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27/06/2013 | FRANCE | N°13NC00245

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 27 juin 2013, 13NC00245


Vu la requête, enregistrée le 11 février 2013, présentée pour la communauté de communes du pays de Lure, dont le siège est ZAC de la Saline, Rue des Berniers, BP 50 à Lure Cedex (70204), par la SELARL D4, avocats associés ;

La communauté de communes du pays de Lure demande à la Cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 1101307 du 12 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de la commission de protection des eaux de Franche-Comté et de la ligue pour la protection des oiseaux de Franche-Comté, la

délibération de son conseil communautaire du 15 mars 2011 approuvant le dossier ...

Vu la requête, enregistrée le 11 février 2013, présentée pour la communauté de communes du pays de Lure, dont le siège est ZAC de la Saline, Rue des Berniers, BP 50 à Lure Cedex (70204), par la SELARL D4, avocats associés ;

La communauté de communes du pays de Lure demande à la Cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 1101307 du 12 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de la commission de protection des eaux de Franche-Comté et de la ligue pour la protection des oiseaux de Franche-Comté, la délibération de son conseil communautaire du 15 mars 2011 approuvant le dossier de création de la zone d'aménagement concerté " Arémis-Lure " et la décision du 8 juillet 2011 de son président refusant de retirer cette délibération ;

2°) de mettre à la charge de la commission de protection des eaux de Franche-Comté et de la ligue de protection des oiseaux de Franche-Comté la somme de 2 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Elle soutient que le Tribunal administratif a exercé sur l'acte attaqué un contrôle d'opportunité et a excédé les limites du contrôle restreint auquel il était tenu en cette matière ; qu'il devait faire usage de la théorie classique du bilan coût-avantage ; qu'il a donné à la ZNIEFF, outil d'inventaire environnemental, une portée juridique qu'elle n'a pas ; qu'il a commis des erreurs de fait notamment dans le chiffrage des surfaces bâties ; qu'il n'a pas pris en compte les éléments d'information qu'elle avait produits et a adopté, par principe, sur plusieurs points la version des associations requérantes ; que l'étude d'impact est de très bonne qualité et a été réalisée conformément aux dispositions de l'article R. 122-3 du code de l'environnement ; que les limites de la ZNIEFF sont encore mouvantes faute d'avoir été validées par l'inventaire national du patrimoine naturel ; que l'enjeu est la préservation des espèces et non leur maintien sur le site ; que les 30 ha de panneaux photovoltaïques seront implantés sur les surfaces où les enjeux environnementaux sont les plus faibles et seront surélevés de 80 cm ; que c'est à tort que le Tribunal administratif a omis de prendre en considération la préservation de plus de 100 ha en zone naturelle, le maintien des continuités écologiques par la mise en place de corridors transversaux de 150 à 300 m de large, l'augmentation importante in fine de la surface d'habitats d'intérêt communautaire sains et la réutilisation des pistes existantes sur le site ; que le Tribunal administratif n'a pas tenu compte de la dimension économique et financière du projet ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2013, présenté pour l'association dite " commission de protection des eaux de Franche-Comté ", par MeA..., qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la communauté de communes du pays de Lure doit justifier de sa capacité à agir et de l'acquittement du timbre électronique ; que le site de l'aérodrome de Malbouhans présente sur plus de 200 ha un intérêt écologique de premier ordre, confirmé par son inscription en ZNIEFF de type 1 depuis 2002 ; qu'il a bénéficié d'un entretien agricole minimal sans labours ni traitements chimiques ; ces terrains abritent deux habitats d'intérêt communautaire dont un prioritaire : une prairie maigre de fauche de l'Arrhenatherion et de grandes surfaces de pelouses siliceuse du Violon caninae ; que la réalisation de la ZAC affectera également les populations d'insectes et notamment les 4 espèces de papillons protégés (Cuivré des marais, Azuré du serpolet, Damier de la succise et Laineuse du prunellier) ; que le maculinéa arion serait aussi affecté alors qu'il s'agit d'un site majeur pour ce Rhopalocère, espèce faisant l'objet d'un plan national d'actions ; que le Tribunal s'est fondé sur les chiffres contenus dans l'étude d'impact et n'en a pas fait une interprétation erronée ; que les espaces verts prévus sur le site sont considérés par l'étude d'impact comme totalement dégradés ; qu'il ne suffit pas que les populations animales puissent pendant le phasage de l'opération prévue sur une trentaine d'années se déplacer, mais que les milieux d'adoption soient favorables ; qu'en l'espèce, les espaces périphériques de l'aérodrome sont tournés vers une agriculture le plus souvent intensive ; que le Tribunal administratif n'a pas commis d'erreur dans le chiffrage de l'étendue de la ZNIEFF ; que le positionnement, la dispersion et le morcellement des hectares de zones naturelles préservées sur le site ne présentent pas les garanties nécessaires à la préservation des habitats naturels, de la flore et de la faune ; que le morcellement des milieux naturels va conduire à un appauvrissement irrémédiable de la diversité biologique ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 26 avril 2013, présenté pour la communauté de communes du pays de Lure, qui conclut aux mêmes fins que la requête ;

