LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° G 14-22. 097 et G 14-26. 145 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en la forme des référés, que le 27 juillet 2012, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l'établissement d'Hérouville Saint-Clair de l'UES Schering-Plough a désigné le cabinet Secafi afin qu'il réalise une expertise sur les risques psycho-sociaux ; que par acte d'huissier du 31 octobre 2012, la société Schering-Plough a saisi le président du tribunal de grande instance, afin qu'il annule cette délibération ;
Sur la recevabilité du pourvoi n° G 14-26. 145, examinée d'office, après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu le principe « pourvoi sur pourvoi ne vaut » ;
Attendu que, par application de ce principe, le pourvoi formé le 5 novembre 2014 par le CHSCT de la société Schering-Plough sous le n° G 14-26. 145, qui succède au pourvoi n° G 14-22. 097 formé par elle le 31 juillet 2014 contre la même décision, n'est pas recevable ;
Sur le premier moyen du pourvoi :
Attendu que le CHSCT fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance ayant dit que la contestation de l'employeur est intervenue dans un délai raisonnable et annulé la délibération par laquelle le CHSCT avait décidé de recourir à une expertise, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte des dispositions des articles L. 4613-13, R. 4614-19 et R. 4614-20 du code du travail que l'employeur qui entend contester devant le juge judiciaire la nécessité d'une expertise fondée sur l'existence d'un risque grave doit saisir la juridiction dans un délai raisonnable après l'adoption de la délibération adoptée par le CHSCT ; qu'en l'espèce, pour juger que la saisine par l'employeur était intervenue dans un délai raisonnable, la cour d'appel a relevé, par motifs propres et adoptés, que la délibération a été votée le 27 juillet 2012, que le procès-verbal de la réunion du CHSCT a été transmis à la direction le 6 septembre et que le cabinet d'expertise a notifié des modalités de son intervention le 15 octobre, ce dont elle a déduit que l'assignation, qui a été délivrée le 31 octobre 2012, soit quinze jours après cette notification, a été faite dans un délai raisonnable ; qu'en statuant ainsi alors qu'il résulte de ses constatations que la délibération a été votée le 27 juillet 2012, ce dont il résulte que l'assignation aux fins de contester la nécessité de l'expertise le 31 octobre, soit trois mois après l'adoption de la délibération, n'a pas été faite dans un délai raisonnable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°/ que pour juger que la saisine par l'employeur était intervenue dans un délai raisonnable, la cour d'appel a estimé, par motifs adoptés, que l'expert désigné par le CHSCT n'ayant notifié les modalités de son intervention « qu'entre le 12 et le 15 octobre 2012 », il doit être considéré que la complète information de la société Schering-Plough sur l'objet, les modalités et le coût de la mesure d'expertise n'est intervenue qu'à cette dernière date ; que c'est à ce moment-là qu'elle a pu se déterminer en pleine connaissance de cause sur le point de savoir si elle entendait contester judiciairement la décision de recourir à l'expertise et, par motifs propres, que le cabinet d'expert ayant adressé à la société son projet d'intervention le 15 octobre 2012, en demandant le 29 octobre 2012 au président du tribunal de grande instance la nécessaire autorisation d'assigner d'heure à heure pour contester cette intervention dans les termes indiqués par ce projet, la société a saisi le juge judiciaire dans un délai raisonnable ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, alors que la contestation ne portait pas sur la désignation de l'expert ou le coût de l'expertise mais sur la nécessité de celle-ci, de sorte que l'employeur avait une exacte connaissance des termes de la contestation dès l'adoption de la délibération par le CHSCT, la cour d'appel a violé les articles L. 4613-13, R. 4614-19 et R. 4614-20 du code du travail ;
