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02/07/2015 | FRANCE | N°13MA02888

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 02 juillet 2015, 13MA02888


Vu la requête sommaire, enregistrée le 19 juillet 2013, présentée pour l'assistance publique-hôpitaux de Marseille (APHM), représentée par son directeur en exercice, dont le siège est sis 80 rue Brochier à Marseille (13354) cedex 5, par Me Le Prado, avocat ; l'APHM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106516 du 14 mai 2013 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il l'a condamnée, à la demande de Mme A...C..., à verser par son article 1er à cette dernière la somme de 19 000 euros au titre de la réparation du préjudice qu'elle a subi lors de son o

pération le 28 octobre 2002 à l'hôpital de la Timone à Marseille et par ...

Vu la requête sommaire, enregistrée le 19 juillet 2013, présentée pour l'assistance publique-hôpitaux de Marseille (APHM), représentée par son directeur en exercice, dont le siège est sis 80 rue Brochier à Marseille (13354) cedex 5, par Me Le Prado, avocat ; l'APHM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106516 du 14 mai 2013 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il l'a condamnée, à la demande de Mme A...C..., à verser par son article 1er à cette dernière la somme de 19 000 euros au titre de la réparation du préjudice qu'elle a subi lors de son opération le 28 octobre 2002 à l'hôpital de la Timone à Marseille et par son article 3, la somme de 30 258,10 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse au titre des débours que la caisse a dû engager pour son assurée ;

2°) de rejeter les demandes de Mme C...et de la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse ;

L'APHM soutient que :

* le jugement attaqué est insuffisamment motivé au regard des conclusions dont les premiers juges étaient saisis ;

* à titre principal, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la lésion du nerf phrénique était fautive ;

* à titre subsidiaire, les premiers juges ont procédé à une évaluation excessive des préjudices ;

* ils ne pouvaient pas indemniser Mme C...au titre de l'incidence professionnelle tout en remboursant à la caisse la pension d'invalidité versée à la victime sans procéder à l'imputation des créances de la caisse sur celles de la victime ;

* en l'absence de pertes de revenus de la victime, l'assiette de la rente invalidité devait se limiter à la seule incidence professionnelle ;

Vu, enregistré le 26 août 2013, le mémoire ampliatif présenté pour l'APHM, représentée par son directeur en exercice, par Me Le Prado, qui persiste dans ses précédentes écritures et soutient en outre que :

* à titre principal, les premiers juges ont estimé à tort que la lésion du nerf phrénique était due à une mauvaise maîtrise du geste chirurgical ;

* l'expert affirme qu'il est incapable d'identifier ce geste chirurgical à l'origine de la lésion ;

* il explique que l'équipe chirurgicale a choisi la bonne voie pour accéder à la côte cervicale dans de bonnes conditions ;

* le risque des paralysies phréniques consécutives à une intervention pour syndrome du défilé thoraco-brachial est estimé à environ 10 % dans la littérature médicale ;

* quelque soit l'habileté du chirurgien, l'intervention qui rend nécessaire l'écartement puis l'élongation du nerf ne peut être à coup sûr exempte de toute complication séquellaire ;

* Mme C...a été victime d'un alea thérapeutique inhérent à l'intervention qui ne peut engager la responsabilité du centre hospitalier ;

* à titre subsidiaire, le tribunal a méconnu les règles d'imputation des créances des organismes sociaux et l'assiette du recours de la caisse ;

* le préjudice professionnel imputable est inférieur à 50 %, dès lors que la mise en invalidité de la victime ne peut être attribuée, même pour moitié, à la complication litigieuse et qu'il n'est pas établi qu'elle est inapte à exercer un autre emploi ;

Vu, enregistré le 25 octobre 2013, le mémoire présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Alpes, agissant pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse, par MeB..., qui conclut à la réformation du jugement et à ce que la somme que l'APHM a été condamnée à lui verser au titre de ses débours soit portée à 64 590,44 euros portant intérêts et qu'elle soit portée à la somme de 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

La caisse soutient que :

