Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Abineet X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DOUAI, en date du 26 septembre 2014, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de blanchiment et escroquerie en bande organisée, association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 mars 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Pichon, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire PICHON, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour ;
Vu la communication faite au procureur général ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 2 février 2015, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de la procédure que la société Master Trans Manutention (MT Manut), située à Coquelles (62), dont le gérant est M. X..., de nationalité anglaise, bénéficie du statut d'entrepositaire agréé lui permettant de recevoir, stocker et expédier des marchandises soumises à accises circulant en suspension de droits ;
Attendu que, le 9 octobre 2012, le procureur de la République de Boulogne-sur-mer a saisi, aux fins d'enquête sur les faits d'abus de biens sociaux au préjudice de ladite société dénoncés par le commissaire aux compte, la section de recherches de la gendarmerie, qu'il a invitée à se rapprocher de l'administration des douanes et des services fiscaux ; que l'officier de police judiciaire a pris contact avec un agent de la brigade de contrôle et de recherches des impôts qu'il a requis aux fins d'obtenir communication de certains documents concernant l'activité des " cash and carry " calaisiens et de la société MT Manut ; qu'une enquête préliminaire avait également été confiée, le 29 avril 2012, au visa des articles 28-1 du code de procédure pénale, 415 du code des douanes, 1791 et 1810 du code général des impôts, au service national de la douane judiciaire, chargée de procéder, de concert avec le service de gendarmerie, à des investigations sur les faits de blanchiment du produit d'une fraude aux accises en matière d'alcool susceptibles d'être imputés aux responsables de la société MT Manut ;
Attendu que, le 6 juin 2013, a été ouverte une information des chefs d'abus de biens sociaux et recel, blanchiment du produit d'infractions aux contributions indirectes en bande organisée ; que le juge d'instruction a délivré, le 10 juin 2013, une commission rogatoire désignant conjointement la section de recherches de la gendarmerie et le service national de la douane judiciaire ; que les investigations de ce service ont porté sur des données issues de l'exploitation de la base de gestion de l'accompagnement des mouvements de marchandises soumises à accises, dénommée GAMMA, fichier relevant de l'administration des douanes ; qu'elles ont aussi consisté en des surveillances diurnes et nocturnes de la zone industrielle de Courtimmo aux fins d'observer les mouvements des ensembles routiers et des véhicules légers ; qu'ainsi, aux termes de deux procès-verbaux des 30 septembre et 8 octobre 2013, le service national de la douane judiciaire a sollicité, pour les nuits des 23 et 25 septembre, " les services douaniers de la division aéroterrestre aux fins d'effectuer une surveillance aérienne nocturne des entrepôts possiblement utilisés par la société MT Manut sur la zone industrielle ", celle-ci ayant " donné lieu à un enregistrement vidéo " qu'elle a ensuite exploité ;
Attendu que, par réquisitoires supplétifs des 8 et 25 novembre 2013, le procureur de la République a saisi le magistrat instructeur, pour la période du 6 juin au 25 novembre 2013, de faits de blanchiment du produit d'infractions aux contributions indirectes et escroquerie en bande organisée, association de malfaiteurs, abus de biens sociaux et recel ;
Attendu que, le 26 novembre 2013, M. X... a été placé en garde à vue, mesure qui a été prolongée à deux reprises par le juge d'instruction, puis mis en examen, le 30 novembre 2013, des chefs de blanchiment du produit d'infractions aux contributions indirectes et escroquerie en bande organisée, association de malfaiteurs ; qu'il a bénéficié du statut de témoin assisté pour les faits d'abus de biens sociaux et recel ;
Attendu que, le 9 avril 2014, M. X... a déposé une requête en annulation d'actes de la procédure ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, des principes de garantie judiciaire et de loyauté des preuves, préliminaire, 19, 77-1-1, 593, D. 11 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de l'ensemble des procès-verbaux dressés dans le cadre des deux enquêtes préliminaires et en particulier, des procès-verbaux des 14 décembre 2012, 28 décembre 2012, 11 janvier 2013, 4 juin 2013, 5 et 6 juin 2013 (D2, D7, D14, D15, D16 et D31), support du réquisitoire introductif du 6 juin 2013 et de la procédure subséquente ;
" aux motifs qu'il résulte des pièces de la procédure que, le 9 octobre 2012, le procureur de la République de Boulogne-sur-Mer a saisi la section de recherches de la gendarmerie de Lille d'une enquête portant sur des faits de blanchiment et d'abus de biens sociaux au préjudice de la société Master Trans Manutention ; qu'après avoir pris contact avec les services fiscaux de Boulogne-sur-Mer le 14 décembre 2012 (D14), l'officier de police judiciaire chargé de cette enquête a requis, le 28 décembre 2012, au visa de l'article 77-1 du code de procédure pénale, M. Z..., appartenant à la brigade de contrôle et de recherches de Boulogne-sur-Mer de bien vouloir lui communiquer tous renseignements et tous documents en sa possession et notamment " les rapports 3909 portant sur les années 2002, 2012, la projection de rappel de l'année 2011, les deux rapports cash établis par la DDFIP 62 concernant l'activité des cash and carry Calaisien et plus particulièrement de Ia société Master Trans Manutention " (D15) ; que le 2 juin 2013, l'officier de police judiciaire a dressé un procès-verbal d'investigation (D17) constatant que les documents sollicités lui avaient été remis ; qu'il ne saurait être déduit de la précision de la réquisition du 28 décembre 2012 quant aux documents sollicités et de la teneur du procès-verbal d'investigation du 11 janvier 2013, l'existence d'un artifice ou d'un stratagème ayant vicié la procédure ; qu'en effet, il apparaît que l'officier de police judiciaire a régulièrement acté à la procédure qu'il avait pris contact avec la BRC de Boulogne-sur-Mer ; qu'à supposer, ainsi que le soutient le demandeur, que les services fiscaux lui aient alors indiqué les documents utiles à la manifestation de la vérité, dont ils étaient en possession, aucune disposition légale ne lui faisait obligation de dresser un procès-verbal consignant la teneur des déclarations de l'agent des services fiscaux lors de cette prise de contact ; que si l'officier de police judiciaire a visé par erreur, dans sa réquisition du 28 décembre 2012, l'article 77-1 du code de procédure pénale et non l'article 77-1-1 dudit code, cette erreur ne saurait entraîner la nullité de la procédure dès lorsqu'il résulte sans ambiguïté des termes précités de cette réquisition qu'elle avait pour seul objet la communication de documents et qu'elle était autorisée par M. Sabatier, vice procureur de la République ; que dès lors, les documents transmis par les services fiscaux l'ont été dans le respect des dispositions légales, sans contournement de procédure ; qu'il importe peu que le procès-verbal du 11 janvier 2013 reprenne, d'ailleurs que très partiellement, la substance des documents remis le 2 juin 2013 en exécution de la réquisition précitée, l'officier de police judiciaire pouvant attendre la remise de l'intégralité des documents sollicités avant de les verser en procédure, ce procès-verbal signé du seul officier de police judiciaire ne constituant au surplus qu'un procès-verbal de renseignements, destiné à guider d'éventuelles investigations sans pouvoir être lui-même retenu comme élément de preuve ; qu'enfin, l'analyse des documents critiqués et des différents procès-verbaux établis fait au contraire apparaître clairement le cheminement des investigations de l'enquêteur, ses légitimes prises de contacts avec les services fiscaux et la transcription des éléments ainsi obtenus, éléments ainsi soumis au contrôle du magistrat et à l'analyse de la défense ;
" 1°) alors que les réquisitions prévues par l'article 77-1-1 du code de procédure pénale ne peuvent être présentées par l'officier de police judiciaire que sur autorisation du procureur de la République ; que ces réquisitions doivent nécessairement être préalables à la remise de documents ou d'informations entrant dans le champ d'application de ce texte ; qu'il résulte des pièces de la procédure que les enquêteurs agissant en enquête préliminaire ont obtenu communication, de l'agent de l'administration fiscale, des « rapports 3909 portant sur les années 2002 et 2012 », de « la projection de rappel de l'année 2011 », et « deux rapports cash établis par la DDFIP 62 concernant l'activité des cash and carry calaisien et plus particulièrement de Ia société Master Trans Manutention » avant même d'en requérir la communication sur autorisation du procureur ; que les dispositions de l'article 77-1-1 ont été contournées et méconnues ;
" 2°) alors, en toute hypothèse, qu'est nulle l'obtention d'informations et documents utiles à la manifestation de la vérité détenus par l'administration fiscale par des moyens et dans des conditions qui, faute d'avoir été consignés par procès-verbal, ne permettent pas à l'autorité judiciaire d'en contrôler la légalité au regard des exigences de l'article 77-1-1 du code de procédure pénale ; que l'arrêt constate que la teneur des contacts noués auprès de l'agent des services fiscaux n'a pas été consignée par procès-verbal et que la date à laquelle les documents ont été versés à la procédure n'est pas forcément celle de leur remise ; qu'en validant néanmoins la procédure, la chambre de l'instruction a violé les articles 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, préliminaire, 19 et D. 11 du code de procédure pénale " ;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu de faire droit à la demande d'annulation des procès-verbaux, prise de ce que l'officier de police judiciaire de la section de recherches de la gendarmerie qui les a dressés est entré en relation avec un agent de la brigade de contrôle et de recherches des impôts et a fait état de certains des documents requis avant leur remise officielle, l'arrêt retient notamment que l'enquêteur a régulièrement acté, à la procédure, sa prise de contact avec cet agent et qu'il importe peu que le procès-verbal du 11 janvier 2013 évoque les documents remis le 2 juin 2013 en exécution d'une réquisition du 28 décembre 2012, dès lors qu'il est possible d'attendre la remise de l'intégralité des documents avant de les verser au dossier ; que les juges ajoutent que les différents procès-verbaux font apparaître le cheminement des investigations de l'enquêteur, ses légitimes prises de contacts avec les services fiscaux et la transcription, dans un procès-verbal de renseignements, des documents qu'il a obtenus sans recourir à un quelconque artifice ou stratagème, ces éléments ayant été soumis au contrôle du magistrat instructeur et à l'analyse de la défense ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations d'où il résulte que, d'une part, aucun procédé déloyal de nature à porter atteinte aux droits de la défense de M. X... n'a été mis en oeuvre, d'autre part, l'officier de police judiciaire a régulièrement requis le service des impôts, conformément aux dispositions de l'article 77-1-1 du code de procédure pénale, avant de verser à la procédure les documents qui lui ont été remis, enfin, le demandeur pourra discuter, le cas échéant, la valeur probante des éléments recueillis devant la juridiction de jugement, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-1, 111-3, 324-1 du code pénal, 1, 28-1, 80, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de l'enquête préliminaire conduite par le SNDJ des chefs de « blanchiment des produits d'infractions aux contributions indirectes » et des actes subséquents, du réquisitoire introductif ouvert de ce chef, de la commission rogatoire du 10 juin 2013 saisissant les agents habilités du SNDJ des mêmes faits et des infractions connexes d'abus de biens sociaux et recel d'abus de biens sociaux, et des actes d'instruction diligentés dans ce cadre ;