Mais attendu que l'action de l'employeur en contestation de l'expertise décidée par le CHSCT n'est soumise, en l'absence de texte spécifique, qu'au délai de prescription de droit commun de l'article 2224 du code civil ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision se trouve légalement justifiée ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 4614-12 du code du travail ;
Attendu que pour annuler la délibération du CHSCT, l'arrêt énonce qu'il résulte du rapport annuel 2011 au CHSCT de la société Schering-Plough signé par son président, qu'aucune situation de danger grave et imminent n'avait motivé la mise en oeuvre de la procédure de droit d'alerte et de retrait au cours de l'année 2011 et qu'aucune modification dans l'organisation du travail n'avait été recensée, qu'un groupe de travail pour étudier les éventuels risques psycho-sociaux avait été créé en 2009, un questionnaire avait été adressé à chacun des salariés et le service de santé au travail avait traité les réponses apportées, que cette cellule ne s'était pas réunie depuis avril 2011, aucune partie n'ayant réclamé sa remise en service, que si des attestations de salariés font état de souffrance au travail, d'arrêts de travail nombreux, de démissions, de salariés pleurant à leur poste de travail, d'un taux d'absentéisme extrêmement élevé, et si au cours de cette réunion du 27 juillet 2012 le médecin du travail, avait témoigné avoir rencontré un certain nombre de salariés en grande souffrance, des femmes qui racontent des choses très sexistes, humiliées et qui se sentent harcelées, des hommes étant aussi touchés, ce médecin ne donne pas connaissance des contrôles et examens qu'il a pu réaliser pour l'année 2012 et ne justifie donc pas que la situation perdurerait pour l'année 2012, même s'il ressort du tableau des jours d'arrêts de travail une réelle augmentation du nombre de jours d'arrêts maladie pour l'année 2012 par rapport aux deux années précédentes, en l'absence de toute explication donnée par le médecin du travail relative à cette augmentation, aucune conclusion portant sur l'existence d'un risque grave pour l'année 2012 ne peut en être déduit, surtout que l'inspection du travail, présente à cette réunion du 27 juillet 2012, n'a pas plus fait part de connaissance particulière de difficultés dans cette entreprise en 2012 ; qu'ainsi, il ne ressort pas du dossier, l'existence, en 2012, dans cet établissement d'Hérouville Saint Clair, d'un risque grave de troubles psycho-sociaux, les inquiétudes des représentants des salariés, membres du CHSCT, n'étant pas justifiées par des éléments permettant de recourir à l'expertise ;
Qu'en statuant ainsi, alors même qu'elle constatait que le médecin du travail avait pris l'initiative en 2012 de demander la convocation des membres du CHSCT, que ce médecin avait au cours de cette réunion relaté avoir rencontré en consultation des salariés en grande souffrance au travail, se plaignant de subir des propos sexistes, des humiliations, le témoignage du médecin du travail étant corroboré par les attestations produites par les membres du comité, et alors que les statistiques de l'employeur mettaient en évidence une augmentation des arrêts de travail pour maladie pour les six premiers mois de l'année 2012, ce qui était de nature à caractériser un risque grave, identifié et actuel, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi n° G 14-26. 145 ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule la décision de recours à une expertise adoptée le 27 juillet 2012 par le CHSCT de l'établissement d'Hérouville Saint Clair de la société Schering-Plough, l'arrêt rendu le 30 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;
Condamne la société Schering-Plough aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Schering-Plough à payer au CHSCT de la société Schering-Plough la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi n° G 14-22. 097 par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Schering-Plough.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé l'ordonnance attaquée ayant annulé la délibération en date du 23 juillet 2013 par laquelle le CHSCT de l'établissement de HEROUVILLE SAINT CLAIR a décidé de recourir à une expertise pour risque grave et désigné le cabinet SECAFI à cette fin.
