans avoir été dépistée », que « son dossier médical n'avait pas été communiqué » et que l'expert judiciaire avait précisé que le lien de causalité entre cette atteinte et la prise du Médiator lui semblait seulement « plausible », excluant toute « imputabilité directe et certaine » ; qu'en décidant, néanmoins, qu'il existait des présomptions graves, précises et concordantes suffisantes pour constituer la preuve d'un lien de causalité entre l'exposition de Mme Y... au Mediator et l'insuffisance aortique qu'elle présentait, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé les articles 1386-9 et 1353 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ que la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a, d'un côté, expressément retenu qu' « a été constatée le jour de l'expertise une insuffisance aortique minime, de grade évalué à 0,5/4, sans retentissement ventriculaire », tout en se déterminant néanmoins, d'un autre côté, au regard des appréciations du collège d'experts de l'Office national d'indemnisation des accident médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM), lequel avait pourtant rendu son avis au regard des pathologies rapportées par Mme Y..., et notamment d' « une insuffisance mitrale aortique grade 1/4 », et non de grade 0,5/4 comme indiqué le jour de l'expertise et constaté par la cour d'appel elle-même ; qu'en se fondant ainsi sur les appréciations du collège d'experts de l'ONIAM pour décider que l'insuffisance aortique de Mme Y... serait une lésion imputable au Médiator, cependant que ces appréciations, reposant sur le postulat erroné d'une insuffisance de grade 1/4, étaient en contradiction directe avec les constatations de l'arrêt fixant à 0,5/4 le grade de l'insuffisance mitrale aortique de Mme Y..., la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que la société faisait valoir dans ses conclusions d'appel que l'atteinte valvulaire de Mme Y... ne présentait aucune des deux caractéristiques échocardiographiques permettant d'identifier une origine médicamenteuse des lésions, à savoir la restriction et le grade de la fuite ; qu'elle soutenait ainsi que l' « examen échocardiographique contradictoire réalisé le jour de l'expertise a permis les constatations suivantes : les sigmoïdes aortiques sont décrites comme seulement « légèrement épaissies de manière diffuse », sans mouvement de restriction décrit ; la valve mitrale est décrite comme de "morphologie normale », sans anomalie restrictive. Aux termes de l'additif au rapport, l'expert indique sur ce point : « la présence d'une composante restrictive serait en faveur d'une imputabilité. Son absence ne permet pas de faire la différence avec des atteintes banales observées chez des hypertendus de cet âge » (
). Il n'y a donc chez Mme Y... rien de spécifique » et ce d'autant que les fuites aortiques présentées par cette dernière sont minimes, étant de grade 0,5/4 ; qu'en affirmant qu'il existait une causalité plausible en faveur d'une imputabilité de l'insuffisance aortique à la prise de Mediator, compte tenu de la chronologie de la découverte de cette pathologie et de la description échographique de la valve aortique, qui ne permettait pourtant pas de constater le moindre mouvement de restriction, sans répondre au moyen déterminant de la société, qui mettait en exergue le fait que cette insuffisance aortique ne pouvait se distinguer d'une atteinte banale non médicamenteuse, faute d'être restrictive et compte tenu de son grade minime, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt relève que, si l'expert judiciaire a conclu à une causalité seulement plausible, le collège d'experts, placé auprès de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, et chargé d'émettre un avis sur les dommages et les responsabilités en vue d'une indemnisation amiable des victimes du benfluorex, s'est ensuite, à la demande de Mme Y..., prononcé en faveur d'une imputabilité de l'insuffisance aortique à la prise de Mediator, que la connaissance sur les effets nocifs du médicament avait alors progressé, qu'aucune hypothèse faisant appel à une cause étrangère n'a été formulée et qu'aucun élément ne permet de considérer que la pathologie de l'intéressée est antérieure au traitement par le Mediator ; que, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni entacher sa décision de contradiction, dès lors qu'elle s'est bornée à reproduire les constatations médicales sur le grade de l'insuffisance aortique présentée par Mme Y..., la cour d'appel a pu en déduire qu'il existait des présomptions graves, précises et concordantes permettant de retenir que sa pathologie est imputable au Mediator ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen du même pourvoi :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'écarter l'exonération de responsabilité qu'elle a invoquée sur le fondement du 4° de l'article 1386-11, devenu 1245-10 du code civil, alors, selon le moyen :

1°/ que le producteur peut s'exonérer de sa responsabilité s'il établit que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut ; que l'état des connaissances scientifiques et techniques devant être pris en compte pour apprécier cette cause d'exonération doit être directement relatif au produit incriminé et ne peut être exclusivement celui concernant un produit voisin, quand bien même il y aurait une parenté chimique entre eux ; qu'en l'espèce, les juges du fond se sont bornés à relever que les connaissances scientifiques et techniques existant en 1997 permettaient d'établir la cardiotoxicité des fenfluramines et de leur métabolite, la norfenfluramine ; qu'ils n'ont pas, en revanche, constaté que l'état des connaissances scientifiques et techniques relatif au benfluorex lui-même permettait à l'époque de parvenir à une conclusion similaire ; qu'en se prononçant ainsi au regard du seul état des connaissances relatif à des substances ayant certes une parenté chimique et un métabolite commun avec le benfluorex (Mediator) mais restant pourtant bien distinctes de celui-ci, pour en déduire de façon péremptoire qu' « au plus tard en 1997 existaient des données scientifiques concordantes sur les effets nocifs du Mediator en raison de l'extrême similitude des propriétés du Mediator avec d'autres médicaments jugés dangereux dès 1997 », la cour d'appel a violé l'article 1386-11 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ que la société faisait valoir que le compte rendu de la réunion du CTPV du 17 décembre 1998, constituant la cote D221/72 du dossier pénal, pièce couverte par le secret de l'instruction qui ne pouvait être produite, soulignait que si la fenfluramine et le benfluorex avait tous deux pour métabolite la norfenfluramine, celle-ci ne représentait qu'un taux circulant de 5 % pour le benfluorex contre 30 % pour la fenfluramine, se traduisant par 7 % de norfenfluramine dans les urines pour la fenfluramine contre 2 % pour le benfluorex, ce qui conduisait à la conclusion qu'il était improbable que le benfluorex induise les mêmes effets que la fenfluramine ; qu'en relevant que selon une étude italienne réalisée en 1999, trois comprimés de Mediator conduisent à produire autant de norfenfluramine que deux comprimés d'Isoméride (fenfluramine), sans répondre aux conclusions de la société qui montraient qu'en tout état de cause, le taux circulant de norfenfluramine était sans commune mesure pour les deux médicaments, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le producteur est responsable de plein droit du dommage causé par le défaut de son produit à moins qu'il ne prouve, selon le 4° de l'article 1386-11, devenu 1245-10 du code civil, que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut ; que la date de mise en circulation du produit qui a causé le dommage s'entend, dans le cas de produits fabriqués en série, de la date de commercialisation du lot dont il faisait partie ;

Et attendu qu'après avoir retenu le caractère défectueux du Mediator, l'arrêt décrit, par motifs propres et adoptés, les conditions dans lesquelles ont été révélés les effets nocifs de ce produit en raison, notamment, de sa similitude avec d'autres médicaments qui, ayant une parenté chimique et un métabolite commun, ont été, dès 1997, jugés dangereux, ce qui aurait dû conduire la société à procéder à des investigations sur la réalité du risque signalé, et, à tout le moins, à en informer les médecins et les patients ; qu'il ajoute que la possible implication du Mediator dans le développement de valvulopathies cardiaques, confirmée par le signalement de cas d'hypertensions artérielles pulmonaires et de valvulopathies associées à l'usage du benfluorex, a été mise en évidence par des études internationales et a conduit au retrait du médicament en Suisse en 1998, puis à sa mise sous surveillance dans d'autre pays européens et à son retrait en 2003 en Espagne, puis en Italie ; que, de ces énonciations, desquelles il résulte que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment de la mise en circulation des produits administrés à Mme Y... entre 2006 et 2009, permettait de déceler l'existence du défaut du Mediator, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, en a exactement déduit que la société n'était pas fondée à invoquer une exonération de responsabilité au titre du dommage subi par Mme Y... ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexé :

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de limiter la réparation de son déficit fonctionnel permanent à la somme de 3 300 euros ;

Attendu que, la société ayant sollicité dans le dispositif de ses conclusions l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions, un sursis à statuer et, subsidiairement au fond, le rejet des demandes de Mme Y... en l'absence de réunion des conditions de mise en jeu de sa responsabilité et, notamment, de preuve d'un préjudice certain, la cour d'appel a, sans méconnaître l'objet du litige, souverainement apprécié l'existence et l'étendue du déficit fonctionnel permanent ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Les Laboratoires Servier aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Les Laboratoires Servier.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la responsabilité de la société Les laboratoires Servier est engagée à l'égard de Mme Esther Y... du fait de la défectuosité du Médiator pendant la période d'administration du médicament et condamné la société Les Laboratoires Servier à verser à Mme esther Y... en réparation de ses préjudices corporels, provisions non déduites, les sommes suivantes : 3.000 euros au titre des souffrances endurées, 1.350 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et 3.300 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la demande de sursis à statuer, Les Laboratoires Servier sont visés par deux procédures pénales, l'une devant le tribunal de Nanterre sur citation directe, dans le cadre de laquelle Mme Y... est partie civile, et l'autre sur information ouverte par le ministère public, dans le cadre de laquelle ils ont été mis en examen. Ces procédures visent les délits de tromperie, homicides et blessures involontaires. L'article 4 du code de procédure pénale dispose que l'action civile en réparation du dommage causé par une infraction peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l'action publique. Toutefois, il est sursis au jugement de cette action tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement. La mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu'elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil. Sur un plan strictement formel, les demandes de Mme Y... sont fondées sur les articles 1386-1 et suivants du code civil, et n'ont pas pour objet de réparer les préjudices nés des infractions objet des poursuites, y compris dans celles dans lesquelles elle s'est constituée partie civile. Sur le plan matériel, une condamnation pour blessures involontaires exige la preuve d'une faute, alors que les dispositions précitées instaurent précisément une responsabilité purement objective, dont la mise en oeuvre n'exige pas une telle preuve. Le sursis à statuer ne peut donc être prononcé en application de l'alinéa 1er de l'article 4 du code de procédure pénale. En ce qui concerne la seule opportunité d'un sursis à statuer, il doit être observé que, si les données scientifiques débattues, à savoir l'imputabilité au Médiator de certaines pathologies cardiaques, sont identiques dans le cadre des instances civiles et pénales, le débat pénal est sans commune mesure, tant par son ampleur que son objet, avec la réparation d'un préjudice causé à une victime particulière. Ainsi, dans le cas où la présente juridiction surseoirait à statuer sur les demandes de Mme Y... dans l'attente de l'issue des procédures pénales en cours, cette dernière serait exposée, sans véritable nécessité au regard des données de fait et scientifiques d'ores et déjà acquises, et des éléments médicaux recueillis la concernant en particulier, à des délais insupportables assimilables à un véritable déni de justice. Enfin, en ce qui concerne l'impossibilité invoquée par Le Laboratoire Servier de communiquer en vue de sa défense certaines pièces du dossier pénal longuement énumérées dans ses écritures, il n'est pas précisé en quoi ces pièces seraient pertinentes dans le cadre du débat particulier intéressant Mme Y..., et certaines sont des documents publics collectés au cours de l'enquête et que Servier pouvait parfaitement produire. En outre le débat sur les effets néfastes du Médiator apparaît largement dépassé, au regard tant de la loi du 29 juillet 2011 instaurant un mécanisme de réparation amiable et une substitution par l'ONIAM, que de l'attitude publique des Laboratoires Servier, qui ont fait part de leur volonté d'indemniser toutes les victimes » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU' « il résulte de l'article 4 du code de procédure pénale que si la règle selon laquelle « le criminel tient le civil en l'état » s'impose lorsque l'action civile est exercée en réparation du dommage causé par une infraction pénale, en revanche, la mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu'elles soient même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil. En l'espèce, l'action engagée contre Les Laboratoires Servier par Mme Y... sur le fondement des articles 1386-1 du code civil et suivants n'est pas exercée en réparation du dommage causé par une ou des infractions faisant l'objet des instances pénales en cours, de sorte qu'un sursis à statuer ne s'impose pas. Par ailleurs, la responsabilité du fait du défaut des produits est une responsabilité objective qui n'impose pas de démontrer l'existence d'une faute, le producteur pouvant toutefois s'exonérer dans des conditions limitativement énumérées par l'article 1386-1 (lire 1386-11) du code civil, et notamment dans le cas prévu au 4°, s'il prouve « que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut ». Or, il apparaît qu'en l'espèce, une expertise judiciaire civile a été réalisée de façon contradictoire, les questions posées à l'expert portant notamment sur les rapprochements signalés dans la littérature médicale et les éléments contenus dans la notice d'utilisation du médicament ; que les parties ont, tant pendant les opérations d'expertise que durant la procédure, échangé de nombreux documents scientifiques et médicaux, qui ont fait l'objet d'une discussion contradictoire, portant précisément sur l'état des connaissances quant aux effets défavorables du médicament et sur la question de la défectuosité du Médiator. Par ailleurs, la société Les Laboratoires Servier ne peut soutenir qu'elle est privée d'un procès équitable au motif général de son empêchement à produire les éléments couverts par le secret de l'instruction sans préciser quels sont, parmi ces éléments, ceux qu'elle entend invoquer pour sa défense dans le cadre de l'instance civile laquelle est distincte, par son fondement et son objet, des procédures pénales en cours. Au vu des explications fournies et des pièces communiquées par la société défenderesse tout au long de la procédure, tant qu'auprès des experts qu'auprès du tribunal, notamment pour contester le défaut de l'information ou pour invoquer les causes d'exonération, il convient de constater que la société Les Laboratoires Servier, laquelle n'a jamais fait état de son impossibilité de produire un élément en particulier, a été en mesure de faire valoir les moyens qui étaient nécessaires à sa défense dans le cadre de la procédure civile. Dès lors qu'il n'apparait pas établi que les éléments dont dispose le tribunal seraient insuffisants pour statuer au fond, ni que la société Les Laboratoires Servier aurait été privée d'un procès équitable, il n'est pas dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice de surseoir à statuer dans l'attente des décisions pénales ou de la levée du secret de l'instruction et la demande de la société défenderesse sera rejetée de ce chef » ;

1°/ ALORS QUE si l'action civile en réparation du dommage causé par une infraction pénale peut être exercée devant une juridiction civile, il doit toutefois être sursis au jugement de cette action tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ; qu'il doit notamment en aller ainsi lorsque le fait générateur de responsabilité civile repose sur les mêmes éléments matériels que ceux de nature à constituer l'infraction pénale faisant l'objet des poursuites ; qu'en l'espèce, la société Les Laboratoires Servier est poursuivie devant les juridictions pénales des chefs de tromperie, homicides et blessures involontaires, parce qu'elle aurait trompé les patients sur les qualités substantielles et les risques inhérents à l'utilisation du Médiator en n'informant pas ces derniers, ainsi que les médecins, de tous les effets indésirables susceptibles d'être liés à la consommation du médicament ; que l'action en responsabilité civile engagée par Mme Y..., qui est partie civile à l'une des instances pénales, repose à la fois sur la démonstration par cette dernière d'un prétendu défaut du produit, tenant à une absence d'information sur les effets indésirables induits par sa consommation, et sur le fait que la société exposante ne puisse de son côté s'exonérer en invoquant le risque de développement, c'est-à-dire le fait que l'état des connaissances scientifiques au moment du traitement de la patiente ne permettaient pas de déceler l'existence du défaut ; que ces différents éléments étant les mêmes que ceux qui font l'objet de la procédure pénale dans laquelle Mme Y... s'est portée partie civile, il s'en déduit que l'action en responsabilité civile engagée par cette dernière est bien une action en réparation du dommage qui lui aurait été causé par les infractions pénales reprochées à la société Les Laboratoires Servier, ce qui imposait donc aux juges du fond de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure pénale ;

