LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 16 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973, relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que, lors des débats devant la cour d'appel statuant en matière disciplinaire, le président de la chambre de discipline présente ses observations, le cas échéant par l'intermédiaire d'un membre de la chambre ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, sur l'action disciplinaire exercée par le ministère public conformément à l'article 10 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945, relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels, M. X..., notaire associé, alors mis en examen pour faux et usage de faux en écriture publique et complicité d'escroquerie en bande organisée, a été condamné par le tribunal de grande instance à la peine disciplinaire d'interdiction temporaire pour une durée de dix mois ;
Attendu que l'arrêt mentionne que le président de la chambre régionale de discipline était représenté, selon pouvoir du 12 novembre 2013, par « Me Philippe E..., notaire à Marseille, » qui, « ayant mandat spécial de représenter le président du conseil régional de discipline des notaires de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, a présenté ses observations » ;
Qu'en procédant ainsi, sans vérifier que ce mandataire spécial était membre de la chambre régionale de discipline, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 décembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur X... à dix mois d'interdiction temporaire et, précisant le jugement entrepris, d'avoir dit qu'il est coupable de diverses fautes disciplinaires commises entre 2004 et 2008 ;
Aux motifs que, « M. Philippe X..., né le 11 octobre 1960 à Marseille, a été nommé notaire en 1996. Il a exercé au sein de la société civile professionnelle P..., X... et Q..., notaires associés, titulaire d'un office ministériel à Marseille, devenue après le départ de M. P..., la société civile professionnelle X... et Q.... Il détient un tiers des parts de la société civile professionnelle.
En dehors des deux notaires associés, l'étude comprend deux notaires salariés M° Franck-Laurent Y... et M° François Z....
Le 15 mars 2012, M. le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille a fait assigner à jour fixe M. Philippe X... devant le tribunal de grande instance de Marseille statuant en matière disciplinaire, au visa de l'article 13 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973.
Par jugement en date du 24 juin 2013, le tribunal de grande instance de Marseille a, au visa des articles 1, 2, 3, 5, 6-1, 10, 20, 23, 25 et 26 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945, des articles 3, 13, 15, 16, 17, 18, 20, 21, 23 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973,- prononcé à l'encontre de M° X..., notaire associé à la résidence de Marseille, une mesure d'interdiction temporaire de l'exercice de ses fonctions d'une durée de dix mois,- désigné la SCP P...- X...- Q... en qualité d'administrateur provisoire.
Par déclaration de M° Christian MEJEAN, avocat au barreau de Marseille, au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 9 septembre 2013, M. Philippe X... a formé recours contre ce jugement.
L'affaire a été audiencée pour le 22 novembre 2013.
M. Philippe X... a été convoqué par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 15 octobre 2013 pour cette audience du 22 novembre 2013.
Les débats se sont déroulés le 22 novembre 2013 en audience en chambre du conseil, M. Philippe X..., interrogé sur ce point, ayant précisé qu'il ne demandait pas que les débats se déroulent en audience publique.
L'avis écrit du 20 novembre 2013 du Parquet Général, par lequel il demande la confirmation du jugement a été porté à la connaissance de M. X... et de son avocat par télécopie du 20 novembre 2013.
Aucune partie n'a demandé le renvoi de l'affaire.
M. Philippe X... a été entendu en ses explications orales à l'appui de son appel.
Me Christian MEJEAN, avocat, a soutenu oralement des conclusions écrites remises à la cour et au parquet général au début de l'audience le 22 novembre 2013. Il a demandé l'infirmation du jugement aux motifs que M. X... n'avait commis aucun manquement à ses obligations professionnelles et que la condamnation porterait atteinte à la présomption d'innocence eu égard au dossier pénal en cours.
M. l'avocat général a conclu oralement, sans dépôt de conclusions écrites, à la confirmation du jugement.
Me Philippe E..., notaire à Marseille, et ayant mandat spécial de représenter le président du conseil régional de discipline des notaires de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, a présenté ses observations.
M. Philippe X... a eu de nouveau la parole en dernier.
I) Procédure
I-1) la recevabilité du recours
Le jugement a été prononcé le 2 septembre 2013. L'appel a été formé par déclaration d'appel du 9 septembre 2013.
La recevabilité de cet appel n'est pas contestée. Cet appel est recevable.
1-2) l'acte de poursuite
L'assignation expose qu'une information judiciaire a été ouverte contre X devant le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Marseille sur réquisitoire introductif du procureur de la république de Marseille du 2 juin 2008, pour escroquerie en bande organisée, faux et usage de faux, exercice illégal de l'activité d'intermédiaire en opérations de banque, que cette instruction a abouti à la mise en cause de responsables et commerciaux de la société Apollonia et que l'instruction a été étendue, par réquisitoires supplétifs successifs, jusqu'à une réquisition d'informer contre des notaires, dont M. Philippe X..., notaire à Marseille, lequel a été mis en examen le 15 janvier 2010 par le juge d'instruction de Marseille pour faux en écriture publique et usage de faux en écriture publique commis à Aix-en-Provence, Paris, Lyon, Marseille de 2002 à 2008, et complicité d'escroquerie commise en bande organisée durant la même période de temps ;
M. le procureur de la République estime qu'indépendamment des infractions pénales sur lesquelles il sera statué à terme par les juridictions pénales, M. Philippe X... a commis des infractions aux règles morales et professionnelles.