" aux motifs, sur l'enquête préliminaire conduite par le SNDJ, que, par soit-transmis, en date du 29 avril 2013, le procureur de la République de Boulogne-sur-Mer a ordonné la cosaisine du SNDJ pour poursuivre l'enquête « sur les faits de blanchiment des produits d'infractions aux contributions indirectes susceptibles d'être imputées aux responsables de la société MT Manut », au visa des articles 28-1 du code de procédure pénale, 415 du code des douanes, 1791 et 1810 du code général des impôts ; qu'aux termes de l'article 324-1, alinéa 2, du code pénal, constitue un blanchiment le fait d'apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit ; qu'en incriminant en ces termes le délit de blanchiment, le législateur a entendu créer, conformément à ses engagements internationaux (Convention de Strasbourg, art. 1er et Convention de Varsovie, art. 1er), une infraction générale, distincte et autonome de blanchiment et il importe en conséquence peu que l'infraction d'origine soit prévue par le code pénal ou par un autre texte ou réprimée par une peine d'emprisonnement, la seule condition imposée à la répression étant que l'infraction d'origine ne soit pas une contravention ; qu'en l'espèce, il apparaît qu'au jour de la saisine du SNDJ, il existait des soupçons portant sur la société Master Trans Manutention de détourner des alcools, circulant en suspension de droits entre différents Etats européens, de leur destination officiellement déclarée, pour être acheminés sans paiement des accises exigibles dans le pays de destination effective et ce sous couvert de faux documents administratifs électroniques ; que ces faits rentrent dans les prévisions de l'article 1810, 3°, du code général des impôts, qui incrimine et punit d'une peine d'un an d'emprisonnement la livraison, la détention en vue de la vente, le transport d'alcool de toute nature importé sans déclaration ainsi que le transport d'alcool avec une expédition obtenue frauduleusement ; que par ailleurs, il n'est pas nécessaire, au regard de la poursuite de l'infraction de blanchiment, qu'en application de l'article L. 212- A du livre des procédures fiscales, que les infractions aux contributions indirectes soient constatées par procès-verbal ; qu'en effet, le délit de blanchiment, infraction comme sus rappelé, générale, distincte et autonome, n'impose pas que des poursuites aient été préalablement engagées ni qu'une condamnation ait été prononcée du chef du crime ou du délit ayant permis d'obtenir les sommes d'argent blanchies ; qu'il importe également peu que les juridictions soient incompétentes pour statuer sur l'infraction d'origine et il suffit que soient établis les éléments constitutifs de l'infraction principale ayant procuré les sommes litigieuses ; que la preuve de l'existence de cette infraction, condition préalable à la caractérisation de l'infraction de blanchiment, est libre et la poursuite du délit de blanchiment de la fraude aux accises n'est donc pas soumise aux dispositions des articles L. 212 et L. 235 du livre des procédures fiscales ; que les officiers de douane judiciaire étant compétents, en application de l'article 28-1 du code de procédure pénale, pour rechercher et constater les infractions prévues par l'article 324-1 du code pénal, le procureur de la République pouvait légalement leur confier la mission d'enquêter sur les faits de blanchiment du produit de ces infractions, le SNDJ n'ayant pas été saisi du chef d'infractions aux contributions indirectes mais de blanchiment du produit de ces infractions ; qu'en outre, il convient d'observer que l'article 1791 du code général des impôts dispose que toute manoeuvre ayant pour but ou pour résultat de frauder ou compromettre les droits, taxes, redevances est punie d'une amende de 15 euros à 750 euros, d'une pénalité dont le montant est compris entre une à trois fois celui des droits, taxes, redevances, sans préjudice de la confiscation des objets, produits ou marchandises saisis en contravention ; que le montant de cette pénalité, à laquelle la Cour de cassation reconnaît un caractère mixte, répressif et indemnitaire, n'est pas plafonné et peut excéder le montant des amendes contraventionnelles fixées par le 5 de l'article 131-13 du code pénal ; que le tribunal correctionnel est compétent en vertu de l'article L. 235 du livre des procédures fiscales et que l'action fiscale se prescrit dans les mêmes conditions que l'action publique en matière de délit ; que dans ces conditions, la fraude aux accises peut être considérée comme un délit au sens de l'article 324-1 du code pénal ; que, sur le réquisitoire introductif du 6 juin 2013, par les motifs sus exposés, le ministère public pouvait légalement ordonner des poursuites du chef de blanchiment du produit des infractions aux contributions indirectes ; (...) que l'infraction d'origine des faits de blanchiment (...) est (...) précisée dans le réquisitoire (...) qui mentionne qu'il s'agit de fraude aux accises en matière d'alcool (...) ; que-sur les actes d'enquête diligentés dans le cadre de la commission rogatoire du 10 juin 2013 ¿ comme rappelé précédemment, les agents habilités du SNDJ ont compétence pour rechercher et constater les infractions prévues aux articles 324-1 à 324-9 du code pénal et pouvaient dès lors être saisis de faits de blanchiment d'infractions aux contributions indirectes et de leurs infractions connexes, à savoir abus de biens sociaux et recel ;