* elle a versé la somme totale de 64 590,44 euros au titre des préjudices patrimoniaux temporaires et permanents à Mme C...;

Vu la lettre du 4 juin 2014 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour est susceptible de soulever d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Alpes, qui n'est pas la caisse d'affiliation de MmeC..., à demander pour son compte le remboursement des débours assurés par la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse ;

Vu la réponse enregistrée le 13 juin 2014 de la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Alpes à ce moyen d'ordre public ;

Vu, enregistré le 30 octobre 2014, le mémoire présenté pour Mme C...par la SELARL d'avocats Chiche-Cohen, qui par la voie de l'appel incident, demande que son indemnité soit portée à la somme totale de 361 616,84 euros et à la condamnation de l'APHM à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

* c'est à juste titre que le tribunal a estimé que la responsabilité de l'APHM était engagée ;

* l'expert a mis en évidence une maladresse dans la conduite du geste chirurgical ;

* en outre, l'expert souligne l'absence d'information préalable ;

* en revanche, c'est à tort que les premiers juges ont limité son indemnisation ;

* c'est à bon droit qu'ils lui ont alloué la somme de 1 400 euros au titre de l'assistance à expertise ;

* en revanche, ils ont écarté à tort les frais médicaux, d'un montant de 980 euros, restés à sa charge et établis par un document produit par la caisse ;

* s'agissant de la perte de gains professionnels futurs jusqu'à son départ à la retraite, un capital de 141 185 euros, basé sur le prix de l'euro de rente de 20,594 devra lui être versé à ce titre ;

* elle a perdu la somme de 73 837 euros de retraite sur la base d'un prix de l'euro de rente viagère de 15,386 ;

* l'expert a reconnu l'existence d'une incidence professionnelle de l'atteinte du nerf phrénique, dont la réparation devra être portée de 3 500 euros à 65 000 euros ;

* l'assistance d'une tierce personne sur la base de 4 heures par semaine et de 20 euros de l'heure donnera lieu au versement d'un capital de 85 671,04 euros ;

* le montant des préjudices patrimoniaux, après déduction poste par poste de la créance de la caisse, s'élève ainsi à la somme de 307 556,84 euros ;

* la réparation de son déficit fonctionnel temporaire sur une période de 18 mois sera portée de 1 100 euros à 4 860 euros ;

* son déficit fonctionnel permanent de 18 % sera réparé par une somme portée à 34 200 euros ;

* son préjudice d'agrément donnera lieu à une indemnité de 15 000 euros ;

* ses préjudices personnels s'élèvent ainsi à la somme de 54 060 euros ;

* après déduction de la créance de la caisse, elle a ainsi droit à la somme de 361 616,84 euros ;

Vu, enregistré le 30 décembre 2014, le mémoire présenté pour l'APHM par Me Le Prado, qui persiste dans ses précédentes écritures ;

Vu les pièces du dossier desquelles il résulte que la requête a été transmise à la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse qui n'a pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 juin 2015 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- et les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

1. Considérant que MmeC..., alors âgée de 43 ans, qui souffrait d'un syndrome du défilé thoraco-brachial gauche avec compression artérielle, a été opérée le 28 octobre 2002 à l'hôpital de la Timone dépendant de l'assistance publique-hôpitaux de Marseille, pour ablation de la côte surnuméraire cervicale gauche ; qu'à la suite de cette opération, elle reste atteinte d'une paralysie du nerf phrénique gauche responsable d'une diminution de sa capacité pulmonaire totale et d'une atteinte neurologique des racines C7 et C8 correspondant notamment à une diminution de la force de la pince pouce-index de la main gauche ; qu'estimant que la responsabilité du centre hospitalier était engagée, elle a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille la désignation d'un expert qui a rendu son rapport le 28 octobre 2010 ; que MmeC..., sur le fondement de ce rapport, a demandé au tribunal administratif de Marseille la condamnation de l'APHM à lui verser la somme totale de 361 616,84 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices ; que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont estimé que la responsabilité de l'APHM était engagée et l'ont condamnée à verser à Mme C... la somme de 19 000 euros en réparation de ses préjudices et la somme de 30 258,10 euros à la caisse primaire d'assurance maladie du Vaucluse au titre de ses débours et celle de 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; que l'APHM interjette appel du jugement qui a reconnu sa responsabilité ; que MmeC..., par la voie de l'appel incident, demande que l'indemnité qui lui a été allouée soit portée à 361 616,84 euros ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Alpes, agissant selon ses dires pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse, demande que la somme que l'APHM a été condamnée à lui verser soit portée à 64 590,44 euros portant intérêts ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'en se bornant à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé, l'APHM n'apporte aucune précision à l'appui de ce moyen de nature à permettre au juge d'en apprécier le bien-fondé ;

