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12/10/2015 | FRANCE | N°14MA00603

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 12 octobre 2015, 14MA00603


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cegelec Sud-ouest a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier de Narbonne à lui verser la somme de 150 397,21 euros hors taxe, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, en réparation des préjudices résultant de l'annulation par le juge des référés contractuels du contrat qui lui avait été attribué pour l'exécution du lot n° 8 " CVC - plomberie - paillasses humides " du marché de construction d'un centre de gérontologie.

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ar un jugement n° 1203291 du 10 décembre 2013, le tribunal administratif de Montpellier ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cegelec Sud-ouest a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier de Narbonne à lui verser la somme de 150 397,21 euros hors taxe, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, en réparation des préjudices résultant de l'annulation par le juge des référés contractuels du contrat qui lui avait été attribué pour l'exécution du lot n° 8 " CVC - plomberie - paillasses humides " du marché de construction d'un centre de gérontologie.

Par un jugement n° 1203291 du 10 décembre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a partiellement fait droit à sa demande en condamnant le centre hospitalier de Narbonne à lui verser la somme de 132 616 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 26 juillet 2012, ces intérêts étant eux-mêmes capitalisés.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 février 2014 et le 20 juillet 2015, le centre hospitalier de Narbonne, représenté par la SCP Charrel et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 10 décembre 2013 ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande de la société Cegelec Sud-ouest ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner avant dire droit une expertise à fin de déterminer et de chiffrer la marge nette bénéficiaire qu'aurait pu réaliser la société Cegelec Sud-ouest ;

4°) en tout état de cause, de mettre la somme de 5 000 euros à la charge de la société Cegelec Sud-ouest au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- les premiers juges auraient dû procéder à un partage de responsabilité, dans la mesure où la société Cegelec Sud-ouest ne pouvait ignorer le caractère litigieux des éléments d'appréciation des critères 2 et 3 ;

- le lien de causalité entre l'irrégularité du marché attribué à la société Cegelec Sud-ouest et le manque à gagner revendiqué n'est pas établi ;

- la société Cegelec Sud-ouest ne justifie par aucun élément précis, motivé et justifié de la réalité de son préjudice.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés le 3 avril 2015 et le 14 septembre 2015, la société Cegelec Perpignan conclut au rejet de la requête et à la condamnation du centre hospitalier de Narbonne à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le centre hospitalier de Narbonne ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Moussaron, président de la 6e chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Héry,

- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant le centre hospitalier de Narbonne, et de MeA..., représentant la société Cegelec Perpignan.

