La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/04/2014 | FRANCE | N°13NC01603

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 24 avril 2014, 13NC01603


Vu la décision du 27 juin 2013 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté pour M. C...D..., annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 5 juin 2012 et a renvoyé l'affaire devant la même cour ;

Vu la requête, enregistrée le 22 décembre 2011, présentée pour la société EtablissementE..., représentée par son président directeur général, dont le siège est 1 rue de Saverne à Marmoutier (67440), par Me Zillig, avocat ;

La société Etablissement Dieboltdemande à la cour :

1°) d'annuler le

jugement n°1002152 du 3 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg ...

Vu la décision du 27 juin 2013 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté pour M. C...D..., annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 5 juin 2012 et a renvoyé l'affaire devant la même cour ;

Vu la requête, enregistrée le 22 décembre 2011, présentée pour la société EtablissementE..., représentée par son président directeur général, dont le siège est 1 rue de Saverne à Marmoutier (67440), par Me Zillig, avocat ;

La société Etablissement Dieboltdemande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1002152 du 3 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 1er octobre 2009 par laquelle l'inspecteur du travail l'a autorisée à licencier M.D..., ensemble la décision implicite de rejet du recours hiérarchique présenté au ministre du travail ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de M. D...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société soutient que :

- l'inspecteur du travail a été informé immédiatement de la décision de mise à pied de M.D... ; qu'elle a respecté l'article L. 2421-1 du code du travail ;

- le délai de huit jours prévu par l'article R. 2421-14 du code du travail n'est pas prescrit à peine de nullité ; en l'espèce le délai a été respecté dès lors que le report de l'entretien préalable était justifié par l'arrêt de travail du salarié et que la saisine de l'inspecteur du travail est intervenue dans le délai de 7 jours ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2012, présenté pour M. C... D... domicilié..., par Me Wedrychowski, tendant au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'inspecteur du travail n'a pas été complètement informé de sa mise à pied ; que le délai de 8 jours prévu à l'article R. 2421-14 du code du travail a été largement dépassé et que le délai constaté est excessif ; que les faits retenus pour prononcer son licenciement ne sont pas établis et que l'inspecteur du travail n'a d'ailleurs retenu qu'une partie des faits qui lui étaient reprochés ;

Vu les pièces du dossier établissant que la requête a été communiquée le 13 janvier 2012 au ministre du travail, de l'emploi et de la santé, pour lequel il n'a pas été présenté d'observations ;

Vu en date du 7 juin 2012, la note en délibéré présentée pour M. D...par Me Wedrychowski ;

Vu le mémoire après cassation, enregistré le 10 septembre 2013, présenté pour la société EtablissementE... ;

La société Etablissement Dieboltpersiste dans ses conclusions et porte à 2 500 euros la somme demandée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'employeur a respecté les dispositions des articles R. 2421-14 et L. 2421-1 du code du travail ;

- la société avait un motif sérieux de licenciement ;

Vu le mémoire en défense après cassation, enregistré le 27 septembre 2013, présenté pour M. C... D..., tendant au rejet de la requête, à la suppression de passages diffamatoires et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'article L. 2421-1 du code du travail a été méconnu car le courrier du 18 août 2009 ne mentionne pas la décision prise par l'employeur de prononcer la mise à pied conservatoire du salarié, qui n'est pas motivée alors que cette motivation constitue une formalité substantielle ;

- l'article R. 2421-14 du code du travail a été méconnu dès lors que le délai imparti par cet article a commencé à courir à compter du 20 août 2009 ; le délai écoulé entre la notification de la décision de mise à pied du 22 août 2009 et la date de demande d'autorisation en date du 16 septembre 2009 adressée à l'inspection du travail excède le délai de huit jours prévu par les textes, et est excessif ; ce délai n'est pas suspendu par un arrêt maladie ;

- le contradictoire n'a pas été respecté dans le cadre de la procédure d'enquête de l'inspection du travail, car ses nombreuses demandes de pièces sont restées sans réponse ;

- aucun des motifs invoqués par l'employeur n'était, au regard des faits, susceptible de motiver son licenciement pour faute grave ; la décision de classement sans suite et le procès verbal de synthèse du 23 janvier 2013 le démontrent ; certains griefs tombent sous le coup de la prescription de deux mois prévue à l'article L. 1332-4 du code du travail ;

Vu le mémoire récapitulatif, enregistré le 20 novembre 2013, présenté pour la société EtablissementE..., qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre qu'il résulte du procès verbal de synthèse que les griefs articulés à l'encontre de M. D...sont fondés, à savoir l'abus de confiance et le recel de biens obtenus à l'aide d'un abus de confiance ; que la direction de l'entreprise n'avait pas connaissance de ses agissements ; que la rupture de son contrat de travail n'avait pas été envisagée ; que la société a déposé, le 4 septembre 2013, une plainte avec constitution initiale de partie civile près le TGI de Saverne, et une consignation a été réglée le 26 septembre 2013 ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 7 janvier 2014, présenté pour M. C...D... ;

