La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/11/2016 | FRANCE | N°15MA00162

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 17 novembre 2016, 15MA00162


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler, d'une part, la décision du 11 septembre 2012 du directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes rejetant leur demande de compensation entre leurs dettes fiscales et des créances qu'ils détenaient sur l'Etat et, d'autre part, deux avis à tiers détenteur émis auprès de la Caisse d'Épargne de Côte d'Azur et de la Société Marseillaise de Crédit le 28 juin 2012.

Ils ont également demandé, par mémoire dis

tinct, que le tribunal administratif de Nice transmette au conseil d'Etat la question...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler, d'une part, la décision du 11 septembre 2012 du directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes rejetant leur demande de compensation entre leurs dettes fiscales et des créances qu'ils détenaient sur l'Etat et, d'autre part, deux avis à tiers détenteur émis auprès de la Caisse d'Épargne de Côte d'Azur et de la Société Marseillaise de Crédit le 28 juin 2012.

Ils ont également demandé, par mémoire distinct, que le tribunal administratif de Nice transmette au conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de l'article 1289 du code civil à la Constitution.

Par un jugement n° 1203886 du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de Nice, après avoir rejeté la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité, a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 janvier 2015 et par un mémoire enregistré le 28 octobre 2016, M. et Mme B..., représentés par Me A..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 13 novembre 2014 du tribunal administratif de Nice ;

2°) de prononcer les annulations demandées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens, comprenant la somme de 35 euros acquittée à l'occasion de l'introduction de leur requête de première instance.

Ils soutiennent que :

- le tribunal ne pouvait régulièrement statuer par un même jugement sur leur requête initiale et sur la question prioritaire de constitutionnalité qu'ils avaient soulevée ;

- la compensation demandée ne porte pas atteinte au principe de l'insaisissabilité des deniers de l'Etat ;

- ils sont confrontés à l'arbitraire de l'Etat.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 mai 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par M. et Mme B... ne sont pas fondés.

Par un mémoire distinct enregistré le 27 octobre 2016, M. et Mme B... demandent à la Cour de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité tirée de ce que " appliquer discriminatoirement l'article 1289 du code civil à certaines créances sur l'Etat est contraire aux articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ".

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958 et notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée ;

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Paix,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant que M. et Mme B... étaient redevables au Trésor public de la somme de 26 432 euros au titre des impôts sur le revenu des années 2009 et 2010, de contributions sociales de l'année 2010 et de taxes d'habitation des années 2010 et 2011 ; que deux avis à tiers détenteur, émis auprès de la Caisse d'Épargne de Côte d'Azur et de la Société Marseillaise de Crédit le 28 juin 2012, leur ont été notifiés pour recouvrement de cette somme ; que M. et Mme B... ont contesté ces actes de poursuite, en indiquant qu'ils étaient créanciers de l'Etat à divers titres, auprès du directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes qui a rejeté leur réclamation par décision du 11 septembre 2012 ; qu'ils demandent à la Cour d'annuler le jugement du 13 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision du 11 septembre 2012 rejetant leur demande de compensation et des avis à tiers détenteur du 28 juin 2012 ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. Une loi organique détermine des conditions d'application du présent article " ; que selon l'article 23-2 de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution : " (...) La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat (...) Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux (...) " ;

3. Considérant que les dispositions de l'article 1289 du code civil qui prévoient que " lorsque deux personnes se trouvent débitrices l'une de l'autre, il s'opère entre elles une compensation qui éteint les deux dettes, de la manière et dans les cas ci-après exprimés " ne sont pas applicables au présent litige, qui trouve sa solution au regard du seul principe de non-compensation des créances publiques ; qu'il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité présentée par M. et Mme B... qui, en tout état de cause, n'est relative qu'à l'application de l'article 1289 du code civil et non à sa constitutionnalité ;

Sur la régularité du jugement :

4. Considérant que les dispositions précitées de l'article 23-2 de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 ne s'opposent pas à ce que le refus de transmission d'une question de constitutionnalité posée par un justiciable soit décidé par la juridiction statuant au fond du litige ; que, par suite, le tribunal administratif de Nice a pu régulièrement, dans le même jugement, refuser la transmission d'une telle question et statuer au fond sur les prétentions de M. et Mme B... ;

Sur le bien-fondé de la demande de compensation :

5. Considérant que le principe de non-compensation des créances publiques fait obstacle, à moins qu'il n'en soit disposé autrement par la loi, à ce que puisse être invoquée à l'encontre des personnes publiques une compensation entre les créances détenues par elles et les créances détenues sur elles par un tiers ; qu'en l'espèce, les services chargés du recouvrement des impositions dues par M. et Mme B... ne pouvaient légalement procéder à la compensation demandée par les intéressés entre leur dette fiscale et les différentes sommes dont le service des domaines, la Caisse des dépôts et consignations ou la préfecture des Alpes-Maritimes auraient été redevables à leur égard ;

6. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit au point précédent, M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir qu'ils seraient confrontés à l'arbitraire de l'Etat du fait du refus de celui-ci de procéder aux compensations qu'ils demandent ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que celles tendant au remboursement des dépens exposés en première instance ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. et Mme B....

Article 2 : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C...B...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré à l'issue de l'audience du 3 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président,

- Mme Paix, président assesseur,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 novembre 2016.

2

N°15MA0162


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00162
Date de la décision : 17/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : CHAMI

Origine de la décision
Date de l'import : 29/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-11-17;15ma00162 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award