2°/ ALORS QUE le droit à un procès équitable implique que le respect des droits de la défense de chacun des plaideurs soit effectivement assuré ; que tel n'est pas le cas lorsque l'une des parties, poursuivie devant les juridictions pénales pour certaines infractions, est attraite devant les juridictions civiles sur le fondement des mêmes faits et se retrouve dans l'impossibilité d'invoquer au soutien de sa défense les éléments rassemblés dans le cadre de l'information judiciaire, indispensables pour apprécier la matérialité des faits qui lui sont reprochés, mais couverts par le secret de l'instruction ; qu'en l'espèce, la société Les Laboratoires Servier faisait expressément valoir qu'elle était dans l'impossibilité de communiquer en vue de sa défense un nombre très important de pièces du dossier pénal couvertes par le secret de l'instruction, dont une expertise scientifique de 800 pages et quatre annexes, réalisée de concert par trois experts, relative aux caractéristiques scientifiques et pharmacologiques du Médiator, à ses propriétés, à ses parentés chimiques et pharmacologiques, à ses effets indésirables, ainsi que de multiples autres pièces nécessaires à l'appréciation tant du caractère défectueux du Médiator que de l'état des connaissances scientifiques et techniques durant la période pendant laquelle ce médicament a été prescrit à Mme Y... (p. 15 à 28) ; qu'en énonçant, pour juger que la société Les Laboratoires Servier n'aurait pas été privée du droit à un procès équitable, qu'il « n'est pas précisé en quoi ces pièces seraient pertinentes dans le cadre du débat particulier intéressant Mme Y... », la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de la société exposante et violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ ALORS QUE le droit à un procès équitable implique que le respect des droits de la défense de chacun des plaideurs soit effectivement assuré ; que tel n'est pas le cas lorsque l'une des parties, poursuivie devant les juridictions pénales pour certaines infractions, est attraite devant les juridictions civiles sur le fondement des mêmes faits et se retrouve dans l'impossibilité d'invoquer au soutien de sa défense les éléments rassemblés dans le cadre de l'information judiciaire, indispensables pour apprécier la matérialité des faits qui lui sont reprochés, mais couverts par le secret de l'instruction ; qu'en l'espèce, la société Les Laboratoires Servier faisait expressément valoir qu'elle était dans l'impossibilité de communiquer en vue de sa défense un nombre très important de pièces du dossier pénal couvertes par le secret de l'instruction, dont une expertise scientifique de 800 pages et quatre annexes, réalisée de concert par trois experts, relative aux caractéristiques scientifiques et pharmacologiques du Médiator, à ses propriétés, à ses parentés chimiques et pharmacologiques, à ses effets indésirables, ainsi que de multiples autres pièces nécessaires à l'appréciation tant du caractère défectueux du Médiator que de l'état des connaissances scientifiques et techniques durant la période pendant laquelle ce médicament a été prescrit à Mme Y... (p. 15 à 28) ; qu'en énonçant en l'espèce, pour décider que la société Les Laboratoires Servier n'aurait pas été privée du droit à un procès équitable, que « le débat sur les effets néfastes du Médiator apparaît largement dépassé », cependant que la communication des pièces litigieuses couvertes par le secret de l'instruction était indispensable pour apprécier tant le caractère défectueux du médicament que l'existence d'un risque de développement exonératoire de la responsabilité du fabricant, tous éléments qui, loin d'appartenir à un « débat dépassé », étaient au contraire au coeur du litige dont les juges du fond étaient saisis, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la responsabilité de la société Les laboratoires Servier est engagée à l'égard de Mme Esther Y... du fait de la défectuosité du Médiator pendant la période d'administration du médicament et condamné la société Les Laboratoires Servier à verser à Mme esther Y... en réparation de ses préjudices corporels, provisions non déduites, les sommes suivantes : 3.000 euros au titre des souffrances endurées, 1.350 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et 3.300 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur l'imputabilité du dommage au Médiator : il résulte de l'expertise du docteur A... (lire A...) que Mme Y..., née le [...] , a été traitée par Médiator [...]      entre le 9 février 2006 et le 17 octobre 2009, soit pendant trois ans.                              . Elle a cependant déclaré en avoir pris depuis 2004. Son dossier médical n'a pas été communiqué. Des examens cardiologiques préopératoires effectués en 1967 et 1970 n'ont pas retrouvé d'anomalies. Un examen cardiologique pratiqué après réception du courrier de l'AFSSAPS le 26 janvier 2011 par le docteur B... a mis en évidence une fuite mitrale de grade ¿ et une fuite aortique très discrète également quantifiée ¿. Cette valvulopathie n'a pas paru spécifique de quoi que ce soit à ce médecin, qui conclut qu'il lui est impossible de dire si elle est en rapport avec le Médiator ou pas. Un second examen, du même cardiologue, a eu les mêmes résultats. A été constatée le jour de l'expertise une insuffisance aortique minime, de grade évalué à 0,5/4, sans retentissement ventriculaire, ainsi qu'une insuffisance mitrale très minime. L'épaississement diffus des sigmoïdes, l'aspect central de la fuite (aortique) sont, pour l'expert, des arguments rendant plausible l'effet du Médiator dans l'apparition de la minime insuffisance aortique observée, en sus de l'effet de l'hypertension artérielle et de l'hypertrophie ventriculaire. Le lien de causalité avec la prise du Médiator lui semble plausible. Cette prise du Médiator a été adjointe à une hypertension artérielle et à une hypertrophie ventriculaire gauche importante, facteurs de sclérose valvulaire avec l'âge. Il n'y avait pas d'état antérieur connu. Cette prise de Médiator a été au moins, aux yeux de l'expert, génératrice d'une aggravation de risque. Les données actuelles de la science laissent penser qu'après deux ans d'arrêt du produit, le risque de complication valvulaire devient très faible, étant cependant observé que le risque évolutif est mal connu. Dans ses explications, le docteur A... (lire A...) a précisé que, l'atteinte valvulaire de Mme Y... étant indétectable à l'examen clinique, elle pouvait très bien préexister sans avoir été dépistée. Au jour de l'expertise (21 janvier 2012), les fuites constatées étaient moins importantes que lors des précédents examens de 2011. Sur dires des parties, et dans un additif au rapport daté du 28 juin 2012, le docteur A... (lire A...) a maintenu son appréciation du caractère plausible de la causalité avec le Médiator, mais a précisé qu'il ne retenait pas d'imputabilité directe et certaine. Le collège d'expert désigné par l'ONIAM dans le cadre de l'instruction de la demande de Mme Y... a émis le 24 mars 2015 l'avis suivant, rendu contradictoirement à l'égard des Laboratoires Servier. Les pathologies rapportées sont les suivantes : une cardiomyopathie hypertensive et hypertrophique, une insuffisance mitrale grade ¿, une insuffisance mitrale aortique grade ¿. La cardiomyopathie hypertensive et hypertrophique présentée par Mme Y... ne correspond pas à une forme d'atteinte cardiaque décrite par la littérature scientifique comme étant liée à une origine toxique ou médicamenteuse en général et à la prise de benfluorex en particulier. Le collège considère également, au vu des pièces médicales produites, que l'insuffisance valvulaire mitrale décrite, qui apparait dans un contexte de cardiopathie hypertensive et hypertrophique, et qui n'est accompagnée d'aucune anomalie morphologique évocatrice d'une atteinte médicamenteuse, ne présente pas les caractéristiques admises par la littérature scientifique comme déterminant une origine toxique ou médicamenteuse en général et à la prise du benfluorex en particulier. En revanche, s'agissant de l'insuffisance aortique, le collège d'experts considère que, compte tenu de la chronologie d'apparition de l'atteinte par rapport à la prise de benfluorex et de la description échographique de la valve aortique, qui met en évidence « un épaississement discret », et en l'absence d'autres causes possibles, seule l'origine médicamenteuse peut être retenue pour expliquer cette atteinte. La cour ne peut qu'observer la convergence entre les appréciations du docteur A... (lire A...), qui conclut à une causalité plausible (sur l'échelle de l'AFSSAPS, allant de paraissant exclue, douteuse, plausible, vraisemblable, très vraisemblable) et du collège d'experts, en faveur d'une imputabilité de l'insuffisance aortique à la prise de Médiator, fondée sur la chronologie de la découverte de cette pathologie par rapport à l'ingestion prouvée de Médiator, et l'aspect échographique de la valve aortique. Il doit d'ailleurs être rappelé que les deux expertises ont été réalisées à près de trois ans d'intervalle, la seconde l'étant alors que les connaissances sur les effets nocifs du Médiator avaient progressé, à