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10/05/2016 | FRANCE | N°15NC00063

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 10 mai 2016, 15NC00063


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône à lui verser une somme de 186 664,60 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'intervention chirurgicale réalisée le 20 octobre 2004 afin de procéder à l'ablation d'un matériel d'ostéosynthèse.

Appelée en la cause, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Saône a demandé de condamner le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône à lui

verser une somme 50 090,92 euros au titre des débours exposés, ainsi que 1 015 euros ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône à lui verser une somme de 186 664,60 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'intervention chirurgicale réalisée le 20 octobre 2004 afin de procéder à l'ablation d'un matériel d'ostéosynthèse.

Appelée en la cause, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Saône a demandé de condamner le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône à lui verser une somme 50 090,92 euros au titre des débours exposés, ainsi que 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, avant de présenter des conclusions à fin de désistement.

L'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) a, pour sa part, demandé sa mise hors de cause.

Par un jugement n° 1301047 du 14 novembre 2014, le tribunal administratif de Besançon a mis hors de cause l'ONIAM, a donné acte du désistement de la CPAM de la Haute-Saône et a condamné le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône à verser la somme de 61 670 euros à M.B....

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 janvier 2015 et 16 février 2015, le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône, représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 14 novembre 2014 ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par M. B...devant ce tribunal ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'indemnisation accordée à M.B....

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'une contradiction dans ses motifs ;

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande ;

- c'est également à tort que la responsabilité de l'hôpital a été retenue ;

- les préjudices ont été évalués de façon excessive par les premiers juges.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2015, M. C...B..., représenté par MeA..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- à la réformation du jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a limité à 61 670 euros la somme que le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône a été condamné à lui verser en réparation des préjudices qu'il a subis ;

- à ce que cette somme soit portée à 186 666,48 euros ;

3°) à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;

- sa demande n'était pas tardive ;

- la faute commise par le chirurgien lors de l'intervention chirurgicale est de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier ;

- il apporte la preuve du lien de causalité entre la faute médicale commise et les dépenses de santé, d'un montant de 235,95 euros, qui sont demeurées à sa charge ;

- le tribunal administratif de Besançon a omis de statuer sur sa demande d'indemnisation des dépenses de santé futures ; ces dépenses s'élèvent à 153,81 euros ;

- il justifie de son recours à l'aide d'une tierce personne ; il sollicite une somme de 10 689,60 euros au titre de ce chef de préjudice ;

- il a subi une perte de gains professionnels actuels d'un montant de 1 097,12 euros ;

- il a été contraint de se réorienter professionnellement du fait des conséquences de l'acte médical fautif ; la perte de gains professionnels futurs ainsi que l'incidence professionnelle s'élèvent à 100 000 euros ;

- le préjudice qu'il a subi du fait de l'interruption de sa scolarité s'élève à 18 000 euros ;

- en addition de la somme de 1 170 euros fixée par les premiers juges au titre du déficit fonctionnel temporaire, il sollicite une somme de 4 500 euros au titre des souffrances endurées, de 6 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, de 36 800 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, de 5 520 euros au titre du préjudice d'agrément et de 2 500 euros au titre du préjudice esthétique.

Par des observations enregistrées le 13 mai 2015, l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, représenté par Me D...et MeF..., demande à être mis hors de cause, les conditions de mise en oeuvre de la solidarité nationale n'étant pas réunies.

Par un courrier enregistré le 23 février 2015, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône indique qu'elle n'entend pas intervenir dans l'instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fuchs,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...souffrait d'une fracture de l'humérus droit qui a été traitée par ostéosynthèse le 23 février 2004 au centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône ; que l'ablation du matériel d'ostéosynthèse a été réalisée dans ce même centre hospitalier, le 20 octobre 2004 ; que dans les suites de cette opération, M. B...a développé une paralysie du nerf radial qui, compte tenu de l'absence de récupération spontanée, a entraîné la réalisation de deux greffes les 14 mars 2005 et 16 juin 2006 ; qu'en dépit de ces interventions, l'intéressé n'a pas retrouvé le plein usage de son membre supérieur droit ; que le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône relève appel du jugement du 14 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Besançon l'a condamné à verser une somme de 61 670 euros à M. B... à raison des préjudices causés par l'opération du 20 octobre 2014 ; que, par la voie de l'appel incident, M. B...demande pour sa part que cette somme soit portée à 186 666,48 euros ;

