Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 à 2007.
Par un jugement n° 1101266 du 17 mai 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande de décharge.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 17 juillet 2013, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ledit jugement du 17 mai 2013 du tribunal administratif de Nice ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- ses interventions en France se résumaient pour le compte de la société Azur Villa Limited, société ayant son siège en Angleterre, au fonctionnement d'un bureau de liaison et non d'un établissement stable de la société comme l'a retenu l'administration ; ses domiciles successifs en France ne peuvent être regardés comme étant le siège de la société Azur Villa Limited ;
- l'administration n'a pas mis en oeuvre la procédure prévue par l'article 117 du code général des impôts ;
- la preuve de l'appréhension des sommes réintégrées par le service dans ses revenus imposables n'est pas rapportée.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 janvier 2014, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention signée entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord du 22 mai 1968 tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur les revenus ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martin, rapporteur,
- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.
1. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité à laquelle a été soumise la société Azur Villas Limited, société de droit britannique exerçant une activité d'intermédiaire pour la location saisonnière de villas et d'appartements situés sur la Côte d'Azur et dont Mme A... est associée, cette dernière a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle relative à la période couvrant les années 2005 à 2007 selon la procédure de rectification contradictoire de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales ; que par une proposition de rectification en date du 16 décembre 2008, l'administration a, en particulier, notifié à l'intéressée des rehaussements tirés de revenus de capitaux mobiliers au titre de revenus distribués s'élevant à 72 814 euros pour l'année 2005, 778 226 euros pour l'année 2006 et 113 283 euros pour l'année 2007 ; que Mme A...ayant présenté des observations relatives à cette proposition de rectification, l'administration a maintenu l'intégralité des rehaussements en cause par réponse en date du 11 juin 2009 ; que la réclamation préalable du 27 septembre 2010 a fait l'objet d'une décision de rejet en date du 7 février 2011 ; que Mme A...relève appel du jugement en date du 17 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales pour les années 2005 à 2007 ;
2. Considérant que l'administration a estimé que la société Azur Villas Limited disposait d'un établissement stable en France la rendant passible de l'impôt sur les sociétés et a imposé entre les mains de MmeA..., considérée comme maître de l'affaire, les revenus réputés distribués par cette société en 2005, 2006 et 2007 et procédant de la reconstitution par l'administration de ses bénéfices ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 117 du code général des impôts que, si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir cette personne morale à l'impôt sur le revenu à raison des sommes correspondantes, mais est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques qui ont bénéficié de la distribution et que l'administration, compte tenu des renseignements dont elle dispose, est en mesure d'identifier ; que Mme A...n'a donc pas été imposée selon une procédure irrégulière au regard des dispositions de l'article 117 du code général des impôts ;
Sur le bien-fondé des impositions contestées :
En ce qui concerne l'existence d'un établissement stable :
4. Considérant que Mme A...fait valoir que la société Azur Villas Limited a son siège en Angleterre et conteste que cette société ait disposé à ses domiciles successifs d'Antibes et de Théoule-sur-Mer d'un établissement stable en France ayant permis à ladite société d'y exercer une activité lucrative génératrice de revenus imposables ;
5. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45, 53 A à 57, 237 ter A et 302 septies A bis et en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions (...) " ; que, d'autre part, aux termes de l'article 6 de la convention franco-britannique du 22 mai 1968 susvisée : " 1. Les bénéfices industriels et commerciaux d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices industriels et commerciaux de l'entreprise sont imposables dans l'autre Etat mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de la même convention : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression " établissement stable " désigne une installation fixe d'affaires où l'entreprise exerce tout ou partie de son activité. / 2. L'expression " établissement stable " comprend notamment : a) un siège de direction ; b) une succursale ; c) un bureau (...) 4. Une personne agissant dans un Etat contractant pour le compte d'une entreprise de l'autre Etat contractant, autre qu'un agent jouissant d'un statut indépendant, visé au paragraphe 5, est considérée comme établissement stable dans le premier Etat si elle dispose dans cet Etat de pouvoirs qu'elle y exerce habituellement lui permettant de conclure des contrats au nom de l'entreprise, à moins que l'activité de cette personne soit limitée à l'achat de marchandises pour l'entreprise. 