AUX MOTIFS propres QUE sur la tardiveté de l'action engagée par la société SCHERING PLOUGH SAS ; que le CHSCT reproche encore en cause d'appel à la société Schering Plough SAS d'avoir trop attendu pour manifester auprès du juge judiciaire son opposition à la décision de désignation d'une expertise en RPS ; que si l'article L. 4614-13 précité ne fixe pas de délai pour contester en justice l'expertise adoptée par le CHSCT, seul l'article R. 4614-19 dudit code dispose que le juge statue « en urgence » ; que si cette urgence qui s'impose au juge n'est pas contestée, la demande doit cependant être présentée dans un délai raisonnable ; que la chronologie ci-dessus présentée des faits, et justement reprise par le premier juge dans son ordonnance que la cour adopte, montre que le 6 septembre 2012, la direction de la société Schering Plough était officiellement informée de la désignation par le CHSCT d'une expertise en RPS confiée au cabinet SECAFI de Lyon et le 15 octobre 2012 que le cabinet SECAFI a adressé à la société Schering Plough son projet d'intervention pour visa (pièce 19 du CHSCT) ; qu'en demandant le 29 octobre 2012 au président du tribunal de grande instance de Caen la nécessaire autorisation d'assigner d'heure à heure pour contester cette intervention dans les termes indiqués par ce projet, la société Schering Plough SAS a saisi le juge judiciaire dans un délai raisonnable qui s'imposait à lui ; qu'il convient également de confirmer l'ordonnance entreprise sur ce point.
AUX MOTIFS adoptés QUE sur le caractère tardif de l'action engagée par la société SCHERING PLOUGH ; que l'article L 4614-13 du Code du travail n'a pas fixé le délai dans lequel l'action en contestation de l'expertise doit intervenir, mais le président du tribunal doit, lui, statuer en urgence aux termes de l'article R. 4614-19 du Code du travail ; que la nature de la procédure choisie, le référé, la volonté du législateur de permettre au juge qui habituellement statue dans l'urgence, de trancher au fond le type de litige en cause, doit conduire à considérer que la contestation élevée doit être formée dans un délai raisonnable ; qu'en l'espèce, le CHSCT s'est réuni le 27 juillet 2012 avec pour ordre du jour :- les risques psychosociaux suite à plusieurs cas avérés et à la demande de la médecine du travail, avec nomination d'un expert sur les RPS ;- présentation du projet de la direction sur la RPS ; qu'il est constant que la délibération du CHSCT décidant d'une expertise, avec effet à compter du 03 septembre 2012, n'a été formalisée qu'au début du mois de septembre pour être communiquée en extrait à la société SCHERING PLOUGH le 6 septembre ; que par ailleurs le Cabinet SECAFI, désigné en qualité d'expert par le CHSCT, n'a notifié les modalités de son intervention qu'entre le 12 et le 15 octobre 2012 ; qu'on doit donc considérer que la complète information de la société SCHERING PLOUGH sur l'objet, les modalités et le coût de la mesure d'expertise n'est intervenue qu'à cette dernière date ; que c'est à ce moment là qu'elle a pu se déterminer en pleine connaissance de cause sur le point de savoir si elle entendait contester judiciairement la décision de recourir à l'expertise ; que l'assignation a été délivrée le 31 octobre 2012, soit 15 jours après la notification par le cabinet SECAFI des modalités de son intervention, en sorte que la saisine est intervenue dans un délai raisonnable.
