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11/02/2016 | FRANCE | N°14VE01575

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 11 février 2016, 14VE01575


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SPIE SUD-EST a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009, pour un montant de 364 649 euros.

Par un jugement n° 1301494 en date du 31 mars 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la requête de la société SPIE SUD-EST.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique,

enregistrés le 26 mai et le 4 novembre 2014, présentés par Me Berger-Picq, avocat, la société SPIE ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SPIE SUD-EST a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009, pour un montant de 364 649 euros.

Par un jugement n° 1301494 en date du 31 mars 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la requête de la société SPIE SUD-EST.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 26 mai et le 4 novembre 2014, présentés par Me Berger-Picq, avocat, la société SPIE SUD-EST demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes ;

3° de mettre à la charge de l'État une somme de 7 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société SPIE SUD-EST soutient que :

- elle ne conteste pas avoir déduit par anticipation la taxe sur la valeur ajoutée relative aux prestations de services, mais que le service aurait également dû, en ce qui concerne les factures réglées autrement que par effets de commerce, prendre en compte, pour le calcul des montants déduits de façon anticipée au titre de l'exercice 2009, les factures effectivement payées au cours de l'année 2009 mais au titre desquelles elle n'avait pas exercé son droit à déduction, puisqu'elle avait déduit de façon anticipée au cours de l'exercice 2008 ces montants dont la déduction aurait normalement dû survenir au cours de l'exercice 2009 ;

- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas justifiée, car la régularisation effectuée en 2007 au titre de l'article L. 62 du livre des procédures fiscales a été faite spontanément ;

- la méthode de calcul de l'assiette de l'intérêt de retard est tronquée ; le service ne peut faire courir les intérêts dus jusqu'à la date de la notification de la proposition de rectification, dès lors que la taxe sur la valeur ajoutée a été déclarée et payée, l'erreur n'ayant consisté qu'à la déduire par anticipation.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Errera,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- et les observations de Me Berger-Picq, pour la société SPIE SUD-EST.

1. Considérant que la société SPIE SUD-EST, qui exerce son activité dans le domaine du génie mécanique, des réseaux de communication et des travaux électriques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 2009, à l'issue de laquelle l'administration lui a réclamé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis des intérêts de retard et des majorations pour manquement délibéré prévues à l'article 1729 du code général des impôts, pour un montant global de 364 649 euros ; que la société SPIE SUD-EST relève appel du jugement n° 1301494 en date du 31 mars 2014 du Tribunal administratif de Montreuil rejetant sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ayant donné lieu à déduction anticipée :

2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel " ; que, pour les prestations de services, la base d'imposition est constituée, en vertu du a du 1 de l'article 266 de ce code, " par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par (...) le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers " ; que le a du 1 de l'article 269 du même code dispose que le fait générateur de la taxe se produit, pour les prestations de services, au moment où " la prestation est effectuée " et le c du 2 du même article précise, pour ces opérations, que la taxe est exigible " lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération (...) " ; qu'aux termes de l'article 271 du même code : " I.1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société SPIE SUD-EST a, au titre du mois de décembre 2009, procédé à la déduction d'un montant de taxe sur la valeur ajoutée qui, en application des règles ci-dessus rappelées, n'était pas encore exigible dans la mesure où il grevait des factures non encore encaissées par ses fournisseurs ; que la combinaison des dispositions précitées au point 2 fait légalement obstacle à ce que la société requérante exerce ainsi son droit à déduction ;

4. Considérant que la société requérante fait valoir que le service aurait également dû prendre en compte, pour le calcul des montants déduits de façon anticipée au titre de l'exercice 2009, les factures effectivement payées au cours de l'année 2009 et au titre desquelles elle n'avait pas exercé son droit à déduction, ces montants dont la déduction aurait normalement dû survenir au cours de l'exercice 2009 ayant été déduits de façon anticipée au cours de l'exercice 2008 ; que la société requérante, qui précise expressément, en page 3 de son mémoire introductif, ne pas formuler de demande de compensation à ce titre, ne produit toutefois à l'appui de ses allégations, et comme l'a jugé le tribunal administratif, aucun élément chiffré permettant de tenir ces éléments pour établis ;

Sur les pénalités :

En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 62 du livre des procédures fiscales : " Au cours d'une vérification de comptabilité et pour les impôts sur lesquels porte cette vérification, le contribuable peut régulariser les erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances dans les déclarations souscrites dans les délais, moyennant le paiement d'un intérêt de retard égal à 70 % de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Cette procédure de régularisation spontanée ne peut être appliquée que si : 1° Le contribuable en fait la demande avant toute proposition de rectification ; 2° La régularisation ne concerne pas une infraction exclusive de bonne foi ; 3° Le contribuable dépose une déclaration complémentaire dans les trente jours de sa demande et acquitte l'intégralité des suppléments de droits simples et des intérêts de retard au moment du dépôt de la déclaration, ou à la date limite de paiement portée sur l'avis d'imposition en cas de mise en recouvrement par voie de rôle " ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