Sur la responsabilité :

3. Considérant que, pour retenir la responsabilité du centre hospitalier, les premiers juges ont estimé que l'atteinte du nerf phrénique constatée à la suite de l'intervention chirurgicale subie le 28 octobre 2002 par Mme C...était le résultat d'une mauvaise maîtrise du geste chirurgical, à l'origine de la baisse consécutive de 30 % des capacités pulmonaires de Mme C..., de nature à ouvrir droit à réparation ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, (...) tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...). " ;

5. Considérant qu'il résulte du rapport de l'expert que dans le cas de MmeC..., l'existence d'une côte surnuméraire entraînant une lésion vasculaire justifiait la chirurgie d'ablation de cette côte et que la technique opératoire de la voie d'abord sus claviculaire permettant de mieux visualiser les éléments vasculo-nerveux de la région de la clavicule était justifiée, même si elle "ne met pas à l'abri de complications nerveuses en raison de la nécessité de disséquer les racines nerveuses cervicales" ; que l'homme de l'art explique que, quelque soit la technique opératoire retenue, les complications neurologiques après ce type d'intervention sont de l'ordre de 10 % selon la littérature médicale, que l'incidence des paralysies phréniques est estimée entre 0,5 % et 6 % des interventions pour syndrome du défilé thoraco-brachial et qu'elles surviennent préférentiellement lors de l'utilisation de la voie axillaire ; que, toutefois, l'expert ajoute que les paralysies phréniques, qui sont la conséquence du nécessaire écartement pour atteindre le site opératoire du nerf phrénique qui subit ainsi une élongation, sont habituellement transitoires, sur une période d'environ 18 mois, et régressives ; que, dans le cas de Mme C..., l'immédiateté de la lésion nerveuse constatée en post opératoire ainsi que l'absence de récupération à la fin de cette période de 18 mois démontrent clairement une atteinte définitive du nerf, trop étiré ou carrément sectionné pendant l'intervention ; que l'expert conclut nettement à une maladresse dans la conduite du geste chirurgical ; que, par suite, l'APHM n'est pas fondée à soutenir que l'incidence élevée de ce type de complication démontrerait que Mme C... a été victime d'un alea thérapeutique inhérent à ce type d'intervention et que sa responsabilité ne pourrait pas dès lors être engagée ; que, par ailleurs, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté l'imputabilité au geste opératoire du chirurgien de la survenance de la lésion neurologique des racines nerveuses C7 et C8, dès lors que, selon l'expert, cette lésion peut tout aussi bien être la résultante d'une fibrose post-opératoire, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par Mme C...;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen nouveau en appel de Mme C...tiré de l'absence d'information préalable sur les risques neurologiques inhérents à l'intervention qu'elle a subie, qui serait de nature à obtenir en tout état de cause une indemnisation moindre fondée sur le terrain de la perte de chance, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé, dès lors que la faute dans l'accomplissement du geste maladroit est à l'origine directe de l'entier préjudice, que la pleine responsabilité de l'APHM est engagée s'agissant des seuls dommages de la victime résultant de l'atteinte du nerf phrénique du fait de cette faute ;

Sur le préjudice :