" 1°) alors que l'article 324-1 du code pénal incrimine au titre du blanchiment, le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l'origine des biens ou des revenus de l'auteur d'un crime ou d'un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect ou d'apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit ; qu'une infraction fiscale aux contributions indirectes, punie de sanctions purement fiscales, à l'exclusion d'une peine privative de liberté, et pour laquelle l'action publique n'est pas ouverte, ne constitue pas un crime ou un délit au sens de l'article 324-1 code pénal ; qu'en considérant, néanmoins, que la fraude aux accises prévue par l'article 1791 du code général des impôts peut être considérée comme un délit au sens de l'article 324-1 du code pénal, de sorte que les agents habilités du SNDJ pouvaient en être saisis tant sur réquisitions du parquet que sur commission rogatoire, et que le ministère public pouvait légalement ordonner des poursuites du chef de blanchiment de cette infraction, la cour a violé les textes visés au moyen ;
" 2°) alors que l'article 1810, 3°, du code général des impôts incr imine et punit d'une peine d'un an d'emprisonnement la « livraison, détention en vue de la vente, transport d'alcool de toute nature fabriqué ou importé sans déclaration » et le « transport d'alcool avec une expédition altérée ou obtenue frauduleusement » ; qu'en faisant application de ces dispositions, pour justifier la saisine des agents habilités du SNDJ par soit transmis du 29 avril 2013, pour des faits de circulation d'alcool en suspension de droits entre différents Etats de l'union européenne sans paiement des accises exigibles dans le pays de destination effective sous couvert de faux documents administratifs électroniques, n'entrant pas dans le champ d'application de ce texte, la cour a violé ce texte par fausse application " ;
Attendu que, pour écarter la demande tendant à voir prononcer la nullité des investigations sur les faits de blanchiment des produits d'infractions aux contributions indirectes conduites par le service national de la douane judiciaire, motif pris de ce que ces infractions fiscales ne pourraient constituer le délit d'origine du blanchiment, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que la fraude aux accises, caractérisant l'infraction aux contributions indirectes prévue à l'article 1791 du code général des impôts, peut constituer le délit d'origine du blanchiment sanctionné par l'article 324-1 du code pénal, infraction générale, distincte et autonome qui ne relève pas de l'action de l'administration fiscale et dont la recherche ou la constatation peut être confiée aux agents de la douane judiciaire en application de l'article 28-1 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
Qu'ainsi, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 28-1, 77-1-1, 99-3, R 15-33-7 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité des procès-verbaux relatifs à l'accès irrégulier à l'application douanière GAMMA, aux données extraites, à leur exploitation, et aux actes subséquents,
" aux motifs qu'il résulte des pièces de la procédure (D7) que, le 4 juin 2013, l'agent des douanes du SNDJ, chargé de l'enquête préliminaire confiée à ce service s'est connecté à la base de données GAMMA et a procédé à l'extraction de documents relatifs à la société MT Manut ; qu'il est constant que la consultation par les services de police des informations contenues dans les fichiers auxquels ont accès ses services ne nécessite pas une réquisition au sens de l'article 77-1-1 du code de procédure pénale ; que dès lors, il en est de même de la consultation par les agents des douanes habilités à exercer des fonctions de police judiciaire des fichiers relevant de l'administration des douanes, le SNDJ étant, aux termes de l'article R15-33-7 du code de procédure pénale, rattaché au directeur général des douanes et droits indirects ; que par ailleurs, l'article 7 de l'arrêté du 14 janvier 2011 relatif à la création d'un télé service concernant la gestion de l'accompagnement des mouvements de marchandises soumises à accise (GAMMA), stipule que peuvent accéder, dans la limite de leurs habilitations, au télé service GAMMA les agents d'administration centrale des douanes chargés d'une mission d'enquête ; qu'enfin, si l'article 28-1 du code de procédure pénale prévoit que les agents de l'administration des douanes habilités à effectuer des enquêtes judiciaires disposent des mêmes attributions et obligations que celles attribuées aux officiers de police judiciaire et ne peuvent, à peine de nullité, exercer d'autres attributions ou accomplir d'autres actes que ceux prévus par le code de procédure pénale, cette disposition, dont le seul objet est d'interdire à ces agents d'user des pouvoirs qui leur sont conférés par le code des douanes, ne fait pas obstacle à la simple consultation par ces derniers des fichiers pour lesquels ils bénéficient d'une habilitation, cette consultation se rapportant en l'espèce à celle des données que le demandeur lui-même ou ses préposés ont déclaré et sur lesquelles il pourra s'expliquer ; que sur l'absence de réquisitions fondant l'accès par les agents du SNDJ au système GAMMA, il y a lieu de retenir les motifs susvisés sur l'inutilité de réquisitions que ce soit au cours de l'enquête préliminaire ou sur commission rogatoire ;