Sur les conclusions de l'ONIAM tendant à sa mise hors de cause :

2. Considérant qu'en l'absence de toute conclusion recherchant la responsabilité de l'ONIAM, il y a lieu d'accueillir la demande de cet établissement tendant à ce qu'il soit mis hors de cause ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Besançon a expressément répondu à la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône tirée de la tardiveté de la demande de M. B... ; que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, ont implicitement écarté l'argument selon lequel le délai de recours contre la décision du 21 juillet 2005 de rejet de la demande indemnitaire préalable de M. B...avait expiré, en soulignant que la procédure s'était poursuivie à titre amiable devant l'ONIAM ; qu'en outre, les premiers juges n'étaient pas tenus à peine d'irrégularité de faire référence au raisonnement tenu par le Conseil d'Etat dans son avis contentieux du 7 août 2013, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier ; que, par suite, le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité pour ce motif ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de la contradiction des motifs du jugement, qui est susceptible d'affecter le bien-fondé de la décision juridictionnelle, est en revanche sans incidence sur sa régularité ;

5. Considérant, en dernier lieu, que le tribunal administratif de Besançon a explicitement rejeté, au point 6 du jugement attaqué, les conclusions de M. B...tendant à l'indemnisation des frais de santé restés à sa charge tant en ce qui concerne les frais actuels que les frais futurs ; qu'ainsi, le jugement, qui n'est pas entaché d'une omission à statuer, n'est pas irrégulier de ce fait ;

Sur la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de M.B... :

6. Considérant, en premier lieu, que le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône soutient que la demande de M. B...était tardive ; qu'il fait valoir que le délai de recours contre la décision du directeur du centre hospitalier en date du 21 juillet 2005 rejetant la demande indemnitaire préalable était expiré avant que ne fût saisie, le 17 novembre 2005, la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales de Franche-Comté et que cette saisine n'a pu avoir pour effet de suspendre le délai de recours contentieux ;

7. Considérant, d'une part, que la personne qui a saisi une collectivité publique d'une demande d'indemnité et qui s'est vu notifier une décision expresse de rejet dispose, en vertu de l'article R. 421-1 et du 1° de l'article R. 421-3 du code de justice administrative, d'un délai de deux mois à compter de cette notification pour rechercher la responsabilité de la collectivité devant le tribunal administratif ; que, conformément aux dispositions de l'article R. 421-5, ce délai n'est toutefois opposable qu'à la condition d'avoir été mentionné, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ; que, d'autre part, dans les cas où le délai de recours contentieux est susceptible d'être suspendu par application des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 1142-7 du code de la santé publique, l'information donnée à l'intéressé doit préciser les conditions de cette suspension ; qu'ainsi, eu égard à l'objectif poursuivi par le législateur en instituant une procédure de règlement amiable des litiges devant les commissions régionales de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, la notification de la décision d'un établissement public de santé rejetant une demande d'indemnité présentée par une personne s'estimant victime d'un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins, ou par les ayants droit d'une personne décédée à la suite d'un acte de prévention, de diagnostic ou de soins, doit indiquer non seulement que le tribunal administratif peut être saisi dans le délai de deux mois mais aussi que ce délai est suspendu en cas de saisine de la commission ; que la notification ne fait pas courir le délai si elle ne comporte pas cette double indication ;