ALORS QU'il résulte des dispositions des articles L. 4613-13, R. 4614-19 et R 4614-20 du Code du travail que l'employeur qui entend contester devant le juge judiciaire la nécessité d'une expertise fondée sur l'existence d'un risque grave doit saisir la juridiction dans un délai raisonnable après l'adoption de la délibération adoptée par le CHSCT ; qu'en l'espèce, pour juger que la saisine par l'employeur était intervenue dans un délai raisonnable, la Cour d'appel a relevé, par motifs propres et adoptés, que la délibération a été votée le 27 juillet 2012, que le procès-verbal de la réunion du CHSCT a été transmis à la direction le 6 septembre et que le cabinet d'expertise a notifié des modalités de son intervention le 15 octobre, ce dont elle a déduit que l'assignation, qui a été délivrée le 31 octobre 2012, soit 15 jours après cette notification, a été faite dans un délai raisonnable ; qu'en statuant ainsi alors qu'il résulte de ses constatations que la délibération a été votée le 27 juillet 2012, ce dont il résulte que l'assignation aux fins de contester la nécessité de l'expertise le 31 octobre, soit trois mois après l'adoption de la délibération, n'a pas été faite dans un délai raisonnable, la Cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et ALORS QUE pour juger que la saisine par l'employeur était intervenue dans un délai raisonnable, la Cour d'appel a estimé, par motifs adoptés, que l'expert désigné par le CHSCT n'ayant notifié les modalités de son intervention « qu'entre le 12 et le 15 octobre 2012 », il doit être considéré que la complète information de la société SCHERING PLOUGH sur l'objet, les modalités et le coût de la mesure d'expertise n'est intervenue qu'à cette dernière date ; que c'est à ce moment-là qu'elle a pu se déterminer en pleine connaissance de cause sur le point de savoir si elle entendait contester judiciairement la décision de recourir à l'expertise et, par motifs propres, que le cabinet d'expert ayant adressé à la société son projet d'intervention le 15 octobre 2012, en demandant le 29 octobre 2012 au président du tribunal de grande instance la nécessaire autorisation d'assigner d'heure à heure pour contester cette intervention dans les termes indiqués par ce projet, la société a saisi le juge judiciaire dans un délai raisonnable ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, alors que la contestation ne portait pas sur la désignation de l'expert ou le coût de l'expertise mais sur la nécessité de celle-ci, de sorte que l'employeur avait une exacte connaissance des termes de la contestation dès l'adoption de la délibération par le CHSCT, la Cour d'appel a violé les articles L. 4613-13, R. 4614-19 et R. 4614-20 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé l'ordonnance attaquée ayant annulé la délibération en date du 23 juillet 2013 par laquelle le CHSCT de l'établissement de HEROUVILLE SAINT CLAIR a décidé de recourir à une expertise pour risque grave et désigné le cabinet SECAFI à cette fin.
AUX MOTIFS propres QUE Sur le bien fondé du recours à expertise ; qu'il ressort des dispositions de l'article L. 4612-1 du code du travail que le CHSCT, qui a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de sécurité des travailleurs de l'établissement, procède, en application des articles suivant, à l'analyse des risques professionnels auxquels peuvent être exposés les travailleurs de l'établissement ainsi qu'à l'analyse des conditions de travail et contribue à la promotion de la prévention des risques professionnels et suscite toute initiative qu'il estime utile dans cette perspective, pouvant procéder à des inspections ; Qu'il peut recourir à un expert agréé en application des dispositions de l'article L. 4 (14-12 dans deux hypothèses : lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement, e i cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail prévu à l'article L. 4612-8 (aménagement important modifiant ces conditions et notamment avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'outillage, d'un changement de produit ou de l'organisation du travail, avant te modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail) ; Que le 19 mai 2010, un accord d'UES entre la société Schering Plough SAS et la société Diosynth était signé avec les organisations