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03/04/2015 | FRANCE | N°13MA02539

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 03 avril 2015, 13MA02539


Vu la requête, enregistrée le 26 juin 2013, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) Art Solar, dont le siège se trouve 23 rue Ernest Michel à Montpellier (34000), représentée par son gérant en exercice, par la SCP d'avocats Scheuer, Vernhet et Associés ;

La SARL Art Solar demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101948 rendu le 26 avril 2013 par le tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2011 par lequel le maire de Bellegarde lui a refusé la délivrance d'un permis de construi

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Vu la requête, enregistrée le 26 juin 2013, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) Art Solar, dont le siège se trouve 23 rue Ernest Michel à Montpellier (34000), représentée par son gérant en exercice, par la SCP d'avocats Scheuer, Vernhet et Associés ;

La SARL Art Solar demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101948 rendu le 26 avril 2013 par le tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2011 par lequel le maire de Bellegarde lui a refusé la délivrance d'un permis de construire pour l'implantation de serres agricoles intégrant une unité de production photovoltaïque au sein d'un projet de Land Art ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bellegarde la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2015 :

- le rapport de Mme Busidan, premier conseiller,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la SARL Art Solar, et celles de MeC..., pour la commune de Bellegarde ;

1. Considérant que la SARL Art Solar relève appel du jugement rendu le 26 avril 2013 par le tribunal administratif de Nîmes, qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2011, par lequel le maire de Bellegarde lui a refusé la délivrance d'un permis de construire portant sur des serres agricoles intégrant une unité de production photovoltaïque ;

Sur la recevabilité de la requête :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le jugement attaqué a été notifié le 2 mai 2013 à l'appelante; que, par suite la requête de cette dernière, enregistrée au greffe de la Cour le 26 juin 2013 sur télécopie confirmée le 3 juillet suivant, a été enregistrée dans le délai d'appel, fixé à deux mois par l'article R. 811-2 du code de justice administrative ; que la fin de non-recevoir opposée par la commune de Bellegarde et tirée de la tardiveté de la requête doit être écartée ;

Sur les conclusions en annulation :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par courrier daté du 23 mars 2011, télécopié le même jour aux services préfectoraux, la requérante a demandé au préfet du Gard de bien vouloir mettre en oeuvre à l'encontre de l'arrêté en litige la procédure de déféré préfectoral définie par l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, ayant été formée dans le délai de recours contentieux de deux mois contre le refus en litige, cette demande a légalement prorogé ledit délai, qui, en l'absence de décision expresse du préfet, n'était pas expiré le 14 juin 2011, date de l'enregistrement de la demande devant le tribunal administratif de Nîmes ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si le projet ayant fait l'objet du refus en litige est le même que le projet ayant fait l'objet d'un précédent refus, daté du 12 juillet 2010, ce premier refus, qui faisait l'objet d'un recours en excès de pouvoir pendant à la date d'introduction de la demande contre le refus en litige, n'était pas définitif ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la demande présentée devant les premiers juges aurait été irrecevable en raison du caractère purement confirmatif du refus attaqué doit être rejeté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que le paragraphe liminaire consacré au caractère de la zone NC, qui éclaire les dispositions réglementaires du plan d'occupation des sols communal, la définit comme englobant " des espaces naturels à protéger en raison de la valeur économique des sols et du sous-sol. Elle est réservée au maintien et au développement d'activités agricoles ainsi qu'à l'exploitation de carrières et doit à ce titre être protégée de toute occupation et utilisation des sols non liées directement à ce type d'activité " ; qu'aux termes de l'article NC 1 de ce règlement, relatif aux occupations et utilisations du sols admises : " Sont admis(...) : (...) 3) les serres de production ; (...)" ; qu'aux termes de l'article NC 2 du même règlement : " Sont interdites toutes les formes d'utilisation et d'occupation des sols non mentionnées à l'article NC 1 ci-dessus. " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est composé de parcelles, d'une superficie totale de quelques 22 hectares, qui sont la propriété d'une structure dont l'un des associés, M.B..., exploite le domaine viticole des Aveylans, classé en appellation d'origine contrôlée " Costières de Nîmes " ; que le projet consiste à installer sur ce terrain, que la pétitionnaire SARL Art Solar se propose d'acquérir, 90 948 m² de serres qui seront ensuite données à bail à trois exploitants agricoles ; qu'ainsi, la SCEA " Château des Aveylans " prévoit d'en exploiter 4 hectares en vue d'y développer, en agriculture biologique, des cultures de fruits et légumes, lesquelles permettraient à la SCEA, en se diversifiant tout en poursuivant une exploitation du domaine viticole sur 10 hectares, de se procurer, selon le compte prévisionnel d'exploitation versé au dossier, un résultat net annuel de l'ordre de 108 000 euros sur les quatre premières années en employant huit à dix personnes ou équivalents temps plein ; que l'EARL " Terres Longues ", prévoit d'exploiter également quatre autres hectares de serres pour y produire principalement, en primeur, 200 tonnes de melon supplémentaires par rapport à sa production actuelle, que le gérant de l'EARL écoule sans difficulté ; que, d'après le compte prévisionnel versé au dossier, cette production supplémentaire générerait un résultat net annuel de l'ordre de 120 000 euros sur les quatre premières années ; qu'enfin, la SARL Equateur, gérée par le même ingénieur agronome exploitant la SCEA " Château des Aveylans ", se propose d'utiliser l'hectare de serres restant en recherche et développement dans l'agriculture biologique ;