7. Considérant que, pour écarter les prétentions de la requérante à cet égard, les premiers juges ont relevé que le service s'était fondé sur la circonstance que la société SPIE SUD-EST s'était déjà vu notifier, à l'issue d'une précédente vérification de comptabilité s'étant déroulée entre le 17 novembre 2006 et le 10 juillet 2007 et portant sur la période comprise entre le 1er janvier 2003 et le 31 décembre 2005, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée déduite par anticipation ; qu'à l'occasion de ce contrôle, elle avait été informée des principes applicables aux déductions de taxe sur la valeur ajoutée de prestations de services ; qu'il résulte de ces éléments que le point décisif a résidé, aux yeux du service, dans la persistance de la société requérante à déduire par anticipation la taxe sur la valeur ajoutée ;

8. Considérant à cet égard que si la société requérante conteste avoir répété une infraction dès lors qu'elle avait eu recours, le 10 juillet 2007, lors de la précédente vérification de comptabilité, à la procédure de régularisation spontanée prévue par les dispositions précitées de l'article L. 62 du livre des procédures fiscales, échappant ainsi à une proposition de vérification, cette circonstance est indifférente dans la mesure où l'élément retenu par l'administration a été, ainsi qu'il a été dit, la récurrence de la pratique, par la société, des déductions anticipées de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'à cet égard, et même si c'est de manière inexacte que les premiers juges ont employé dans le considérant 5 de leur jugement le verbe " notifier ", aucune proposition de rectification n'ayant été notifiée à l'issue de la vérification de comptabilité des exercices 2003 à 2005, il est constant que la pratique des déductions anticipées de taxe sur la valeur ajoutée et leur caractère systématique ont été dûment constatée par le service ;

En ce qui concerne les intérêts de retard :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " I. - Toute somme, dont l'établissement ou le recouvrement incombe à la direction générale des impôts, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard. (...) / IV - 1. L'intérêt de retard est calculé à compter du premier jour du mois suivant celui au cours duquel l'impôt devait être acquitté jusqu'au dernier jour du mois du paiement (...) / 4. Lorsqu'il est fait application de l'article 1729, le décompte de l'intérêt de retard est arrêté au dernier jour du mois de la proposition de rectification (...) " ; qu'en application des dispositions précitées, le décompte des intérêts de retard appliqués au rappel de droits éludés, à raison d'une insuffisance de déclaration ou de liquidation commise par le contribuable et rectifiée par l'administration, doit être arrêté, en principe, au dernier jour du mois de la proposition de rectification ou, lorsque les droits ainsi éludés ont été acquittés par le contribuable avant cette date, au dernier jour du mois de ce paiement ; qu'en revanche, demeure sans incidence sur le décompte des intérêts de retard devant assortir le rappel des droits ainsi éludés, au titre de l'année, de l'exercice ou de la période d'imposition concernée, la circonstance que la rectification dont ce rappel procède ferait, par ailleurs, apparaître une éventuelle surtaxe au titre d'une année, d'un exercice ou d'une période d'imposition ultérieure ;

10. Considérant que la requérante soutient que les paiements correspondant aux factures en cause ayant été encaissés par ses fournisseurs quelques semaines ou quelques mois après la date à laquelle elle a procédé à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui les grevait, donnant alors naissance à son droit à déduction, et que par suite, la période à prendre en compte pour le calcul de l'intérêt de retard devait s'arrêter à la date à laquelle son droit à déduction naissait légalement ;

11. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que le rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société SPIE SUD-EST au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009, à raison de la taxe déduite par anticipation dans les conditions rappelées au point 3, a été notifié à l'intéressée par proposition de rectification du 28 juillet 2011 ; que, d'une part, la requérante ne justifie pas avoir réglé auprès du Trésor le montant du rappel de droits établi, au titre de ladite période, avant le 31 juillet 2011, dernier jour du mois de cette proposition de rectification ; que, d'autre part, ne saurait valoir paiement des droits ainsi éludés, au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009, le trop-versé de taxe sur la valeur ajoutée qu'aurait ultérieurement acquitté l'intéressée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2010, non vérifiée par l'administration par suite de l'absence alléguée de déduction de la même taxe au titre de cette dernière période, lors de l'ouverture de ce droit par paiement du prix des factures concernées à ses fournisseurs, intervenu au cours de l'année 2010 ; que, dans ces conditions, l'administration, en arrêtant le décompte des intérêts de retard en litige au 31 juillet 2011, dernier jour du mois de la proposition de rectification notifiée à la requérante, n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 1727 du code général des impôts, et n'a davantage méconnu le principe prohibant l'enrichissement sans cause ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société SPIE SUD-EST n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société SPIE SUD-EST est rejetée.

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N° 14VE01575 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE01575
Date de la décision : 11/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-05 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Fait générateur.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Antoine ERRERA
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-02-11;14ve01575 ?
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