Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 25 août 2015 et des mémoires enregistrés les 9 février 2016 et 4 mai 2016, la société A. Barbaud et Cie, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2641T-2681T du 25 juin 2015 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté son recours dirigé contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de l'Hérault du 5 février 2015 accordant à la SNC Bessan Développement l'autorisation préalable requise en vue de la création à Bessan d'un ensemble commercial de 9 602 m² comportant un hypermarché à l'enseigne " Intermarché " de 3 500 m², une galerie marchande, deux moyennes surfaces spécialisées en équipement de la maison de 680 m² et 1 510 m², deux moyennes surfaces spécialisées en équipement de la personne de 850 m² chacune, deux boutiques de 255 m² chacune, deux boutiques de 213 m² chacune, une maison des terroirs de 950 m² et un point de retrait permanent de deux pistes de ravitaillement et de 10 m² d'emprise au sol ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SNC Bessan Développement la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle n'a pas été convoquée à la réunion de la Commission nationale d'aménagement commercial et n'a pu formuler ses observations, en méconnaissance des articles R. 752-34 et R. 752-36 du code du commerce, de sorte que le principe du contradictoire a été méconnu ;
- c'est à tort que son recours a été rejeté comme irrecevable pour défaut d'intérêt à agir, dès lors que la délimitation de la zone de chalandise, volontairement restreinte par le pétitionnaire afin d'en exclure les concurrents, est erronée.
Par des mémoires enregistrés le 15 décembre 2015 et le 19 avril 2016, la SNC Bessan Développement, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la société A. Barbaud et Cie la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable, faute pour la société A. Barbaud et Cie de justifier d'un intérêt pour agir ;
- les moyens soulevés par la société A. Barbaud et Cie ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mastrantuono,
- les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public,
- et les observations de Me B... pour la société A. Barbaud et Cie, requérante, et de Me C... pour la SNC Bessan Développement.
1. Considérant que la société A. Barbaud et Cie, qui exploite sous l'enseigne " Mr. Bricolage " un magasin spécialisé dans l'équipement de la maison à Balaruc-le-Vieux, demande l'annulation de la décision du 25 juin 2015 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté, pour défaut d'intérêt pour agir, son recours dirigé contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de l'Hérault du 5 février 2015 qui a autorisé la SNC Bessan Développement à créer à Bessan un ensemble commercial d'une surface de vente totale de 9 602 m² ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 752-34 du code de commerce : " (...) Quinze jours au moins avant la réunion de la commission nationale, les parties sont convoquées à la réunion et informées que la commission nationale ne tiendra pas compte des pièces qui seraient produites moins de dix jours avant la réunion, à l'exception des pièces émanant des autorités publiques " ; qu'aux termes de l'article R. 752-36 du même code : " La commission nationale peut recevoir des contributions écrites. / La commission nationale entend toute personne qui en fait la demande écrite au secrétariat, en justifiant les motifs de son audition, au moins cinq jours avant la réunion. / Sont dispensés de justifier les motifs de leur audition : l'auteur du recours devant la commission nationale (...) " ;
3. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;
4. Considérant que la société A. Barbaud et Cie, à laquelle avait été adressée, par courrier du 17 juin 2015, une convocation pour la séance de la Commission nationale d'aménagement commercial devant se tenir le 1er juillet 2015 à 10h15, a été rendue destinataire d'une lettre datée du 22 juin 2015 par laquelle le secrétariat de la commission nationale lui a indiqué que cette dernière était tenue de rejeter son recours pour irrecevabilité, dès lors qu'elle exploitait un magasin situé hors de la zone de chalandise du projet, et qu'elle ne devait, par suite, pas tenir compte de la convocation qui lui avait précédemment été adressée par erreur ; que si la société requérante fait valoir que, dans ces conditions, elle n'a pas été mise en mesure de demander à être entendue par la commission nationale, d'autant qu'elle n'avait pas été informée de ce que son recours serait en fait examiné dès le 25 juin 2015, elle n'établit pas que la lettre du 22 juin 2015 aurait été reçue à une date telle qu'elle aurait encore pu utilement faire parvenir une demande d'audition cinq jours au moins avant la séance prévue le 1er juillet 2015 ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que la méconnaissance des dispositions des articles R. 752-34 et R. 752-36 du code de commerce ait été susceptible d'avoir exercé, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision attaquée, ni qu'elle ait effectivement privé la société A. Barbaud et Cie d'une garantie ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit donc être écarté ;
5. Considérant, en second lieu qu'aux termes du I de l'article L. 752-17 du code du commerce : " (...) le représentant de l'Etat dans le département, tout membre de la commission départementale d'aménagement commercial, tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 752-3 du même code : " (...) constitue la zone de chalandise d'un équipement faisant l'objet d'une demande d'autorisation d'exploitation commerciale l'aire géographique au sein de laquelle cet équipement exerce une attraction sur la clientèle. Elle est délimitée en tenant compte notamment de la nature et de la taille de l'équipement envisagé, des temps de déplacement nécessaires pour y accéder, de la présence d'éventuelles barrières géographiques ou psychologiques et de la localisation et du pouvoir d'attraction des équipements commerciaux existants " ;
6. Considérant que la société A. Barbaud et Cie exploite un magasin spécialisé dans l'équipement de la maison à Balaruc-le-Vieux, soit en dehors de la zone de chalandise définie dans le dossier de demande d'autorisation d'exploitation de l'ensemble commercial de 9 602 m² présenté par la SNC Bessan Développement ; que, toutefois, alors que cette zone de chalandise est identique à celle qui avait été approuvée par le service instructeur de la Commission nationale d'aménagement commercial lors de l'examen d'un précédent recours à l'encontre de la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de l'Hérault du 22 novembre 2013 autorisant la SNC Bessan Développement à créer sur le même site un ensemble commercial d'une surface de vente supérieure à 29 102 m², il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu notamment, d'une part, de la forte attractivité des équipements commerciaux situés dans le secteur de Balaruc, Sète et Frontignan, lesquels comportent plusieurs hypermarchés et grandes surfaces alimentaires et de nombreux magasins de grande surface spécialisés dans l'équipement de la maison et dans l'équipement de la personne, ainsi que, d'autre part, de l'existence d'un péage sur l'autoroute permettant d'effectuer le trajet le plus rapide entre ce secteur et celui de Bessan, que la zone de chalandise ait été délimitée de manière irrégulière, la société requérante se bornant à mentionner la distance et le temps de trajet en voiture entre le magasin qu'elle exploite et l'ensemble commercial projeté et à affirmer que la délimitation de la zone de chalandise a été opérée à seule fin d'exclure les magasins concurrents, sans apporter aucun élément d'analyse économique à l'appui de ses allégations ; que c'est dès lors à bon droit que la commission nationale a opposé une irrecevabilité à la société requérante après avoir relevé que le magasin qu'elle exploite était situé en dehors de la zone de chalandise du projet en cause et que la définition de cette zone n'apparaissait pas comme erronée ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la SNC Bessan Développement, que la requête de la société A. Barbaud et Cie doit être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société A. Barbaud et Cie une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la SNC Bessan Développement et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SNC Bessan Développement et l'Etat, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, soient condamnées sur leur fondement ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société A. Barbaud et Cie est rejetée.
Article 2 : La société A. Barbaud et Cie versera à la société Bessan Développement une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société A. Barbaud et Cie, à la SNC Bessan Développement et à la Commission nationale d'aménagement commercial.
Délibéré après l'audience du 31 mai 2016, où siégeaient :
- M. Cherrier, président de chambre,
- M. Martin, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 juin 2016.
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N° 15MA03577 3
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