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20/12/2016 | FRANCE | N°14MA05082

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2016, 14MA05082


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités dont elles ont été assorties auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 à 2005 et d'autre part, de prononcer la décharge des cotisations de contributions sociales et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2004 et 2005.

Par un jugement n° 1200751 du 24 octobre 2014, le tribunal

administratif de Nice :

- a prononcé la décharge, d'une part, de la cotisation supplé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités dont elles ont été assorties auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 à 2005 et d'autre part, de prononcer la décharge des cotisations de contributions sociales et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2004 et 2005.

Par un jugement n° 1200751 du 24 octobre 2014, le tribunal administratif de Nice :

- a prononcé la décharge, d'une part, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles M. C... a été assujetti au titre de l'année 2003, soit 7 919 euros, et d'autre part des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2005, soit 320 786 euros ;

- a réduit les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales assignées à M. C... au titre de l'année 2004 d'une somme de 219 983 euros ;

- a déchargé M. C... des droits et pénalités correspondant à ces réductions de bases ;

- a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée par télécopie le 18 décembre 2014, régularisée par courrier le 23 décembre 2014, et des mémoires enregistrés le 28 octobre 2016 et le 30 novembre 2016, M. C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 24 octobre 2014 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande au titre de l'année 2004 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées restant à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la procédure d'imposition :

- le caractère contradictoire de l'examen de sa situation fiscale personnelle n'a pas été respecté, dès lors qu'il n'a pas disposé des documents saisis à son domicile par l'administration dans le cadre de la procédure de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ;

- le délai complémentaire de sept jours qui lui a été imparti pour répondre à la demande de justifications prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales était insuffisant ;

- il en résulte une méconnaissance des dispositions de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des droits du contribuable vérifié et du devoir de loyauté auquel l'administration est tenue ;

- les informations recueillies par l'administration auprès des autorités fiscales libanaises ne lui ont pas été communiquées avant la mise en recouvrement des impositions en litige, alors que ces renseignements ont permis à l'administration de motiver les rehaussements et les pénalités pour manquement délibéré ;

Sur le bien fondé des impositions :

- il a justifié que les sommes imposées dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée proviennent de la société Healthcare Publications Limited et correspondent à des remboursements de frais, à des loyers perçus au Liban et à un prêt accordé par cette société ;

- la société Healthcare Publications Limited ne pouvait lui verser les sommes alléguées dès lors qu'elle n'a pas fait de bénéfices ;

- l'administration ne rapporte pas la preuve de sa volonté délibérée d'éluder l'impôt en se fondant sur la seule insuffisance des justifications apportées.

Par des mémoires en défense enregistrés le 5 août 2015 et le 27 octobre 2016, le ministre de finances et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... à l'encontre des impositions restant en litige ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant que M. C... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle qui a porté sur les années 2003 à 2005 ; qu'au cours de la même période, l'administration, agissant dans le cadre des dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, a procédé à la visite du domicile de l'intéressé et à la saisie de documents le 30 mai 2007 ; qu'à l'issue de ces procédures, l'administration a notifié à M. C... des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu au titre des années 2003 à 2005, et en matière de contributions sociales au titre des années 2004 et 2005 ; qu'en particulier, s'agissant de ces deux dernières années, elle a taxé d'office dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, des sommes dont le caractère non imposable n'était pas établi ; que M. C... a saisi le tribunal administratif de Nice, qui en premier lieu a prononcé la décharge, d'une part, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2003, soit 7 919 euros, et d'autre part des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2005, soit 320 786 euros, en deuxième lieu a réduit les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales assignées à M. C... au titre de l'année 2004 d'une somme de 219 983 euros, en troisième lieu a déchargé M. C... des droits et pénalités correspondant à ces réductions de bases, en quatrième lieu a rejeté le surplus de la demande ; que M. C... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, par décision en date du 27 octobre 2016, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration fiscale a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à hauteur d'une somme de 61 302 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. C... a été assujetti au titre de l'année 2004 ; que les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur les impositions restant en litige :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de débat contradictoire :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales alors applicable : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. " ; qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements et de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 69 du même livre : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. " ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que les documents saisis au domicile de M. C... le 30 mai 2007 lui ont été restitués le 25 juin 2007 ; que si l'administration avait initialement, le 5 avril 2007, demandé au requérant de produire dans un délai de deux mois des justifications sur ses revenus des années 2004 et 2005 en application de la procédure prévue à l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, elle lui a accordé, par courrier reçu par l'intéressé dès le 14 juin 2007, du fait de la difficulté qu'il rencontrait pour répondre aux demandes en l'absence de restitution des pièces saisies, un délai complémentaire de sept jours à compter de la restitution des documents, expirant le 2 juillet 2007 ; qu'ainsi, la demande de justifications a été formulée dans des conditions qui permettaient au contribuable de faire valoir ses droits, sans qu'il puisse être regardé comme ayant été privé d'une garantie de procédure sur ce point ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la proposition de rectification qui, selon l'article L. 48 de ce livre, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; qu'il est constant que plusieurs entrevues ont eu lieu les 28 septembre, 13 décembre 2006 et 19 mars 2006 ainsi que des échanges écrits dans le cadre des demandes de justifications, soit avant notification de la proposition de rectification du 28 août 2007 ; que les documents saisis lui ont été restitués le 25 juin 2007, également avant cette notification ; que, dès lors, le contribuable n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé d'un débat contradictoire du fait que la saisie domiciliaire a été concomitante à l'examen de sa situation fiscale personnelle ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable aux opérations de contrôle menées à l'encontre de M. C... : " Dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle (ESFP), le dialogue joue également un rôle très important tout au long de la procédure. Il vous permet de présenter vos explications sur les discordances relevées par le vérificateur à partir des informations dont il dispose "; que ni ces dispositions, ni aucune autre disposition de la charte n'imposent au vérificateur, avant l'envoi de la demande d'éclaircissements et de justifications, d'engager un dialogue portant sur les discordances qu'il a relevées ; que, par suite, si M. C... entend soutenir qu'un tel dialogue n'a pas eu lieu avant l'envoi de la demande de justifications qui lui a été adressée en application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, cette circonstance est, en tout état de cause, dépourvue d'incidence sur la régularité de la procédure au terme de laquelle l'administration a imposé ses revenus d'origine indéterminée ; que le vérificateur n'a ainsi méconnu ni les garanties prévues par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ni le devoir de loyauté auquel est tenue l'administration fiscale ;