7. Considérant que la commune ne conteste pas utilement l'ensemble de ces éléments en se bornant à produire un avis de la chambre d'agriculture du Gard daté du 3 janvier 2011 selon lequel " un retour d'expériences suivies par l'INRA de Sophia Antipolis montrerait les limites à l'exploitation de serres photovoltaïques pour la production agricole " ; que, par suite, la destination agricole de ces serres ne peut être regardée comme dénaturée par l'installation des panneaux photovoltaïques qui en constituent la couverture ; que la circonstance que l'électricité produite par les serres ne servira pas seulement à leur fonctionnement, mais également à alimenter le réseau de distribution publique n'enlève rien au fait que ces serres participeront, conformément à la vocation de la NC sus-rappelée, au maintien d'une activité agricole sur le terrain d'assiette du projet, alors qu'en raison des difficultés de la filière viticole, la SCEA " Château des Aveylans " a arraché 20 hectares de vignoble sur les 30 existants en 2003 ;

8. Considérant que la destination agricole du projet ne peut pas non plus être mise en doute par le fait que le projet comporte également la création, d'une part de 600 m² de locaux comprenant sanitaires, vestiaires et téléphones/fax, d'autre part de places de stationnement qui couvrent une superficie totale de 3530 m², soit moins de 4% de la superficie couverte par les serres, et qui sont présentés comme nécessaires notamment aux véhicules de transport des marchandises pour le chargement et déchargement des cultures ; que si le projet prévoit par ailleurs 9 hectares de surfaces plantées avec différentes essences de plantes et fleurs mellifères, ces espaces plantés ne peuvent pas être regardés comme une utilisation des sols non liée directement à l'activité agricole, quand bien même les graminées, romarins et lavandes, qui les composeront en partie, seront plantés sous forme de végétation structurée inscrivant le site des serres photovoltaïques dans une démarche qui se veut également artistique, relevant du Land Art ;

9. Considérant ainsi que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, et dès lors que les dispositions précitées du règlement du plan d'occupation des sols admettent les " serres de production ", la commune ne pouvait légalement refuser le projet au motif qu'il méconnaîtrait l'article NC-1 précité ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que le refus en litige est également motivé par la contrariété du projet avec l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme qui dispose : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. " ;

11. Considérant que si ce motif de refus s'appuie sur le fait que le terrain d'assiette est proche de zones naturelles d'intérêt écologique et floristique ( ZNIEFF), à quelques centaines de mètres du mas de Broussan et du Bois des Sources et à 4 km de la zone de protection spéciale (ZPS) site Natura 2000 " Costières de Nîmes ", la commune n'établit pas, ni même n'allègue, que cette proximité nuirait à la protection de ces sites ; que, par ailleurs, la commune ne justifie pas que toute forme d'artificialisation des espaces agricoles devrait être évitée dans cette zone, alors que, comme l'arrêté lui-même le relève, le secteur d'emprise a été identifié dans la charte paysagère et environnementale de l'appellation d'origine contrôlée des costières de Nîmes comme un terroir sous influence urbaine et une zone à potentiel paysager et environnemental en mutation ; qu'ainsi, et alors que le projet s'inscrit, comme il a été dit plus haut, dans une démarche artistique que la commune ne conteste pas, le motif tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut pas légalement justifier la décision en litige ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement, que la SARL Art Solar est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2011 par lequel le maire de Bellegarde a refusé de lui délivrer le permis de construire qu'elle sollicitait ; qu'il y a lieu par suite, d'annuler ce jugement et l'arrêté du 24 janvier 2011, contre lequel, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, l'appelante ne soulève aucun autre moyen de nature à en entraîner l'annulation ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelante, qui n'est, dans la présente instance, ni partie perdante ni tenue aux dépens, la somme que demande la commune de Bellegarde au titre des frais qu'elle a exposés non compris dans les dépens ; qu'en revanche, sur le fondement des mêmes dispositions et dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'intimée la somme de 1 500 euros que demande la SARL Art Solar au titre de ces mêmes frais ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 26 avril 2013 et l'arrêté du maire de Bellegarde du 24 janvier 2011 portant refus de délivrance à la SARL Art Solar d'un permis de construire sont annulés.

Article 2 : La commune du Bellegarde versera à la SARL Art Solar la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Art Solar et la commune de Bellegarde.

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N° 13MA02539


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA02539
Date de la décision : 03/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Hélène BUSIDAN
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP SCHEUER - VERNHET et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-04-03;13ma02539 ?
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