7. Considérant que l'APHM conteste le montant et les modalités de calcul de l'indemnisation de la victime et que Mme C...et la caisse demandent une majoration de l'assiette et du quantum de cette indemnisation ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du III de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 applicable aux évènements ayant occasionné des dommages survenus antérieurement à son entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée : " Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après. / Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel. / Conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée. / Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice " ;

9. Considérant qu'en application de ces dispositions le juge, saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et d'un recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste de préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime ; que le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale ;

10. Considérant qu'en l'absence de dispositions réglementaires définissant les postes de préjudice, il y a lieu, pour mettre en oeuvre la méthode sus décrite, de distinguer, parmi les préjudices de nature patrimoniale, les dépenses de santé, les frais liés au handicap, les pertes de revenus, l'incidence professionnelle et scolaire et les autres dépenses liées à ce dommage ; que parmi les préjudices personnels sur lesquels l'organisme de sécurité sociale ne peut exercer son recours que s'il établit avoir effectivement et préalablement versé à la victime une prestation réparant de manière incontestable un tel préjudice, il y a lieu de distinguer, pour la victime directe, les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique et les troubles dans les conditions d'existence, envisagés indépendamment de leurs conséquences pécuniaires ;

11. Considérant qu'en l'espèce, seuls sont indemnisables les préjudices résultant de l'aggravation de l'état de santé de Mme C...en lien avec la faute commise par le geste chirurgical maladroit des médecins du centre hospitalier et non ceux résultant de l'opération de l'ablation de la côte surnuméraire cervicale gauche ;

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

S'agissant des dépenses de santé :

12. Considérant que les premiers juges ont rejeté la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse, caisse d'affiliation de la victime, présentée au titre des frais médicaux et pharmaceutiques au motif que ni le décompte de ces frais ni l'attestation d'imputabilité de son médecin conseil ne permettaient de faire la distinction entre les frais consécutifs aux soins liés aux dommages sur le nerf phrénique de ceux liés à la pathologie initiale de la patiente et de l'atteinte neurologique des racines C7 et C8 ; que ni la notification des débours produite par la caisse de Vaucluse en première instance, qui ne détaille aucunement la nature et la date de chacun de ces frais dont le remboursement est demandé globalement pour la période du 16 novembre 2004 au 12 décembre 2006 et des examens paracliniques pour la période du 15 novembre 2002 au 6 juillet 2009, ni l'attestation d'imputabilité du 22 août 2012 de son médecin conseil qui détaille ces frais et les date sans mettre en correspondance leur montant et qui semble demander une prise en charge exhaustive des débours exposés, ne permettent de vérifier que ces frais médicaux et examens paracliniques présentent un lien de causalité direct et certain avec la seule atteinte fautive au nerf phrénique de la victime ; qu'il ne résulte pas non plus de l'instruction que les 15 séances de kinésithérapie pour la période du 4 mars 2010 au 14 mai 2010 présentent un tel lien de causalité alors au demeurant que le jour de l'expertise le 15 septembre 2010 Mme C...alléguait à l'expert quelques séances épisodiques de kinésithérapie sans fournir d'ordonnance en ce sens ; qu'en l'absence de tout élément permettant de chiffrer le surcoût lié au traitement de l'atteinte au nerf phrénique, c'est à bon droit et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions d'appel de la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Alpes agissant pour le compte de la caisse de Vaucluse, que les premiers juges ont rejeté la demande de la caisse de Vaucluse au titre de ces frais ;

13. Considérant que si Mme C...soutient que des frais médicaux sont restés à sa charge pour un montant de 980 euros, il résulte de l'instruction et notamment de la fiche "recouvrement de l'indemnité forfaitaire au profit de la CNAMTS" produite par la caisse que ce montant correspond à la demande de la caisse de Vaucluse au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé, pour les rejeter, que la victime ne justifiait pas avoir engagé de tels frais ;

S'agissant des frais d'assistance à expertise :

14. Considérant que les premiers juges ont alloué à Mme C...la somme de 900 euros pour " la part utile de la dépense effectuée " sans s'en expliquer alors que Mme C... produit une note de frais d'un montant de 1 400 euros ; qu'il y a lieu de porter à 1 400 euros la somme allouée au titre des frais d'assistance à expertise ;