Il soutient en outre que le procès verbal de synthèse ne remet pas en question le classement sans suite intervenu à son égard ; que les griefs invoqués à son encontre ne sont pas constitutifs de motifs graves d'un licenciement, lequel a été imaginé par la direction pour échapper à une indemnisation qu'elle jugeait trop onéreuse ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2014 :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me Zillig, avocat de la société Etablissements Dieboltet de Me Wedrychowski, avocat de M.D... ;

1. Considérant que la société Etablissements Diebolta sollicité de l'inspection du travail l'autorisation de licencier pour faute M. D..., directeur administratif et financier depuis le 25 janvier 1991 et conseiller prud'homal ; que, par une décision en date du 1er octobre 2009, l'inspecteur du travail a accordé l'autorisation demandée ; que le silence gardé par le ministre chargé du travail sur le recours hiérarchique de M. D...enregistré le 25 novembre 2009 a fait naître une décision implicite de rejet ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé ces deux décisions ;

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-14 du code du travail : " En cas de faute grave, l'employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé jusqu'à la décision de l'inspecteur du travail. La consultation du comité d'entreprise a lieu dans un délai de dix jours à compter de la date de la mise à pied. La demande d'autorisation de licenciement est présentée dans les quarante-huit heures suivant la délibération du comité d'entreprise. S'il n'y a pas de comité d'entreprise, cette demande est présentée dans un délai de huit jours à compter de la date de la mise à pied. La mesure de mise à pied est privée d'effet lorsque le licenciement est refusé par l'inspecteur du travail ou, en cas de recours hiérarchique, par le ministre. " ; que si le délai de huit jours n'est pas prescrit à peine de nullité de la procédure, il doit cependant être aussi court que possible, eu égard à la gravité de la mesure de mise à pied ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société SA Diebolta prononcé une mesure de mise à pied à titre conservatoire de M. D...par courrier du 18 août 2009 dont M. D...a accusé réception le 22 août 2009 ; que la société a informé, par courrier avec accusé de réception du 18 août 2009, reçu le 19, la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de la convocation en vue d'un licenciement d'un salarié protégé, conseiller prud'homal, M. D... C..., ainsi que sa mise à pied à titre conservatoire ; que l'inspectrice du travail a attesté par un courrier en date du 5 décembre 2011, attestation qui peut valablement être versée aux débats, contrairement à ce que soutient M.D..., avoir reçu cette information ; que si la demande d'autorisation de licenciement n'a été adressée que le 16 septembre et reçue le 17 septembre par l'inspecteur du travail, soit plus de huit jours après la mise à pied à titre conservatoire, il ressort des pièces du dossier que M. D..., qui avait été convoqué à un entretien préalable au licenciement le 27 août 2009, a adressé à la société un certificat médical lui prescrivant un arrêt de travail jusqu'au 8 septembre 2009, si bien que son employeur a, pour ce motif, repoussé l'entretien au 9 septembre 2009 ; que nonobstant la circonstance que la société a demandé à M. D... de se présenter le 27 août durant ses heures de sortie pour restituer certains objets (clés, ordinateur, carte essence) et documents appartenant à la société et que M. D...a demandé la veille au soir que l'entretien soit maintenu, la saisine de l'inspecteur du travail, reçue huit jours après l'entretien, ne peut être regardée comme intervenue au terme d'un délai excédant anormalement celui prévu à l'article R. 2421-14 précité ; que le dépassement du délai réglementaire n'a en outre en l'espèce pas privé le salarié d'une garantie ; qu'il suit de là que la société est fondée à soutenir que le tribunal ne pouvait légalement annuler pour ce motif la décision d'autorisation de licenciement de M.D... ;

4. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D...devant le tribunal administratif et la cour ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2421-1 du code du travail :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2421-1 du code du travail, applicable aux conseillers prud'homaux en application de l'article L. 2421-2 du même code : " La demande d'autorisation de licenciement d'un délégué syndical, d'un salarié mandaté ou d'un conseiller du salarié est adressée à l'inspecteur du travail. En cas de faute grave, l'employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé dans l'attente de la décision définitive. Cette décision est, à peine de nullité, motivée et notifiée à l'inspecteur du travail dans le délai de quarante-huit heures à compter de sa prise d'effet. Si le licenciement est refusé, la mise à pied est annulée et ses effets supprimés de plein droit. " ;