Les conclusions annexées à l'assignation exposent : « Il ressort du dossier d'instruction que M° X... était seul parmi les associés à avoir traité depuis 2000 ou 2003 les programmes confiés à l'étude par Apollonia (qui décidait donc du choix du notaire aux lieu et place non seulement des clients mais également des promoteurs vendeurs) ... M° X... avait dédié un service de l'étude à la gestion des dossiers apportés par Apollonia. Après avoir réfuté être asservi aux exigences d'Apollonia, il n'en confirmait pas moins que cette société avait conçu (fautes d'orthographe comprises et jamais corrigées) le modèle de procuration (importé de M° G... où il avait transité) fixait d'autorité les rendez-vous avec les clients sans se préoccuper des disponibilités de l'étude, imposait les notaires (surtout M° G...) susceptibles de recevoir les procurations lorsque M° X..., chargé des actes d'un programme ou inversement et l'avait conduit à passer outre aux limites de la compétence territoriale d'attribution pourtant rappelées par la profession ... Jean A... avait enjoint à M° X... en septembre 2007 de remplacer Muriel B..., clerc affecté aux relations avec Apollonia... M° X..., tout en estimant que ce clerc était compétent, s'était exécuté au nom de la rentabilité de l'étude. Cette rentabilité s'était traduite par la réception de 620 actes de vente sans que M° X... se révèle capable... de préciser le chiffre d'affaires résultant de l'activité induite par Apollonia, autrement qu'en avançant des pourcentages, soit 7 % en moyenne de 2004 à 2008 sauf en 2007 où le niveau avait atteint 20 %. M° X... se résolvait... à constater diverses " malfaçons " altérant la sincérité des multiples procurations reçues par lui, ou, plus exactement, supposées telles. Ainsi ratifiait il sous son nom les procurations (même celles reçues par ses clercs qui n'apparaissaient donc pas dans l'acte) " parce qu'on signait " ou encore " parce que logiquement ce document doit être parfait... et enfin parce qu'un notaire pouvait se contenter d'une simple " lecture en diagonale ". Mais il croyait devoir les qualifier " d'erreurs " ou " d'omissions ", " non préméditées " ou encore " involontaires " et soutenait qu'elles n'avaient pas porté à conséquence préjudiciable puisque, précisait-il, le préjudice effectivement subi par les victimes n'était causé que par des faits extérieurs à l'instrumentation des actes réalisés par l'étude " Confronté au cas... des époux C... qui contestaient leur signature sur 6 procurations reçues par lui et sur des demandes de prêt, M° X... suggérait que des usurpateurs, munis de leurs pièces d'identité, se soient substitués à ces victimes. Il ne trouvait pas anormal que l'étude, pour satisfaire à sa demande, communique systématiquement et immédiatement une copie des procurations à la société Apollonia qui n'avait pourtant aucun titre pour en disposer, alors même que les clients n'en étaient jamais pourvus (ce qui avait l'avantage de réduire la tentation de les révoquer) et que ces procurations n'étaient pas annexées aux actes de prêt, ce qui avait pour effet (sinon pour objet) d'empêcher les banques prêteuses d'être informées à travers la connaissance de 1'ensemble des acquisitions par lesquelles les procurations étaient données, de l'endettement global des emprunteurs. ¿ Il n'hésitait pas à se dédouaner de tout devoir de conseil vis à vis des clients notamment quant au risque de s'endetter au-delà de leur surface financière, en soutenant qu'il ne lui appartenait pas de se préoccuper précisément aux lieux et place des banques concernées de la situation financière des intéressés..... il précisait... au sujet des procurations litigieuses, que si " le fait d'avoir omis le nom de clerc habilité constitue un faux, je le reconnais ", Il se disait incapable, vu leur nombre, de spécifier les documents reçus à l'étude ou à l'extérieur où il y avait ce qu'il persistait à qualifier " d'omissions " tout en admettant que celles-ci''se répétaient trop souvent ".... Il ressort des éléments du dossier qu'il a privilégié les seuls intérêts d'Apollonia en se pliant à leurs exigences (modèles de procuration, changement de clerc) et qu'ainsi il a failli gravement aux devoirs de sa charge... Les clients victimes ont tous estimé dans leurs déclarations n'avoir pas été en mesure de quantifier le risque d'endettement qu'ils encourraient en faisant de telles acquisitions... Au-delà de ce devoir de conseil qui n'a pas été respecté, M° X... devait s'assurer de la validité des actes signés (règles de forme et de fond des contrats de mandat) aurait dû comparer la signature de la procuration à celle d'actes antérieurement reçus s'il s'agissait de clients habituels de l'étude ou solliciter la présentation de l'original d'une pièce d'identité. Il a pu constater que diverses malfaçons altéraient la sincérité des procurations et qu'il ratifiait des procurations sans procéder à des vérifications élémentaires. Il avouait avoir communiqué des procurations à la société Apollonia qui n'avait pourtant aucun titre à en disposer... En conséquence cela démontre que M° X... a failli à son devoir de conseil et à son devoir de vérificateur imposés par l'ordonnance du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels...
L'assignation vise six pièces.
