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02/05/2017 | FRANCE | N°15LY03023

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 02 mai 2017, 15LY03023


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Nateva a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010 et des intérêts de retard y afférents.

Par un jugement n° 1302740 du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 août 2015, la Société Nateva, représenté

e par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 juillet 2015 ;

2°) de prononcer la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Nateva a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010 et des intérêts de retard y afférents.

Par un jugement n° 1302740 du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 août 2015, la Société Nateva, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 juillet 2015 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 035 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier, le tribunal administratif ayant appliqué d'office les dispositions du III de l'article 44 sexies, lesquelles, en outre, n'étaient pas applicables au cas d'espèce, sans en informer préalablement les parties, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

- il n'existe aucune communauté d'intérêts entre elle-même et les sociétés Fytosan et Laboratoires Pasquier ayant permis un transfert de clientèle, de sorte que sa création résulte du libre jeu de la concurrence ;

- elle n'a pas été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration ou une extension d'activités préexistantes ;

- son activité et celle de la société Laboratoire Pasquier ne sont pas complémentaires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mars 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la société Nateva étant détenue indirectement par la société Laboratoires Pasquier, laquelle exerce une activité complémentaire, elle n'est pas éligible à l'article 44 sexies du code général des impôts.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vinet,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

1. Considérant que la société Nateva, qui exerce une activité de production d'extraits de plantes aromatiques et médicinales, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause le bénéfice de l'exonération d'impôt sur les sociétés de l'article 44 sexies du code général des impôts et lui a notifié des cotisations d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010 dont elle demande la décharge ; qu'elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts, dans sa version alors applicable : " I. Les entreprises soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés, à l'exclusion des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif, jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. (...) II. Le capital des sociétés nouvellement créées ne doit pas être détenu, directement ou indirectement, pour plus de 50 % par d'autres sociétés. Pour l'application du premier alinéa, le capital d'une société nouvellement créée est détenu indirectement par d'autres sociétés lorsque l'une au moins des conditions suivantes est remplie :a - un associé exerce en droit ou en fait une fonction de direction ou d'encadrement dans une autre entreprise, lorsque l'activité de celle-ci est similaire à celle de l'entreprise nouvellement créée ou lui est complémentaire ; b - un associé détient avec les membres de son foyer fiscal 25 % au moins des droits sociaux dans une autre entreprise dont l'activité est similaire à celle de l'entreprise nouvellement créée ou lui est complémentaire. III. Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au paragraphe I. (...) " ;

3. Considérant que si la proposition de rectification et la réponse aux observations du contribuable étaient fondées tant sur les dispositions du II de l'article 44 sexies précité que sur celles du III du même article, l'administration, par un courrier du 10 avril 2012, a expressément renoncé à fonder les impositions supplémentaires litigieuse sur le fondement du III, estimant que les conditions n'étaient pas réunies en l'espèce ; qu'elle a décidé de maintenir les impositions litigieuses sur le seul fondement du II de l'article 44 sexies ; que, toutefois, le tribunal administratif, après avoir estimé que le II de l'article 44 sexies ne pouvait fonder lesdites impositions, a considéré que celles-ci étaient fondées au regard du III de ce même article ; que, ce faisant, il a substitué d'office, un fondement légal à un autre, alors qu'il ne lui appartenait pas de procéder à une telle substitution, qui n'est pas d'ordre public, en l'absence d'une demande en ce sens de l'administration ; que, par suite, le jugement attaqué est irrégulier et doit être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de la société Nateva devant le tribunal administratif ;

Sur le bien-fondé des impositions :

5. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au vu de l'instruction, si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.C..., détenteur d'un tiers du capital de la société Nateva, est président du directoire de la société Laboratoire Pasquier ; que M. B..., qui détient également un tiers du capital de la société Nateva, détient par ailleurs plus de 25 % du capital de la société Laboratoire Pasquier ; qu'ainsi le critère des liens capitalistiques existant entre les deux sociétés au sens des dispositions précitées du II de l'article 44 sexies du code général des impôts est rempli ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'activité de la société Nateva consiste à acquérir auprès de cueilleurs et producteurs, des plantes qu'elle valorise en les transformant en extraits sous diverses formes, tels que des extraits secs ou liquides, des huiles essentielles et des hydrolats ; que, s'agissant des compléments alimentaires aqueux, qui représentent près d'un tiers de son chiffre d'affaires, elle indique conditionner elle-même une partie de sa production, tandis qu'elle intervient comme fournisseur pour une autre partie, ses clients réalisant alors eux-mêmes le conditionnement ; que la société des Laboratoires Pasquier intervient dans le domaine du façonnage de produits pharmaceutiques et de compléments alimentaires sous forme liquide ; que, si celle-ci façonne et conditionne une partie des produits aqueux qu'elle commercialise, elle en acquiert également une partie auprès de la société Nateva, dont elle est une des principales clientes ; qu'ainsi, pour une partie significative de leur activité, ces deux sociétés exercent des activités soit similaires, soit complémentaires au sens des dispositions du II de l'article 44 sexies précitées, quand bien même elles n'interviendraient pas dans le même secteur économique ; que les dispositions en cause n'impliquent pas qu'une part prépondérante du chiffre d'affaires de l'une des deux sociétés soit réalisée avec l'autre pour que les activités soient regardées comme similaires ou complémentaires ; qu'ainsi, sont inopérantes les circonstances que les deux sociétés n'auraient pas signé de contrat d'exclusivité ou de sous-traitance et qu'elles ne seraient pas en situation d'interdépendance technique ou économique ; que la signature d'un accord de non concurrence entre les deux sociétés n'est pas davantage un critère requis pour considérer que les dispositions du II de l'article 44 sexies du code général des impôts trouvent à s'appliquer ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que l'administration a considéré que la société Nateva se trouvait dans la situation visée au II de l'article 44 sexies du code général des impôts et a remis en cause l'exonération prévue par l'article 44 sexies du code général des impôts dont la société Nateva a bénéficié au titre des années 2008, 2009 et 2010 ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de la société Nateva doit être rejetée ;

Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

10. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la société Nateva dans l'instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 9 juillet 2015 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande et les conclusions de la requête de la société Nateva sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société Nateva et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2017, à laquelle siégeaient :

Mme Mear, président,

Mme Terrade, premier conseiller,

Mme Vinet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 2 mai 2017.

2

N° 15LY03023


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03023
Date de la décision : 02/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-01-04-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Exonérations.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : YDES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-05-02;15ly03023 ?
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