tel point que le réexamen de certaines demandes écartées initialement a été ordonné par le législateur. Elle relève également qu'aucune hypothèse faisant appel à une cause étrangère n'a été formulée, et que, même si la pathologie présentée ne peut, selon le docteur A... (lire A...), avoir de retentissement fonctionnel, aucun élément ne permet de considérer qu'elle est antérieure au traitement par Médiator, alors pourtant que Mme Y... était suivie pour hypertension artérielle depuis au moins 2006. Le tribunal a donc justement retenu que cet ensemble d'éléments constituait des présomptions graves, précises et concordantes suffisantes pour constituer la preuve d'un lien de causalité entre l'exposition de Mme Y... au Médiator et l'insuffisance aortique qu'elle présente » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « pour mettre en jeu la responsabilité du producteur d'un médicament sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du code civil, le demandeur doit prouver le dommage, le défaut du médicament et le lien de causalité entre ce défaut et le dommage, ce qui implique de démontrer au préalable l'administration du médicament et la participation du médicament dans la survenance du dommage. Eu égard à la difficulté d'établir scientifiquement un lien de causalité, il est admis que la preuve de cette causalité peut être administrée par la réunion de présomptions suffisamment graves, précises et concordantes à condition d'une part, que le fait invoqué puisse au regard des données acquises de la science être matériellement une cause génératrice du dommage, d'autre part qu'il soit hautement probable que ce facteur a été à l'origine du dommage et enfin, que les autres causes possibles du dommage aient pu être circonscrites ou exclues. S'agissant de la preuve de l'administration du médicament, la réalité du traitement par Médiator de Mme Y... ne fait pas l'objet de discussions, seule la durée de ce traitement étant contestée. L'expert indique que le Médiator lui a été prescrit à partir d'au moins 2006 à raison de 3 comprimés par jour, la première ordonnance communiquée étant datée du 9 février 2006 et que la délivrance du médicament est attestée pour la période du 27 octobre 2006 au 17 octobre 2009 par la pharmacie et pour la période du 27 novembre 2007 au 17 octobre 2009 par la CPAM. Dans la mesure où l'attestation du docteur C..., qui fait état d'un début de traitement à partir de 2004, n'est pas étayée par d'autres éléments objectifs, en particulier le dossier médical de sa patiente qu'il n'a pas communiqué à l'expert, il sera retenu que le traitement par Médiator est établi du 9 février 2006 au 17 octobre 2009.Il ressort du rapport du docteur A... que Mme Y..., âgée de 63 ans au moment de l'expertise, présente une hypertension artérielle ancienne qui est traitée, une hypertrophie ventriculaire gauche notable, une dyslipémie traitée par une statine, une insuffisance aortique minime 0,5/4 sans retentissement ventriculaire et une insuffisance mitrale très minime, l'expert précisant que cette double valvulopathie aortique et mitrale qui a été découverte en janvier 2011, est moins sévère au jour de l'expertise que lors des électrocardiogrammes réalisés en janvier et juillet 2011. Sans pouvoir affirmer, faute d'avoir eu communication du dossier médical de Mme Y..., que ces lésions n'existaient pas avant la prise de Médiator, l'expert retient néanmoins que le lien de causalité entre la prise de Médiator et la double valvulopathie que présente Mme Y... est plausible ; qu'en effet, l'exposition au Médiator peut chez certains patients, plus souvent des femmes, entrainer la constitution de lésion valvulaires d'allure fibreuse, non inflammatoires, non sténosantes, mais restrictives ; que des études scientifiques ont montré que ces lésions étaient analogues à celles décrites par les anorexigènes et le pergolide et qu'elles auraient, ainsi que le montre l'étude Triboulloy C et coll de 2011, la même physiopathologie impliquant l'action de la norfenfluramine, métabolite du benfluorex, sur les récepteurs sérotoninergiques 5-HT2b qui sont fortement exprimés sur les valves cardiaques. Par ailleurs, l'expert conclut que cette pathologie qui est en lien plausible avec le Médiator a été adjointe aux facteurs de sclérose valvulaire présentés par Mme Y..., à savoir une hypertension artérielle et une hypertrophie ventriculaire gauche, et qu'en l'absence d'état antérieur connu, il peut être considéré que cette pathologie a été, au minimum, additive à l'état antérieur et génératrice d'une aggravation de risque. Les Laboratoires Servier soutiennent que l'imputabilité des troubles de Mme Y... au médicament ne peut être établie, même par des présomptions graves, précises et concordantes, dans la mesure où l'ignorance de l'état antérieur de Mme Y... ne permet pas d'exclure que sa valvulopathie ait préexisté au traitement, que les lésions observées ne sont pas évocatrices de valvulopathie médicamenteuse et qu'il existe d'autres causes possibles. Il est exact que l'expert n'exclut pas de façon formelle que l'atteinte valvulaire pouvait exister avant le traitement, celle-ci ne pouvant être détectée par un simple examen clinique, néanmoins il convient de constater que des examens cardiaques réalisés en 1967 et 1970 n'ont révélé aucune anomalie et que c'est seulement après avoir reçu le courrier de l'AFSSAPS que Mme Y... a fait pratiquer les examens qui ont révélé sa pathologie, ce qui permet de penser qu'elle ne souffrait pas auparavant de pathologie cardiaque qui aurait nécessité des échographies cardiaques régulières. Par ailleurs, les conclusions du docteur A..., émises au vu de ses constatations et des examens pratiqués, en particulier l'échocardiogramme, sont clairement en faveur d'une valvulopathie d'origine médicamenteuse ; qu'en réponse au dire de la société Servier, l'expert a confirmé que les signes échographiques chez Mme Y... étaient caractéristiques de l'effet du Médiator au niveau de la valve aortique ; que l'expert précise que ces anomalies sont « en sus » de l'effet de l'hypertension artérielle et de l'hypertrophie ventriculaire, ce qui signifie qu'elles ne sont pas imputables aux autres pathologies cardiaques de Mme Y.... De même, ces anomalies ne peuvent être la conséquence d'un éventuel état antérieur, l'expert considérant que dans l'hypothèse de la préexistence de lésions valvulaires, la pathologie en lien avec l'exposition au Médiator est au minimum additive à l'état antérieur. Les conclusions du docteur A... sont confortées par le collège d'experts D..., dont le rapport en date du 17 février 2015 est versé au débat ; en effet, au vu des pièces qui leur ont été fournies, le collège d'experts considère que, compte tenu de la chronologie d'apparition, de la description anatomique et, en l'absence d'autres causes possibles, seule l'origine médicamenteuse peut être retenue pour expliquer l'insuffisance aortique de Mme Y.... En revanche, le même collège conclut que n'étant accompagnée d'aucune anomalie morphologique évocatrice d'une atteinte médicamenteuse, l'insuffisance valvulaire mitrale n'est pas imputable au benfluorex ; que cette dernière conclusion n'est pas contradictoire avec les conclusions de l'expert judiciaire, puisque ce dernier indique que lors de l'échocardiogramme qu'il a réalisé, il n'a pas constaté de fusion commissurale ou d'aspect restrictif au niveau de la valvule mitrale, alors que toujours selon cet expert, en échographie l'aspect restrictif caractéristique de l'effet du Médiator s'observe surtout au niveau de la valvule mitrale. Ainsi, il est établi que Mme Y... souffre d'une double valvulopathie aortique et mitrale de faible importance, pour laquelle l'expert qui l'a examinée a retenu qu'elle était en lien de causalité plausible avec son exposition au Médiator ; que si l'insuffisance valvulaire mitrale ne peut être imputée au benfluorex, en revanche l'insuffisance valvulaire aortique présente des aspects caractéristiques des lésions d'origine médicamenteuse qui ne peuvent être imputées ni à un état éventuel antérieur, ni aux autres pathologies cardiaques de Mme Y..., l'expert judiciaire considérant que la pathologie en lien avec le Médiator est au minimum additive à un éventuel état antérieur et aux autres facteurs de sclérose valvulaire présentés par Mme Y... ; qu'il peut également être constaté que la régression des fuites valvulaires constatée par l'expert est compatible avec les effets de l'arrêt du traitement par Médiator mais qu'une telle régression est inhabituelle pour les fuites liées au vieillissement, ce qui permet d'écarter le facteur de l'âge. Compte tenu des conclusions de l'expert qui sont confortées par les conclusions du collège d'experts benfluorex, du fait que les lésions valvulaires présentées par Mme Y... présentent des aspects caractéristiques de l'exposition au benfluorex et dans la mesure où l'expertise n'a pas permis de mettre en évidence d'autre facteur causal autonome, il existe des présomptions graves, précises et concordantes de la présence d'un lien direct et certain entre la prise de Médiator pendant plusieurs années par Mme Y... et sa valvulopathie aortique » ;