6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la décision de mise à pied du 18 août 2009, qui était suffisamment motivée, a été transmise à l'inspecteur du travail dans le délai de deux jours prévu par ces dispositions ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2421-1 du code du travail doit en tout état de cause être écarté ;

Sur le moyen tiré du non respect du contradictoire :

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-11 du code du travail : " L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat. L'inspecteur du travail prend sa décision dans un délai de quinze jours, réduit à huit jours en cas de mise à pied. Ce délai court à compter de la réception de la demande d'autorisation de licenciement. Il n'est prolongé que si les nécessités de l'enquête le justifient. L'inspecteur avise de la prolongation du délai les destinataires mentionnés à l'article R. 2421-12. " ;

8. Considérant que le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions mentionnées ci-dessus impose à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé fondée sur un motif disciplinaire, d'informer le salarié concerné des agissements qui lui sont reprochés et de l'identité des personnes qui en ont témoigné ; qu'il implique, en outre, que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance en temps utile de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, sans que la circonstance que le salarié est susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation ; que c'est seulement lorsque l'accès à certains de ces éléments serait de nature à porter gravement préjudice à leurs auteurs que l'inspecteur du travail doit se limiter à informer le salarié protégé, de façon suffisamment circonstanciée, de leur teneur ;

9. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; qu'il appartient au juge administratif d'écarter, le cas échéant de lui-même, un moyen tiré d'un vice de procédure qui, au regard de ce principe, ne lui paraît pas de nature à entacher d'illégalité la décision attaquée ;

10. Considérant qu'au cours de l'enquête contradictoire qui a précédé la décision litigieuse du 1er octobre 2009, M. D...a demandé par courriel du 22 septembre 2009 à MmeA..., inspectrice du travail, de lui " confirmer qui " lui " communiquera les pièces ", sans autres précisions ; que par courrier du 23 septembre 2009, l'inspectrice du travail a répondu que si l'inspecteur du travail était tenu de porter à la connaissance du salarié les faits et les motifs qui fondent la demande d'autorisation de licenciement, il n'était pas tenu de lui communiquer les documents joints par l'employeur à titre de justificatifs ; que cependant M. D..., qui exerçait les fonctions de directeur administratif et financier, a eu connaissance des griefs précis formulés à son encontre, à savoir " auto octroi de primes non autorisées et non respect de l'augmentation annuelle des salaires le concernant, contrats falsifiés et inexistants - auto application de la loi TEPA, remboursement indus de frais de déplacement, d'hébergement et de repas, violation des engagements contractuels - tromperie - manque de loyauté à l'encontre de l'ensemble du personnel, émissions de fausses factures et encaissement de factures sur son compte personnel ", a reconnu certains faits lors de l'enquête contradictoire qui s'est déroulée les 22, 23 et 24 septembre et n'apporte aucune précision sur les pièces justificatives qu'aurait apportées son employeur sans qu'il soit mis en mesure d'en débattre ; que, dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D...aurait été privé de la garantie que constitue le caractère contradictoire de l'enquête prévue à l'article R. 2421-11 du code du travail ;

Sur le moyen tiré de l'illégalité des motifs du licenciement :

11. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives ou candidats à ces fonctions bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés de l'entreprise, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou visées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ou auquel il a postulé ;

12. Considérant qu'il ressort de la décision attaquée que si la demande de licenciement était fondée sur les cinq motifs cités au point 9, l'inspecteur du travail n'a retenu que les trois derniers griefs pour fonder sa décision ; que par suite, les moyens dirigés contre les autres motifs sont inopérants ;

13. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1332-4 du code du travail : " Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales " ; qu'il ressort des pièces du dossier que les faits à l'origine du licenciement n'ont été découverts par l'employeur que le 27 juillet 2009 ; que M. Diebolta déposé plainte le 5 septembre 2009 pour ces faits s'étant déroulés du 1er janvier 1991 au 5 septembre 2009, plainte qui a été transmise au procureur de la République ; que, par suite, contrairement à ce que soutient M. D..., les faits tenant au " remboursement indus de frais de déplacement, d'hébergement et de repas " n'étaient pas prescrits à la date à laquelle l'inspecteur du travail a été saisi ;

