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26/06/2017 | FRANCE | N°15MA04249

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 26 juin 2017, 15MA04249


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Cheval-Blanc a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement M. C... et la société Sarom à lui payer la somme de 31 698 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 6 juillet 2004, eux-mêmes capitalisés.

Par un jugement n° 1301563 du 17 septembre 2015, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de la commune de Cheval-Blanc.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2015, la commune de Cheval-Bla

nc, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Cheval-Blanc a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement M. C... et la société Sarom à lui payer la somme de 31 698 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 6 juillet 2004, eux-mêmes capitalisés.

Par un jugement n° 1301563 du 17 septembre 2015, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de la commune de Cheval-Blanc.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2015, la commune de Cheval-Blanc, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 17 septembre 2015 ;

2°) de condamner solidairement M. C... et la société Sarom à lui payer la somme de 31 698 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 6 juillet 2004, eux-mêmes capitalisés ;

3°) de mettre à leur charge solidaire une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté toute faute contractuelle de M. C... et de la société Sarom, dès lors que ceux-ci ont manqué à leur obligation d'exécuter loyalement et de bonne foi le contrat les liant à elle pour la collecte des ordures ménagères de ses habitants ;

- cette faute contractuelle est directement à l'origine de son préjudice, tenant à la facturation, par le SIECEUTOM, du coût du traitement des déchets de tiers ;

- elle justifie du montant de ce préjudice.

Par des mémoires, enregistrés les 31 janvier et 23 février 2017, le syndicat mixte intercommunautaire pour l'étude, la construction et l'exploitation d'une unité de traitement des ordures ménagères (SIECEUTOM), représenté par Me E..., conclut à sa mise hors de cause, à l'annulation du jugement attaqué, à la condamnation solidaire de M. C... et de la société Sarom à verser à la commune de Cheval-Blanc la somme de 31 698 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 6 juillet 2004 et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à leur charge solidaire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il doit être mis hors de cause ;

- il a la qualité d'observateur ;

- il n'était pas partie à l'instance devant le tribunal administratif ;

- il n'est pas directement concerné par le présent litige ;

- il s'associe aux conclusions de la commune ;

- la responsabilité contractuelle de M. C... et la société Sarom est engagée, dès lors que leur faute dans l'exécution des contrats conclus avec la commune n'est pas contestée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mars 2017, la société Sarom SARL et M. B... C..., représentés par Me D..., concluent au rejet de la requête, au rejet de l'intervention du SIECEUTOM, à ce que la Cour tire toutes les conséquences du caractère abusif de la requête de la commune de Cheval-Blanc au retard de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, à ce qu'une somme de 3 600 euros soit mise à sa charge, au profit de chacun d'entre eux, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à ce qu'une somme de 3 600 euros soit mise à la charge du SIECEUTOM, au profit de chacun d'entre eux, au même titre.

Ils soutiennent que :

- la demande de la commune est irrecevable, en l'absence d'habilitation à agir régulière ;

- les conclusions du SIECEUTOM tendant à leur condamnation solidaire à indemniser la commune et à ce qu'une somme soit mise à leur charge solidaire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont irrecevables, en l'absence de qualité du syndicat pour les présenter pour son compte ;

- son intervention est irrecevable, en l'absence d'habilitation à agir régulière ;

- la prétendue créance de la commune est prescrite au regard de la loi du 31 décembre 1968 ;

- le marché public liant la commune de Cheval-Blanc à la société Sarom relativement à la collecte des ordures ménagères sur son territoire pour la période du 1er janvier au 30 juin 2002 a été exécuté en méconnaissance des dispositions de l'article 79 du code des marchés publics alors applicable ;

- le même marché, conclu pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2002, a été irrégulièrement conclu ;

- la société Sarom n'est jamais convenue avec la commune du remboursement progressif d'une somme de 12 195,92 euros au titre de l'exécution défaillante des différents marchés conclus avec elle au même titre ;

- ces marchés ont été correctement exécutés et définitivement réglés par la commune ;

- celle-ci demeure redevable d'une somme de 82 498,71 euros toutes taxes comprises à la société Sarom au titre de prestations supplémentaires réalisées à la demande de son maire et non réglées ;

- seule leur responsabilité délictuelle peut être recherchée au titre de surcoûts dans le traitement des ordures ménagères, étranger aux contrats conclus avec la commune ;

- ils n'ont reçu aucune somme indue en règlement de ces contrats ;

- le préjudice de la commune n'est pas établi ;

- elle a commis, dans le cadre de l'exécution des contrats précités, des fautes de nature à les exonérer de leur responsabilité éventuelle ;

- le présent litige est entaché de conflit d'intérêts et procède d'un détournement de pouvoir et de procédure.