5. On ne considère pas qu'une entreprise d'un Etat contractant a un établissement stable dans l'autre Etat contractant du seul fait qu'elle y exerce son activité par l'entremise d'un courtier, d'un commissionnaire général ou de tout autre intermédiaire jouissant d'un statut indépendant, à condition que ces personnes agissent dans le cadre ordinaire de leur activité. " ; qu'il résulte de ces stipulations que, pour avoir un établissement stable en France, une société résidente du Royaume-Uni doit soit disposer d'une installation fixe d'affaires par laquelle elle exerce tout ou partie de son activité, soit avoir recours à une personne non indépendante exerçant habituellement en France des pouvoirs lui permettant de l'engager dans une relation commerciale ayant trait aux opérations constituant ses activités propres ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'une perquisition autorisée par le juge judiciaire a été effectuée le 13 décembre 2007 au domicile de la requérante en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; qu'il ressort des éléments non contestés par Mme A...tirés de ces perquisitions et relevés par le vérificateur dans la proposition de rectification visant la société Azur Villas Limited, produite par la requérante en première instance, que cette société, durant la période courant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2007, a disposé de locaux permanents situés aux domiciles successifs de la requérante situés d'abord 20, avenue Fragonard, à Théoule-sur-Mer puis, à compter de 2007, 444, chemin de Vallauris, à Antibes Juan-les-Pins ; que dans ces deux locaux, la société a déployé le matériel informatique nécessaire à cette activité et a bénéficié des moyens de communication utiles ; que, par ailleurs, la société Azur Villas Limited bénéficiait en France pour l'exploitation de cette activité de la présence continue de sa dirigeante, MmeA..., laquelle, disposant des compétences pour négocier avec les propriétaires des biens, les clients et divers partenaires commerciaux et possédant des procurations sur les comptes bancaires de la société, assurait ainsi la gestion administrative, commerciale et financière pleine et entière de cette dernière ; que si la requérante soutient que ses interventions se limitaient au fonctionnement d'un bureau de liaison et à une activité d'intermédiation ayant pour contrepartie le versement d'une commission, l'exactitude de cette assertion ne ressort pas de l'instruction ; que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la société Azur Villas Limited doit être regardée comme ayant été au cours des trois exercices en cause une entreprise exploitée en France, au sens et pour l'application des dispositions précitées du I de l'article 209 précité du code général des impôts, ainsi qu'une installation fixe d'affaires caractérisant un établissement stable au sens et pour l'application des stipulations du 1 de l'article 4 précité de la convention fiscale franco-britannique ; que, par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la société Azur Villas Limited n'aurait pas disposé en France d'un établissement stable au sens du même article 4 de ladite convention, ayant permis à cette société de mener une activité lucrative génératrice de revenus imposables ;
En ce qui concerne l'appréhension des revenus distribués par MmeA... :
7. Considérant qu'en cas de refus des redressements par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé ; que, toutefois, le contribuable maître d'une affaire est réputé avoir appréhendé les distributions réalisées par la société qu'il contrôle ;
8. Considérant que l'administration a identifié Mme A...comme bénéficiaire de revenus distribués au sens de l'article 109 du code général des impôts, selon lequel " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ;... " ;
9. Considérant qu'il est admis par la requérante qu'elle avait la qualité de directrice de la société Azur Villas Limited ; que si Mme A...fait valoir qu'à la date du 30 avril 2008, elle ne détenait que 48 % des parts de la société et non 67 % comme l'avait relevé le vérificateur, cette critique est à elle seule sans portée dès lors qu'elle est relative à une situation postérieure à la période vérifiée ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 6 et n'est pas contesté par MmeA..., celle-ci disposait des procurations sur les comptes bancaires de la société Azur Villas Limited ; qu'en outre, durant la période litigieuse, la requérante a approuvé les rapports des comptes de la société en cause établis par le cabinet d'expertise comptable anglais Born et Co ; qu'ainsi qu'il a déjà été rapporté au point 6 et n'est pas davantage contesté, la contribuable assurait le suivi entier des relations commerciales avec les propriétaires des biens immobiliers proposés à la location et avec les clients locataires de ces biens, ainsi qu'avec les partenaires commerciaux de la société susnommée ; que dans ces conditions, l'administration a pu, à juste titre, en déduire que l'intéressée était le seul maître de l'affaire, au sein de laquelle elle disposait du pouvoir de décision, et devait, par suite, être regardée comme ayant appréhendé les sommes réputées distribuées par la société Azur Villas Limited ; qu'ainsi, c'est par une exacte application des dispositions du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts que l'administration a imposé entre les mains de Mme A...dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers les bénéfices reconstitués par elle, générés par l'établissement stable en France de la société Azur Villas Limited ;
10. Considérant qu'il résulte de ce tout qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales pour les années 2005 à 2007 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud est.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2015, où siégeaient :
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N° 13MA02876 2
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