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19/09/2013 | FRANCE | N°13MA01324

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 19 septembre 2013, 13MA01324


Vu, enregistrée le 29 mars 2013, la requête présentée pour la société anonyme Ruas Michel, représentée par ses représentants légaux en exercice, dont le siège est sis 787 chemin des surveillants, zone artisanale Le Petrole II à Lunel (34400), par la SCP d'avocat de Angelis-Semidei-Vuillquez-Habart Melki-Bardon-De Angelis ; la société demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 de l'ordonnance n° 1204045 du 14 mars 2013 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice l'a condamnée, à la demande de Mme C...et de M.A..., à verser à ces derniers

une somme de 40 000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation d...

Vu, enregistrée le 29 mars 2013, la requête présentée pour la société anonyme Ruas Michel, représentée par ses représentants légaux en exercice, dont le siège est sis 787 chemin des surveillants, zone artisanale Le Petrole II à Lunel (34400), par la SCP d'avocat de Angelis-Semidei-Vuillquez-Habart Melki-Bardon-De Angelis ; la société demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 de l'ordonnance n° 1204045 du 14 mars 2013 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice l'a condamnée, à la demande de Mme C...et de M.A..., à verser à ces derniers une somme de 40 000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice qu'ils ont subi résultant des dommages qui ont affecté leur propriété le 7 février 2009 à la suite d'un éboulement de terrain ;

2°) de rejeter la demande de Mme C...et de M. A...;

3°) de condamner Mme C...et M. A...à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 3 mai 2013, le mémoire présenté pour Mme B...C...et M. D... A..., par la SCP d'avocats Courtignon-Pensa Bezzina- Le Goff, qui concluent au rejet de la requête et à la condamnation de la société Ruas à leur verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

............................

Vu, enregistré le 3 mai 2013, le mémoire présenté pour Mme B...C...et de M. D... A..., par la SCP d'avocats Courtignon-Pensa Bezzina- Le Goff qui persistent dans leurs précédentes écritures et demandent en outre, par la voie de l'appel incident, que le versement de la provision ne soit pas subordonné à la constitution d'une garantie ;

.........................

Vu, enregistré le 4 juin 2013, le mémoire présenté pour la société Ruas Michel, représentée par ses représentants légaux en exercice, par la SCP d'avocat de Angelis-Semidei-Vuillquez-Habart Melki-Bardon-De Angelis, qui persiste dans ses précédentes écritures ;

Vu la lettre du 1er juillet 2013 informant les parties de ce que la Cour est susceptible de soulever d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande en tant qu'elle émane de M. A..., dès lors que les désordres litigieux concernent le terrain dont Mlle C...est seule nue-propriétaire ;

Vu, enregistré le 9 juillet 2013, le mémoire présenté pour Mme B...C...et de M. D... A..., en réponse à ce moyen d'ordre public ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 août 2013 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me E... substituant la SCP De Angelis pour la société Ruas Michel ;

1. Considérant que Mme C...est nue-propriétaire d'un terrain sur lequel elle a fait édifier avec M. A...une villa au 4000 chemin de Las Ayas à Contes ; que leur propriété a été dévastée, le 7 février 2009, par un éboulement de terrain ; qu'estimant que les dommages subis résultaient d'un défaut d'entretien du réseau public d'eau potable, que le syndicat intercommunal à vocation multiple pour l'équipement et l'aménagement du territoire des cantons de Levens, Contes, l'Escarène et Nice (SILCEN) a délégué à la société anonyme Michel Ruas par convention d'affermage le 17 octobre 2000, Mme C...et de M.A..., en leur qualité de tiers par rapport au réseau d'eau public d'eau potable, ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice la condamnation solidaire du SILCEN et de la SA Ruas Michel à leur verser une provision de 46 285,26 euros ; que, par l'ordonnance attaquée n° 1204045 du 14 mars 2013, le juge des référés a mis hors de cause le SILCEN, a condamné la SA Michel Ruas à verser à Mme C...et à M. A...une somme de 40 000 euros à titre de provision, dont le versement a été subordonné à la constitution d'une garantie et a rejeté le surplus des conclusions des demandeurs ; que la société Ruas Michel interjette appel de cette ordonnance en tant que, par l'article 2 de cette ordonnance, le juge des référés l'a condamnée à verser à Mme C...et à M. A... cette provision de 40 000 euros ; que Mme C...et de M. A...concluent au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demandent à ce que le versement de cette provision ne soit pas subordonné à la constitution d'une garantie de leur part ;