Les pièces produites sont numérotées : 1, 2, 4, 5 et 6.
La pièce 1 est la requête aux fins d'assigner ajour fixe. La pièce 2 est l'ordonnance autorisant à assigner à jour fixe.
La pièce 3 est une lettre adressée au président de la chambre de discipline du conseil régional des notaires.
La pièce 4 correspond à des copies de pièces du dossier pénal, soit :
-6 procès-verbaux d'audition de M. R... par la police judiciaire le 13 et 14 janvier 2010,- le procès-verbal de première comparution du 15 janvier 2010,- des auditions de M. Hervé D... (4) et de Mme Muriel B....
La pièce 5 est l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 27 janvier 2010. La pièce 6 est un courrier du procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
Il a été produit également une copie du dernier procès-verbal d'interrogatoire devant le juge d'instruction de Marseille le 4 avril 2013.
- II) Sur le fond :
- II-1) Le contexte et ses conséquences :
M. X... a reconnu avoir consacré depuis quelques années, et depuis 2002 au moins une part importante de son activité de notaire à l'établissement d'actes ayant trait à des ventes immobilières dans le cadre de programmes de construction de promoteurs immobiliers. Ces programmes de construction étaient fondés sur les incitations fiscales résultant des réductions d'impôts par application des dispositions du code général des impôts sur les investissements immobiliers dans le secteur de la location meublée, dites dispositifs de défiscalisation.
Il consacrait une part de son activité à l'établissement d'actes de ventes immobilières dans le cadre de programmes aux fins de défiscalisation,
Il a précisé à la cour que l'acquéreur, dans ce cadre, se désintéresse du bien immobilier acquis, ne se préoccupant que d'obtenir une réduction d'impôt.
Une société spécialisée dans la commercialisation des biens immobiliers vendus dans le cadre des dispositifs de défiscalisation, la société Apollonia, qui a son siège social à Aix-en-Provence, s'est ainsi faite l'intermédiaire habituel des sociétés de promotion en indiquant comme notaire du vendeur M. X..., notaire à Marseille.
Lors de son audition par la police, audition n'5, du 14 janvier 2010, il déclarait : J'ai mis en place une organisation afin de faciliter les relations avec Apollonia. Il y avait un service dédié et qui participait au fonctionnement de l'étude. Viviane A..., qui gérait les relations sur l'organisation, via les secrétaires qui avaient une relation directe avec l'étude, nous a demandé de mettre en place une structure qui facilite les échanges entre l'étude et la clientèle d'Apollonia et je pense que j'ai dû recueillir 620 actes d'acquisition pour le compte des clients d'Apollonia depuis 2002. En revanche je ne peux pas vous dire le nombre de procurations que j'ai recueillies , M. Hervé D..., clerc qui traitait ces dossiers a déclaré le 12 janvier 2010 devant les services de police : « j'ai l'impression d'avoir beaucoup travaillé avec Apollonia en 2007 je passais des heures à rédiger des actes. Nous avons fait une grosse année 2007 grâce à Apollonia. J'ai le souvenir en 2007 de n'avoir travaillé que pour Apollonia ; j'en étais même fatigué ».
Les comportements reprochés à M. X... s'insèrent dans cette activité d'établissement d'actes authentiques de ventes de biens immobiliers aux fins de défiscalisation dans des programmes dont la société Apollonia avait la commercialisation.
Cette activité a représenté une part de son activité. M. X... a déclaré à la police judiciaire que cela représentait environ 7 % de son chiffre d'affaires global entre 2004 et 2008, pour atteindre 20 % en 2007.
Dans ce contexte et, malgré le caractère systématique et répétitif des actes, et le relatif désintérêt des acquéreurs pour le bien immobilier acheté, en présence d'acquéreurs que le notaire rappelle être des personnes d'un niveau socio-culturel élevé, à haut niveau de revenus et se disant trop occupés pour consacrer du temps à leur acquisition, le notaire doit cependant respecter ses obligations déontologiques. Il ne doit pas céder à la pression des vendeurs. Il ne doit pas se contenter d'une obligation de conseil minimaliste. Son statut d'officier ministériel l'oblige à ne pas se considérer comme un simple exécutant d'une opération de défiscalisation. Il doit attirer l'attention de l'acquéreur sur les risques inhérents à son acquisition et, lorsque celle-ci paraît motivée par le seul souci d'obtenir un avantage fiscal au travers une location meublée, il doit rappeler à l'acquéreur l'aléa inhérent à une telle opération.
- II-2) Rappel des règles applicables :
Le règlement national des notaires compile les obligations déontologiques préexistantes des notaires pour les rassembler en un document unique.
L'article préliminaire du règlement national des notaires rappelle que le notaire est le conseil des personnes physiques et morales de droit privé et de droit public, le rédacteur impartial de leur volonté. Il leur fait connaître toute l'étendue des obligations qu'elles contractent, rédige leurs engagements avec clarté, leur donnant le caractère d'un acte authentique assorti, le cas échéant, de la force exécutoire.
L'article deux de ce règlement rappelle que le notaire doit expliquer la loi et en assurer l'application.