Par ordonnance du 3 avril 2017 la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai suivant.

Un mémoire présenté par la commune de Cheval-Blanc a été enregistré le 3 mai 2017, postérieurement à la clôture d'instruction.

Une note en délibéré présentée par la commune de Cheval-Blanc a été enregistrée le 14 juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gautron,

- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,

- et les observations de Me A... représentant la commune de Cheval-Blanc, de Me E... représentant le SIECEUTOM et de Me D... représentant M. C... et la société Sarom.

1. Considérant que, par actes d'engagements successifs, notamment, en dernier lieu, du 26 juin 2002, la commune de Cheval-Blanc (Vaucluse) a confié à M. C..., puis à la société Sarom, exploitant son fonds de commerce en location-gérance, la collecte des ordures ménagères sur son territoire et leur acheminement auprès d'un centre de traitement exploité pour le compte du SIECEUTOM, de 1994 à fin 2002 ; que ce dernier ayant porté à l'attention de la commune le caractère anormalement élevé de la quantité de déchets, en provenance de son territoire, traités durant la période de 1997 à 2002, occasionnant un surcoût réparti entre les collectivités adhérentes et chiffré à 31 698 euros pour ce qui la concerne, celle-ci en a recherché le remboursement amiable par M. C... et la société Sarom, avant d'émettre à l'encontre de la société, le 6 juillet 2004, un titre de perception pour un montant de 4 808,54 euros ; que ce titre de perception a été annulé par un jugement définitif du tribunal administratif de Nîmes n° 0426452 du 25 janvier 2007 ; que la commune relève appel du jugement du même tribunal du 17 septembre 2015 ayant rejeté sa demande tendant à la condamnation de M. C... et de la société Sarom à l'indemniser du surcoût précité ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par M. C... et la société Sarom :

2. Considérant, en premier lieu, qu'une collectivité publique est irrecevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu'elle a le pouvoir de prendre ; qu'en particulier, les collectivités territoriales, qui peuvent émettre des titres exécutoires à l'encontre de leurs débiteurs, ne peuvent saisir directement le juge administratif d'une demande tendant au recouvrement de leur créance ; que, toutefois, lorsque la créance trouve son origine dans un contrat, la faculté d'émettre un titre exécutoire dont dispose une personne publique ne fait pas obstacle à ce que celle-ci saisisse le juge d'administratif d'une demande tendant à son recouvrement ;

3. Considérant qu'il est constant que la créance revendiquée par la commune trouve son origine dans les contrats ci-dessus mentionnés conclus entre elle-même, d'une part, et M. C... puis la société Sarom, d'autre part ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par ces derniers, tirée de la faculté qu'avait la commune d'émettre un titre exécutoire à leur encontre, ne peut qu'être écartée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2132-1 du code général des collectivités territoriales : " Sous réserve des dispositions du 16° de l'article L. 2122-22, le conseil municipal délibère sur les actions à intenter au nom de la commune. " ; qu'aux termes de l'article L. 2132-2 du même code : " Le maire, en vertu de la délibération du conseil municipal, représente la commune en justice. " ; qu'aux termes de son article L. 2122-22 : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...)16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal ; (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le conseil municipal de la commune de Cheval-Blanc, par une délibération du 22 avril 2014 dont l'opposabilité n'est pas contestée, a notamment délégué à son maire compétence pour " intenter au nom de la commune les actions en justice ou défendre la commune dans les actions intentées contre elle devant (...) les trois juridictions de l'ordre administratif (...) pour les (...) contentieux de pleine juridiction " ; que, contrairement à ce qui est soutenu, cette délégation précise, ainsi, de manière suffisante la nature et l'étendue de la compétence déléguée ; que dès lors, M. C... et la société Sarom ne sont pas fondés à opposer une fin de non-recevoir tirée de l'absence d'habilitation à agir régulière du maire de Cheval-Blanc ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 5211-2 du code général des collectivités territoriales : " A l'exception de celles des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 2122-4, les dispositions du chapitre II du titre II du livre Ier de la deuxième partie relatives au maire et aux adjoints sont applicables au président et aux membres du bureau des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre. " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le comité syndical du SIECEUTOM, par une délibération du 28 mai 2014 dont l'opposabilité n'est pas contestée, a notamment délégué à son président compétence pour " intenter au nom du syndicat les actions en justice ou défendre le syndicat dans les actions intentées contre lui, actions où le syndicat est demandeur, défendeur, action de première instance, d'appel ou de cassation et de faire appel le cas échéant (...), pour toutes les affaires du syndicat " ; que cette délégation précise, ainsi, de manière suffisante la nature et l'étendue de la compétence déléguée ; que dès lors, M. C... et la société Sarom ne sont pas fondés à opposer une fin de non-recevoir tirée de l'absence d'habilitation à agir régulière du président du comité syndical du SIECEUTOM ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'à supposer même que M. C... et la société Sarom entendent opposer une fin de non-recevoir contractuelle, tirée de ce que les marchés les liant à la commune de Cheval-Blanc auraient été intégralement exécutés et définitivement réglés, sans réserve, cette fin de non-recevoir n'est pas, en tout état de cause, assortie de précisions et justifications suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ; qu'elle ne peut, par suite, qu'être écartée ;