S'agissant des frais de tierce personne :

15. Considérant qu'il résulte du rapport de l'expert, qui ne retient pas la nécessité pour Mme C... de bénéficier de l'assistance d'une tierce personne, que la victime se lave, s'habille, se nourrit et va aux toilettes seule et qu'elle sort seule et conduit sur de petites distances ; que le taux de déficit fonctionnel permanent de 10 % fixé pour la seule atteinte au nerf phrénique ne permet pas, par lui-même, d'établir que la victime manquerait d'autonomie dans l'accomplissement des gestes quotidiens ; que la circonstance que son fils et sa fille l'aident à faire les courses et le ménage n'établit pas non plus la nécessité de la présence d'une tierce personne à ses côtés ; que ce chef de préjudice doit ainsi être rejeté ;

S'agissant de la perte de revenus :

16. Considérant que le principe de la réparation intégrale du préjudice doit conduire le juge à déterminer, au vu des éléments de justification soumis à son appréciation, le montant de la perte de revenus dont la victime a été effectivement privée du fait du dommage qu'elle a subi ; qu'il résulte du rapport de l'expert que Mme C...était employée comme femme de ménage à une date indéterminée et qu'elle a été admise à faire valoir ses droits pour invalidité à compter du 1er octobre 2004 avec attribution d'une pension d'invalidité ; qu'elle ne produit aucun élément, tels des bulletins de salaire, de nature à établir son revenu annuel net avant l'intervention litigieuse et donc la réalité de la perte de revenus jusqu'à sa mise à la retraite qu'elle invoque ; que la caisse n'a pas exposé d'indemnités journalières pour cette période ; que si Mme C... demande aussi une indemnisation au titre des pertes de revenus au-delà de sa mise à la retraite, il ne résulte d'aucune des pièces du dossier que l'invalidité en cause soit consécutive à la prise en charge qui a été dispensée par le centre hospitalier de la Timone ; qu'en outre, elle ne produit aucune pièce faisant apparaitre une perte de revenus depuis sa mise à la retraite ; que ce chef de préjudice a été ainsi écarté à bon droit par les premiers juges ;

S'agissant de l'incidence professionnelle ;

17. Considérant que les premiers juges ont estimé que l'invalidité de Mme C...est partiellement imputable à 50 % à l'atteinte du nerf phrénique et ses conséquences respiratoires ; qu'ils ont alloué la somme de 3 500 euros à Mme C...au titre de l'incidence professionnelle et la moitié des prétentions de la caisse au titre de la pension d'invalidité (arrérages échus et capital représentatif des arrérages à échoir au 1er mai 2011) soit la somme de 30 258,10 euros ;

18. Considérant que l'expert admet une incidence de la paralysie du nerf phrénique dans le port de charge et de tous les travaux physiques nécessitant un effort important eu égard à la diminution de la capacité respiratoire de la victime de nature à confirmer l'imputabilité partielle de l'invalidité à l'atteinte du nerf phrénique et de ses conséquences respiratoires à hauteur de 50 % retenue par les premiers juges ;

19. Considérant que l'APHM soutient que les premiers juges ne pouvaient pas indemniser Mme C...au titre de l'incidence professionnelle tout en remboursant à la caisse la pension d'invalidité versée à la victime, sans procéder à l'imputation des créances de la caisse sur celles de la victime ;

20. Considérant qu'aux termes de l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale : " L'assuré a droit à une pension d'invalidité lorsqu'il présente une invalidité réduisant dans des proportions déterminées, sa capacité de travail ou de gain, c'est-à-dire le mettant hors d'état de se procurer, dans une profession quelconque, un salaire supérieur à une fraction de la rémunération normale perçue dans la même région par des travailleurs de la même catégorie, dans la profession qu'il exerçait avant la date de l'interruption de travail suivie d'invalidité ou la date de la constatation médicale de l'invalidité si celle-ci résulte de l'usure prématurée de l'organisme " ; qu'eu égard à la finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail qui lui est assignée par ces dispositions législatives et à son mode de calcul, en fonction du salaire, fixé par l'article R. 341-4 du code de la sécurité sociale, la pension d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de revenus professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité ; que le recours exercé par une caisse de sécurité sociale au titre d'une pension d'invalidité ne saurait s'exercer que sur ces deux postes de préjudice ;