1. Considérant que le centre hospitalier de Narbonne a lancé en 2011 une procédure d'appel d'offres ouvert en vue de la construction d'un centre de gérontologie ; qu'à l'issue de la consultation, le lot n° 8 de ce marché " CVC - plomberies - paillasses humides " a été attribué à la société Cegelec Sud-ouest ; que ce marché, d'un montant de 2 849 735,72 euros hors taxe options comprises, a été notifié le 16 juin 2011 ; qu'à la demande de la société Spie Sud-ouest, concurrent évincé, le juge des référés contractuels du tribunal administratif de Montpellier a, par ordonnance du 7 juillet 2011 devenue définitive, prononcé l'annulation de ce marché ; que le centre hospitalier de Narbonne relève appel du jugement du 10 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a partiellement fait droit à la demande de la société Cegelec Sud-ouest en le condamnant à verser à ladite société la somme de 132 616 euros, cette somme étant assortie des intérêts légaux à compter du 26 juillet 2012 et les intérêts étant capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts à compter du 26 juillet 2013 ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; que, pour retenir l'entière responsabilité du centre hospitalier de Narbonne du fait des manquements aux règles de publicité et de mise en concurrence entachant le marché, les premiers juges, après avoir mentionné ces manquements d'une manière exhaustive au point 6 du jugement, ont indiqué au point 7 " qu'il résulte de ce qui a été dit au point 6 et alors même que la société requérante est réputée avoir une importante expérience des conditions de mise en oeuvre de la commande publique que, contrairement à ce qu'il fait valoir, les manquements ainsi relevés sont exclusivement imputables au centre hospitalier de Narbonne ; que la société Cegelec Sud-ouest est, dans ces conditions, fondée à soutenir que l'entière responsabilité quasi-délictuelle de l'établissement public défendeur est, à raison des fautes à l'origine de l'annulation du marché, entièrement engagée à son égard " ; qu'ils ont ainsi suffisamment motivé leur jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Considérant que, pour prononcer l'annulation du marché, le juge des référés s'est fondé, d'une part, sur l'erreur de notation commise par la commission d'appel d'offres sur le critère du prix, noté sur 11 ; qu'en effet, alors que la note de 10 sur 11 lui avait été attribuée, la société Spie Sud-ouest aurait dû recevoir la note maximale compte tenu du prix proposé, ce qui aurait réduit l'écart de la notation globale entre les deux candidats d'un seul point ; que, d'autre part, pour apprécier la valeur technique de l'offre, le règlement de consultation prévoyait la " prise en compte des éléments qui permettront d'apprécier les moyens mis en oeuvre par les candidats et leur capacité à exécuter l'ensemble des prestations dans les délais impartis " ; que la société Spie Sud-ouest a obtenu la note de 5,5 sur 6 pour ce critère et la société Cegelec Sud-ouest la note maximale ; que le juge des référés a considéré que la formulation ambigüe de cet élément d'appréciation pouvait être entendue comme permettant l'admission à concourir de candidats incapables d'exécuter l'ensemble des prestations demandées dans le respect des exigences du marché et devait être regardée comme constituant un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence ; qu'il a également considéré que constituait un tel manquement l'élément d'appréciation du critère portant sur la qualité rédactionnelle de l'offre et son exhaustivité, noté sur 3, et fondé sur la clarté de la présentation, qualifié de subjectif, critère pour lequel la société Cegelec Sud-ouest s'est vu attribuer la note de 2,5 et la société Cegelec Sud-ouest celle de 3 ; qu'il en a déduit que : " eu égard au faible écart entre les notes qui lui ont été attribuées et celles dont a bénéficié la société attributaire, les manquements aux règles de publicité et de mise en concurrence rappelées ci-dessus ont affecté les chances de la société requérante d'obtenir le marché litigieux " ;

4. Considérant que, postérieurement à l'annulation du contrat prononcée par le juge du référé contractuel, le centre hospitalier de Narbonne a décidé d'abandonner la procédure en cours, comme il pouvait légalement le faire, et de relancer un nouvel appel d'offres ; que la société Cegelec Sud-ouest ne peut se prévaloir d'aucun droit à la conclusion du contrat, dès lors que la procédure engagée était, comme l'a jugé le juge des référés contractuels, suffisamment irrégulière pour qu'il prononce la nullité dudit contrat ; qu'ainsi, elle n'a pas droit à la rémunération des bénéfices qu'elle attendait du contrat, lequel n'a connu aucun commencement d'exécution ; qu'en revanche, la faute commise par le centre hospitalier de Narbonne à avoir conduit une procédure irrégulière qui a abouti à l'annulation du contrat est directement à l'origine du préjudice subi par la société qui a inutilement engagé des frais pour répondre à l'appel d'offres ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en condamnant le centre hospitalier de Narbonne à verser à la société la somme non contestée de 12 470 euros hors taxe ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier de Narbonne est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier l'a condamné à indemniser la société Cegelec Sud-ouest des préjudices résultant de l'annulation du marché conclu le 16 juin 2011 au-delà d'une somme de 12 470 euros hors taxe ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la société Cegelec Perpignan, partie perdante dans la présente instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par le centre hospitalier de Narbonne ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 132 616 euros que le tribunal a condamné le centre hospitalier de Narbonne à verser à la Société Cegelec Sud-ouest est ramenée à la somme de 12 470 (douze mille quatre cent soixante-dix) euros hors taxe.

Article 2 : Le jugement susvisé est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Narbonne et à la société Cegelec Perpignan.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2015, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- Mme Héry, premier conseiller,

- M. Ouillon, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 octobre 2015.

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N° 14MA00603


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00603
Date de la décision : 12/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02-03 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation. Droit à indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: Mme Florence HERY
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : SCP CHARREL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-10-12;14ma00603 ?
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