Sur les conclusions du SIECEUTOM :

9. Considérant que si la Cour a communiqué la requête au SIECEUTOM, les conclusions indemnitaires de la commune de Cheval-Blanc sont dirigées exclusivement contre M. C... et la société Sarom, au titre de leur exécution défaillant des contrats précités conclus avec la commune relativement à la collecte des ordures ménagères sur son territoire et à leur acheminement auprès d'un centre de traitement ; que M. C... et la société Sarom ne recherchent pas davantage la responsabilité du SIECEUTOM, lequel ne dispose d'ailleurs d'aucune compétence en matière de collecte des ordures ménagères ; que dès lors, celui-ci, qui se borne à s'associer aux conclusions de la commune, doit, comme il le soutient, être mis hors de cause ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale :

10. Considérant, qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. (...) " ;

11. Considérant que ces dispositions législatives, si elles instituent, au profit notamment des communes, une prescription quadriennale des créances détenues sur ces dernières, ne rendent pas cette prescription corrélativement applicable aux créances détenues par elles sur des personnes privées ; qu'ainsi, M. C... et la société Sarom ne peuvent utilement se prévaloir de cette prescription à l'encontre de la créance litigieuse revendiquée à leur encontre par la commune de Cheval-Blanc ;

En ce qui concerne l'opposabilité des contrats conclus entre les parties :

12. Considérant que, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l' exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ;

13. Considérant qu'à supposer même que M. C... et la société Sarom entendent soutenir que les contrats conclus entre la commune et la société, pour la période du 1er janvier au 30 juin 2002 et pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2002, seraient inopposables, compte tenu des irrégularités entachant leur conclusion et leur exécution, les vices qu'ils invoquent, tirés respectivement du commencement d'exécution du premier contrat antérieurement à sa notification à son titulaire, en méconnaissance de l'article 79 du code des marchés publics alors en vigueur et de l'absence de rapport de présentation dans le cadre de la procédure d'attribution du second, ne sont pas établis ; qu'en tout état de cause, ces vices, qui n'affectent pas le contenu des contrats, ne présentent pas davantage une gravité suffisante, au regard des principes rappelés au point précédent, pour que l'application de ces contrats soient écartée en l'espèce ; que par suite, le présent litige doit être réglé sur le terrain contractuel ;

En ce qui concerne la responsabilité contractuelle de M. C... et de la société Sarom :

14. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que la commune de Cheval-Blanc était, au moment des faits qu'elle reproche à M. C... et à la société Sarom, liée à ces derniers par les contrats précités relatifs à la collecte des ordures ménagères sur son territoire et à leur acheminement auprès d'un centre de traitement ; qu'en outre, il résulte de l'instruction que ces faits, consistant dans le dépôt auprès de ce centre, avec les ordures ménagères collectées sur le territoire de la commune, de déchets, notamment industriels, pris en charge auprès d'autres clients de M. C... et de la société Sarom et mélangés avec elles, n'ont été rendus possibles que par l'existence de ces contrats ; que dans ces conditions, la commune ne peut rechercher leur responsabilité que sur le fondement et dans les limites des obligations pesant sur eux en vertu des mêmes contrats ; qu'ainsi, la commune et le SIEUCETOM sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par leur jugement attaqué, les premiers juges ont estimé que les conclusions indemnitaires de la commune ne pouvaient, en tout état de cause, être accueillies sur un fondement contractuel ;