" alors que lorsque, sur réquisition du procureur de la République ou sur commission rogatoire d'un juge d'instruction, les agents des douanes habilités procèdent à des enquêtes judiciaires, ils disposent des mêmes prérogatives et obligations que celles attribuées aux officiers de police judiciaire et ne peuvent, à peine de nullité, exercer d'autres attributions ou accomplir d'autres actes que ceux prévus par le code de procédure pénale dans le cadre des faits dont ils sont saisis par l'autorité judiciaire ; qu'agissant sur réquisition du procureur de la République, dans le cadre d'une enquête préliminaire, ils sont soumis soumis aux dispositions de l'article 77-1-1 du code de procédure pénale, et aux dispositions de l'article 99-3 dudit code lorsqu'ils agissent sur commission rogatoire du juge d'instruction ; qu'en décidant le contraire, et en affirmant que les agents des douanes habilités pouvaient avoir accès directement, sans réquisition, au fichier de traitement de données dénommé GAMMA de l'administration des douanes, la chambre de l'instruction a violé les textes visés au moyen " ;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu d'annuler, en l'absence de réquisitions, les procès-verbaux d'exploitation de la base de gestion GAMMA établis par le service national de la douane judiciaire, l'arrêt énonce qu'au même titre que les services de police, s'agissant des fichiers auxquels ils ont accès, les agents des douanes habilités à exercer des fonctions de police judiciaire peuvent consulter, sans réquisition, les fichiers relevant de leur administration et pour lesquels ils bénéficient d'une habilitation ;
Attendu qu'en cet état, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 151, 152, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la commission rogatoire du 10 juin 2013 ;
" aux motifs que le fait que la commission rogatoire critiquée ait été délivrée non à un officier de police judiciaire nominativement désigné mais à " la section de recherches de Lille " n'affecte pas sa validité dès lors qu'il est constant que celle-ci a été exécutée par des officiers de police judiciaire compétents pour recevoir les délégations données par le juge mandant et en assurer l'exécution ;
" alors que le juge d'instruction ne peut requérir, par commission rogatoire, que tout juge de son tribunal, tout juge d'instruction ou tout officier de police judiciaire ; qu'en délivrant commission rogatoire à « la section de recherches de Lille », le juge d'instruction a méconnu les exigences de l'article 151 du code de procédure pénale " ;
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de la commission rogatoire délivrée le 10 juin 2013 à la section de recherches de Lille, les juges retiennent que celle-ci a été exécutée par des officiers de police judiciaire dépendant de ce service et compétents pour recevoir une telle délégation ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, qui établissent que le juge d'instruction a agi conformément aux dispositions de l'article 151 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
Qu'ainsi, le moyen n'est pas fondé ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 14, 151, 152 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité des actes accomplis dans le cadre d'une commission rogatoire du 16 septembre 2013, étrangère à la procédure ;
" aux motifs que si l'article 151, alinéa 4, du code de procédure pénale prévoit que le juge d'instruction fixe le délai dans lequel la commission rogatoire doit être retournée par l'officier de police judiciaire, le dépassement en l'espèce du délai imparti par le juge d'instruction pour l'exécution de ladite commission rogatoire, fixé au 15 décembre 2000, ne saurait, en l'absence de retrait de cette délégation, avoir d'incidence sur la validité des actes accomplis après son expiration, et la référence à une commission rogatoire délivrée le 16 septembre 2013, qui résulte d'une erreur de fait manifeste, est dépourvue de toute incidence sur la validité des actes accomplis en exécution de la commission rogatoire du 10 juin 2013 ;
" 1°) alors que les officiers de police judiciaire ou les agents habilités à exercer des fonctions de police judiciaire ne peuvent instrumenter au-delà des faits dont le juge d'instruction mandant est saisi ni des limites de la commission rogatoire qui les a commis ; qu'il résulte de la procédure que l'inspecteur des douanes habilité à exercer des fonctions de police judiciaire, a poursuivi l'exécution de la commission rogatoire du 10 juin 2013, par prorogation, en vertu d'une commission rogatoire du 16 septembre 2013 étrangère à la présente procédure et portant sur des faits distincts ; que dès lors, les délégataires ont excédé leurs pouvoirs ;
" 2°) alors qu'en l'absence de tout motif de nature à justifier de l'existence d'une simple erreur de fait, l'arrêt attaqué n'est pas légalement justifié " ;
Attendu qu'en retenant que l'éventuel dépassement du délai imparti par le juge d'instruction pour l'exécution de la commission rogatoire délivrée le 10 juin 2013 ne saurait, en l'absence de retrait de cette délégation, avoir d'incidence sur la validité des actes accomplis, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, peu important la référence erronée à une commission rogatoire portant d'autres références ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles D. 33, 60, 151, 152, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en nullité ;