21. Considérant, d'une part, qu'il résulte de la notification des débours produite par la caisse de Vaucluse en première instance que Mme C...a perçu une pension d'invalidité de 2ème catégorie pour la période du 2 novembre 2004 au 1er mai 2011 pour un montant de 37 206,96 euros ; qu'eu égard à la finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail qui lui est assignée par l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale et à son mode de calcul, en fonction du salaire, fixé par l'article R. 341-4 du même code, une telle pension d'invalidité a pour objet de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de revenus professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité ; que Mme C...ne démontre pas que l'incidence professionnelle du dommage corporel dont elle a été victime n'aurait pas été suffisamment réparée par le versement de la pension d'invalidité prévue par le code de la sécurité sociale ; que dès lors, l'APHM est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges l'ont condamnée à verser la somme de 3 500 euros à Mme C...au titre de l'incidence professionnelle ;

22. Considérant d'autre part, que l'APHM ne conteste pas l'assiette et le montant alloué à la caisse par le tribunal au titre de cette pension d'invalidité ; qu'invitée à verser aux débats un relevé actualisé depuis le 1er mai 2011 de la pension d'invalidité versée à Mme C... à la date du présent arrêt, la caisse n'a pas répondu à cette invitation ; que, dans ces conditions, il n'y a pas lieu de revenir sur la somme de 30 258,10 euros allouée à la caisse par les premiers juges ;

En ce qui concerne les préjudices personnels :

23. Considérant que la date de consolidation doit être fixée, en l'absence de mention par l'expert, au jour de l'expertise le 28 octobre 2010 dès lors que l'état de Mme C...n'est plus susceptible d'évolution depuis cette date ;

24. Considérant qu'il résulte du rapport de l'expert que Mme C...souffre d'un déficit fonctionnel permanent de 10 % lié à ses difficultés respiratoires ; que son déficit fonctionnel temporaire a été fixé à 10 % pendant les 18 mois qui ont été nécessaires pour traiter les conséquences de l'atteinte du nerf phrénique ; que Mme C...n'établit pas avoir subi un préjudice d'agrément qui n'a pas été retenu par l'expert au motif qu'elle ne pratiquait pas de loisir particulier avant l'intervention ; qu'il sera fait une juste appréciation de ses troubles dans les conditions d'existence en mettant à la charge de l'APHM la somme globale de 14 220 euros au titre de la réparation de l'ensemble de ses préjudices personnels ;

25. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme de 19 000 euros que l'APHM a été condamnée à verser à Mme C...doit être ramenée à la somme de 12 120 euros ; que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions de la caisse des Hautes-Alpes agissant pour le compte de la caisse de Vaucluse, il y a lieu de confirmer la condamnation de l'assistance publique- hôpitaux de Marseille à verser la somme de 30 258,10 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse ;

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :

26. Considérant que dès lors que la caisse n'a pas obtenu une meilleure indemnisation de ses débours en appel, ses conclusions aux fins de majoration de l'indemnité forfaitaire de gestion doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

27. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que l'APHM, qui n'est pas la partie perdante à l'instance soit condamnée à verser quelque somme que ce soit à Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La somme de 19 000 euros que l'APHM a été condamnée à verser à Mme C...par l'article 1er du jugement est ramenée à 12 120 euros.

Article 2 : Le jugement est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'APHM, à Mme A...C...et aux caisses primaires d'assurance maladie de Vaucluse et des Hautes-Alpes.

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N° 13MA02888 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA02888
Date de la décision : 02/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-04-02 Procédure. Instruction. Moyens d'investigation.


Composition du Tribunal
Président : M. FIRMIN
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-07-02;13ma02888 ?
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