15. Considérant, en deuxième lieu, que M. C... et la société Sarom reconnaissent l'existence des faits qui leur sont reprochés par la commune ; qu'ils ne contestent pas n'en avoir informé ni cette dernière, ni le SIECEUTOM ; que par suite et alors même, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'acte d'engagement, ni d'aucune autre stipulation ou disposition applicable, que les contrats liant les parties auraient interdit à leurs titulaires d'assurer la collecte d'autres déchets auprès de tiers sur le territoire de la commune de Cheval-Blanc ou en dehors de celui-ci et d'autre part, qu'il n'est pas établi que les prix proposés par eux, dans le cadre de ces contrats, auraient été établis sur la base d'estimations manifestement surévaluées des quantités d'ordures ménagères à collecter, la commune de Cheval-Blanc est fondée à soutenir que M. C... et la société Sarom ont commis des fautes de nature à engager leur responsabilité contractuelle, consistant à avoir, dans le cadre de l'exécution des contrats précités, fait traiter, à ses frais et à ceux des autres collectivités membres du SIEUCETOM, les déchets pris en charge auprès de tiers ;

16. Considérant, en troisième lieu, que si M. C... et la société Sarom soutiennent que la commune aurait elle-même commis une faute exonératoire en s'abstenant notamment, une fois les faits précités connus d'elle, de rompre ses relations contractuelles avec eux, elle ne justifie pas, en tout état de cause, de la date à laquelle la commune a été informée de ces faits ; qu'ainsi, il n'est pas établi, contrairement à ses allégations, que cette dernière aurait, comme elle le prétend, laissé ces relations perdurer en pleine connaissance de cause ;

17. Considérant, en dernier lieu, que M. C... et la société Sarom n'invoquent pas utilement, dans le cadre du présent litige, les moyens tirés de ce que la décision du maire de Cheval-Blanc d'agir en justice à leur encontre serait entachée de conflit d'intérêts et de détournements de pouvoir et de procédure ;

En ce qui concerne le préjudice de la commune :

18. Considérant que la commune de Cheval-Blanc se prévaut d'un préjudice estimé à 31 698 euros sur le fondement d'un rapport établi pour le compte du SIECEUTOM, correspondant à la part supportée des dépenses afférentes au traitement des apports de déchets excédentaires, par M. C... et la société Sarom, au centre de traitement ;

19. Considérant, en premier lieu, que si ces derniers soutiennent que le SIECEUTOM n'aurait pas été compétent pour en commander l'élaboration, il résulte de l'instruction, en tout état de cause, que seul ce syndicat, en charge du traitement des déchets apportés depuis les différentes collectivités le composant, était en possession des éléments permettant d'évaluer tant les apports excédentaires constatés en provenance de la commune de Cheval-Blanc, que le surcoût correspondant pour cette dernière ; que, si ce rapport n'a pas été élaboré contradictoirement, son contenu a pu être discuté par M. C... et la société Sarom devant le tribunal administratif comme devant la Cour ; que ces derniers, en se bornant à faire valoir, d'une part, que ses " motivation et (...) facturation (...) ne sont pas (...) indiquées " et que, lors de son élaboration, le maire de Cheval-Blanc était membre de son comité syndical, sans démontrer l'influence déterminante qu'aurait eu ce dernier dans la décision du syndicat d'en commander l'élaboration et d'autre part, que ce rapport ne mentionnerait pas les éléments de référence sur lesquels il se fonde, n'indiquerait pas la méthodologie retenue et ne prendrait en compte aucune variable, sans verser aux débats le moindre élément de nature à en contredire les analyses et conclusions, M. C... et la société Sarom ne contestent pas utilement ces dernières ;

20. Considérant, en deuxième lieu, que M. C... et la société Sarom, qui font eux-mêmes état, au vu du rapport précité, de la prise en charge par l'ensemble des communes membres du SIECEUTOM du surcoût lié aux excédents litigieux, ne sont pas fondés à contester le financement, par celle de Cheval-Blanc, membre de ce syndicat, de sa quote-part dudit surcoût ;