" aux motifs qu'il résulte des mentions des procès-verbaux critiqués des 30 septembre et 8 octobre 2013, que les officiers du SNDJ ont, en exécution de la commission rogatoire délivrée le 10 juin 2013 par le juge d'instruction, " sollicité les services douaniers de la division aéroterrestre aux fins d'effectuer une surveillance nocturne des entrepôts possiblement utilisés par la société Manut sur la ZI Courtimmo au cours des nuits des 23 et 25 septembre 2013 " ; que lesdites surveillances ont donné lieu à des enregistrements vidéo placés sous côte judiciaire ; que l'exploitation de ces enregistrements a été réalisée par l'agent des douanes requérant, appartenant au SNDJ ; qu'en procédant ainsi, l'agent de douane judiciaire, qui s'est borné à demander au service requis de lui fournir des moyens matériels aériens et vidéo que ce dernier détenait et non d'accomplir des actes de police judiciaire ou de procéder à des examens techniques ou scientifiques, n'a fait qu'un usage régulier de ses pouvoirs de réquisition, la loi ne soumettant à aucune forme spécifique les réquisitions aux fins de prestations matérielles ; que par ailleurs, le service requis (la division aéroterrestre de l'administration des douanes), et la mission confiée (la surveillance nocturne des entrepôts sis sur la ZI Courtimmo) sont précisément identifiés et la mise sous scellés des enregistrements vidéos préserve les droits du demandeur ;
" alors que l'officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire doit accomplir lui-même sa mission et ne peut subdéléguer les actes de police judiciaire ; qu'il résulte des mentions des procès-verbaux des 30 septembre et 8 octobre 2013 que les officiers du SNDJ ont, en exécution de la commission rogatoire délivrée le 10 juin 2013 par le juge d'instruction, " sollicité les services douaniers de la division aéroterrestre aux fins d'effectuer une surveillance nocturne des entrepôts possiblement utilisés par la société Manut sur la ZI Courtimmo au cours des nuits des 23 et 25 septembre 2013 " et que lesdites surveillances ont donné lieu à des enregistrements vidéo, que lesdits PV ont ensuite eu pour objet d'exploiter ; que s'agissant de surveillances constituant des actes de police judiciaire, ces actes d'investigation ne pouvaient être délégués aux services de l'administration des douanes ; que la cour a violé les textes susvisés " ;
Attendu que, pour écarter le moyen de nullité des procès-verbaux d'exploitation de l'enregistrement vidéo de surveillances aériennes nocturnes d'entrepôts effectuées par la division aéroterrestre des douanes, pris de ce que ces opérations relèveraient de la police judiciaire, l'arrêt retient que l'enquêteur du service national de la douane judiciaire s'est borné à requérir, pour exécuter ces prestations matérielles, la division dotée des moyens aériens et d'enregistrement nécessaires ; que les juges ajoutent que le service requis et la mission confiée sont précisément identifiés et que la mise sous scellés des enregistrements, dont l'exploitation a été réalisée par l'agent requérant, préserve les droits du demandeur ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, d'où il résulte que la division aéroterrestre, rattachée à la direction générale des douanes et contributions indirectes, n'a pas elle-même effectué des actes de police judiciaire, mais a été régulièrement requise pour limiter son concours à une intervention purement technique, à l'aide du matériel spécifique dont elle disposait pour filmer, par voie aérienne et de nuit, des entrepôts, et dès lors que, d'une part, aux termes des procès-verbaux d'exploitation établis par le seul agent de la douane judiciaire, le service requis n'a enregistré que des mouvements de camions, véhicules légers et piétons, sans aucune identification, d'autre part, les éléments ainsi recueillis, qui ne portent atteinte ni au respect de la vie privée ni aux droits de la défense, seront soumis à la discussion des parties, l'arrêt n'encourt pas le grief allégué ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le septième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux, des droits de la défense, préliminaire et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en nullité de la garde à vue et des actes subséquents ;
" aux motifs qu'il résulte des pièces de la procédure (D351) que le demandeur a été placé en garde à vue le 26 novembre 2013, à 6h 10 pour des faits d'abus de biens sociaux, recel, blanchiment du produit d'infractions aux contributions indirectes (fraude aux accises en matière d'alcool) en bande organisée, association de malfaiteurs ; que cette mesure a été prolongée le 27 novembre 2013 pour une durée de 24h après présentation au juge d'instruction ; que la garde à vue a été à nouveau prolongée le 28 novembre 2013 pour une durée de 48h après présentation au juge d'instruction ; qu'il n'est pas contesté que la garde à vue du demandeur a été conduite dans le respect des dispositions législatives en vigueur, au jour de leur mise en oeuvre ; qu'au regard de la complexité et de la gravité des faits de la procédure, de l'impact économique enjeu, de l'existence d'un réseau structuré et international mis en place pour faire échec aux droits des états au profit d'individus disposant de moyens considérables à cette fin, la prolongation de la garde à vue de l'intéressé pour une durée supplémentaire de 48 h ne constitue pas une atteinte disproportionnée au but poursuivi, étant observé en l'espèce que durant sa garde à vue, le demandeur a été entendu à neuf reprises avec l'assistance constante de son conseil et que de multiples investigations (perquisition, audition de témoin) ont dû être diligentées ; que l'article 63-4-1 du code de procédure pénale, qui énumère limitativement les pièces que peut consulter l'avocat assistant une personne gardée à vue, n'est pas incompatible avec les dispositions conventionnelles invoquées, la restriction qu'il apporte à la communication de l'entier dossier n'étant pas, à ce stade de la procédure, de