L'article 3. 1 rappelle le principe du libre choix du notaire. L'article 3. 2. 1 rappelle que le notaire doit à sa clientèle sa conscience professionnelle, les égards, l'impartialité, la probité et l'information la plus complète, Le notaire est tenu à une obligation d'information, de renseignements et de conseil. La dévalorisation dans l'esprit des acquéreurs de la portée de l'acte authentique de mutation immobilière compris comme un simple instrument fiscal dans une opération de défiscalisation devait amener le notaire à un surcroît de prudence et de solennité pour rappeler à l'acquéreur l'importance de son acte, et ses conséquences.
L'article 2 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels dispose que toute contravention aux lois et règlements, toute infraction aux règles professionnelles, tout fait contraire à la probité, à l'honneur ou à la délicatesse commis par un officier public ou ministériel, même se rapportant à des faits extra professionnels, donne lieu à sanction disciplinaire.
- II-3) Les pratiques de M. X... :
- A) Un système organisé avec Apollonia
Il est reproché à M. X... de s'être mis dans la dépendance du commercialisateur Apollonia, en acceptant d'instaurer une organisation facilitant tellement les relations avec cette société que celle-ci avait fini par imposer un mode de fonctionnement.
Dans son verbal d'audition (police n° 5 le 14 janvier 2010, 5574 et suivants), M. X... déclare : « j'ai mis en place une organisation afin de faciliter les relations avec Apollonia. Il y avait un service dédié et qui participait au fonctionnement de l'étude. Viviane A..., qui gérait les relations sur l'organisation, via les secrétaires qui avaient une relation directe avec l'étude, nous a demandé de mettre en place une structure qui facilite les échanges entre l'étude et la clientèle d'Apollonia ».
Dans son audition n° 1 (police le 12 janvier 2010, 5655 et suivants), M. Hervé D..., clerc, ayant précisé être affecté au service promotions immobilières depuis 2005-2006, déclare à propos d'Apollonia : la particularité de ce programme c'est qu'on ne voyait jamais les clients, Muriel me disait que d'ici demain ou après-demain qu'un certain nombre de dossiers soient sortis le dossier des clients Apollonia est un dossier R..., nous avions le contrat de réservation signé par les clients avec les conditions d'obtention d'un prêt, Nous demandions l'état civil, l'état hypothécaire et après on attendait l'obtention du prêt.... la procuration était recueillie avant l'obtention du prêt .
Dans son procès-verbal d'audition n° 5 aux services de police M. X... déclare que Mme A... « nous donnait des instructions pour établir des fiches navettes qui servaient à connaître l'évolution du dossier... Elle nous donnait des instructions pour mener à bien le dossier, pour savoir où était le dossier de banque, notamment... » Il précise encore : Mme A... m'a expliqué que la clientèle était prise en charge par ses services et que, parallèlement un expert-comptable organisait la défiscalisation de chacun des investisseurs pour mener à bien la défiscalisation. C'est Apollonia qui avait le contact avec la clientèle, qui fixait les rendez-vous, qui définissait la date, ainsi que le lieu avec le client. Le secrétariat d'Apollonia appelait afin de fixer les rendez-vous. En général j'étais avisé une semaine à l'avance. Dans les cas où je ne pouvais pas me déplacer, Apollonia s'adressait à un autre notaire .
Le commercial d'Apollonia était systématiquement présent pendant les rendez-vous de signature. Dans son procès-verbal d'audition du 12 janvier 2010, Mme B..., clerc, répond à la question : pourquoi le commercial d'Apollonia était-il présent : il (le commercial) était là parce qu'il assistait le client
Ces éléments confirment une emprise progressive de cette société de commercialisation qui imposait son rythme à M. X..., créant une dépendance de ce dernier à l'égard de la société Apollonia.
- B) Pas de véritable choix du notaire par le client
Dans son procès-verbal police n° 5, M. X... a déclaré « Apollonia, en fait M. A... décide de l'attribution de certaines promotions à tel ou tel notaire, je ne sais pas pourquoi les programmes étaient attribués à l'étude de G... ou à la mienne.... C'est Apollonia, en fait le secrétariat d'Apollonia qui appelait mon secrétariat afin de fixer le rendez-vous et ensuite M° G... nous envoyait un modèle de procuration »
Le client-acquéreur était considéré comme un " investisseur " plus que comme un acquéreur. Il était pris en charge par la société Apollonia, qui avait quelques notaires travaillant avec elle, notamment M. X.... Ce notaire était indiqué par Apollonia. Aucune information sur le libre choix du notaire n'était donnée par quiconque.
- C) Le recours systématique à la procuration
Dans son procès-verbal d'audition n° 2 aux services de police le 13 janvier 2010, M. X... répond à la question, une procuration est-elle systématiquement nécessaire « quand vous avez des clients qui sont dans tous les coins de France, c'est la pratique courante notariale, nous signons toujours des VEFA, avec des procurations ».
Lors de l'interrogatoire 4 avril 2013, sur l'intérêt des procurations, il précise : « les procurations respectaient les programmes de promotion dont chacune des études avait la charge. Comme les programmes n'étaient pas terminés et attables en même temps, cela permettait de joindre la procuration utile à chaque acte devant être passé à une date donnée. Cela était plus facile pour la gestion des programmes par chacune des études ».
Mme B..., clerc, déclare le 12 janvier 2010 : « face à l'affaire pénale qui me conduit ici, je peux soulever qu'effectivement le principe systématique de la procuration n'est pas R...... ce système était organisé par Apollonia. Ce système ne me paraissait pas anormal. C'était une organisation comme une autre à mon sens ».