7. Considérant, en dernier lieu, que la procédure d'imposition en cause n'étant pas au nombre de celles visées par les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le moyen tiré de la violation de ces stipulations ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales :

8. Considérant qu'il n'y a plus lieu pour la Cour de se prononcer sur le mérite du moyen tiré de l'absence de communication au requérant de la réponse des autorités libanaises dans le cadre de la procédure d'assistance administrative internationale mise en oeuvre par l'administration, dès lors qu'il résulte de l'instruction que les demandes de renseignements concernaient le montant de loyers perçus au Liban et que le dégrèvement prononcé en cours d'instance a porté sur ces loyers ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il incombe à M.C..., régulièrement taxé d'office sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales précités à raison de revenus d'origine indéterminée, d'établir que les sommes concernées, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie déterminée de revenus ;

10. Considérant, en premier lieu, que l'administration a réintégré dans les revenus imposables du requérant la somme de 50 000 euros, créditée sur l'un de ses comptes bancaires le 28 janvier 2004 ; que si M. C... fait valoir que cette somme correspond au remboursement de frais professionnels par la société HCP-Healthcare Publications Limited pour laquelle il exerce des fonctions de consultant et d'assistance, en se bornant à se référer à un contrat d'assistance conclu le 1er avril 2003 avec cette société, à une liste de participation à des réunions et à des factures d'hôtel établies à Dubaï, il n'apporte, devant le juge de l'impôt, aucun élément de nature à établir que le versement litigieux était destiné à le rembourser des frais qu'il aurait engagés dans l'intérêt de cette société ; qu'il est constant, comme l'ont relevé les premiers juges, que l'administration n'a pas retrouvé trace, dans les écritures comptables de la société HCP-Healthcare Publications Limited, d'un tel remboursement de frais ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a regardé la somme en cause comme constituant un revenu d'origine indéterminée ;

11. Considérant, en second lieu, M. C... ne justifie pas plus en appel qu'en première instance que la somme totale de 339 933,52 euros portée au crédit de ses comptes bancaires en 2004 correspondrait à plusieurs sommes versées par la société HCP-Healthcare Publications Limited, en exécution d'un contrat de prêt conclu le 15 janvier 2003 pour un montant de 1 500 000 euros, pour financer des travaux dans une villa dont il est propriétaire, par l'intermédiaire de la SCI Eden dont il détient 100 % des parts sociales ; qu'en particulier, les documents produits ne permettent pas de justifier d'une relation entre ce prêt et les crédits bancaires litigieux ; que, dans ces conditions, le requérant ne peut être regardé comme apportant la preuve du caractère non imposable de ces crédits ;

Sur la pénalité pour manquement délibéré appliquée au titre de l'année 2004 :

12. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré.(...) " ;

13. Considérant que l'administration fiscale justifie du manquement délibéré en relevant, dans la proposition de rectification du 28 août 2007, l'importance du rehaussement par rapport aux revenus initialement déclarés par M. C..., ainsi que les liens étroits qui existent entre celui-ci et la société HCP-Healthcare Publications Limited, qui lui a versé les sommes en cause sur ses comptes personnels ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions restant en litige ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande M. C... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : A concurrence de la somme de 62 302 euros, il n'y pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales assignées à M. C... au titre de l'année 2004.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction nationale des vérifications des situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,

- Mme Boyer, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2016.

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N° 14MA05082


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