Sur la recevabilité de la demande en tant qu'elle émane de M.A... :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme C...et M. A...sont propriétaires en indivision à parts égales de la maison individuelle construite sur le terrain litigieux dont Mme C...est nue-propriétaire ; que, par suite, M. A...a intérêt pour agir dans la présente instance ; que, dès lors, les premiers juges pouvaient être saisis par une demande collective de Mme C...et M.A... ; que, toutefois, chacun des requérants n'est fondé à demander, chacun en ce qui le concerne, que la moitié de la provision allouée par les premiers juges ;

Sur l'appel principal de la société Ruas Michel :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence de demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. " ;

En ce qui concerne le lien de causalité entre le défaut d'entretien de l'ouvrage public et le sinistre :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport du 1er octobre 2012 de l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Nice, qu'une fuite d'eau provenant des canalisations traversant le terrain de Mme C...et de M. A... existait antérieurement au sinistre ; que l'expert indique que, ainsi que le fait valoir la société Ruas, le mouvement des terres constaté à l'origine du sinistre est imputable à trois causes simultanées, à savoir un facteur géologique, la nature du terrain, un facteur météorologique, un épisode pluvieux exceptionnel et un facteur humain, la négligence dans l'exploitation des ouvrages par la société Ruas ; que, toutefois, en s'appuyant sur la circonstance que seules les terres traversées par les canalisations d'eau de la propriété de Mme C...et de M. A...se sont effondrées, les autres restanques du terrain restant visibles, que les autres propriétés voisines ne supportant pas de canalisations n'ont pas été affectées par ce sinistre et en relevant que les prélèvements d'eau effectués sur le lieu du glissement de terrain le 27 février 2009 et analysés par le laboratoire de l'environnement ont démontré que l'écoulement d'eau qui se produisait à partir des terres effondrées était identique aux échantillons prélevés à partir des compteurs d'eau provenant des canalisations dont l'entretien incombait à la société requérante, l'expert précise que le sinistre trouve son origine déterminante dans l'écoulement continu d'une fuite d'eau d'une canalisation du réseau public, constatée sur le terrain avant l'épisode pluvieux qui a duré 3 mois consécutifs, lequel a eu pour conséquence la saturation des terres déjà imbibées et leur glissement sur la propriété de Mme C...et de M.A... ; qu'il ajoute clairement qu'une intervention plus rapide pour réparer la fuite d'eau signalée par M.A..., le 22 février 2008, soit un an avant le sinistre, et qui a donné lieu à une fiche d'intervention le 25 février 2008 de la société Ruas, aurait vraisemblablement empêché le glissement de terrain ; qu'il conclut que le sinistre du 7 février 2009 est imputable pour 60 % au défaut d'entretien d'un réseau enterré dont la vétusté avérée nécessitait une surveillance étroite et 40 % au phénomène météorologique, à savoir une pluviométrie exceptionnelle qui a constitué le facteur déclenchant du sinistre ; qu'ainsi, l'expert a clairement indiqué la cause principale du sinistre et le juge des référés, qui n'a pas retenu, contrairement à ce que soutient la société requérante, que le mauvais entretien des canalisations comme cause du dommage, mais a aussi estimé que la configuration et la nature du terrain étaient une cause secondaire du sinistre, a pu, au vu de ce rapport, estimer que l'obligation de Mme C...et de M. A...n'était pas sérieusement contestable ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'expert, qui n'était pas tenu de prendre en compte le rapport du 14 février 2009 du cabinet spécialiste en géologie, géotechnique, hydrogéologie, mandaté par la commune après l'accident, qui affirme que le sinistre résulterait uniquement des conditions climatiques exceptionnelles, a toutefois précisé que les conclusions de ce rapport privé n'étaient pas fiables, dès lors que, notamment, les investigations menées par ce cabinet pour connaître l'origine de l'éboulement de terrain ne sont pas explicitées clairement ; que la société Ruas a d'ailleurs contesté pendant l'expertise, dans un dire, les critiques de l'expert sur ce point ; que le juge des référés s'est nécessairement interrogé sur le facteur climatique dans la survenance du sinistre, dès lors qu'il a rejeté les pluies comme cause du sinistre en indiquant qu'elles ne présentaient pas le caractère de force majeure de nature à exonérer la responsabilité de la SA Ruas pour défaut d'entretien de l'ouvrage public ; que, par suite, la société Ruas n'est pas fondée à soutenir que le juge n'aurait pas examiné l'ensemble des éléments de fait et de droit qui lui étaient soumis ;