8. Considérant que la décision du 21 juillet 2005 par laquelle le directeur du centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône a rejeté la demande d'indemnité présentée par la mère de M. B... ne comportait pas la mention que le délai de recours contentieux dont disposait l'intéressé pour saisir le tribunal administratif pourrait, sous certaines conditions, être suspendu en cas de saisine de la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ; qu'en l'absence de cette indication, la notification de cette décision de rejet à M. B...le 22 juillet 2005 n'a pu avoir pour effet de faire courir le délai de recours contentieux ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point précédent, les délais de recours n'ont pas commencé à courir contre la décision du 21 juillet 2005 ; que cette décision n'ayant pas acquis de caractère définitif, le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône n'est pas fondé à soutenir que la décision implicite par laquelle il a rejeté la demande indemnitaire préalable qui lui a été adressée le 25 mars 2013 serait confirmative de la décision du 21 juillet 2005 ;

10. Considérant, en troisième lieu, que le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône soutient que la demande serait tardive du fait de la saisine du tribunal administratif de Besançon le 7 août 2013 alors que l'avis de la commission régionale de conciliation et d'indemnisation a été rendu le 6 mars 2009 et qu'un protocole d'indemnisation transactionnel lui a été proposé par l'ONIAM le 18 juin 2009, auquel la victime n'a pas apporté de réponse ;

11. Considérant que lorsque, en l'absence de présentation d'une offre de l'assureur ou de l'ONIAM ou à défaut d'acceptation de cette offre, la procédure de règlement amiable n'a pu aboutir, la victime conserve le droit d'agir en justice devant la juridiction compétente contre un établissement public de santé, si elle estime que sa responsabilité est engagée, ou contre l'ONIAM, si elle estime que son dommage est indemnisable au titre de la solidarité nationale ;

12. Considérant que si M. B...n'a pas donné suite à l'indemnisation amiable qui lui était proposée par l'ONIAM, se substituant à l'assureur défaillant du centre hospitalier, il conservait le droit d'agir en justice contre le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône ; qu'en l'absence de toute mention, tant dans l'avis de la commission régionale de conciliation et d'indemnisation que dans la proposition d'indemnisation transactionnelle partielle soumise à M.B..., des délais de recours contre cette décision, celle-ci n'a pu, en tout état de cause, faire courir le délai de recours contentieux ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône tirée de la tardiveté de la demande de première instance doit être écartée ;

Sur la responsabilité :

En ce qui concerne la faute :

14. Considérant qu'il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise remis le 23 mars 2006, que les préjudices subis par M. B...ont été causés par les manoeuvres de traction très importantes réalisées lors de l'ablation du matériel d'ostéosynthèse, qui ont entraîné la rupture d'un nerf ; que la difficulté pour retirer le matériel d'ostéosynthèse rencontrée par le chirurgien lors de l'opération du 20 octobre 2004 s'explique en partie par l'absence de respect des règles de l'art lors de la pose de ce matériel le 23 février 2004, également au centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône, le chirurgien n'ayant alors pas, pour des raisons non explicitées dans le premier compte rendu opératoire, interposé un lambeau musculaire entre le nerf et la plaque ; qu'eu égard à ce contexte difficile, le chirurgien officiant lors du retrait du matériel d'ostéosynthèse le 20 octobre 2004 aurait dû procéder avec un surcroît de précaution et éviter toute action de mise sous tension, voire décider de ne pas retirer le matériel ; que ces deux fautes médicales, lors de la pose du matériel d'ostéosynthèse puis lors du retrait de ce matériel, sont de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône ;

En ce qui concerne les préjudices :

S'agissant des préjudices patrimoniaux :

Quant aux dépenses de santé restées à la charge de M.B... :

15. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, parmi les dépenses de santé qui sont restées à la charge de M.B..., les frais d'utilisation d'un véhicule sanitaire léger les 14 et 18 mars 2005, d'un montant de 105,85 euros, doivent être regardés comme étant en lien avec l'opération du 14 mars 2005, laquelle a été rendue nécessaire du fait des séquelles subies par M. B...à la suite de l'ablation du matériel d'ostéosynthèse le 20 octobre 2004 ; que les frais de pansement et de pharmacie, d'un montant total de 43,96 euros, ont été engagés les 19 et 30 mars 2005, quelques jours après l'opération de greffe nerveuse du 14 mars 2005, et en l'absence dans les relevés de l'assurance maladie de tout autre facteur pouvant expliquer ces dépenses, il y a lieu de regarder celles-ci comme étant en lien avec les fautes retenues au point 14 ; qu'en revanche, il n'est pas établi que les frais de transport du 24 mars 2004, les dépenses de kinésithérapie du 10 janvier 2005 et les frais de radiographie du 25 octobre 2004 sont en lien direct avec les fautes commises par le centre hospitalier intercommunal ; qu'ainsi, le préjudice subi par M. B...au titre des dépenses de santé actuelles restées à sa charge s'élève à 149,81 euros ;

16. Considérant, en second lieu, qu'en se bornant à produire des relevés de la caisse primaire d'assurance maladie pour des dépenses engagées en décembre 2006 et juillet 2008 ainsi qu'une attestation d'une société d'ambulance pour un transport effectué le 5 décembre 2006, M. B... n'établit pas l'existence d'un lien de causalité entre ces dépenses et les fautes médicales commises par le centre hospitalier intercommunal ; que sa demande de remboursement des frais de santé futurs ne peut donc qu'être rejetée ;

Quant aux frais d'assistance par une tierce personne :

17. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans son rapport en date du 4 septembre 2008, l'expert a entendu exclure l'existence de toute perte d'autonomie postérieurement à la consolidation de l'état de santé de M.B... ; qu'en revanche, il résulte en particulier du premier rapport d'expertise, en date du 23 mars 2006, que la victime, qui est droitière, a perdu l'usage de son bras droit pendant une période supérieure à 18 mois à la suite de l'opération du 20 octobre 2004, alors qu'une période de trois semaines est généralement nécessaire pour récupérer d'une telle intervention ; qu'ainsi, M. B...est fondé à soutenir qu'il a eu besoin, à compter du 15 novembre 2004 et jusqu'à la consolidation de son état de santé le 31 août 2006, de l'assistance d'une tierce personne dans l'accomplissement des actes de la vie courante ; qu'il produit une attestation de ses parents indiquant qu'ils lui ont apporté cette aide ; que ce point n'est pas contesté en appel par le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône ; qu'il y a lieu de fixer le besoin d'assistance par tierce personne de M. B... à une heure trente par jour du 15 novembre 2004 au 31 août 2006, soit une période de 654 jours ; que l'indemnisation due doit être calculée sur la base d'un taux horaire de 10 euros, déterminé en tenant compte du salaire minimum moyen sur la période augmenté des charges sociales ; que, dès lors, il y a lieu d'accorder à l'intimé une somme de 9 810 euros en réparation de ce chef de préjudice ;

Quant au préjudice scolaire :

18. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B...a dû interrompre sa scolarité en lycée hôtelier pendant une période de deux années et qu'il n'a pu reprendre son cursus menant au baccalauréat professionnel qu'à compter du mois de septembre 2006 ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme demandée de 18 000 euros ;

Quant aux préjudices professionnels :

19. Considérant, en premier lieu, que M. B...soutient qu'il n'a pu percevoir sa rémunération du mois d'octobre 2004 en qualité de cuisinier ; que, d'une part, l'intéressé n'établit pas que son contrat, qui courait du 17 septembre au 30 septembre 2004, aurait été reconduit le mois suivant ; que, d'autre part, l'opération de retrait du matériel d'ostéosynthèse a eu lieu le 20 octobre 2014 ; que pour la période du mois d'octobre antérieure à cette date, il ne peut donc en tout état de cause faire état d'une perte de revenus qui serait en lien avec cette opération ; qu'en outre, il résulte du rapport d'expertise en date du 4 septembre 2008 que la durée d'incapacité temporaire de travail consécutive à l'ablation d'un matériel d'ostéosynthèse au niveau de l'humérus est de trois semaines ; qu'ainsi, l'incapacité dans laquelle il a été de travailler entre le 20 octobre 2004 et la fin de ce mois n'est pas en lien avec les fautes commises par le centre hospitalier intercommunal ; qu'il s'ensuit que cette demande ne peut être accueillie ;

