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14/04/2016 | FRANCE | N°14MA02619

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 14 avril 2016, 14MA02619


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E...veuveC..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de son fils mineur B...C..., et Mlle D...C...ont demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner le centre hospitalier d'Ajaccio à leur verser, à titre principal, la somme globale de 403 653,88 euros et, à titre subsidiaire, la somme globale de 369 563,40 euros en réparation du décès de M. F... C..., leur mari et père.

Par un jugement n° 1300123 du 17 avril 2014, le tribunal administratif de Bastia a condamné le centre ho

spitalier d'Ajaccio à verser à Mme E... la somme de 272 112,47 euros, à M. B.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E...veuveC..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de son fils mineur B...C..., et Mlle D...C...ont demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner le centre hospitalier d'Ajaccio à leur verser, à titre principal, la somme globale de 403 653,88 euros et, à titre subsidiaire, la somme globale de 369 563,40 euros en réparation du décès de M. F... C..., leur mari et père.

Par un jugement n° 1300123 du 17 avril 2014, le tribunal administratif de Bastia a condamné le centre hospitalier d'Ajaccio à verser à Mme E... la somme de 272 112,47 euros, à M. B... C...la somme de 39 552,71 euros, à Mlle D...C...la somme de 23 262,22 euros et à l'Etat la somme globale de 150 583,82 euros.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 juin 2014, et deux mémoires, enregistrés les 18 juillet 2014 et 4 mars 2016, le centre hospitalier d'Ajaccio, représenté par Me G..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300123 du 17 avril 2014 du tribunal administratif de Bastia ;

2°) de rejeter les demandes des consorts C...et de l'Etat.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- M. B... C...n'a pas repris l'instance introduite en son nom par sa mère ;

- le fait que M. C... ait pu échapper à la vigilance du service où il était hospitalisé ne révèle ni défaillance dans la surveillance ni faute dans l'organisation du service ;

- l'évaluation des préjudices notamment le préjudice économique subi par les consorts C...et E...est excessive ;

- l'évaluation du montant de la créance de l'Etat (ministère de l'éducation nationale) est excessive.

Par des mémoires, enregistrés les 11 septembre 2014 et 15 mars 2016, Mme A... E... veuveC..., Mlle D...C...et M. B... C..., représentés par Me de la Foata, concluent :

1°) au rejet de la requête du centre hospitalier d'Ajaccio ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- à la réformation du jugement par lequel le tribunal administratif de Bastia a limité aux sommes de 272 112,47 euros, de 39 552,71 euros et de 23 262,22 euros les indemnités au versement desquelles il a condamné le centre hospitalier d'Ajaccio en réparation de leurs préjudices respectifs ;

- à ce que soit porté, à titre principal, à la somme globale de 452 639,01 euros et, à titre subsidiaire, à la somme globale de 405 222,53 euros, le montant de l'indemnité due au titre du décès de M. C... ;

3°) à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier d'Ajaccio au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- M. B... C...a repris l'instance en son nom personnel ;

- une défaillance dans la surveillance et une faute dans l'organisation du service sont directement à l'origine de l'accident ayant entraîné la mort de M. C... et de nature à engager la pleine et entière responsabilité de l'établissement ;

- les frais d'obsèques se sont élevés à 3 925,30 euros ;

- le préjudice moral doit être indemnisé par les sommes de 40 000 euros pour Mme E... veuve C...et 50 000 euros pour chacun des enfants Camille etB... C... ;

- les préjudices économiques de Mme E..., de Mlle D...C...et de M. B... C...s'élèvent, à titre principal, à 309 126,86 euros, 21 298,86 euros et 30 831,06 euros ; soit, la somme globale de 452 639,01 euros après déduction du capital décès de 52 543,07 euros et, à titre subsidiaire, à la somme globale de 405 222,53 euros.

Par un mémoire, enregistré le 23 septembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête du centre hospitalier d'Ajaccio et à ce que cet établissement verse à l'Etat la somme de 300 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 17 août 2015, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête du centre hospitalier d'Ajaccio.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code la sécurité sociale ;

- l'ordonnance n° 59-6 du 7 janvier 1959 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laso ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique.