nature ni à priver la personne d'un droit effectif et concret à un procès équitable ni à porter atteinte aux droits de la défense, l'accès à toutes les pièces étant garanti devant les juridictions d'instruction et de jugement ; que le demandeur a comparu à deux reprises devant le juge d'instruction, chargé de la procédure qui a recueilli ses observations et s'est prononcé sur les raisons justifiant la prolongation de la mesure de garde à vue ; qu'il convient de rappeler que ce magistrat, qui n'est pas partie poursuivante, présente les garanties d'indépendance à l'égard de l'exécutif et des parties requises par l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que lors de sa présentation au juge d'instruction, le demandeur s'est borné à faire des observations sur le déroulement de sa garde à vue et à se déclarer innocent des faits qui lui étaient reprochés de sorte qu'il ne saurait se taire un grief de ce que ces déclarations spontanées et non incriminantes aient été recueillies par le juge d'instruction hors la présence de son avocat ;
" 1°) alors que le droit à l'assistance d'un avocat durant la garde à vue implique, pour être effectif dès ce stade, et permettre l'organisation de la défense et la préparation des interrogatoires, l'accès à l'ensemble des pièces du dossier ; qu'en écartant toute nullité sur le fondement de dispositions internes non conformes à cette exigence, sans constater que l'impossibilité momentanée d'accès à l'entier dossier aurait été, dans le cas particulier de l'espèce, justifiée par une menace grave pour la vie ou les droits fondamentaux d'un tiers, ou strictement nécessaire en vue de préserver un intérêt public important, la chambre de l'instruction a violé les articles 6, § 1 et § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" 2°) alors qu'en l'absence de toute menace grave pour la vie ou la sécurité des personnes, la prolongation de la garde à vue de M. X... pour une durée supplémentaire de 48 heures, était disproportionnée ;
" 3°) alors que le fait que le juge d'instruction à l'origine de l'arrestation et de la détention, et en charge de la conduite de l'enquête, soit celui qui statue sur la prolongation de la mesure de détention et apprécie sa légalité ainsi que sa nécessité, de surcroît hors l'assistance de l'avocat, constitue une violation des articles 5, § 3, et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ainsi que de l'article préliminaire du code de procédure pénale " ;
Attendu qu'en refusant, par les motifs repris au moyen, de faire droit à la demande d'annulation fondée sur l'irrégularité alléguée de la garde à vue de M. X..., la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
Que, d'une part, l'article 63-4-1 du code de procédure pénale alors en vigueur, en ce qu'il énumère limitativement les pièces que l'avocat de la personne gardée à vue est en droit de consulter, n'est pas contraire à l'article 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, dès lors que l'absence de communication de l'ensemble du dossier, à ce stade de la procédure, ne prive pas d'un droit effectif et concret à un procès équitable la personne concernée, dont l'accès à l'intégralité des pièces est garanti devant les juridictions d'instruction et de jugement, et le grief, en ce qu'il se réfère à la directive européenne 2012/ 13/ UE dont le délai de transposition n'était pas expiré à la date à laquelle le demandeur a été placé en garde à vue, est inopérant ;
Que, d'autre part, la chambre de l'instruction a analysé sans insuffisance les nécessités de l'instruction, portant sur l'une des infractions qui entrent dans le champ d'application de l'article 706-73 du code de procédure pénale, ayant conduit, à l'issue des premières quarante-huit heures de garde à vue de M. X..., à une prolongation supplémentaire de quarante-huit heures effectuée, avant la publication de la décision du Conseil constitutionnel du 9 octobre 2014, en application de l'article 706-88 de ce code ;
Qu'enfin, le juge d'instruction statue en toute impartialité, au sens des dispositions conventionnelles invoquées, sur la légalité et le bien-fondé des prolongations de garde à vue, et le respect de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme est assuré par la faculté, pour le demandeur, de discuter devant la juridiction de jugement la valeur probante des déclarations ainsi recueillies ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le huitième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des droits de la défense, préliminaire, 116 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en nullité de l'interrogatoire de première comparution et de la mise en examen ;
" aux motifs que le demandeur ne saurait se faire un grief de l'absence de cotation au dossier au jour de son interrogatoire de première comparution des ordonnances de soit-communiqué et des réquisitoires supplétifs des 8 et 25 novembre 2013 dès lors qu'il apparaît qu'il a eu précisément connaissance de l'existence des réquisitoires précités mentionnés lors de son placement en garde à vue et dans tous les procès-verbaux subséquents ainsi que lors de sa première comparution, au cours de laquelle il n'a fait aucune déclaration sur le fond ; qu'il convient par ailleurs d'observer que son conseil, qui l'a assisté à toutes les étapes de la procédure n'a émis aucune observation à ce sujet alors qu'il en a présenté pour un autre motif et ne conteste pas l'existence de ces réquisitoires ; que par ailleurs, une commission rogatoire ne doit être versée au dossier que lorsque les procès-verbaux établis pour son exécution ont été reçus par le juge d'instruction, aucune prescription légale n'exigeant d'en tenir, avant cette réception, une copie à la disposition des parties, et alors qu'il ne saurait résulter de