Cette pratique de la procuration même lorsqu'elle n'était pas nécessaire permettait au promoteur de se prévaloir d'actes de réservation confirmés par une procuration de vente et d'obtenir ainsi une garantie d'achèvement lui permettant de réaliser le programme immobilier.
Cette pratique correspondait au souci de permettre la réalisation du programme immobilier. Elle n'était pas directement de l'intérêt de l'acquéreur, même si celui-ci avait intérêt à voir le programme se réaliser. Mais l'acquéreur n'était pas informé des raisons pour lesquelles une procuration lui était demandée alors qu'elle n'était pas nécessaire.
Cette pratique notariale correspond à une association aux affaires du promoteur, lesquelles permettent au notaire de recevoir de nombreux actes.
- D) Un modèle de procuration convenu avec Apollonia :
Lors de son audition par les services de police, procès-verbal de police n° 4 14 janvier 2010, à la question, qui a rédigé la matrice originelle (des procurations), M. X... répond :
« C'était avec Apollonia. C'est un clerc. La matrice venait de l'étude de M° G... et nous l'avons reprise ». Ce modèle comportait une erreur avec la mention " offre de prêt signé ce jour " avec faute d'orthographe à " signé " au lieu de " signée " et alors que cette offre de prêt n'avait pas été signée. Cette erreur a été reprise dans toutes les procurations.
Dans le procès-verbal n° 4 police M. X... reconnaît que la mention " offre de prêt signé ce jour " ne correspondait pas à la réalité.
Cette répétition de ces mentions erronées montre que M. X... n'a pas réellement vérifié toutes les mentions figurant sur ces procurations, faites à la chaîne sur la demande d'Apollonia.
- E) Des rendez-vous fixés par Apollonia
Dans son audition n° 3 aux services de police (12 janvier 2010, 5669 et suivants) M. Hervé D... déclare : « en général, pour les procurations, nous recevions une télécopie d'Apollonia mentionnant un lieu et une heure de rendez-vous pour le recueil, dans ce cas-là c'est le rédacteur de la procuration qui avisait M. X... de la signature de procurations, dans ce cas-là, Audrey S..., s'il pouvait les recueillir, il le faisait, si ce n'était pas possible, il désignait quelqu'un pour les recueillir, en général Muriel B... » et « les rendez-vous avec les clients étaient pris directement par Apollonia, ils nous envoyaient un fax mentionnant " rendez-vous procuration, madame.,, monsieur..., tel jour, telle heure, à tel endroit " nous devions donc établir la procuration rédigée à X... ou à Muriel ».
Une dépendance hiérarchique inversée s'était instaurée, le notaire dépendant du cornmercialisateur pour l'organisation de son emploi du temps. Cette façon de faire porte atteinte à l'indépendance et à la dignité du notaire.
- F) Des actes répétés hors de l'étude : Dans son procès-verbal d'audition aux services de police n° 6 du 14 janvier 2010 (5588 et suivants) M. X... répond à la question : pourquoi avoir recueilli autant de procurations à l'extérieur de l'étude : « à la demande d'Apollonia qui fixait les dates et lieux de recueils de ces procurations ».
Dans procès-verbal d'audition police n° 2 du 12 janvier 2010 M. X... répond à la question, à l'extérieur de votre office, pour quel motif, à quelle fréquence : « j''ai effectivement recueilli des actes à l'extérieur de mon étude notariale, pour acquérir et emprunter. J'ai également recueilli des procurations à 1'extérieur de mon étude en dehors des programmes Apollonia et notamment pour des promoteurs lorsque c'était nécessaire et que le client le demandait, sinon on envoie un modèle de procuration à un confrère plus proche du lieu de résidence du client pour nous éviter de nous déplacer ».
Mme B..., clerc, le 12 janvier 2010, répond à la question, avez-vous été amenée, vous même à vous déplacer : « Oui, c'est arrivé et ce sur toute la France, Les rendezvous étaient pris par la société Apollonia et nous étions généralement attendus et bien reçus ». elle ajoute : « très peu de clients (Apollonia) sont venus à l'étude pour signer la procuration, je peux les compter sur les doigts d'une main... la demande de rendez-vous était systématiquement prise par le personnel d'Apollonia ¿ face à l''affaire pénale qui me conduit ici, je peux soulever qu'effectivement le principe systématique de la procuration n'est pas R... ». Cette pratique répétée et systématique des actes hors étude, dans le seul but de répondre aux demandes de la société Apollonia est contraire à la dignité et à l'indépendance du notaire et aux dispositions de l'article 12. 1 du règlement national des notaires.
