Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille la condamnation de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole à lui verser la somme de 90 594,74 euros en réparation du préjudice subi résultant de sa chute le 26 octobre 2010 rue Michel Gachet à Marseille.
Par un jugement n° 1205293 du 18 avril 2014, le tribunal administratif de Marseille a condamné la communauté urbaine à verser, par son article 1er, à Mme B...la somme de 5 070 euros en réparation de ses préjudices personnels et, par son article 2, au département des Bouches-du-Rhône, employeur de la victime, la somme de 31 113,20 euros portant intérêts.
Procédure contentieuse devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 juin 2014, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 1205293 du 18 avril 2014 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a, par son article 1er, limité son indemnisation à la somme de 5 070 euros, en tant qu'il a, par son article 3, mis à la charge de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole la somme de 700 euros au titre des frais d'expertise et qu'il a, par son article 6, rejeté le surplus de sa demande indemnitaire ;
2°) de condamner la communauté urbaine Marseille Provence Métropole à lui verser une somme portée à 90 594,74 euros en réparation de son préjudice et celle de 1 400 euros au titre des frais d'expertise ;
3°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) de condamner la communauté urbaine Marseille Provence Métropole aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise d'un montant de 1 400 euros.
Mme B...soutient que :
- c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la responsabilité de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole était engagée pour défaut d'entretien normal de la voie publique ;
- en revanche, c'est à tort qu'ils ont limité son indemnisation en retenant la faute d'imprudence de la victime évaluée à 70 % ;
- elle n'a commis aucune faute en empruntant le trottoir jonché d'ordures comme les rues avoisinantes en raison d'une grève des éboueurs ;
- sur son préjudice, elle a subi une perte de gains professionnels de 1 124,24 euros pour la période d'arrêt de travail du 26 octobre 2010 au 27 mai 2011 ;
- l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a retenu l'incidence professionnelle, qui sera réparée par l'allocation d'une somme de 15 000 euros ;
- les frais futurs, soit 48 heures de déficit fonctionnel temporaire total, seront réparés par la somme de 1 250 euros ;
- son déficit fonctionnel temporaire total du 26 octobre 2010 au 30 octobre 2010 sera réparé par la somme de 1 000 euros ;
- son déficit fonctionnel temporaire partiel donnera lieu à l'allocation d'une somme de 6 720 euros ;
- ses souffrances endurées de 3,5/7 seront réparées par la somme de 20 000 euros ;
- son préjudice esthétique de 2/7 sera réparé par la somme de 8 000 euros ;
- son déficit fonctionnel permanent de 9 % sera indemnisé par la somme de 22 500 euros ;
- son préjudice d'agrément sera réparé par la somme de 15 000 euros ;
- son préjudice matériel est évalué à 169 euros ;
- la communauté urbaine devra ainsi lui rembourser la somme de 90 594,74 euros ;
- c'est aussi à tort que les premiers juges ont mis à la charge de la communauté urbaine les frais d'expertise pour la somme de 700 euros, alors que ces frais s'élèvent à 1 400 euros.
Par mémoires enregistrés les 1er octobre 2014 et 6 octobre 2015, la communauté urbaine Marseille Provence Métropole conclut à titre principal, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement qui a retenu sa responsabilité à 30 % et au rejet de la requête de Mme B..., à titre subsidiaire, à ce que la Cour dise que la faute de la victime l'exonère de toute responsabilité, à titre infiniment subsidiaire, à ramener la demande indemnitaire de la requérante à de plus justes proportions et en tout état de cause, à condamner Mme B...à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La communauté urbaine fait valoir que :
- aucun défaut d'entretien normal ne peut lui être reproché ;
- la faute d'inattention de la victime est de nature à exonérer la communauté urbaine de toute responsabilité ;
- la requérante ne saurait être indemnisée pour une somme totale supérieure à 14 169,40 euros.
Par un mémoire enregistré le 26 mai 2015, le département des Bouches-du-Rhône, représenté par le cabinet de Castelnau, conclut à la réformation du jugement en tant qu'il a laissé une part de 70 % de responsabilité à la requérante et à la condamnation de la communauté urbaine à lui verser la somme de 103 708,67 euros assortie des intérêts au taux légal.
Le département fait valoir que :
- c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu la responsabilité de la communauté urbaine ;
- en revanche, c'est à tort qu'ils ont retenu la faute de la victime ;
- en tout état de cause, la part de responsabilité de Mme B...ne peut être fixée à 70 % ;
- en tant qu'employeur de la victime, le département peut demander le remboursement des charges qu'il a engagées du fait de cet accident ;
- le total de ces frais médicaux, de transport et d'expertise s'élève à la somme de 103 708,67 euros.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de MmeE..., première conseillère,
- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,
- et les observations de Me A...substituant Me D...de la Selarl Abeille et associés pour la communauté urbaine Marseille Provence Métropole.