syndicales représentatives pour une durée de 3 ans rappelant le rôle et les responsabilités du CHSCT de la société Schering Plough ; Que le 25 janvier 2012, un protocole d'accord était signé par la direction de la société Schering Plough SAS, les organisations syndicales représentatives et les membres titulaires du comité central d'entreprise de TUES Schering Plough SAS aux termes duquel, après la fusion réalisée avec la société américaine Merck et Co Inc, une réorganisation de l'entreprise était envisagée pouvant entraîner des suppressions de postes et des départs contraints et des mesures étaient donc arrêtées, destinées à favoriser le reclassement interne et externe des salariés concernés ; qu'il était mentionné que le comité d'entreprise pourrait désigner un expert dans le cadre de la gestion des RPS ; que néanmoins, l'établissement d'Hérouville St Clair, lit concerné que par des mesures de départs volontaires et aucune investigation supplémentaires n'était entreprise ; Que le 23 juillet 2012, le CHSCT de la société Schering Plough était convoqué à une réunion extraordinaire le 27 juillet 2012 « suite à plusieurs cas avérés et à la demande du médecin de la médecine de travail avec nomination d'un expert sur les RPS et présentation du projet de la direction sur les RPS par la société Preventis » ; Qu'au cours de cette réunion, des membres du CHSCT indiquaient avoir mené des premières analyses sommaires » desquelles il résultait des difficultés pour les salariés : « charge de travail importante, changements opérationnels incessants, ergonomie des postes de travail inadaptée, etc » et souhaitaient alors disposer d'une étude complète et indépendante de la direction pour pouvoir effectuer leur mission ; que la demande du CHSCT s'entendait donc du premier cas d'intervention possible du CHSCT prévu à l'article L. 4614-12 précité, à savoir le risque grave constaté dans l'établissement ; e la société Schering Plough SAS reproche dès lors au CHSCT de n'avoir utilisé ses pouvoirs d'enquête et ses moyens d'action avant de recourir à une mesure d'expertise et de ne pas avoir précisé quelles seraient les répercussions des problèmes invoqués la santé des salariés ; qu'il résulte du rapport annuel 2011 au CHSCT de la société Schering Plough signé par son président, directeur de l'établissement, qu'aucune situation de danger grave et ira minent n'avait motivé la mise en oeuvre de la procédure de droit d'alerte et de retrait au cours de l'année 2011 et qu'aucune modification dans l'organisation du travail n'avait été recensée ; qu'un groupe de travail pour étudier les éventuels RPS avait été créé en 2009, un questionnaire avait été adressé à chacun des salariés et le service de santé au travail avait traité les réponses apportées ; que cette cellule ne s'était pas réunie depuis avril 2011, aucune partie n'ayant réclamé sa remise en service ; que dans le cadre de la procédure, le CHSCT produit, outre le compte rendu de a réunion du 27 juillet 2012, des attestations de salariés ; que ces attestations font état de : souffrance au travail de certains salariés, nombreux arrêts de travail en seraient le résultat (stress, angoisse, peurs), plusieurs personnes ayant démissionné, pleurant à leur poste de travail, certains salariés étant sur-occupés tandis que d'à titres étant inoccupés, mises à l'écart de certains, burn-out du responsable de la formation, taux d'absentéisme extrêmement élevé (attestation n° 13 de Mme Y...Y...
) ; que les membres du CHSCT se sont fait l'écho, lors de cette réunion du 27 juillet, de frustrations des sal triés au regard de leurs notations annuelles et du système d'évaluation mis en place par la direction de l'entreprise, 5 % des salariés n'ayant pas obtenu d'augmentation individualisée à la sui : e de cette évaluation ; que le secrétaire du CHSCT avait conclu que les critiques portaient sur a méthode de conduite des entretiens d'évaluation et non sur son résultat ; que Mme Y...a de plus versé dans le cadre de la présente procédure, des photographies adressées par le biais du mail professionnel du directeur de la société Schering Plough SAS, M. Z..., à plusieurs salariés dont elle dit avoir été très choquée ; mais que s'il est bien évidemment inadmissible que circulent dans le cadre du travail des