- F-1) Dans les locaux d'Apollonia
Dans son procès-verbal d'audition police n° 2, 13 janvier 2010, M. X... explique question, nous vous donnons connaissance de l'attestation de M. Marc F.... Il indique que le rendez-vous s'est déroulé le 22 août 2003 dans les locaux d'Apollonia avec M. K... et M. A.... Au bout de 45 minutes et plusieurs coups de fil un homme d'environ 40 ans s'est présenté avec un casque de moto et a laissé entendre qu'il était le notaire, a expliqué qu'il ne possédait pas les documents et c'est M. A... qui a procédé à l'édition des documents à signer. Aucune lecture n'a été faite et aucun conseil n'a été donné. Le supposé notaire ne leur a pas adressé la parole. Plus tard les époux F... ont observé une photo de vous et constaté que M. X... n'était pas la personne rencontrée « je suppose que l'individu qui s'est présenté était un clerc de mon étude » question, pourquoi ne s'est-il pas présenté ? « Je ne sais pas » question quelle inconséquence vous a poussé à signer ce document qui ne vous concernait quasiment en rien « parce qu'on signait » question qu'est-ce que cela veut dire, on signait « logiquement ce document doit être parfait » question pourquoi ne pas l'avoir rédigé vous même « je ne sais ce qui a empêché qu'un acte parfait soit rédigé » question, en quoi est-ce un avantage de faire signer à un client perpignanais une procuration à Aix-en-Provence chez Apollonia plutôt qu'à votre étude « il n'y a ni avantage, ni inconvénient » question, alors pourquoi pas en votre étude à Marseille « parce que le rendez-vous avait été fixé par Apollonia question, à quel titre les membres de la société Apollonia se permettent-ils de fixer arbitrairement le lieu où l'acte authentique doit être signé « c'est en qualité de commercialisateur et de contact avec le client . Cette façon de procéder, en envoyant un clerc dans les locaux d'Apollonia, comme un facteur, faisant signer une procuration sans rien dire, vide l'intervention du notaire de sa substance, porte atteinte à la solennité de l'acte authentique.
- F-2) de manière répétitive, hors ressort
Dans son procès-verbal d'audition police n° 3 du 13 janvier 2010 M. X... déclare « suite aux courriers et vu l'interdiction d'instrumenter en dehors du ressort de la cour d'appel, le commercialisateur Apollonia a chargé mon étude d'instrumenter des procurations pour le compte de l'étude G... et inversement Apollonia a chargé l'étude G... d'instrumenter pour le compte de la mienne, ainsi que d'autres études ».
Dans son procès-verbal d'audition n° 4, police le 13 janvier 2010, Mme B... expose qu'elle avait interrogé le CRIDON en 2007 et que celui-ci avait alerté M. X... sur le fait que ces procurations hors ressort pouvaient être considérées comme des actes répétitifs hors ressort et qu'il faudrait démontrer soit que les clients étaient des clients habituels soit que le programme était proche de l'étude. Elle expose que M. X... en avait parlé à M° G... et que la question de savoir s'ils ne pouvaient pas se remplacer s'était posée.
Il résulte des auditions de M. X... qu'il concevait la réception de procurations comme un travail de collecte, commandé par Apollonia, concerté avec un autre notaire, avec des déplacements répétés hors ressort, alors que de tels déplacements ne doivent pas être systématiques, et qu'il en résultait une perte de dignité du notaire, transformé en simple collecteur de procurations.
- G) Du personnel compatible avec Apollonia
Dans procès-verbal police n° 5, à la question sur la demande de M. A... ne plus avoir Mme B..., clerc, comme interlocutrice, M. X... déclare « M. A... m'a indiqué qu'il fallait arrêter avec Mme B... car ne nous ne signions pas dans les temps ... j'ai accédé à cette exigence car M. A... est caractériel ... j'ai chargé M. D... et Mme H... des relations téléphoniques avec Apollonia » Dans son procès-verbal d'audition n° 4 (13 janvier 2010, 5841 et suivants) Mme Muriel B..., clerc, déclare : « au mois de septembre 2007, M. A... Jean a dit à M. X... qu'il souhaitait que je ne m'occupe plus des dossiers Apollonia... Il m'a dit que compte tenu que cela ne passait pas avec les époux A... je ne serai plus leur interlocuteur principal... je ne vous cache pas que j'ai été choquée d'être écartée ... mais avec le temps j'étais soulagée de ne plus avoir la pression d'Apollonia » question, qu'entendez-vous par pression : « mon équipe, M. D..., Mme H... et moi-même étions quotidiennement relancés par Apollonia et plus particulièrement par Mme I..., les époux A... et ce à plusieurs reprises sur le suivi des dossiers et le nombre d'actes à signer. Etant ici précisé que M° X... était lui aussi quotidiennement relancé sur le rythme d'actabilité et venait me questionner à ce sujet. Donc indirectement la pression était mise par M° X... en plus de la pression directe d'Apollonia »
Ces déclarations permettent d'établir une influence qu'avait réussi à imposer le responsable d'Apollonia sur l'office notarial de M. X..., portant atteinte à l'indépendance du notaire.
- H) Des erreurs Dans son procès-verbal d'audition police du 13 janvier 2010 M. X... déclare : « nous avons toujours reçu les procurations devant les clients, nous nous sommes toujours déplacés, les procurations ont toujours été signées en notre présence... s'il n'y a pas le lieu du recueil, c'est une omission, sachant en plus que le lieu de recueil ou la non-mention du lieu de recueil n'a aucune incidence sur la validité de l'acte authentique ».