1°/ ALORS QUE si en matière de produits de santé, il est permis au demandeur, en l'absence de certitude scientifique, de rapporter la preuve de l'imputabilité du dommage à l'administration du produit par de simples présomptions de fait, celles-ci ne peuvent être retenues par les juges du fond qu'à la condition d'être graves, précises et concordantes ; que de telles présomptions ne peuvent être réunies qu'à la condition que le produit incriminé puisse être une cause génératrice du dommage, qu'il soit hautement probable qu'il ait été à l'origine de celui-ci et que les autres causes possibles du dommages soient exclues ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont eux-mêmes constaté que « l'atteinte valvulaire de Mme Y... étant indétectable à l'examen clinique, elle pouvait très bien préexister sans avoir été dépistée », que « son dossier médical n'a(vait) pas été communiqué » et que l'expert judiciaire avait précisé que le lien de causalité entre cette atteinte et la prise du Médiator lui semblait seulement « plausible », excluant toute « imputabilité directe et certaine » ; qu'en décidant néanmoins qu'il existait des présomptions graves, précises et concordantes suffisantes pour constituer la preuve d'un lien de causalité entre l'exposition de Mme Y... au Médiator et l'insuffisance aortique qu'elle présentait, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé les articles 1386-9 et 1353 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a d'un côté expressément retenu qu' « a été constatée le jour de l'expertise une insuffisance aortique minime, de grade évalué à 0,5/4, sans retentissement ventriculaire », tout en se déterminant néanmoins d'un autre côté au regard des appréciations du collège d'experts I... , lequel avait pourtant rendu son avis au regard des pathologies rapportées par Mme Y..., et notamment d'« une insuffisance mitrale aortique grade 1/4 », et non de grade 0,5/4 comme indiqué le jour de l'expertise et constaté par la cour d'appel elle-même ; qu'en se fondant ainsi sur les appréciations du collège d'experts I... pour décider que l'insuffisance aortique de Mme Y... serait une lésion imputable au Médiator, cependant que ces appréciations, reposant sur le postulat erroné d'une insuffisance de grade 1/4, étaient en contradiction directe avec les constatations de l'arrêt fixant à 0,5/4 le grade de l'insuffisance mitrale aortique de Mme Y..., la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ ALORS QUE la société Les Laboratoires Servier faisait valoir dans ses conclusions d'appel que l'atteinte valvulaire de Mme Y... ne présentait aucune des deux caractéristiques échocardiographiques permettant d'identifier une origine médicamenteuse des lésions, à savoir la restriction et le grade de la fuite ; qu'elle soutenait ainsi que « l'examen échocardiographique contradictoire réalisé le jour de l'expertise a permis les constatations suivantes : les sigmoïdes aortiques sont décrites comme seulement « légèrement épaissies de manière diffuse », sans mouvement de restriction décrit ; la valve mitrale est décrite comme de « morphologie normale », sans anomalie restrictive. Aux termes de l'additif au rapport, l'expert indique sur ce point : « la présence d'une composante restrictive serait en faveur d'une imputabilité. Son absence ne permet pas de faire la différence avec des atteintes banales observées chez des hypertendus de cet âge » (...). Il n'y a donc chez Mme Y... rien de spécifique » et ce d'autant que les fuites aortiques présentées par cette dernière sont minimes, étant de grade 0,5/4 (conclusions, p. 36 et 37) ; qu'en affirmant qu'il existait une « causalité plausible » en faveur d'une imputabilité de l'insuffisance aortique à la prise de Médiator, compte tenu de la chronologie de la découverte de cette pathologie et de la description échographique de la valve aortique, qui ne permettait pourtant pas de constater le moindre mouvement de restriction, sans répondre au moyen déterminant de la société exposante, qui mettait en exergue le fait que cette insuffisance aortique ne pouvait se distinguer d'une atteinte banale non médicamenteuse, faute d'être restrictive et compte tenu de son grade minime, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la responsabilité de la société Les laboratoires Servier est engagée à l'égard de Mme Esther Y... du fait de la défectuosité du Médiator pendant la période d'administration du médicament et condamné la société Les Laboratoires Servier à verser à Mme esther Y... en réparation de ses préjudices corporels, provisions non déduites, les sommes suivantes : 3.000 euros au titre des souffrances endurées, 1.350 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et 3.300 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur le caractère défectueux du Médiator : le Médiator, ayant pour indication initiale le traitement des hypertriglycéridémie et diabète de type 2, mais étant de fait prescrit dans un but d'amaigrissement, a été commercialisé par la société Les Laboratoires Servier en France à partir de 1976, après autorisation de mise sur le marché (AMM) en 1974. Ce médicament a fait l'objet d'une décision de suspension d'AMM en novembre 2009, puis de retrait en juin 2010, en raison de sa toxicité cardio-vasculaire, caractérisée par un risque d'hypertension artérielle et pulmonaire et de valvulopathies, et de son efficacité modeste dans la prise en charge du diabète de type 2. L'AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) a invité en décembre 2010 tous les patients traités par Médiator, recensés par les données des CPAM, à consulter, en raison notamment d'un risque de mauvais fonctionnement des valves cardiaques. Le principe actif du Médiator est le benfluorex, lequel a pour métabolite la norfenfluramine, laquelle stimule certains récepteurs de sérotonine, ce qui induit une prolifération de fibroblastes et de collagène, et provoque ainsi des remaniements valvulaires dominés par des aspects de fibrose, avec épaississement et rigidité valvulaire, responsables de régurgitations de type restrictif. Cette donnée scientifique n'est pas remise en cause par le Laboratoire Servier, non plus que le fait que la norfenfluramine crée un risque de valvulopathie. Plusieurs études récentes (Tribouilloy notamment) ont confirmé le rôle du benfluorex dans la survenance de valvulopathies inexpliquées. Il est constant que ce risque n'a jamais été mentionné dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP) publié par L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM, ex-AFSSAPS), et reproduit au dictionnaire Vidal jusqu'au retrait de l'AZMM. Le législateur a créé un mécanisme d'indemnisation amiable des personnes traitées par benfluorex, et Les Laboratoires Servier, dans des déclarations publiques, se sont engagés, par la voix d'un de leurs avocats, à indemniser toutes les victimes. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que le Médiator est un produit défectueux, comme n'offrant pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, en ce que, d'une part les risques afférents à son utilisation dépassent son intérêt thérapeutique, et, d'autre part, ces mêmes risques n'ont pas été portés à la connaissance ni des médecins ni des patients. Sur l'exonération de responsabilité au titre du risque de développement : l'article 1386-11 du code civil dispose que le producteur est responsable de plein droit à moins qu'il ne prouve que l'état des connaissances scientifiques et techniques au moment où il a mis le produit en circulation n'a pas permis de déceler ce défaut. La connaissance personnelle qu'ont pu avoir, ou non, les Laboratoires Servier du défaut lors de la mise en circulation du médicament administré à Mme Y... est donc indifférente. Il doit seulement être recherché si les données scientifiques disponibles entre 2004 et 2009, période d'exposition de Mme Y..., permettaient aux Laboratoires de déceler le défaut. Sur ce point, les Laboratoires Servier font valoir que ce n'est que l'addition de tous les éléments recueillis entre 1995 et 2009 qui a permis d'identifier le risque, qui demeurait encore sujet à controverse après 2009. Il doit cependant être relevé que les Laboratoires Servier savaient, au moins depuis 1993, que le benfluorex se métabolise en norfenfluramine (étude Gordon 1993). L'usage du benfluorex dans les préparations magistrales a été interdit en France dès 1995, en tant qu'anorexigène. Deux autres médicaments également produits par les Laboratoires Servier, et contenant ce même métabolite, l'Isoléride et le Pondéral, médicaments anorexigènes, ont été retirés du marché français en 1997 à la suite de la démonstration en 1995 (rapport IGAS), d'une augmentation du risque d'hypertension artérielle (HTAP). Aux Etats-Unis cependant, ce retrait a fait suite à la démonstration plus tardive d'une augmentation du risque de valvulopathie, non rapporté auparavant. La présence du métabolite commun avec le benfluorex (la norfenfluramine) ne permettait ainsi pas d'exclure, même à l'époque, que cette molécule, malgré les différences de classe thérapeutique et de mécanisme d'action principal, pût être à l'origine de risques de lésions cardiovasculaires analogues à celles détectées pour les anorexigènes en 1997, et ce même si les mécanismes pharmacologiques susceptibles d'induire de tels effets indésirables n'ont été élucidés que dans le courant des années 2000 (synthèse établie par le docteur E..., produite par le Laboratoire lui-même). En 1998, le retrait du médicament commercialisé en Suisse sous le nom de Médiaxal, décidé à l'initiative des Laboratoires Servier, est intervenu peu après que l'autorité de contrôle du médicament dans ce pays a mis l'accent sur le fait que le principe actif de cette molécule était incriminé dans les hypertensions artérielles et le développement des valvulopathies induites par les anorexigènes. Dès 2000, une étude dite F... a mis en évidence le rôle de récepteurs de sérotonine activés par la norfenfluramine dans la constitution de lésions conduisant à une valvulopathie. Cette suspicion a conduit à la mise sous surveillance du Médiator dans d'autres pays européens et, à la suite d'alertes en Espagne et en Italie en 2003 pour sa possible implication dans le développement de valvulopathies cardiaques, les Laboratoires Servier ont retiré du marché dans ces pays le benfluorex, commercialisé en Espagne sous le nom de Modulator. Le fait, mis en avant par les Laboratoires Servier, que le benfluorex ait des propriétés pharmacologiques différentes de celles de l'Isoméride et du Pondéral et soit dépourvu d'effet anorexigène significatif n'est donc pas pertinent, puisque, selon plusieurs études et notamment une étude italienne réalisée dès octobre 1999 à la demande de l'Agence européenne du médicament, trois comprimés de Médiator conduisent à produire autant de norfenfluramine que deux comprimés d'Isoméride (posologies quotidiennes pour ces deux médicaments). Cette étude souligne la similitude entre l'Isoméride et le benfluorex et formule l'hypothèse que les patients traités au benfluorex sont exposés à un niveau potentiellement toxique de norfenfluramine. De fait, un mésusage du Médiator, consistant à exploiter ses propriétés anorexigènes, a été signalé à la commission de pharmacovigilance à plusieurs reprises à partir de 1998, ce qui confirme encore, s'il en était besoin, l'extrême similitude des propriétés du Médiator avec d'autres médicaments jugés dangereux en 1997. Il est donc établi qu'au plus tard en 1997 existaient des données scientifiques concordantes sur les effets nocifs du Médiator qui auraient dû conduire les Laboratoires Servier à des investigations sur la réalité du risque signalé et, à tout le moins, à en informer les médecins et les patients, ce qui n'a pas été le cas en France, alors que les Laboratoires Servier ont préféré retirer le benfluorex dans des pays où les mêmes suspicions ont été exprimées. Il est vrai, ainsi que le rappellent justement les Laboratoires Servier, que les comptes-rendus de réunions de la commission nationale de pharmacovigilance dépendant de l'AFSSAPS montrent que, bien qu'alertée depuis 1999 par des experts italiens et plusieurs cas d'HTAP, puis un de valvulopathie, cette autorité s'est bornée à lui demander des investigations, à partir desquelles elle a, d'une part, décidé de ne pas modifier le RCP du Médiator et