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26/03/2015 | FRANCE | N°14NC00040

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 26 mars 2015, 14NC00040


Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2014, complétée par un mémoire enregistré le 4 novembre 2014, présentée pour la Société MT Trading, dont le siège est ZAC du Plateau à Flavigny (54630), représentée par son gérant en exercice, par MeA...;

La Société MT Trading demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101636 du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant, selon le tribunal, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2005, 2006

et 2007 ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le...

Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2014, complétée par un mémoire enregistré le 4 novembre 2014, présentée pour la Société MT Trading, dont le siège est ZAC du Plateau à Flavigny (54630), représentée par son gérant en exercice, par MeA...;

La Société MT Trading demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101636 du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant, selon le tribunal, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2005, 2006 et 2007 ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes mises à sa charge au titre de l'année 2006 ;

3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La Société MT Trading soutient que :

- la méthode d'évaluation de la valeur vénale des titres de la société AB Services est erronée ;

- l'intention libérale de M. D...à l'égard de la Société MT Trading n'est pas établie ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2014, présenté par le ministre chargé du budget qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- la méthode d'évaluation de la valeur vénale des titres de la société AB Services n'est pas erronée ;

- l'intention libérale de M. D...à l'égard de la Société MT Trading est établie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2015 :

- le rapport de Mme Guidi, premier conseiller,

- les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public,

- et les observations de Me Crozat, avocat de la société MT Trading ;

1. Considérant que la société à responsabilité MT Trading a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a donné lieu à une proposition de rectification du 17 juin 2009 aux termes de laquelle l'administration fiscale a notamment procédé à la réévaluation d'une participation minoritaire acquise par la société MT Trading dans la société anonyme Société Nouvelle AB Services les 14 et 15 mars 2006 ; que si la proposition de rectification du 17 juin 2009 met à la charge de la société MT Trading des rappels d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007, la société n'a toutefois demandé au tribunal administratif de Nancy que de prononcer la décharge du rappel d'impôt sur les sociétés qui lui a été assigné au titre de l'année 2006 ; qu'elle relève ainsi appel du jugement du tribunal administratif de Nancy du 5 novembre 2013 en ce qu'il a rejeté cette demande formée au titre de l'année 2006 ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés (...) " ; que, dans le cas où le prix de l'acquisition d'une immobilisation a été volontairement minoré par les parties pour dissimuler une libéralité faite par le vendeur à l'acquéreur, l'administration est fondée à corriger la valeur d'origine de l'immobilisation, comptabilisée par l'entreprise acquéreuse pour son prix d'acquisition, pour y substituer sa valeur vénale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l'acquisition faite à titre gratuit et à réintégrer dans les résultats de l'entreprise acquéreuse la différence entre la valeur vénale et le prix d'acquisition déclaré ;

3. Considérant que la preuve de l'existence d'une libéralité doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour le vendeur, d'octroyer, et, pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ; que dans le cas où le vendeur et l'acquéreur sont liés par une relation d'intérêts, l'intention d'octroyer et de recevoir une libéralité est présumée ;

4. Considérant, en premier lieu, que la valeur vénale de titres non admis à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ; que la valeur réelle des titres d'une société doit être évaluée par référence à la valeur des autres titres de la société telle qu'elle ressort des transactions portant à la même époque sur ces titres dès lors que cette valeur ne résulte pas d'un prix de convenance ; qu'en l'absence de toute transaction ou de transaction équivalente, l'appréciation de la valeur vénale est faite en utilisant les méthodes d'évaluation qui permettent d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société à responsabilité limitée MT Trading, qui a pour activité la gestion de participations et le conseil dans les domaines managérial, comptable, fiscal et juridique, a fait l'acquisition, les 14 et 15 mars 2006, de l'intégralité des parts sociales de la société anonyme Société Nouvelle AB Services ; qu'après la vérification de la comptabilité de la société MT Trading, l'administration fiscale a, par une proposition de rectification du 17 juin 2009, procédé à la réévaluation d'une participation minoritaire, acquise pour une valeur individuelle de 66,09 euros auprès de M.D..., associé à hauteur de 48% dans la Société Nouvelle AB Services ; que, concomitamment, les parts sociales détenues par deux autres actionnaires de la Société Nouvelle AB Services, détenant chacun approximativement 25 % du capital social, ont été acquises par la société MT Trading pour un montant individuel de 300 euros ; que pour déterminer la valeur de l'avantage dont a bénéficié la société MT Trading du fait de la cession des parts de M. D...à un prix unitaire de 66,09 euros, l'administration fiscale a calculé la moyenne de la valeur mathématique et de la valeur de rentabilité des titres de M. D...et a rapproché le résultat, arrêté à 274 euros par action, du prix des cessions des autres parts sociales de la Société Nouvelle AB Services ;