documents qui n'y ont nullement leur place, il ressort des mails envoyés par la salariée elle-même que celle-ci expédiait à l'intention de ses collègues des blagues et histoires dites « drôles » ou « coquines » et participait à ce jeu malsain qu'elle ne peut fustiger pas la suite et dont le lien avec la demande d'expertise n'est pas démontré ; qu'il ressort du compte rendu de cette réunion du 27 juillet 2012 que le médecin du travail, le docteur A..., qui avait réclamé cette réunion extraordinaire dans des termes les restés inconnus, avait affirmé en termes très généraux qu'une salariée avait failli accoucher prématurément et que d'autres avaient une tension à 20, 8 et qu'elle a « rencontré un certain nombre de salariés qui sont en grandes souffrances, des femmes qui racontent des choses très sexistes, humiliées et qui se sentent harcelées, des hommes étant aussi touchés » et expose que « la visite occasionnelle d'un salarié vers le médecin du travail est toujours le constat d'une souffrance. À l'origine, les salariés ne sont pas malades mais le deviennent suite à des problèmes d'organisation, relationnels, des mis plus bas que terre par humiliation sur des choses personnelles » ; que cette implication du médecin du travail est le signe qu'il y avait un risque dans l'établissement que ne pouvait ignorer la direction ; que ce même médecin mentionne que pour l'année 2011, elle a effectué 128 visites cliniques et a reçu 34 salariés « avec majoritairement des visites dans le cadre de RPS » ; que cependant, il ne donne pas connaissance des contrôles et examens qu'il a pu réaliser pour l'année 2012 et ne justifie donc pas que la situation perdurait pour l'année 2012, même s'il ressort du tableau des jours d'arrêts de travail pour maladie et accidents du travail de 2010 à 2011 versé par la société Schering Plough qu'une augmentation du nombre de jours d'arrêts maladie était réelle pour l'année 2012 par rapport aux deux années précédentes ; qu'en l'absence de toute explication donnée par ce médecin relative à cette augmentation, aucune conclusion portant sur l'existence d'un risque grave pour l'année 2012 ne peut en être déduit ; que l'inspection du travail, présente à cette réunion du 27 juillet 2012, n'a pas plus fait part de connaissance particulière de difficultés dans cette entreprise en 2012 ; qu'ainsi l'a relevé le premier juge, il ne ressort donc pas du dossier soumis à l'examen du tribunal et la cour maintenant de l'existence, en 2012, dans cet établissement d'Hérouville St Clair, d'un risque grave de troubles psycho-sociaux, les inquiétudes des représentants des salariés, membres du CHSCT, n'étant pas justifiées par des éléments permettant de recourir à l'expertise comme retenu par la décision querellée ; qu'il y a lieu dès lors de confirmer l'ordonnance entreprise.
ET AUX MOTIFS adoptés QUE Sur le fond L'article L 4614-12 du Code du Travail dispose que le CHSCT peut faire appel à un expert agréé lorsque un risque grave, révélé pu non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement. Le risque grave doit être réellement constaté dans l'entreprise. Pour une part, la souffrance au travail des salariés est rapportée par des membres du CHSCT qui produisent un certain nombre d'attestations ; Monsieur B...atteste de ce que des salariés sont très anxieux, il décrit les difficultés subies par 4 salariés, souligne que le médecin du travail s'est inquiété de la consommation excessive d'anxiolytiques par les salariés. Il met en lien cette souffrance avec le DES actuellement en cours, Monsieur C...évoque une désorganisation de l'entreprise, une répartition déséquilibrée des charges de travail, le mécontentement de certains salariés, Madame D...