s'est, d'autre part, abstenue de toute mesure plus énergique. Les Laboratoires Servier ne peuvent cependant s'exonérer de leur responsabilité pour ce motif. La Cour administrative d'appel de Paris a, par plusieurs arrêts rendus le 31 juillet 2015, retenu de ce chef la responsabilité de l'Etat, aux motifs notamment qu'à la fin de l'année 1998, et en tout cas en juillet 1999, les autorités sanitaires disposaient de nouveaux éléments d'information dont il y avait lieu de tenir compte, qui sont, pour l'essentiel, ceux qui viennent d'être cités, et qui auraient dû déterminer une intervention de l'AAFSSAPS, puisqu'à cette date, en effet, le déséquilibre entre les risques, majeurs, tenant à l'utilisation du Médiator et l'intérêt que celle-ci pouvait présenter pour la santé publique était suffisamment manifeste pour que l'abstention de prendre les mesures adaptées, qui ne pouvaient être que la suspension ou le retrait de l'autorisation de mise sur le marché du Médiator, auxquels il n'a été finalement procédé respectivement qu'en 2009 et 2010, doive être regardée comme une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Néanmoins, la faute ainsi reconnue d'une autorité publique dans l'exercice d'une mission de santé publique ne saurait avoir pour effet d'exclure ou de diminuer la responsabilité première des Laboratoires Servier soumis à ce contrôle en leur qualité de producteur de médicaments, et leur obligation de réparer les préjudices ainsi causés. Il doit par ailleurs être observé, ainsi que le retient la Cour administrative d'appel de Paris, que l'indemnisation des victimes par l'Etat dans le cadre de la mise en oeuvre de sa responsabilité aurait pour effet de le subroger dans leurs droits à l'égard des Laboratoires Servier, qui n'en seraient pas moins tenus de réparer intégralement les conséquences des défauts de leur produit. Le jugement sera ainsi confirmé en ce que l'exonération au titre du risque de développement n'a pas été retenue au profit des Laboratoires Servier » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur le défaut du médicament : selon l'article 1386-4 du code civil, un produit est défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre compte tenu de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation. Il revient donc à Mme Y... d'établir qu'au moment où il lui a été administré, le Médiator présentait un défaut de nature à présenter un danger pour les personnes et de démontrer, qu'au regard des données scientifiques de l'époque et du rapport bénéfice-risque qui en était attendu, ce médicament n'offrait pas la sécurité à laquelle elle pouvait légitimement s'attendre compte tenu notamment de l'information figurant sur la notice d'accompagnement. Le médiator, qui a été commercialisé en France par les laboratoires Servier à partir de 1976, a fait l'objet d'une décision de suspension d'autorisation de mise sur le marché (AMM) en novembre 2009, puis de retrait en juin 2010 en raison de sa toxicité cardiovasculaire caractérisée par un risque d'hypertension artério-pulmonaire (HTAP) et de valvulopathies, la démonstration étant aujourd'hui faite que cette toxicité est liée à la présence de norfenfluramine qui est l'un des principaux métabolites du benflurorex, principe actif du Médiator. Il ressort des pièces versées au débat que le benfluorex est pharmacologiquement associé à la famille des fenfluramines et que malgré les propriétés anorexigènes des fenfluramines, seules les propriétés sur les métabolismes glucidiques et lipidiques ont fait l'objet de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) du Médiator. Les Laboratoires Servier ont par ailleurs commercialisé en France comme anorexigènes deux autres médicaments de la famille des fenfluramines, le Pondéral (fenfluramine) en 1966 et l'Isoméride (dexfenfluramine) en 1985. A partir des années 1980, les fenfluramines ont été progressivement suspectées dans l'apparition de cas d'HTAP et de valvulopathies cardiaques et en 1995, l'étude pharmaco-épidémiologique internationale IPPHS a conclu à l'existence d'un risque d'HTAP lié à l'usage d'anorexigènes en général et de fenfluramines en particulier, ce qui a amené la Direction générale de la santé à interdire l'ensemble des anoxérigènes, y compris le benfluorex, dans l'exécution et la délivrance des préparations magistrales, étant précisé que le benfluorex n'a pas été concerné par les restrictions d'indications émises en 1994 et 1995 par la Commission nationale de pharmacovigilance (CNPV). La mise en évidence des effets indésirables graves à type HTAP puis de valvulopathies a conduit l'Agence du médicament à suspendre, le 15 septembre 1997, l'AMM de la dexfenfluramine (Isoméride) et de la fenfluramine (Pondéral), ces médicaments ayant cessé ensuite d'être commercialisés. S'agissant du benfluorex, une étude interne des Laboratoires Servier portant sur l'analyse des différents métabolites du Médiator (Pharmacokinetics of the metabolites of benfluorex – 8 septembre 1993) a mis en évidence la présence de norfenfluramine, ce qui, selon les écritures des Laboratoires Servier, a toujours été une information disponible et connue. Or, la cardiotoxicité de la norfenfluramine était fortement suspectée dès 1995 sans que les mécanismes de la norfenfluramine sur les valves cardiaques ne soient explicités. L'étude publiée par Richard F... et coll. En 2000 a démontré le mécanisme d'implication de la fenfluramine et de son principal métabolite, la norfenfluramine, dans l'apparition de valvulopathies cardiaques, les auteurs de cette étude invitant à reconsidérer la sécurité de l'emploi de tous les médicaments contenant des principes actifs ou des métabolites susceptibles d'avoir une implication dans le mécanisme pathogène décrit, en particulier les médicaments se métabolisant en norfenfluramine. La cardiotoxicité de la norfenfluramine a été confirmée par des études in vivo menées sur des rats de laboratoire et dont les résultats ont été publiés en 2007 (European Heart Journal, 28, 2156-62, In vivo mode of drag induced valvular heart disease in rats) et 2009 (Droogman5, Cyproheptadine prevents Pergacle-Induced valvulopathy in rats ; an echographic and hystological study ; AM. J. G... 200). Il ressort des éléments produits au débat que c'est en raison de sa parenté chimique avec les fenfluramines et de la présence de norfenfluramine, métabolite commun aux fenfluramines, que dès 1995, le benfluorex a fait l'objet d'une enquête de pharmacovigilance confiée au CRPV de Besançon. S'il est exact que jusqu'à la réévaluation du benfluorex par l'AFSSAPS, la Commission nationale de pharmacovigilance a estimé que le nombre de cas d'HTAP et de valvulopathies rapportés par cette enquête de pharmacovigilance n'était pas suffisant pour constituer un signal significatif de toxicité du Médiator, néanmoins le rapport de l'IGAS qui pointe les graves défaillances du système de pharmacovigilance, conclut que les éléments recueillis par les autorités de santé entre 1995 et 2005 auraient dû conduire à une évaluation défavorable de la balance bénéfice-risque du Médiator, notamment les rapports italiens très documentés sur la toxicité de la norfenfluramine, le signalement le 3 octobre 2003 d'un cas de valvulopathie cardiaque par l'agence du médicament espagnole, et les cas signalés en France : alerte de trois médecins conseil nationaux de l'assurance maladie entre 1997 et 1998, la notification au CRPV de Marseille le 10 février 1999 d'un cas de valvulopathie aortique et un cas d'HTAP notifié en juin 1999. Il ressort du compte-rendu établi en octobre 2009 qu'après examen des résultats réactualisés de l'enquête du CRPV de Besançon, la CNPV a maintenu sa position et que finalement, après avoir procédé à l'examen de nouvelles données, notamment les résultats de l'étude du CHU de Brest et de l'étude Regulate réalisée par Les Laboratoires Servier, ces résultats étant confirmés par une troisième étude menée par la CNAMTS, et avoir réévalué défavorablement la balance bénéfice-risque, l'AFSSAPS a décidé de suspendre l'AMM des spécialités contenant du benfluorex, visant ainsi explicitement le Médiator, et à les retirer du marché à compter du 30 novembre 2009. Au vu de l'ensemble des éléments, il est établi que le benfluorex fait partie de la famille des fenfluramines et que comme les autres fenfluramines ou dérivés de fenfluramines commercialisés par Les Laboratoires Servier (Isoméride, Pondéral), il se métabolise en norfenfluramine. Par ailleurs, il ressort des études et publications scientifiques qu'au moins depuis 1995, la norfenfluramine est suspectée d'être responsable des risques cardiovasculaires liés à l'usage des fenfluramines, ce qui a été confirmé par l'étude F... de 2000 qui a démontré le mécanisme d'implication de la fenfluramine et de son principal métabolite, la norfenfluramine, dans l'apparition de valvulopathies cardiaques. S'il est exact que jusqu'à la veille du retrait du médiator, les autorités de santé ont considéré que le benfluorex ne présentait pas de risque cardiotoxique compte tenu du faible nombre de cas d'HTAP et de valvulopathies associés à l'usage de benfluorex, néanmoins la parenté chimique du benfluorex avec les autres fenfluramines commercialisées par Les Laboratoires Servier, les publications scientifiques sur la toxicité de la norfenfluramine, dont la présence en tant que métabolite du benfluorex était connue au moins depuis 1993, le signalement des cas d'HTAP et de valvulopathie associés au benfluorex, même s'ils étaient peu nombreux, auraient dû conduire ces autorités de santé à reconsidérer la balance bénéfice-risque du benfluorex dans un sens défavorable ou au moins, à s'assurer que les risque cardiotoxiques liés à la norfenfluramine étaient mentionnés dans l'information destinée aux professionnels de la santé et aux patients, en particulier qu'ils figuraient sur la notice d'utilisation du Médiator. Or, jusqu'en 2009, date du retrait tardif du Médiator, les informations sur les effets indésirables et les précautions d'emploi du Médiator ne faisaient pas mention des risques d'apparition d'une HTAP et d'une valvulopathie. Il est donc démontré qu'entre 2006 et 2009, période pendant laquelle il a été administré à Mme Y..., le Médiator présentait un défaut en ce que ses effets cardio-toxiques liés à la présence de norfenfluramine étaient avérés et en ce que, au regard des données scientifiques de l'époque et du rapport bénéfice-risque qui en était attendu, ce médicament n'offrait pas la sécurité à laquelle elle pouvait légitimement s'attendre compte tenu notamment de l'absence d'information figurant sur la notice d'utilisation quant au risque d'HTAP et de valvulopathie. Dans la mesure où la valvulopathie aortique présentée par Mme Y... a un lien direct et certain avec les effets cardio-toxiques du Médiator, il est également établi le lien de causalité entre son dommage et le défaut du médicament. Compte tenu des développements précédents, il apparait que les Laboratoires Servier ne peuvent invoquer un risque de développement pour s'exonérer de leur responsabilité ; qu'en effet, malgré les divergences au sein de la communauté scientifique et la discordance des résultats de certaines études, notamment celles diligentées à la demande des Laboratoires Servier, il apparait que la publication des études internationales qui ont progressivement mis en évidence les effets toxiques du benfluorex et la confirmation de ces études avec le signalement de cas d'HTAP et de valvulopathies associés à l'usage de benfluorex, initialement peu nombreux mais en constante augmentation ensuite, permettent de considérer qu'entre 2006 et 2009, période pendant laquelle le Médiator a été administré à Mme Y..., l'état des connaissances scientifiques ne permettait pas d'ignorer les risques d'HTAP et de valvulopathies induits par le benfluorex et qu'en tout état de cause, dans la mesure où elle était sérieusement documentée, la seule suspicion de ces risques obligeait le laboratoire producteur à en informer les patients et les professionnels de santé, notamment en les mentionnant dans la notice d'utilisation du médicament. Par conséquent, la responsabilité des Laboratoires Servier est engagée vis-à-vis de Mme Y... en application des articles 1386-1 et suivants du code civil et ils seront tenus à l'indemnisation des préjudices qu'elle a subis du fait de son exposition au Médiator » ;