20. Considérant, en second lieu, que si M. B...soutient qu'il a perdu une chance d'exercer le métier de cuisinier gastronomique, il ne l'établit pas, alors au demeurant qu'il a finalement obtenu, après avoir repris sa scolarité, le baccalauréat professionnel hôtellerie option restauration auquel il se destinait antérieurement à son accident ; qu'il n'est pas plus établi qu'il aurait été dans l'obligation de se reconvertir afin d'exercer la profession d'ambulancier et qu'il aurait subi, à ce titre, une perte de revenus ; qu'en revanche, il résulte de l'instruction que l'invalidité dont est atteint l'intéressé a pour effet d'augmenter la pénibilité du travail exercé ; qu'il y a lieu, pour compenser cette incidence professionnelle, d'octroyer à M. B...une somme de 10 000 euros ;

21. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant total des préjudices patrimoniaux subis par M. B...du fait des fautes médicales commises par le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône s'élève à 37 959,81 euros ;

S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux :

22. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du 4 septembre 2008, que M.B..., qui était âgé de 21 ans à la date de l'opération de retrait du matériel d'ostéosynthèse, est demeuré atteint d'un déficit fonctionnel permanent de 20%, lié en particulier à une perte de force et d'endurance et un déficit de dextérité du poignet et de la main droite ; que ce préjudice s'élève à 35 000 euros ; qu'en outre, l'intéressé a également souffert d'un préjudice d'agrément notamment lié à une pratique sportive rendue difficile, en particulier en ce qui concerne l'exercice du basket-ball ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à une somme de 5 000 euros ; qu'ainsi, le tribunal administratif, qui a indemnisé ces deux chefs de préjudice à hauteur de 40 000 euros, n'en a pas fait une évaluation insuffisante ;

23. Considérant, en deuxième lieu, que l'intensité des souffrances endurées par l'intéressé a été évaluée à 3 sur une échelle allant de 1 à 7 dans le rapport d'expertise du 4 septembre 2008 ; que les premiers juges ont justement apprécié ce chef de préjudice en lui octroyant une somme de 3 000 euros à ce titre ;

24. Considérant, en dernier lieu, que le préjudice esthétique subi par M.B..., du fait du port de prothèses et de ses cicatrices, a été évalué par l'expert à 2 sur une échelle allant de 1 à 7 ; que le tribunal administratif n'a pas fait une évaluation insuffisante de ce chef de préjudice, avant et après consolidation, en le fixant à une somme totale de 2 500 euros ;

25. Considérant que le montant total des préjudices extrapatrimoniaux subis par M. B... du fait des fautes médicales commises par le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône s'élève, y compris la somme de 1 170 euros octroyée par le tribunal administratif au titre du déficit fonctionnel temporaire et non contestée en appel, à une somme de 46 670 euros ;

26. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon l'a condamné à réparer les préjudices subis par M. B...du fait de l'intervention chirurgicale réalisée le 20 octobre 2014 ; qu'en revanche, M. B...est fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a limité à 61 670 euros la somme que le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône a été condamné à lui verser en réparation des préjudices subis ; qu'il y a lieu de porter cette somme à 84 629,81 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

27. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'ONIAM est mis hors de cause de la présente instance.

Article 2 : Les conclusions de la requête du centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône sont rejetées.

Article 3 : La somme que le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône est condamné à verser à M. B...est portée de 61 670 euros à 84 629,81 euros (quatre-vingt-quatre mille six-cent-vingt-neuf euros et quatre-vingt-un centimes).

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Besançon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône versera une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier intercommunal de la Haute-Saône, à M. C...B..., à l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône.

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N° 15NC00063


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00063
Date de la décision : 10/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Délais.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service public de santé - Établissements publics d'hospitalisation - Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux.


Composition du Tribunal
Président : Mme DHIVER
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : VATIER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-05-10;15nc00063 ?
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