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19/03/2015 | FRANCE | N°14NT01961

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 19 mars 2015, 14NT01961


Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2014, présentée pour Mme D...A..., élisant domicile..., par Me Lamy-Rabu, avocat ;

Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403046 en date du 30 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2014 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé un pays vers lequel elle pourra être reconduite d'office lorsque le dél

ai sera expiré ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-...

Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2014, présentée pour Mme D...A..., élisant domicile..., par Me Lamy-Rabu, avocat ;

Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403046 en date du 30 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2014 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé un pays vers lequel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au profit de son conseil par application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

elle soutient que :

- en refusant le renouveler de son titre de séjour en qualité de conjoint de ressortissant français au motif que la communauté de vie avec son mari avait cessé sans prendre en compte les violences conjugales infligées par son mari, le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; en s'en tenant à une lecture stricte de l'accord franco-algérien qui ne reprend pas les dispositions de l'article L313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal administratif entretient une discrimination à l'encontre des ressortissantes algériennes ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée de l'exception d'illégalité du refus de renouvellement de son titre de séjour ; elle porte en outre une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant l'Algérie comme pays de destination méconnaît les dispositions de l'article 3 de cette même convention ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 17 novembre 2014 fixant la clôture d'instruction au 8 janvier 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2014, présenté par le préfet de Maine-et-Loire qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- en ce qui concerne le refus de titre de séjour : l'accord franco-algérien régit exclusivement le séjour des ressortissants algériens sur le territoire français, aussi la requérante ne peut elle se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle ne remplit pas la condition de détention d'un visa de long séjour pour obtenir un certificat de résidence algérien sur le fondement du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; la décision n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;

- sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français : le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour n'est pas fondé ; la décision ne porte pas d'atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée au regard du but poursuivi ;

- Mme A...n'établit pas l'existence de risques personnels encourus en cas de retour en Algérie, la décision ne méconnaît dès lors pas l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 22 octobre 2014, admettant Mme A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et désignant Me Lamy-Rabu pour la représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2015 :

- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur,

- les observations de Lamy-Rabu, avocat de MmeA... ;

1. Considérant que Mme A..., ressortissante algérienne, née le 21 février 1981, est entrée en France le 10 janvier 2013 sous le couvert d'un passeport revêtu d'un visa valable 90 jours et portant la mention " familleC... " ; qu'un certificat de résidence valable du 10 janvier 2013 au 9 janvier 2014 lui a été délivré par le préfet d'Indre-et-Loire en qualité de conjointe de Français ; que l'intéressée ayant sollicité le 6 janvier 2014 le renouvellement de son certificat de résidence algérien, le préfet de Maine-et-Loire a, par arrêté du 13 mars 2014, refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que Mme A... relève appel du jugement en date du 30 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux " ; que l'accord franco-algérien régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité ; qu'il suit de là que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance, ne sont, à l'exception de certaines dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers qui n'ont pas été écartées par une disposition contraire expresse contenue dans cet accord, pas applicables aux ressortissants algériens, lesquels relèvent des règles fixées par ledit accord ; qu'une ressortissante algérienne ne peut ainsi utilement, pour contester la légalité d'un refus de renouvellement de certificat de résidence, invoquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant que lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger en raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, le préfet peut accorder le renouvellement du titre de séjour ; que, toutefois, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, notamment eu égard à l'examen des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;

3. Considérant que le préfet de Maine-et-Loire a refusé le renouvellement du titre de séjour d'un an sollicité par Mme A... épouse B...en raison de la rupture de la vie commune avec son époux ; que l'intéressée fait toutefois valoir que le préfet aurait dû faire usage de son pouvoir de régularisation et tenir compte de sa situation particulière en raison des violences que son conjoint lui a fait subir, la contraignant à mettre fin à la vie commune pour s'y soustraire ; qu'en l'espèce, compte tenu des résultats de l'examen médico-légal du 14 mai 2013 et des termes du jugement de relaxe prononcé par le tribunal correctionnel de Tours le 26 décembre 2013, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation à laquelle il s'est livré de la situation personnelle de cette ressortissante algérienne ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour n'est pas établie ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français prononcée à la suite de la décision de refus de séjour serait privée de base légale du fait de l'illégalité de cette dernière ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si Mme A...fait valoir qu'elle a exercé une activité professionnelle de vendeuse pendant quelques mois et qu'elle est en cours de formation en vue d'assurer son insertion professionnelle, il est constant que son entrée sur le territoire français est récente ; qu'elle ne justifie pas avoir développé des liens personnels particuliers au cours de son séjour en France ni être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans ; que dans ces conditions la mesure d'éloignement n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ;

7. Considérant que les allégations de Mme A... selon lesquelles, à la suite de l'échec de son mariage arrangé entre les familles, elle serait rejetée par sa famille au cas de retour en Algérie, au demeurant non établies par les trois attestations convenues et établies en cours d'instance, ne sont pas de nature à faire regarder la décision fixant le pays de destination comme méconnaissant les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de Maine-et-Loire de délivrer à Mme A...une carte de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont MmeA..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 26 février 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Etienvre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mars 2015.

Le rapporteur,

C. LOIRATLe président,

F. BATAILLE

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT01961


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01961
Date de la décision : 19/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Cécile LOIRAT
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : LAMY-RABU

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-03-19;14nt01961 ?
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