21. Considérant, en dernier lieu, que si M. C... et la société Sarom font valoir que la commune de Cheval-Blanc serait toujours redevable à la société d'une somme de 82 498,71 euros toutes taxes comprises à la société Sarom au titre de prestations supplémentaires réalisés à la demande de son maire et non réglées, elle ne justifie pas, en tout état de cause, de la réalité de cette créance ;

22. Considérant que, dans ces conditions, le préjudice de la commune de Cheval-Blanc doit être évalué à 31 698 euros ;

23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Cheval-Blanc est fondée à soutenir que c'est à tort que, par leur jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire ; qu'elle est également fondée, par suite, à demander l'annulation de ce jugement et la condamnation solidaire de M. C... et de la société Sarom à lui verser la somme mentionnée au point précédent ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

24. Considérant qu'aux termes de l'article 1231-6 du code civil : " Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. / Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte. (...) " ; qu'aux termes de l'article 1343-2 du même code : " Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise. " ;

25. Considérant, d'une part, qu'ainsi qu'il a été dit, le titre de perception émis par la commune de Cheval-Blanc, à l'encontre de la société Sarom, le 6 juillet 2004, a été définitivement annulé par un jugement du tribunal administratif de Nîmes du 25 janvier 2007 ; que par suite, la commune ne peut se fonder sur ce titre de perception pour soutenir que la somme précitée de 31 698 euros devrait produire intérêts à compter de cette date ; qu'elle a seulement droit, en application des dispositions précitées de l'article 1231-6 du code civil, à ces intérêts à compter du 13 juin 2013, date d'enregistrement de sa requête, dans laquelle ces intérêts ont été demandés pour la première fois, devant le tribunal administratif ;

26. Considérant, d'autre part, que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année ; qu'en ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière ; que la capitalisation des intérêts a été demandée par la commune de Cheval-Blanc le 13 juin 2013 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 13 juin 2014, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative :

27. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros. " ; que la faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de M. C... et de la société Sarom tendant à ce que la commune de Cheval-Blanc soit condamnée à une telle amende ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

28. Considérant, en premier lieu, qu'à supposer que le SIECEUTOM présente des conclusions tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. C... et de la société Sarom au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le syndicat n'avait que la qualité d'observateur devant le tribunal administratif ; que, dès lors qu'aucune conclusion n'est dirigée à son encontre, il n'a pas davantage la qualité de partie devant la Cour ; que dès lors, il n'est pas recevable à présenter de telles conclusions, qui doivent ainsi être rejetées, en tout état de cause ; que, pour les mêmes motifs, la somme réclamée par M. C... et la société Sarom au même titre ne saurait être mise à sa charge ;

29. Considérant, en second lieu, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de M. C... et de la société Sarom une somme de 2 000 euros à verser à la commune de Cheval-Blanc, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent, en revanche, à ce que la somme réclamée par M. C... et de la société Sarom au même titre soit mise à la charge de la commune de Cheval-Blanc, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D É C I D E :

Article 1er : Le SIECEUTOM est mis hors de cause.

Article 2 : Le jugement n° 1301563 du tribunal administratif de Nîmes du 17 septembre 2015 est annulé.

Article 3 : M. C... et la société Sarom sont condamnés solidairement à verser à la commune de Cheval-Blanc une somme de 31 698 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 13 juin 2013. Les intérêts échus à la date du 13 juin 2014 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 4 : M. C... et la société Sarom verseront solidairement une somme de 2 000 euros à la commune de Cheval-Blanc en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de M. C... et de la société Sarom, ainsi que du SIECEUTOM sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cheval-Blanc, au syndicat mixte intercommunautaire pour l'étude, la construction et l'exploitation d'une unité de traitement des ordures ménagères, à la société Sarom SARL et à M. B... C....

Délibéré après l'audience du 12 juin 2017 où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- Mme Steinmetz-Schies, président assesseur,

- M. Gautron, conseiller,

Lu en audience publique, le 26 juin 2017.

10

N° 15MA04249


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA04249
Date de la décision : 26/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-03 Marchés et contrats administratifs. Exécution technique du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. Allan GAUTRON
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : COQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-06-26;15ma04249 ?
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