Elle soutient en outre que sa requête est recevable ; que ce site par la présence d'infrastructures de pistes est le seul permettant l'implantation d'entreprises dans le cadre du projet " véhicules du futur " ; que sur les 930 ha de surfaces agricoles à la périphérie du site, près de 70% sont constitués de prairies dont la majorité est de type " prairie naturelle " ; que l'aménagement est prévu de manière concertée et progressive dans le but de maintenir les grands équilibres écologiques du site ; qu'il a été tenu compte, de manière réaliste, de la nature des espèces et des habitats présents sur le site ainsi que de leurs caractéristiques ; que le dossier de création s'est attaché à préserver la richesse patrimoniale du site ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 mai 2013, présenté pour la ligue pour la protection des oiseaux de Franche-Comté, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la communauté de communes du pays de Lure le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la délimitation du projet " Arémis-Lure " recouvre bien la ZNIEFF de type I dénommée " ancien aérodrome de Lure-Malbouhans " ; que même si elle est dépourvue de caractère réglementaire, la légalité du projet devait être examinée au regard des espèces et milieux inventoriés par cette ZNIEFF et qui sont d'une richesse exceptionnelle ; que ce site doit être replacé dans le contexte de la stratégie nationale de préservation de la biodiversité ; que le Tribunal administratif a exposé de manière précise et explicite les motifs de sa décision ; que la communauté de communes du pays de Lure n'a pas mis en oeuvre les mesures d'évitement du site de Malbouhans ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 mai 2013, présenté pour la commission de protection des eaux de Franche-Comté, qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Elle soutient en outre que les installations photovoltaïques couvrent une superficie qui englobe pour partie une zone où des habitats jugés de qualité forte à très forte ont été identifiés ; qu'en dépit de l'installation des panneaux à 80 cm du sol, il est à craindre une banalisation du cortège végétal et animal ; que contrairement à ce que soutient la communauté de communes, les milieux environnants ne sont pas favorables aux espèces présentes sur le site car ils sont le plus souvent tournés vers l'agriculture intensive ; que les mesures préventives et compensatoires sont insuffisantes ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 juin 2013, présenté pour la communauté de communes du pays de Lure, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que la délibération contestée n'avait ni pour objet ni pour effet d'autoriser une dérogation au titre des espèces protégées ; que la recherche d'un autre site d'implantation, clairement abordée dans l'étude d'impact, n'a pas été concluante ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2013 :

- le rapport de M. Pommier, président,

- les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,

- et les observations de Me Rouquet, avocat de la communauté de communes du pays de Lure, ainsi que celles de Me Morin, avocat de la commission de protection des eaux de Franche-Comté, et celles de Me Posak, avocat de la ligue de protection des oiseaux de Franche-Comté ;

Vu, enregistrée le 17 juin 2013, la note en délibéré présentée pour la communauté de communes du pays de Lure ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par la commission de protection des eaux de Franche-Comté :

1. Considérant, en premier lieu, que l'article 1635 bis Q du code général des impôts dispose que : " Lorsque l'instance est introduite par un auxiliaire de justice, ce dernier acquitte pour le compte de son client la contribution par voie électronique. / Lorsque l'instance est introduite sans auxiliaire de justice, la partie acquitte cette contribution par voie de timbre mobile ou par voie électronique. / Les conséquences sur l'instance du défaut de paiement de la contribution pour l'aide juridique sont fixées par voie réglementaire " ; qu'aux termes de l'article R. 411-2 du code de justice administrative : " Lorsque la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts est due et n'a pas été acquittée, la requête est irrecevable. / Cette irrecevabilité est susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours (...) " ;

2. Considérant que l'avocat de la communauté de communes du pays de Lure a, lors de l'introduction de la présente instance, acquitté par voie électronique la contribution pour l'aide juridique ; que, dès lors, la requête est recevable ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 5211-9 du code général des collectivités territoriales : " Le président est l'organe exécutif de l'établissement public de coopération intercommunale (...) Il représente en justice l'établissement public de coopération intercommunale (...) " ; qu'ainsi le président de la communauté de communes du pays de Lure tenait de ces dispositions compétence pour interjeter appel du jugement rendu par le Tribunal administratif de Besançon le 12 décembre 2012 et demander à la Cour d'ordonner le sursis à exécution dudit jugement ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non recevoir opposées par la commission de protection des eaux de Franche-Comté doivent être écartées ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement attaqué :

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement " ;

6. Considérant que les moyens tirés de ce que le Tribunal administratif de Besançon a commis une erreur de fait en retenant dans le jugement attaqué une superficie totale des aménagements de 200 ha, alors qu'elle n'est que de 131 ha, et de ce qu'eu égard aux diverses précautions prises et dont fait état l'étude d'impact, la création de la ZAC " Arémis-Lure ", qui laisse subsister 105 ha de zones naturelles sur les 236 ha que comptera cette zone, n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la richesse de la faune et de la flore du site de l'ancien aérodrome de Lure-Malbouhans couvert par une Znieff de type 1, paraissent en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ; qu'aucun autre moyen n'a été invoqué par les parties défenderesses ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Besançon en date du 12 décembre 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commission de protection des eaux de Franche-Comté et de la ligue pour la protection des oiseaux de Franche-Comté la somme que demande la communauté de communes du pays de Lure au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la communauté de communes du pays de Lure, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que demandent au même titre la commission de protection des eaux de Franche-Comté et la ligue pour la protection des oiseaux de Franche-Comté ;

D É C I D E :

Article 1er : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête formée par la communauté de communes du pays de Lure contre le jugement du Tribunal administratif de Besançon en date du 12 décembre 2012, il sera sursis à l'exécution de ce jugement.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de la commission de protection des eaux de Franche-Comté et de la ligue pour la protection des eaux de Franche-Comté tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes du pays de Lure, à la commission de protection des eaux de Franche-Comté (CREPESC) et à la ligue pour la protection des oiseaux (LPO) de Franche-Comté.

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N° 13NC00245


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00245
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Voies de recours - Appel - Conclusions recevables en appel - Conclusions à fin de sursis.

Urbanisme et aménagement du territoire - Procédures d'intervention foncière - Opérations d'aménagement urbain - Zones d'aménagement concerté (ZAC) - Création.


Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Joseph POMMIER
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : POSAK

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-06-27;13nc00245 ?
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