évoque des collègues en détresse psychologique, fait état de conduites de harcèlement de certains cadres, souligne qu'elle a rencontré plus de 20 salariés en pleurs pour des problèmes d'évaluation, des femmes confrontées au sexisme ; elle fait état de difficultés importantes avec son employeur, Monsieur E...atteste ce qu'il est témoin de la souffrance de salariés, évoque des arrêts de travail causés par le stress, ses propres difficultés et sa culpabilité d'être payé à rien faire alors que d'autres sont surchargés. Il joint à son témoignage un arrêt de travail qui fait état d'un état dépressif secondaire au stress professionnel. Madame Y..., licenciée pour faute grave en août 2012, ancien cadre à la DRH, fait état de propos et d'agissements qui seraient préoccupants s'ils étaient avérés, mais qui semblent pour l'essentiel se rapporter à une période antérieure à l'année 2012. Le médecin du travail, Mme A...a fait état devant le CHSCT réuni le 27 juillet la souffrance au travail de salariés. Certains viennent la rencontrer ce qui est de souffrance. Elle souligne que des salariés deviennent malades suite à des problèmes d'organisation, relationnels ou en raison d'humiliations. Le docteur A...indique qu'elle a pratiqué 128 examens cliniques, eu la visite de 34 sais lés majoritairement dans le cadre de RPS, sans compter les entretiens téléphoniques et les visites à l'infirmerie. Mme F..., infirmière, confirme l'existence d'une grande souffrance au travail des salariés (devant le CHSCT du 27 juillet 2012) ; L'existence de risques psycho-sociaux dans l'entreprise des membres du CHSCT n'est pas apparue totalement infondée à l'employeur qui a indiqué au cours de la réunion du CHSCT qu'il ne niait pas l'existence de risques psycho-sociaux (ce qui ne revient pas à admettre la réalité d'un risque grave et actuel) dans l'entreprise mais ajoutait qu'il n'était pas sûr que l'expertise puisse éclairer la situation. Le docteur A...et Mme F...n'ont établi aucun rapport sur la souffrance au travail des salariés et leurs déclarations ne permettent pas de savoir si les difficultés des salariés s'amplifient, et si par exemple on retrouve une augmentation du nombre durée des arrêts de travail au cours de l'année 2012. Aussi, il doit être relevé que le nombre de jours d'arrêts maladie pour l'année 2012 est de 168 jours, pour 275 en décembre 2011 et 237 jours en décembre 2010 ; Les services de l'inspection du travail ne paraissent pas non plus avoir établi un rapport quelconque sur les risques psycho-sociaux au sein de l'entreprise en 2012 ou alerté de manière explicite l'employeur sur la nécessité d'y remédier ; Sans remettre en cause la sincérité des témoignages des membres du CHSCT il doit cependant être relevé qu'on peine à mesurer l'importance réelle des difficultés évoqué, étant observé que la déception d'un nombre important de salariés au moment de la restitution de leur évaluation ne peut se confondre avec un risque psycho'social, de même que l'imputation à certains cadres de propos sexistes ou d'attitudes de harcèlement relèveraient plutôt, s'ils étaient établis, d'une juridiction répressive. La mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sein de l'établissement d'HEROUVILLE SAINT CLAIR est en elle-même porteuse d'inquiétudes pour un certain nombre salariés mais ne fait pas présumer l'actualité de risques psycho-sociaux graves alors que justement elle s'accompagne d'un ensemble de mesures prises dans l'intérêt des salariés de nature à limiter ces risques. Dès lors, il doit être considéré que faute d'établir l'existence d'un risque grave et actuel, et alors qu'un accord du 19 mai 2010 sur la prévention et la réduction du stress au des risques psycho-sociaux permet déjà d'en faire le diagnostic, l'appel à l'expert tiers n'est pas suffisamment justifié
ALORS QU'aux termes de l'article L 4614-12 du Code du travail, le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de Travail (CHSCT) peut faire appel à un expert agréé lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement ; que le risque grave visé par ce texte s'entend d'un risque identifié et actuel ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, constaté d'une part des attestations de salariés faisant état de conditions de travail très dégradées (sur ou sous occupation de salariés, burn-out, démissions, stress, absentéisme ¿) ; d'autre part l'implication du médecin du travail qui a alerté le CHSCT sur la situation de souffrance au travail et fait état d'un nombre important de visites « RPS » ; enfin une augmentation réelle du nombre d'arrêts de travail en 2012 ; qu'elle a néanmoins estimé qu'un risque grave et actuel, pour l'année 2012, n'était pas établi ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait au contraire de ses propres constatations un risque identifié et actuel, la Cour d'appel a violé l'article susvisé.