1. Considérant qu'à la suite d'une tentative de suicide, M. F... C...a été admis, dans la nuit du 14 au 15 janvier 2012, au service des urgences du centre hospitalier d'Ajaccio ; qu'il a subi une intervention chirurgicale le 15 janvier 2012 et a été transféré au service orthopédique le 16 janvier ; qu'à la même date, il se jetait dans le vide depuis le toit de l'établissement ; que Mme E... veuveC..., en son nom propre et au nom de son fils mineur, B..., et Mlle D...C..., sa fille majeure, ont recherché la responsabilité du centre hospitalier d'Ajaccio sur le fondement du défaut de surveillance et de la faute dans l'organisation du service ; que le centre hospitalier d'Ajaccio relève appel du jugement du 17 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Bastia l'a condamné à verser à Mme E... veuve C...la somme de 272 112,47 euros, à M. B... C... la somme de 39 552,71 euros, à Mlle D...C...la somme de 23 262,22 euros et à l'Etat la somme de 150 583,82 euros dont 98 040,75 euros au titre de la pension de réversion versée à Mme E... veuve C...par l'Etat (ministère des finances et des comptes publics) et 52 543,07 euros au titre du capital décès versé aux ayants droit de M. C... par le ministère de l'éducation nationale ; que Mme E... veuveC..., Mlle D... C...et M. B... C...concluent au rejet de la requête du centre hospitalier d'Ajaccio et à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a condamné l'établissement hospitalier à leur verser des indemnités inférieures à leurs demandes ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'en se bornant à soutenir dans sa requête que le jugement attaqué est insuffisamment motivé au regard des conclusions dont les premiers juges étaient saisis, le centre hospitalier d'Ajaccio ne permet pas à la Cour d'apprécier la pertinence de ce moyen qui ne peut dès lors qu'être écarté ;

Sur la recevabilité de la demande :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme E... veuve C...agissant au nom de son fils mineur, B...C..., a régulièrement saisi le tribunal administratif de Bastia d'une demande indemnitaire ; que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, la circonstance que M. B... C...soit devenu majeur en cours d'instance ne faisait pas obstacle à ce que celle-ci se poursuivît valablement à son égard sans qu'il fût besoin d'une reprise d'instance dès lors qu'aucune demande nouvelle n'a été présentée au nom d'B... C... postérieurement à la date à laquelle ce dernier a atteint sa majorité ; qu'il suit de là que le moyen invoqué par le centre hospitalier d'Ajaccio, tiré de l'absence de reprise formelle d'instance, est inopérant ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier d'Ajaccio :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. F... C..., hospitalisé dans la nuit du 14 au 15 janvier 2012 au service des urgences du centre hospitalier d'Ajaccio à la suite d'une tentative de suicide, a été placé dans la matinée du 16 janvier 2012 dans le service orthopédie dans une chambre barreaudée compte tenu de son état suicidaire ; qu'il a été examiné par l'infirmier psychiatrique d'un autre établissement spécialisé le jour même vers 10 heures 30 ; que Mme E... veuve C...a notamment informé ce dernier de la volonté de son mari d'attenter à nouveau à ses jours ; que M. C... a également rencontré un psychiatre le 16 janvier 2012, vers 11 heures 15, lequel a immédiatement établi une prescription d'anxiolytiques ; que, toutefois, aux alentours de 14 heures, M. C... a quitté sa chambre, située au fond d'un couloir, et s'est tué en sautant du toit du bâtiment sur lequel il s'était rendu, soit après être passé devant les bureaux des personnels soignants et avoir pris l'ascenseur sans qu'aucun membre du service ne s'en aperçoive, soit après avoir emprunté l'escalier de secours situé à proximité de sa chambre en raison du non fonctionnement du contrôle d'accès ; que, dès lors, compte tenu des circonstances de son hospitalisation, de la nature de sa pathologie et de la connaissance qu'avaient les médecins des risques que comportait son état psychologique, le fait que M. C... ait pu échapper à la vigilance du service où il était hospitalisé et qu'il ait pu mettre fin à ses jours en accédant facilement au toit de l'hôpital révèle une défaillance dans la surveillance et une faute dans l'organisation du service ; que cette faute est directement à l'origine de l'accident qui a entraîné la mort de M. C... ; que, dès lors que des défaillances dans l'organisation du service ont rendu possible le suicide de M. C..., la responsabilité du centre hospitalier se trouve engagée pour la totalité du dommage subi ; que, par suite, le centre hospitalier d'Ajaccio n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia l'a condamné à réparer l'intégralité des conséquences du suicide de M. C... ;