1°/ ALORS QUE le producteur peut s'exonérer de sa responsabilité s'il établit que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut ; que l'état des connaissances scientifiques et techniques devant être pris en compte pour apprécier cette cause d'exonération doit être directement relatif au produit incriminé et ne peut être exclusivement celui concernant un produit voisin, quand bien même il y aurait une parenté chimique entre eux ; qu'en l'espèce, les juges du fond se sont bornés à relever que les connaissances scientifiques et techniques existant en 1997 permettaient d'établir la cardiotoxicité des fenfluramines et de leur métabolite, la norfenfluramine ; qu'ils n'ont pas en revanche constaté que l'état des connaissances scientifiques et techniques relatif au benfluorex lui-même permettait à l'époque de parvenir à une conclusion similaire ; qu'en se prononçant ainsi au regard du seul état des connaissances relatif à des substances ayant certes une parenté chimique et un métabolite commun avec le benfluorex (Médiator) mais restant pourtant bien distinctes de celui-ci, pour en déduire de façon péremptoire qu' « au plus tard en 1997 existaient des données scientifiques concordantes sur les effets nocifs du Médiator » en raison de « l'extrême similitude des propriétés du Médiator avec d'autres médicaments jugés dangereux dès 1997 », la cour d'appel a violé l'article 1386-11 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ ALORS QUE la société Les Laboratoires Servier faisait valoir que le compte rendu de la réunion du CTPV du 17 décembre 1998, constituant la cote D221/72 du dossier pénal, pièce couverte par le secret de l'instruction qui ne pouvait être produite, soulignait que si la fenfluramine et le benfluorex avait tous deux pour métabolite la norfenfluramine, celle-ci ne représentait qu'un taux circulant de 5% pour le benfluorex contre 30 % pour la fenfluramine, se traduisant par 7% de norfenfluramine dans les urines pour la fenfluramine contre 2% pour le benfluorex, ce qui conduisait à la conclusion qu'il était improbable que le benfluorex induise les mêmes effets que la fenfluramine (conclusions, p. 48) ; qu'en relevant que selon une étude italienne réalisée en 1999, trois comprimés de Médiator conduisent à produire autant de norfenfluramine que deux comprimés d'Isoméride (fenfluramine), sans répondre aux conclusions de la société exposante qui montraient qu'en tout état de cause, le taux circulant de norfenfluramine était sans commune mesure pour les deux médicaments, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour Mme Y....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif – de ce chef – attaqué de limiter à la somme de 3 300 euros la condamnation de la société Les Laboratoires Servier en réparation du déficit fonctionnel permanent subi par Mme Y... ;