6. Considérant, d'une part, que si la société MT Trading critique la méthode mathématique mise en oeuvre par l'administration pour évaluer les titres de la société AB services en faisant valoir que le service a fait application d'un coefficient de pondération du bénéfice net courant moyen, l'application d'une telle pondération n'est pas, contrairement à ce que soutient la requérante, exclue par le guide d'évaluation des entreprises ; qu'il résulte de l'instruction que la pondération opérée par le service est justifiée par l'augmentation significative du chiffre d'affaires de la Société Nouvelle AB Services au cours des exercices clos en 2003, 2004 et 2005, impliquant une valorisation de son fonds de commerce correspondant à la croissance de l'activité de la société ; que la société requérante soutient également que le calcul de la valeur de productivité des titres serait inexact faute d'avoir tenu compte d'un coefficient de risque maximal, correspondant à la situation de la société en situation de dépendance économique par rapport à son fournisseur et aux changements induits par le changement de propriétaire ; qu'il ressort cependant des termes de la proposition de rectification que le service a déterminé le coefficient de risque en se fondant sur la possibilité d'un changement de fournisseur et sur la circonstance que le changement d'actionnaire et l'inclusion dans un groupe nouveau ont eu lieu dans un cercle restreint d'actionnaires d'un même groupe de sociétés ; qu'enfin, l'administration a combiné ces résultats en procédant à leur moyenne simple sans que la société requérante qui se borne à soutenir que la société Nouvelle AB Services, relevant de la catégorie des PME, n'exerce pas une activité commerciale puisse utilement se prévaloir de la moyenne pondérée applicable aux grandes entreprises industrielles ; qu'il en résulte que, contrairement à ce que soutient la société MT Trading, l'administration a pris en compte la situation économique réelle de la Société Nouvelle AB Services pour déterminer la valeur de ses titres et obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ;

7. Considérant, d'autre part, que l'administration s'est également référée à la valeur des 6 000 titres détenus par les membres de la famille C...acquis le 17 mars 2006 par la société MT Trading pour une valeur unitaire de 300 euros pour déterminer la valeur réelle des titres cédés par M. D...à un prix unitaire de 66,69 euros ; que contrairement à ce que soutient la société MT Trading, la valeur en 2004 des titres acquis par M. D...dans la société AB services, d'un montant de 35,44 euros, ne saurait être utilisée à titre d'élément de comparaison pour fixer le prix de leur revente en 2006 à la société MT Trading dès lors que le chiffre d'affaires de la société a progressé de manière significative durant la période comprise entre les deux cessions ; que la cession des titres détenus par M. B...le 15 mars 2006 à un prix unitaire de 24,81 euros ne saurait par ailleurs constituer un élément de comparaison pertinent dès lors qu'elle ne portait que sur 239 titres représentant 2% du capital de la société, alors que la cession effectuée par M. D... portait sur 5 750 titres représentant 47,94 % du capital et que celles effectuées par les membres de la famille C...portaient sur 6 004 titres représentant près de 50 % du capital ; qu'enfin, si la société MT Trading soutient que le prix unitaire de 300 euros auquel les membres de la famille C...ont effectué la cession de leurs titres dans la Société Nouvelle AB Services est un prix de convenance déterminé en fonction de leurs intérêts fiscaux au regard de l'imposition des plus-values de cession et ne saurait ainsi être retenu comme un terme de comparaison pertinent, elle n'apporte cependant aucun élément à l'appui de ces allégations ; qu'ainsi, la cession par les membres de la famille C...ayant eu lieu dans des conditions comparables à celle des titres détenus par M. D...dans la société AB services, c'est à bon droit que le service a rapproché ces deux cessions pour comparer la valeur des titres cédés ; que, dans ces conditions, la méthode des transactions comparables, combinée aux autres méthodes de calcul, a permis d'obtenir le résultat le plus proche possible de celui qui résulterait de la rencontre de l'offre et de la demande ; que, par suite, l'administration établit un écart significatif entre la valeur vénale des parts acquises par la société MT Trading dans la Société Nouvelle AB Services et le prix convenu avec M.D... ;

8. Considérant, en second lieu, que la société MT Trading est détenue majoritairement par M.D... qui en est par ailleurs le gérant ; que l'acquisition par la société MT Trading des parts que M. D...détenait dans la Société Nouvelle AB Services a été réalisée pour un prix près de quatre fois inférieur à celui retenu pour l'achat de titres comparables détenus par les autres associés de la Société Nouvelle AB Services ; que, dans ces conditions, l'existence d'une communauté d'intérêts unissant M. D...à la société MT Trading et leur intérêt commun dans la minoration de la valeur des titres de la Société Nouvelle AB services caractérisent une intention de libéralité ; que, par suite, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, que la société MT Trading, en minorant excessivement le montant individuel de l'acquisition des seules actions de M.D..., a reçu une libéralité de ce dernier ; que l'administration pouvait donc substituer à la valeur d'origine la valeur vénale des parts de M. D... pour assigner à la société MT Trading des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2006 ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société MT Trading n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société MT Trading la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société MT Trading est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société MT Trading et au ministre chargé du budget.

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N° 14NC00040


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00040
Date de la décision : 26/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-04-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurie GUIDI
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : SOCIETE GEGOUT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-03-26;14nc00040 ?
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