1. Considérant que Mme B...interjette appel du jugement du 18 avril 2014 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a limité à 30 % la part de la responsabilité de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole dans la survenance de sa chute le 26 octobre 2010 rue Michel Gachet à Marseille et qu'il a limité à 5 070 euros la condamnation de la communauté urbaine en réparation de son préjudice ; que le département des Bouches-du-Rhône conclut à la réformation du jugement en tant qu'il a laissé une part de 70 % de responsabilité à la requérante et à la condamnation de la communauté urbaine à lui verser, en sa qualité d'employeur de MmeB..., la somme de 103 708,67 euros assortie des intérêts ; que la communauté urbaine Marseille Provence Métropole conclut à titre principal, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement qui a retenu sa responsabilité et au rejet de la requête de MmeB..., à titre subsidiaire, à ce que la Cour dise que la faute de la victime l'exonère de toute responsabilité, à titre infiniment subsidiaire, à ramener la demande indemnitaire de la requérante à de plus justes proportions ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, régulièrement mise en cause, n'a pas produit ;
Sur la responsabilité :
2. Considérant qu'il appartient à l'usager, victime d'un dommage survenu sur une voie publique, de rapporter la preuve du lien de cause à effet entre l'ouvrage public et le dommage dont il se plaint ; que la collectivité en charge de l'ouvrage public doit alors, pour que sa responsabilité ne soit pas retenue, établir que l'ouvrage public faisait l'objet d'un entretien normal ou que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure ;
3. Considérant que, pour estimer que la responsabilité de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole était engagée pour défaut d'entretien normal de la voirie, les premiers juges ont affirmé que la présence d'immondices en quantité importante sur le trottoir et la chaussée, qui ont causé la chute de la requérante, ne constituait pas un obstacle que tout piéton peut s'attendre à rencontrer et que la grève des éboueurs pendant 14 jours en octobre 2010 à Marseille à l'origine de ces tas d'ordures ne pouvait être regardée comme un cas de force majeure de nature à exonérer la communauté urbaine de sa responsabilité ;
4. Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction que ce tas très important d'immondices était parfaitement visible en octobre vers 9 heures ; que depuis le début de la grève des éboueurs une quinzaine de jours auparavant, le tas d'ordures litigieux croissait régulièrement, ce que la requérante ne pouvait pas ignorer compte tenu du fait qu'elle connaissait bien les lieux pour habiter à proximité ; que ce tas pouvait facilement être contourné ; qu'à cet égard, Mme B... n'est pas fondée à soutenir qu'elle était tenue, en application de l'article R. 412-34 du code de la route, de marcher sur le trottoir sans pouvoir contourner le tas d'immondices en empruntant la chaussée réservée aux automobilistes, dès lors que les piétons ne sont tenus d'utiliser les trottoirs que lorsqu'ils sont praticables ; que, par suite, la chute de la requérante résulte exclusivement de son imprudence ; que, dans ces conditions, et en l'absence d'autre moyen dont la Cour serait saisie par l'effet dévolutif de l'appel, la communauté urbaine Marseille Provence Métropole est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu une part de responsabilité de la communauté urbaine et qu'ils l'ont condamnée à indemniser Mme B...et son employeur, le département des Bouches-du-Rhône ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ni Mme B...ni le département des Bouches-du-Rhône ne sont fondés à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a limité leur indemnisation ; que la communauté urbaine Marseille Provence Métropole est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges l'ont condamnée à indemniser Mme B...et le département des Bouches-du-Rhône au titre du préjudice qu'ils ont subi du fait de cette chute ;
Sur les frais d'expertise :
6. Considérant qu'il résulte de l'ordonnance de taxation définitive des frais d'expertise n° 1100528-0 du 10 juillet 2013 produite par la requérante que l'expert médical désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a perçu le 12 juillet 2011 une allocation provisionnelle d'un montant de 700 euros à valoir sur le montant des frais d'expertise et que les frais et honoraires ont été taxés à la somme définitive de 700 euros "somme qui coïncide exactement avec le montant de l'allocation provisionnelle accordée (...) et solde le compte" ; que cette ordonnance met la charge des frais d'expertise à Mme B...; que, dans ces conditions, Mme B...n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait conservé à sa charge la moitié des frais de cette expertise, soit 700 euros ; qu'il y a lieu dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre la charge de ces frais à la communauté urbaine ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de leurs frais d'instance ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 avril 2014 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : Les frais d'expertise d'un montant total de 700 (sept cents) euros sont mis à la charge définitive de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...B..., à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, au département des Bouches-du-Rhône et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.
Copie en sera adressée à l'expert.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2015, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président
- M. Laso, président-assesseur,
- MmeE..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 5 novembre 2015.
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N° 14MA026762
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