AUX MOTIFS QU'il est ici constitué d'un part par la contribution de l'insuffisance aortique à l'essoufflement déploré par Mme Y... et d'autre part par l'anxiété d'une éventuelle aggravation en raison de l'incertitude subsistante sur l'évolution future des lésions causées par le Médiator et par la nécessité de se soumettre à des examens cardiaques réguliers ; qu'au regard de l'âge de Mme Y... lors de la consolidation, soit 63 ans, et du taux justement retenu de 3%, le point d'indice doit être fixé à 1 100 euros et ce poste de préjudice sera fixé à 3 300 euros (arrêt attaqué, p. 12) ;

ALORS QUE dans le dispositif de ses conclusions d'appel, la société Les Laboratoires Servier concluait, dans l'hypothèse où sa responsabilité serait retenue, à la confirmation du jugement sur le montant des indemnisations ; qu'en infirmant le jugement qui avait alloué à Mme Y... au titre du déficit fonctionnel permanent la somme de 5 400 euros pour lui allouer une indemnité moindre, la cour d'appel a méconnu les articles 4, 5 et 954, alinéa 2, du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 16-19643
Date de la décision : 20/09/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

RESPONSABILITE DU FAIT DES PRODUITS DEFECTUEUX - Producteur - Responsabilité - Exonération - Risque de développement - Exclusion - Cas

RESPONSABILITE DU FAIT DES PRODUITS DEFECTUEUX - Produit - Mise en circulation - Moment - Détermination

Le producteur est responsable de plein droit du dommage causé par le défaut de son produit à moins qu'il ne prouve, selon le 4° de l'article 1386-11, devenu 1245-10 du code civil, que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut à la date de mise en circulation du produit qui a causé le dommage s'entend, dans le cas de produits fabriqués en série, de la date de commercialisation du lot dont il faisait partie. Une cour d'appel dont il résulte des énonciations que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment de la mise en circulation des produits administrés, permettait de déceler l'existence du défaut d'un produit, en a exactement déduit que le producteur n'était pas fondé à une invoquer une telle exonération de responsabilité


Références :

Sur le numéro 1 : ARTICLE 6, § 1, DE LA CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES

ARTICLE 4 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE

ARTICLE 1134 DU CODE CIVIL.
Sur le numéro 2 : article 1386-11, devenu 1245-10 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 14 avril 2016

N1 A RAPPROCHER :1RE CIV., 31 OCTOBRE 2012, POURVOI N° 11-26.476, BULL. 2012, I, N° 226 (REJET).N2 Sur l'exonération du producteur de sa responsabilité du fait des produits défectueux pour risque de développement, avant la transposition de la directive 85/374/CEE du Conseil, du 25 juillet 1985, à rapprocher :1re Civ., 15 mai 2007, pourvoi n° 05-10234, Bull. 2007, I, n° 185 (1) (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 sep. 2017, pourvoi n°16-19643, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.19643
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