En ce qui concerne le quantum de la provision :

6. Considérant que l'expert a estimé, dans son rapport définitif, eu égard aux factures produites pendant l'expertise, le cout des travaux provisoires de mise en sécurité à la somme de 1 196 euros, en lien direct avec le sinistre, entrepris par Mme C...et de M. A...et a chiffré le cout d'un ouvrage de soutènement avec drainage de la zone sinistrée pour un montant global de 39 689,26 euros et une perte de jouissance de leur villa rendue inhabitable après le sinistre, pendant trois mois, à la somme non contestée de 5 400 euros et a réservé son chiffrage des préjudices liés à la perte de la valeur vénale de la propriété de Mme C...et de M. A...; que ces éléments ont été soumis au contradictoire des parties pendant l'expertise ; que le juge des référés chargé de déterminer le montant de cette provision et qui n'avait pas à renvoyer l'estimation de ce préjudice au juge du fond, n'a pas fait une estimation excessive du quantum de la provision en allouant la somme de 40 000 euros à Mme C...et de M. A...à ce titre ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Ruas n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés l'a condamnée à verser une provision d'un montant de 40 000 euros à Mme C...et de M. A...; que, compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de condamner la société Ruas à verser la somme de 20 000 euros à Mme C...et une autre somme de 20 000 euros à M.A... ;

Sur les conclusions incidentes de Mme C...et de M. A...:

8. Considérant que, si Mme C...et de M. A...soutiennent qu'il n'y a pas lieu à fourniture d'une caution bancaire et que le juge des référés n'a pas justifié le fait de subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie, celui-ci, qui n'était pas tenu de motiver sa décision, a pu, à bon droit, dans les circonstances de l'espèce, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que Mme C...et de M.A..., qui ne sont pas la partie perdante à la présente instance, soient condamnés à verser quelque somme que ce soit à la société requérante au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société Ruas à verser à Mme C... et à M. A...la somme de 1 500 euros qu'ils demandent au titre de leurs frais d'instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : La société Ruas Michel est condamnée à verser la somme de 20 000 (vingt mille) euros à Mme C...et la même somme de 20 000 (vingt mille) euros à M.A....

Article 2 : L'ordonnance du 14 mars 2013 du juge des référés du tribunal administratif de Nice est réformée en ce qu'elle a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La requête de la société Ruas Michel est rejetée.

Article 4 : Les conclusions incidentes de Mme C...et de M. A...sont rejetées.

Article 5 : La société Ruas Michel versera à Mme C...et à M. A...la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ruas Michel, à Mme B...C...et à M. D... A....

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N° 13MA013242

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA01324
Date de la décision : 19/09/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-04-02 Procédure. Instruction. Moyens d'investigation.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : SCP DE ANGELIS -SEMIDEI-VUILLQUEZ - HABART-MELKI - BARDON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-09-19;13ma01324 ?
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