Dans son procès-verbal d'audition police n° 2 du 13 janvier 2010, M. X... déclare au sujet de la procuration M. et Mme J... mentionnée comme faite à Villiers-le-Bel où il n'est jamais allé, que le lieu doit être erroné sur la procuration. M. et Mme J... disent c'est M. François K... qui les a reçus à l'hôtel Scribe à Paris et ce serait un commercial d'Apollonia qui s'en serait chargé. M. X... dit que c'est faux et qu'il n'aurait jamais laissé signer un commercial. M. X... précise qu'un clerc habilité a pu oublier de mentionner son habilitation. Dans son procès-verbal police n° 2 du 13 janvier 2010 M. X... ne peut expliquer, à propos de la procuration de M. et Mme L... du 9 décembre 2005, pourquoi elle est indiquée comme faite en l'étude, alors qu'ils étaient ce jour-là à St Marcellin (Isère) et M. X... était à l'assemblée générale de la société civile professionnelle.
A propos de la procuration du 22 août 2003 de M. et Mme F..., avec mention avec en-tête à Aix-en-Provence dans les locaux de la société Apollonia et à la fin faite et passée en l'étude M. X... a dit lors de son audition à la police à ce sujet que c'était une erreur, alors qu'elle a été faite dans les locaux d'Apollonia.
M. X... a contesté les déclarations des époux C... qui disaient qu'ils n'étaient pas présents lors d'un rendez-vous de procuration. Il a apporté, lors de son interrogatoire du 4 avril 2013, des éléments prouvant qu'il était là.
Dans son procès-verbal d'audition police, n° 4 du 14 janvier 2010 M. X... a déclaré, sur la question relative à la procuration de M et Mme M... mentionnée signée par lui, alors que c'était une femme qui l'avait reçue : « c'était un clerc habilité probablement Mme B... » pourquoi son nom et sa qualité n'apparaissent-ils pas ; « parce qu'elle a oublié de le mettre.. c'est effectivement à moi de le vérifier, mais je ne l'ai pas vu ». Avez-vous lu cette procuration « oui, en diagonale.... nous avons mis en place dans l'étude différents services avec des chefs de service, clercs habilités ou notaires salariés. L'acte, lorsqu'il est reçu par le clerc habilité est lu et relu par celui-ci. L'acte devient parfait à ma signature et les parties sont engagées à la réception des signatures par le clerc habilité. ».
Dans son procès-verbal d'audition n° 2 du 12 janvier 2010, Mme B... a reconnu l'erreur quant au lieu de trois procurations de M. Daniel N... recueillies par elle le 12 avril 2005, alors qu'elles mentionnent qu'elles ont été reçues en l'office notarial alors que les procurations ont été signées à Perpignan.
Ces erreurs, quand elles sont établies, ne sont pas constitutives de fautes disciplinaires.- I) Pas de respect de l'obligation de conseil
Dans son procès-verbal d'interrogatoire du 4 avril 2013, M. X... insiste sur le fait qu'il s'agissait d'une clientèle " hors norme " c'est à dire composée de personnes à la tête de gros patrimoines ou de gros revenus qui avaient fait le choix d'investir, il a déclaré : « je n'avais pas la vision globale de sa situation financière (de l'acquéreur) qui ne permettait de douter de la faisabilité d'un tel investissement » et « J'étais face à des clients hors norme qui pour moi étaient nécessairement capables de supporter des emprunts de plusieurs centaines de milliers d'euros, voire de plusieurs millions d'euros puisque les banques leur avaient accordé un financement ».
Lors de son interrogatoire du 4 avril 2013, M. X..., sur l'obligation de conseil, déclare « lorsque je rencontrais les acquéreurs, je percevais tout l'intérêt qu'ils manifestaient à l'idée d'investir dans l'immobilier. Malheureusement il est vrai que j'intervenais après le discours du commercial qu'ils avaient reçu, discours auquel, je vous le répète, je n'avais pas accès » et « je partais du principe que la banque lui ayant accord un crédit, c'est que la situation le permettait ».
Dans son procès-verbal d'audition du 14 janvier 2010 M. X..., déclare :
« j'étais là pour instrumenter la procuration et leur acquisition ainsi que leurs emprunts. Les époux s'étant portés acquéreurs de produits immobiliers aux fins de défiscalisation. Ils ne m'ont jamais demandé de faire une étude patrimoniale afin de les renseigner sur les possibilités de défiscalisation », question : sur quoi a porté l'obligation de conseil que vous avez dispensé aux époux M... : réponse « qu'ils achetaient des biens immobiliers à tel endroit, moyennant un prix, que dans ce prix il pouvait y avoir des récupérations de TVA ou pas, qu'il y avait l'expert-comptable qui s'occupait d'eux et ensuite qu'ils faisaient un prêt et qu'ils pouvaient toujours me demander toute question qui leur paraissait opportune et que j'étais à leur disposition ». question vous êtes-vous préoccupé de vérifier si les opérations financières telles que présentée aux clients étaient viables, réponse : « je n'avais pas les éléments nécessaires pour voir si l'opération était viable telle qu'exposée », question : les avez-vous averti des risques financiers : réponse : « non, je n'avais pas les éléments, je n'avais pas l'encours de patrimoine des clients... il y a des gens qui ont acheté plusieurs biens.. ils ne m'ont pas parlé de problèmes suite aux premières acquisitions ».