Sur les préjudices :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. F... C...et son épouse exerçaient le métier d'enseignant ; qu'après le décès de M. C..., le foyer était composé de trois personnes, Mme E... veuveC..., âgée de 43 ans, Mlle D...C..., âgée de 20 ans, étudiante et M. B... C..., âgé de 17 ans, lycéen ; que les consorts C...demandent l'indemnisation des pertes de revenus subies du fait du décès de leur époux et père, des frais d'obsèques exposés ainsi que l'indemnisation du préjudice moral ;

En ce qui concerne les pertes de revenus :

6. Considérant que le préjudice économique subi par une personne du fait du décès de son conjoint est constitué par la perte des revenus de la victime qui étaient consacrés à son entretien, compte tenu, le cas échéant, de ses propres revenus et déduction faite des prestations reçues en compensation ; que le préjudice est établi par référence à un pourcentage des revenus de la victime affecté à l'entretien de la famille ;

Quant à la période courant du décès de M. C... à la date de lecture du présent arrêt :

7. Considérant qu'il résulte de l'avis d'imposition des revenus perçus en 2011 que les revenus du foyer étaient constitués des revenus de M. C... qui s'élevaient à la somme de 45 600 euros et de ceux de son épouse qui s'élevaient à la somme de 34 076 euros ; que le revenu annuel global du foyer en 2011 s'élevait ainsi à 79 676 euros ; qu'il convient de déduire de ce revenu annuel global du foyer, dès lors que celui ci comportait deux enfants à charge, Camille etB..., 15 % correspondant à la part des dépenses personnelles de M. C..., soit la somme de 11 951,40 euros ; que le revenu annuel du foyer s'élevait ainsi à 67 724,60 euros ; que, pour l'ensemble de la période concernée, le revenu du foyer était ainsi susceptible de s'élever à la somme de 287 829,55 euros ;

8. Considérant, d'une part, qu'il convient de déduire les traitements perçus par Mme E... veuve C...et M. B... C...pendant cette période ; qu'il résulte des avis d'imposition et des bulletins de traitement versés que Mme E... veuve C...a perçu une somme totale de 168 493,55 euros au titre des années 2012 à 2016 ; que son fils B...C...a quant à lui perçu la somme de 15 308,15 euros au titre des années 2014 à 2016 ; qu'ainsi, le montant des revenus perçus par le foyer s'est élevé à 183 801,70 euros au titre de la période courant de 2012 à la date de lecture du présent arrêt ;

9. Considérant, d'autre part, qu'il convient de déduire les arrérages échus des pensions de réversion et additionnelle versées par l'Etat (ministère des finances et des comptes publics) à Mme E... veuve C...tels qu'ils résultent des avis d'imposition produits au dossier pour les années 2012 à 2014, soit la somme de 46 962 euros, et les sommes de 18 264 euros pour 2015 et 5 327 euros en 2016 calculées par référence au bulletin de pension du 6 janvier 2015 ; qu'ainsi, le montant de ces pensions s'élevait à 70 553 euros ;

10. Considérant que, pour la période concernée, le préjudice économique du foyer qui correspond à la différence entre le revenu disponible de 287 829,55 euros, mentionné au point 7, dont les membres du foyer bénéficiaient avant le décès de M. C... et le revenu d'un montant de 254 354,70 euros dont ils ont réellement disposé depuis, s'est élevé à la somme de 33 474,85 euros ;

11. Considérant que, compte tenu de la part de chacun des membres du foyer, soit 20 % pour chacun des deux enfants et 60 % à Mme E... veuveC..., le préjudice économique subi par chacun des enfants s'élève à 6 694,97 euros et à 20 084,91 euros pour celui subi par Mme E... veuve C...; que le préjudice économique de chacun des enfants a été entièrement réparé par le capital décès versé par l'Etat (ministère de l'éducation nationale) à chacun d'eux soit 17 788,84 euros ; que le préjudice économique de Mme E... veuve C... s'élève, pour la période concernée, à la somme de 3 119,52 euros après déduction du capital décès de 16 965,39 euros versé à l'intéressée par l'Etat (ministère de l'éducation nationale) ;