cette situation, au regard des nécessités propres à la recherche de la vérité au cours de l'instruction préparatoire, une atteinte aux règles édictées par les dispositions conventionnelles invoquées ; qu'il résulte des mentions du procès-verbal de première comparution du demandeur que celui-ci a été mis en examen des chefs d'abus de biens sociaux, recel, blanchiment du produit d'infractions aux contributions indirectes (fraude aux accises en matière d'alcool) en bande organisée, escroquerie en bande organisée, association de malfaiteurs ; que pour chacune de ces qualifications, le juge d'instruction a précisé les circonstances de temps et de lieux propres à chacun des faits ; qu'il résulte du procès-verbal de première comparution, que le juge d'instruction a fait connaître à la personne mise en examen chacun des faits dont il est saisi en vertu de réquisitoire introductif et supplétifs, ainsi que leur qualification juridique, qu'ainsi, il a été satisfait aux prescriptions de l'article 116 du code de procédure pénale qui n'exigent pas que soient explicités par écrit les faits et circonstances qui motivent la mise en examen ; qu'il résulte des mentions du procès-verbal de première comparution que le juge d'instruction était assisté d'un interprète en langue anglaise et dans ces conditions le demandeur ne saurait soutenir qu'il n'a pas été mis en mesure de comprendre les éléments qui fondaient les accusations portées contre lui ; que s'il est exact qu'un même fait ne peut être retenu comme élément constitutif d'une infraction et circonstance aggravante d'une autre infraction, le demandeur ne saurait reprocher au juge d'instruction de l'avoir mis en examen d'une part du chef d'association de malfaiteurs, d'autre part, d'escroquerie et blanchiment en bande organisée dès lors que la qualification retenue est toujours provisoire et peut être modifiée au cours ou en fin d'information ; qu'enfin, il appartiendra à l'instruction de préciser la ou les victimes des faits d'escroquerie reprochés au demandeur, à savoir les Etats de destination des produits soumis à accises, le demandeur ne pouvant sérieusement soutenir qu'en l'absence d'indication de l'identité de ces Etats, il n'est pas en mesure de comprendre la nature et la cause de l'accusation dont il est l'objet ;
" 1°) alors que l'absence de mise à la disposition de l'avocat, lors de l'interrogatoire de première comparution, de pièces de la procédure, en l'espèce deux ordonnances de soit-communiqué et deux réquisitoires supplétifs des 8 et 25 novembre 2013, déterminantes de la mise en examen intervenue pour les faits qui y étaient visés, viole les dispositions de l'article 116 du code de procédure pénale et porte nécessairement atteinte aux droits de la défense ; que le seul fait que M. X... ait eu connaissance de l'existence de ces réquisitoires qui ont été mentionnés lors de son placement en garde à vue ne saurait suppléer à leur absence dans le dossier ; que la chambre de l'instruction a méconnu l'article 116 du code de procédure pénale, ensemble les droits de la défense ;
" 2°) alors que tout accusé a droit notamment à être informé dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui ; que le procès-verbal d'interrogatoire de première comparution et de notification de la mise en examen ne mentionne, s'agissant des faits de blanchiment et d'association de malfaiteurs, que la qualification juridique des faits, sans aucune circonstance de fait, hormis les dates et lieux ; que la mise en examen du chef d'association de malfaiteurs ne précise pas quels sont le ou les faits matériels en vue de préparer un ou plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement pour lesquels le groupement aurait été formé ou l'entente établie ; que M. X... n'est pas en mesure de déterminer pour la préparation de quelles infractions punies de plus de cinq ans d'emprisonnement, il lui est reproché d'avoir également formé ou appartenu à une association de malfaiteurs ; que les victimes des faits d'escroquerie sont désignés comme « les trésors publics européens », les actes qui auraient opérés obligations ou décharges n'étant pas déterminables ; que l'imprécision des charges ainsi formulées compromet les droits de la défense, en violation des textes visés au moyen ;
" 3°) alors que M. X..., qui a besoin de l'assistance d'un interprète et ne lit pas le français, a fait valoir qu'il avait demandé au magistrat instructeur la traduction de procès-verbaux essentiels pour comprendre les éléments qui fonderaient les accusations portées contre lui et que ce droit lui avait été refusé par le magistrat instructeur ; que la chambre de l'instruction n'a pas répondu à ce chef péremptoire des écritures " ;
Attendu que, pour écarter le moyen de nullité pris de l'irrégularité de la mise en examen de M. X... en raison de l'absence au dossier, lors de l'interrogatoire de première comparution, de deux ordonnances de soit-communiqué et réquisitoires supplétifs, et de l'imprécision des faits pour lesquels il a été mis en examen, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations d'où il résulte que, d'une part, l'avocat du requérant, qui avait été en mesure de consulter l'intégralité du dossier dans les conditions prévues à l'article 116 du code de procédure pénale, n'a formulé aucune observation à ce sujet lors de la première comparution de M. X..., qui a exercé le droit de se taire et n'a donc pas été interrogé, d'autre part, le magistrat instructeur lui a fait connaître la nature et la qualification juridique de chacun des faits dont il était saisi, la chambre de l'instruction, qui a répondu aux articulations essentielles du mémoire, a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le neuf avril deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.