Dans son procès-verbal d'audition n° 2 du 12 janvier 2010 (5818 et suivants) Mme Muriel B..., clerc, précise, sur la durée recueil d'une procuration : « c'est assez rapide » et « il est fort possible que pendant tout le déroulement d'un dossier, le client ne rencontre pas le notaire, effectivement, si le notaire ne voit pas le client, il lui est difficile de lui prodiguer les conseils que lui incombe sa tâche ».
Dans son procès-verbal d'audition n° 1 du 12 janvier 2010 (5811 et suivants) de Mme Muriel B..., clerc, déclare : « le devoir de conseil n'est pas dévolu au clerc de notaire j'ai une obligation de conseil en tant que clerc mais aucune sanction déontologique n'est prévue en cas de manquement à cette obligation par un clerc ».
Dans un tel contexte de procurations systématiques, même si elles n'étaient pas nécessaires, recueillies en divers lieux sans solennité, y compris même au siège de la société de commercialisation, sans respect réel du libre choix du notaire, sans porter une attention à la situation de chaque acquéreur, le respect par M. X... de son obligation d'information, de renseignement et de conseil a été insuffisant et ce, de manière répétée.
En conclusion, M. X... a commis les fautes disciplinaires suivantes entre 2004 et 2008 :- atteintes au principe déontologique d'impartialité par réception systématique de procurations alors qu'elles n'étaient pas nécessaires sauf à servir les besoins du promoteur immobilier,- atteintes à l'honneur et à la dignité de sa fonction par collecte de procurations à travers la France, organisées par la société de commercialisation, et l'accomplissement d'actes de manière régulière au siège d'une société de commercialisation, et dépendance à l'égard de cette société,- atteintes à la règle déontologique du libre choix du notaire par déplacements organisés par la société de commercialisation aux domiciles d'acquéreurs sans que ceux-ci aient eu l'information sur la possibilité de recourir à un autre notaire,- atteintes à la déontologie par manquements réitérés à son obligation d'information, de renseignements et de conseil.
Aucune atteinte à la présomption d'innocence eu égard aux faits pour lesquels M. X... est poursuivi pénalement n'est commise par la reconnaissance de culpabilité de fautes disciplinaires.
Ces fautes sont distinctes des infractions pénales reprochées.
L'action disciplinaire est indépendante et autonome de l'action pénale, même si les éléments de l'action disciplinaire sont puisés dans le dossier pénal.
La présence poursuite disciplinaire ne préjuge en rien du sort de la poursuite pénale.
- III) La sanction
L'article 3 de l'ordonnance du 28 juin 1945 dispose que les peines disciplinaires sont : 1° le rappel à l'ordre, 2° la censure simple, 3° la censure devant la chambre assemblée, 4° la défense de récidiver, 5° l'interdiction temporaire, 6° la destitution.
Au vu du caractère répété des fautes disciplinaires pendant quatre ans et de leur gravité, la sanction de l'interdiction temporaire pendant dix mois prononcée par le tribunal de grande instance de Marseille sera confirmée » ;
Alors, d'une part, qu'en condamnant Monsieur X... à une peine disciplinaire, après avoir relevé que le représentant spécial du président de la Chambre régionale de discipline du conseil régional des notaires a présenté des observations, mais sans toutefois préciser si ce dernier avait déposé des conclusions écrites préalablement à l'audience et, si tel avait été le cas, sans constater que Monsieur X... avait eu communication de ces conclusions afin de pouvoir y répondre utilement, la Cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Alors, d'autre, part, que le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, cet exposé pouvant revêtir la forme d'un visa des conclusions des parties avec l'indication de leur date ; qu'en n'exposant aucunement les moyens et prétentions du président de la Chambre régionale de discipline du conseil régional des notaires, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
Alors, en outre, que, lors des débats devant la Cour d'appel statuant en matière disciplinaire, le président de la Chambre de discipline présente ses observations, le cas échéant par l'intermédiaire d'un membre de la Chambre de discipline ; qu'en condamnant Monsieur X... à une peine disciplinaire, après avoir relevé que le représentant spécial du président de la Chambre de discipline du conseil régional des notaires, qui a présenté des observations, est notaire à Marseille, mais sans préciser si ce dernier était membre par ailleurs de la Chambre de discipline, la Cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des articles 16 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973 modifié, relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels ;
Alors, au surplus, que sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète ; qu'aucune loi n'autorise le ministère public à communiquer la copie d'un dossier pénal en cours d'instruction à un Tribunal de grande instance statuant en matière disciplinaire à l'encontre d'un notaire ; qu'en sanctionnant l'exposant à une peine disciplinaire après avoir pourtant relevé que les éléments de l'action disciplinaire sont puisés dans le dossier pénal en cours d'instruction, la Cour d'appel a violé l'article 11 du Code de procédure pénale ;
Alors, enfin, que l'exigence d'impartialité s'impose à l'autorité qui a pour mission de procéder à une instruction objective et contradictoire de l'affaire disciplinaire et dont le travail est déterminant du sort ultérieurement réservé aux poursuites par la formation de jugement ; qu'il en résulte qu'en matière de discipline des professions réglementées, l'autorité qui exerce la fonction de poursuite ne peut également instruire le dossier disciplinaire du professionnel poursuivi ; qu'en condamnant l'exposant à une peine disciplinaire quand le ministère public, autorité de poursuite, a pourtant également procédé à l'instruction du dossier disciplinaire, la Cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.