Vu la requête, enregistrée le 6 août 2013 présentée pour M. et Mme A...C..., demeurant..., par Me Hubeau ;
M. et Mme C...demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 6 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande tendant à être déchargés de l'obligation de payer la somme de 90 591,65 euros au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 1993, à la restitution de cette somme et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) d'ordonner que leur soient restituées avec intérêts moratoires, dans la limite de 87 694,95 euros, les sommes recouvrées par le Trésor public au titre de leur imposition de l'année 1993 et la somme de 53 325,94 euros appréhendée par avis à tiers détenteur du 19 avril 2007 ;
3°) de constater la déchéance des droits et actions de l'administration au regard du recouvrement du surplus de leur imposition de l'année 1993, y compris pénalités et frais ;
4°) de constater que l'administration n'est pas fondée à leur opposer, à partir de mises en recouvrement effectuées en 1999 et 2000, leur reconnaissance, interruptive de prescription, d'une dette fiscale globale de 202 228 euros ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros à leur verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- la recevabilité du quantum de leur demande, limitée à 67 983,07 euros par le tribunal administratif, doit être admise à hauteur de 87 697,95 euros incluant l'ensemble des droits et pénalités non encore constatés ;
- le jugement est entaché d'omission à statuer sur leur contestation relative à l'existence d'une reconnaissance de dette ;
- l'action en recouvrement relative à l'imposition des revenus de l'année 1993 est prescrite du fait que l'inscription de l'hypothèque légale du trésor portant sur des immeubles situés à Lyon est irrégulière, en ce que le bordereau d'inscription ne comporte pas les mentions obligatoires, et que la somme de 53 325,94 euros appréhendée par avis à tiers détenteur du 19 avril 2007 n'a pas été correctement imputée sur leur passif fiscal ;
- les versements qu'ils ont été contraints d'effectuer, alors même qu'ils contestaient les impositions, ne sauraient valoir reconnaissance de dettes ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 16 janvier 2014, le mémoire en défense présenté pour le ministre de l'économie et des finances ; il conclut au rejet de la requête ; il soutient que :
- la prescription de l'action en recouvrement relative à l'imposition établie au titre de l'année 1993, mise en recouvrement le 31 décembre 1999, a été valablement suspendue par l'effet du sursis de paiement, garanti par une hypothèque légale, dont les contribuables ont bénéficié, sur leur demande, entre le 15 mars 2000 (date de leur réclamation) et le 6 janvier 2005 (date du jugement ayant prononcé le rejet de leur requête) ;
- nonobstant leur contestation du bien-fondé des impositions, les différents engagements de versements pris par les redevables, leurs versements échelonnés et leurs lettres mentionnant le montant des impositions constituent de leur part une reconnaissance de dette au sens de l'article 2240 du code civil, interruptive de la prescription de l'action en recouvrement ;
- si les requérants entendent contester l'imputation de la somme de 53 325,94 euros, appréhendée le 30 juillet 2007 en exécution d'un avis à tiers détenteur du 19 avril 2007, en soutenant que cette imputation erronée rendrait caducs l'ensemble des actes de poursuite ultérieurs, il est constant que les sommes appréhendées ont été imputées conformément à l'objet de l'avis à tiers détenteur du 19 avril 2007 qui, à défaut d'avoir été frappé d'opposition, est devenu définitif ; en outre, la juridiction administrative est incompétente pour connaître d'une contestation relative à la régularité de l'inscription de l'hypothèque légale du trésor préalablement à l'émission de l'avis à tiers détenteur susmentionné ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance du 14 mars 2014 fixant la clôture de l'instruction au 3 avril 2014 à 16 heures en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;
Vu les pièces dont il résulte que, par application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office tirés de l'irrecevabilité :
- des conclusions tendant à la restitution de sommes appréhendées par le trésor public fondées sur le moyen tiré de la prescription de l'action en vue du recouvrement en l'absence d'opposition formée contre des actes de poursuite dans les formes et délai prévus par les articles L. 281 et R. 281 et suivant du livre des procédures fiscales ;
- des conclusions à fin de donner acte d'une éventuelle déchéance des droits et actions de l'administration pour le recouvrement d'impositions dont les requérants restent débiteurs, et de ce que l'administration ne serait pas fondée, pour le recouvrement de ces impositions, à leur opposer une reconnaissance de dette interruptive de prescription ;
- des conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires en l'absence de litige né et actuel ;
Vu, enregistré le 4 avril 2014 le mémoire en réplique ainsi que les observations en réponse à l'information susvisée relative aux moyens d'ordre public présentés pour M. et MmeC... ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2014 :
- le rapport de M. Commenville, président,
- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;