14. Considérant cependant que M. D...fait valoir qu'il bénéficiait de 1991 à 2002 d'un véhicule de société et que lors de la suppression de cet avantage M. Dieboltlui avait garanti qu'il bénéficierait d'un avantage équivalent, à savoir le remboursement d'une somme de 12 à 13 000 euros par an ; que s'il produit un tableau annoté des rémunérations du personnel de l'entreprise, ce document, qui n'est pas signé, n'établit pas qu'il devait percevoir des frais de déplacement kilométriques en sus de la somme de 914,68 € versée mensuellement et de l'usage d'une carte essence ; que toutefois il ressort du détail du compte de résultat de l'entreprise qu'y figurent pour les années 2007 et 2008 les sommes de 13 149,43€ et 14 462,76€ sous l'intitulé " D...C...fr. déplacement " ce qui rend crédible l'affirmation selon laquelle M. Dieboltne pouvait ignorer les remboursements litigieux ; que M. D...fait valoir en outre que le procès-verbal de synthèse de la gendarmerie du 22 janvier 2013 indique que " tout cela est visible dans une comptabilité et perdure depuis une dizaine d'années (...) " et que la poursuite pénale a abouti le 27 mars 2013 à un classement sans suite par le procureur de la République ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D...se soit accordé le remboursement de frais dans des conditions non admises par son employeur ; que ce grief ne pouvait fonder légalement le licenciement prononcé ;

15. Considérant, en deuxième lieu, que l'inspecteur du travail a fondé sa décision sur le motif tiré de la " violation des engagements contractuels - tromperie - manque de loyauté à l'encontre de l'ensemble du personnel " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le 12 décembre 2008, en raison des circonstances économiques dues à la conjoncture, le comité d'entreprise de la SA Diebolta voté l'acceptation d'une baisse de salaire de 10% pour l'ensemble du personnel, y compris tous les membres de la direction ; qu'un document en date du 15 décembre 2008, signé par M.D..., atteste, contrairement à ce qu'il soutient, " qu'il a accepté en conséquence une modification provisoire de son contrat de travail qui est entrée en application le 1er janvier 2009 pour une période provisoire prolongée au 31 juillet 2009 " ; que la circonstance que ledit document ne soit pas signé par M. Dieboltest sans incidence sur l'engagement pris par M.D... ; qu'il n'est pas contesté par M. D...qu'il s'est fait rembourser sur ses salaires de juin et juillet 2009 les sommes précédemment retenues à ce titre ; que s'il soutient avoir obtenu pour cela l'accord de M.Diebolt, il ne l'établit pas ; que par suite, l'inspecteur du travail a pu retenir sans erreur de fait parmi les griefs justifiant le licenciement une violation des engagements contractuels ;

16. Considérant, en troisième lieu, que l'inspecteur du travail a fondé sa décision sur des " émissions de fausses factures et encaissement de factures sur son compte personnel " ; que, contrairement à ce que soutient M.D..., les faits liés à la société allemande Forec GmbH n'ont pas été retenus par l'inspecteur du travail pour fonder la décision litigieuse ; que par contre, s'agissant du " droit de jeu au golf de la Wantzenau ", il ressort des pièces du dossier que cette action au nom de la société Dieboltpermettant à une personne de bénéficier du droit de jeu avait été cédée à l'ASPTT Strasbourg qui versait une rémunération pour mise à disposition de cette action ; que, pour les années 2008 et 2009, ledit droit de jeu a été versé par chèque et encaissé sur le compte de M.D..., qui ne peut utilement soutenir qu'une telle pratique relève du domaine du loisir et n'affecte pas les intérêts de la sociétéE... ; que, par suite, ce grief pouvait également être retenu par l'inspecteur du travail pour fonder le licenciement prononcé ;

17. Considérant que les griefs précités de violation de ses engagements contractuels par un cadre dirigeant dans un contexte de déloyauté à l'encontre du reste du personnel et d'encaissement de factures sur son compte personnel présentaient un degré de gravité suffisant pour justifier le licenciement pour faute ;

Sur le moyen tiré du détournement de procédure :

18. Considérant que la circonstance que M.B..., mandataire judiciaire, a attesté le 28 décembre 2012 qu'il " était envisagé le licenciement de M.D..., le poste de celui-ci ne se justifiant plus du fait de la baisse d'activité " et que " M. Dieboltenvisageait alors une transaction avec M. D...pour étaler le coût de ce licenciement ", ne suffit pas, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la nature et de la gravité des fautes commises, à établir le détournement de procédure allégué ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société SA Etablissement Dieboltest fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du l'inspecteur du travail en date du 1er octobre 2009 autorisant le licenciement de M.D... et la décision implicite de rejet intervenue sur recours hiérarchique ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société EtablissementE..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. D...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. D...la somme demandée par la société Etablissement Dieboltau titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 3 novembre 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la société Etablissement Diebolttendant à la condamnation de M. D...à lui verser des sommes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société SA EtablissementsE..., à M. C... D...et au ministre du travail.

''

''

''

''

2

13NC01603


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01603
Date de la décision : 24/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Procédure préalable à l'autorisation administrative.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : LAGRANGE PHILIPPOT CLEMENT ZILLIG VAUTRIN SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-04-24;13nc01603 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award