Quant à la période courant de la date du présent arrêt au 10 août 2019, date à laquelle M. C... était susceptible d'accéder à la retraite :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui a été exposé au point précédent que, compte tenu du revenu annuel du foyer de 67 724,60 euros, du revenu annuel moyen de Mme E... de 39 926,44 euros calculé par référence au bulletin de paye de décembre 2015 versé au dossier et du montant annuel des pensions de réversion et additionnelle de 18 264 euros calculé par référence au bulletin de pension du 6 janvier 2015 versé, la perte de revenus annuelle s'élève à 9 534,16 euros pour le foyer, lequel se compose de Mme E... veuve C...et de sa fille CamilleC..., M. B... C...n'étant plus à charge au titre de cette période ; qu'ainsi, la perte de revenus subie par Mme D... C...s'élève à la somme de 1 906,83 euros et celle de Mme E... veuve C...à la somme de 7 627,33 euros ; que, dès lors, le préjudice économique de Camille C...qui aura 25 ans le 29 avril 2017 a été intégralement réparé par le reliquat du capital décès non imputé au titre de la période précédente ; que le préjudice économique de Mme E... veuve C...s'élève, jusqu'à cette date, à la somme de 7 945,44 euros ;

13. Considérant que, pour la période du 30 avril 2017 au 10 août 2019, le préjudice économique de Mme E... veuve C...qui subit alors la totalité de la perte de revenus annuelle du foyer soit 9 534,16 euros, s'élève à 21 716,70 euros ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 11 à 13 qu'à la suite du décès de M. C..., le préjudice économique de Mme E... veuve C...s'élève à la somme de 32 781,66 euros ; que, par suite, le centre hospitalier d'Ajaccio est fondé, d'une part, à soutenir que Camille et B...C...n'ont pas subi de préjudice économique et, d'autre part, à demander que l'indemnité que le tribunal administratif de Bastia l'a condamné à verser à Mme E... veuve C...au titre des pertes de revenus soit ramenée à la somme de 32 781,66 euros ;

En ce qui concerne les frais d'obsèques :

15. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme E... veuve C...a exposé des frais d'obsèques qui s'élèvent à 3 925,30 euros ; qu'il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier d'Ajaccio cette somme ;

En ce qui concerne le préjudice moral :

16. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les premiers juges n'ont pas fait une appréciation insuffisante du préjudice moral résultant du décès de leur époux et père en allouant à Mme E... veuve C...et à M. B... C..., alors mineur, la somme de 20 000 euros chacun et en allouant à Mlle D...C..., enfant majeur au foyer, la somme de 15 000 euros à ce titre ;

En ce qui concerne les droits de l'Etat (ministère des finances et des comptes publics et ministère de l'éducation nationale) :

17. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'État et des autres personnes publiques : " Lorsque le décès, l'infirmité ou la maladie d'un agent de l'État est imputable à un tiers, l'État dispose de plein droit contre ce tiers, par subrogation aux droits de la victime ou de ses ayants droit, d'une action en remboursement de toutes les prestations versées ou maintenues à la victime ou à ses ayants droit à la suite du décès, de l'infirmité ou de la maladie./ II. Cette action concerne notamment : le traitement ou la solde et les indemnités accessoires pendant la période d'interruption du service ; les frais médicaux et pharmaceutiques ; le capital décès ; les arrérages des pensions et rentes viagères d'invalidité ainsi que les allocations et majorations accessoires ; les arrérages des pensions de retraite et de réversion prématurées, jusqu'à la date à laquelle la victime aurait pu normalement faire valoir ses droits à pension, ainsi que les allocations et majorations accessoires ; les arrérages des pensions d'orphelin./ III. Le remboursement par le tiers responsable des arrérages de pensions ou rentes ayant fait l'objet d'une concession définitive est effectué par le versement d'une somme liquidée en calculant le capital représentatif de la pension ou de la rente " ;

18. Considérant, d'autre part, qu'en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2006 portant financement de la sécurité sociale, le juge, saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et d'un recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste du préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime ; que le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste du préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 7 et 8, qu'avant compensation par les pensions versées par l'Etat (ministère des finances et des comptes publics), les pertes de revenus du foyer s'élevaient à 104 027,85 euros pour la période passée et à 92 660,53 euros pour la période future, soit 196 688,38 euros pour l'ensemble de la période en litige ; qu'après indemnisation de la perte de revenus subie par Mme E... veuveC..., le solde de ce poste de préjudice s'élève à 163 906,72 euros ;