1. Considérant que M. et Mme C...font appel du jugement du 6 juin 2013 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant qu'il a rejeté leur demande de restitution de la somme de 87 694,95 euros appréhendée par le trésor public pour paiement des compléments d'impôt sur le revenu, contribution sociale généralisée et majorations mis à leur charge au titre des années 1993, 1994 et 1995, mis en recouvrement les 31 décembre 1999 et 31 décembre 2000 ; qu'ils demandent, en outre à la cour administrative d'appel de constater, ensemble, la déchéance des droits et actions de l'administration pour le recouvrement du surplus de sa créance relative à l'imposition des revenus de l'année 1993 et l'impossibilité, au regard des mises en recouvrement auxquelles il a été procédé en 1999 et 2000 pour un montant total de 1 326 552 F (202 228 euros), de leur opposer une reconnaissance de dette interruptive de la prescription de l'action en vue du recouvrement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que, dès lors qu'il a constaté au §4 du jugement qu'en ce qui concerne les impositions établies au titre des années 1993, 1994 et 1995, la prescription de l'action en vue du recouvrement avait été prorogée, depuis la mise en recouvrement des impositions, par l'effet d'un sursis de paiement, de mises en demeure et d'avis à tiers détenteur jusqu'à la date du 22 juin 2011, le tribunal administratif n'avait pas à se prononcer sur le moyen devenu inopérant tiré de ce que les versements effectués au cours de la même période ne pouvaient être regardés comme valant reconnaissance de dette interruptive de prescription ; qu'ainsi le jugement attaqué n'est pas entaché d'omission à statuer ;
Sur les conclusions tendant à la restitution de la somme de 87 694,95 euros, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête :
3. Considérant que la somme de 87 694,95 euros dont les requérants demandent à la cour administrative d'appel d'ordonner qu'elle leur soit restituée a été appréhendée par le trésor public, à concurrence de 53 325,94 euros le 30 juillet 2007 en exécution d'un avis à tiers détenteur notifié le 19 avril 2007 à Me Daguet, notaire, à la suite d'une vente d'immeuble leur ayant appartenu, et, pour le surplus, par l'effet de versements effectués par les contribuables en exécution d'un plan de règlement échelonné du solde de leur dette fiscale ;
4. Considérant que, d'une part, aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. " ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 281-1 du même livre : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ...2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution (1), dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199. " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 281-2, dans sa rédaction alors en vigueur à la date de l'avis à tiers détenteur du 19 avril 2007 : " La demande prévue par l'article R. 281-1 doit, sous peine de nullité, être présentée au trésorier-payeur général dans un délai de deux mois à partir de la notification de l'acte si le motif invoqué est un vice de forme ou, s'il s'agit de tout autre motif, dans un délai de deux mois après le premier acte qui permet d'invoquer ce motif " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que des conclusions tendant à la restitution de sommes appréhendées par le trésor public par voie d'avis à tiers détenteur ou par l'effet de paiements spontanés fondées sur le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement prévue par l'article L. 274 précité ne sont recevables qu'en complément, et pour l'exécution, d'une opposition formée contre des actes de poursuites dans les formes et délai prévus par les articles L. 281 et R. 281 et suivants du livre des procédures fiscales ;
5. Considérant qu'il est constant, que, d'une part, M. et Mme C...n'ont pas formé opposition dans le délai de deux mois de sa notification contre l'avis à tiers détenteur émis à leur encontre le 19 avril 2007 auprès de Me Daguet, notaire, par le trésorier de Fumey pour avoir paiement de la somme de 225 785,67 euros, dont ils étaient redevables au titre de l'impôt sur le revenu des années 1993, 1994 et 1995, et en exécution duquel la somme de 53 325,94 euros a été versée au trésor public ; que, d'autre part, le moyen tiré par M. et Mme C... de ce que l'action en vue du recouvrement de l'impôt était prescrite à la date à laquelle ils ont exécuté des versements spontanés en exécution d'un plan de règlement échelonné n'est pas invoqué au soutien de la contestation de l'obligation de payer résultant d'un acte de poursuite ; que, dans ces conditions, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de la prescription de l'action en vue du recouvrement pour demander la restitution des sommes appréhendées par le trésor public ;
Sur les autres conclusions des requérants :
6. Considérant, en premier lieu, qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable public et les requérants concernant le versement d'intérêts moratoires ; que, dès lors, les conclusions de ces derniers tendant à la condamnation de l'Etat au versement d'intérêts moratoires ne sont pas recevables ;
7. Considérant, en second lieu, qu'il n'appartient pas au juge de l'impôt de donner acte aux requérants d'une éventuelle déchéance des droits et actions de l'administration pour le recouvrement des impositions dont ils restent débiteurs, ni, en tout état de cause, de ce que l'administration ne serait pas fondée à leur opposer une reconnaissance de dette interruptive de prescription à hauteur de 202 228 euros ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme C...la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...C...et au ministre chargé du budget.
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