20. Considérant que, d'une part, il a lieu d'allouer à l'Etat (ministère des finances et des comptes publics) la somme de 69 792 euros au titre des arrérages échus des pensions et, sur justificatifs, le remboursement des arrérages des pensions à échoir jusqu'au 10 août 2019 ;

21. Considérant que, d'autre part, le capital décès versé par l'Etat (ministère de l'éducation nationale) aux consorts C...s'élève à 52 543,07 euros dont 16 965,39 euros pour Mme E... veuve C...et 17 788,84 euros pour chacun des enfants Camille etB... C... ; que, comme le soutient le centre hospitalier, le recours de l'Etat (ministère de l'éducation nationale) doit être limité au préjudice économique subi par les consorts C...après déduction des pensions versées ; qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 11 et 12 que le préjudice économique de Mme E... veuve C...s'élève, après déduction des pensions versées, à 27 712,24 euros, celui de Camille C...à 8 601,80 euros et celui d'B... C...à 6 694,97 euros ; que l'Etat a dès lors droit au remboursement du capital décès, pour la totalité de la somme versée à ce titre à Mme E... veuve C...et, s'agissant des sommes accordées à Camille C...et B...C..., dans la limite de leurs préjudices économiques ; qu'ainsi, il y a lieu d'allouer à l'Etat (ministère de l'éducation nationale) la somme de 32 262 euros ;

22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, le centre hospitalier d'Ajaccio est fondé à demander que les indemnités que le tribunal administratif de Bastia l'a condamné à verser aux consorts C...soit ramenées à 56 707 euros pour Mme E... veuveC..., à 20 000 euros pour B...C...et à 15 000 euros pour Camille C...; que, d'autre part, le centre hospitalier d'Ajaccio est fondé à demander que l'indemnité que le tribunal administratif de Bastia l'a condamné à verser à l'Etat (ministère des finances et des comptes publics) soit ramenée à la somme de 69 792 euros au titre des arrérages échus des pensions servies à Mme E... veuve C...et, sur justificatifs, s'agissant du remboursement des arrérages des pensions à échoir jusqu'au 10 août 2019 ; qu'enfin, le centre hospitalier d'Ajaccio est fondé à demander que l'indemnité que le tribunal administratif de Bastia l'a condamné à verser à l'Etat (ministère de l'éducation nationale) soit ramenée à la somme de 32 262 euros ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

23. Considérant que les consorts C...ont droit aux intérêts des sommes qui leur sont dues à compter du 20 septembre 2012, date de réception par le centre hospitalier d'Ajaccio de leur demande indemnitaire préalable ; qu'ils ont droit à la capitalisation de ces intérêts à compter du 20 septembre 2013 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier d'Ajaccio, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que les consorts C...et l'Etat (ministère des finances et des comptes publics) demandent au titre de l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Les sommes que le centre hospitalier d'Ajaccio a été condamné à verser par les articles 2 à 4 du jugement du tribunal administratif de Bastia du 17 avril 2014 sont ramenées à 56 707 euros pour Mme E... veuveC..., à 20 000 euros pour B...C...et à 15 000 euros pour CamilleC.... Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2012. Les intérêts échus à la date du 20 septembre 2013 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Les sommes que le centre hospitalier d'Ajaccio a été condamné à verser par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Bastia du 17 avril 2014 sont ramenées à 32 262 euros pour l'Etat (ministère de l'éducation nationale), à 69 792 euros au titre des arrérages échus des pensions servies à Mme E... veuve C...et, sur justificatifs, s'agissant du remboursement des arrérages des pensions à échoir jusqu'au 10 août 2019 pour l'Etat (ministère des finances et des comptes publics).

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 17 avril 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Les conclusions des consorts C...et de l'Etat (ministère des finances et des comptes publics) présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier d'Ajaccio, à Mme A... E...veuveC..., à Mlle D...C..., à M. B... C..., au ministre des finances et des comptes publics et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et la recherche.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2016, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Laso, président assesseur,

- Mme H..., première conseillère,

Lu en audience publique, le 14 avril 2016.

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N°14MA02619

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02619
Date de la décision : 14/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Jean-Michel LASO
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-04-14;14ma02619 ?
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