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27/03/2014 | FRANCE | N°12NC01628

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 27 mars 2014, 12NC01628


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 26 septembre 2012, complété par le mémoire enregistré le 1er juillet 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget ;

Le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901741 en date du 26 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a accordé à la société Arcelor Atlantique et Lorraine la réduction des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle au titre de l'année 2006 pour un montant de 187 859 euros pour son établissement situé à Rombas ;

2°) de

remettre intégralement la somme dégrevée à la charge de la SAS Arcelor Atlantique et Lorra...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 26 septembre 2012, complété par le mémoire enregistré le 1er juillet 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget ;

Le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901741 en date du 26 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a accordé à la société Arcelor Atlantique et Lorraine la réduction des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle au titre de l'année 2006 pour un montant de 187 859 euros pour son établissement situé à Rombas ;

2°) de remettre intégralement la somme dégrevée à la charge de la SAS Arcelor Atlantique et Lorraine ;

Le ministre soutient que

- le tribunal administratif a commis une erreur de droit sur la portée de la notion de cession de biens au sens du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts qui ne saurait s'entendre restrictivement des seules ventes ;

- la notion de bien cédé désigne la généralité des biens immobilisés compris dans une cession intervenue à l'intérieur d'un groupe, quelle que soit la qualification de l'opération, sans distinction selon les modalités juridiques choisies ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que les précisions du législateur éclairant la portée originelle de la disposition en auraient modifié le champ d'application et seraient inapplicables à l'année 2006 ;

- si le code civil définit précisément la notion de vente, il ne comporte aucune définition de la notion de cession ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'opération en litige ne pouvait s'analyser comme une cession de bien ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2013, présenté pour la société Arcelor Atlantique et Lorraine, dont le siège est 6 rue André Campra à Saint-Denis (93200) par Me Chatel, avocat qui conclut au rejet du recours du ministre ;

La société soutient que :

- la volonté du législateur visait exclusivement les montages permettant une optimisation, seules les opérations de cession de biens pouvant donner lieu au déclenchement du mécanisme de fixité des bases imposables ;

- l'opération d'apport partiel d'actif réalisée ne constitue pas une cession de biens au sens de la jurisprudence tant administrative que judiciaire ;

- les modifications législatives ne s'appliquent qu'aux opérations intervenues depuis le 1er janvier 2007 et une portée rétroactive ne serait pas conforme aux droits des contribuables ;

Vu la lettre du 21 janvier 2014 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 27 février 2014 et que l'instruction pourrait être close à partir du 6 février 2014 sans information préalable ;

Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate pris le 7 février 2014 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 février 2014 :

- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;

1. Considérant que la SAS Arcelor Atlantique et Lorraine a reçu le 1er avril 2005 de la société Sollac Lorraine, par voie d'apport partiel d'actif, le site industriel de Rombas (Moselle) ; que la valeur de ce bien a été déclarée, dans le cadre de ses déclarations de taxe professionnelle pour 2006, en faisant application du régime de la valeur locative plancher défini par l'article 1518 B du code général des impôts ; qu'ayant estimé que l'opération réalisée en 2005 relevait de l'application des dispositions du 3° de l'article 1469 du code, l'administration a procédé sur cette base à un nouveau calcul de la valeur locative et assigné à la SAS Arcelor Atlantique et Lorraine des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle au titre de l'année 2006 ; que le ministre chargé du budget interjette appel du jugement en date du 26 juillet 2012 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a fait partiellement droit à la demande de la SAS Arcelor Atlantique et Lorraine en prononçant la réduction de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2006 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " La taxe professionnelle a pour base : 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de celles qui ont été détruites ou cédées au cours de la même période (...) " ; qu'aux termes du 3° quater de l'article 1469 du même code : " Le prix de revient d'un bien cédé n'est pas modifié lorsque ce bien est rattaché au même établissement avant et après la cession et lorsque, directement ou indirectement : a. l'entreprise cessionnaire contrôle l'entreprise cédante ou est contrôlée par elle ; b. ou ces deux entreprises sont contrôlées par la même entreprise (...) " ; qu'aux termes de l'article 1518 B du même code : " A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession. Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux seules immobilisations corporelles directement concernées par l'opération d'apport, de scission, de fusion ou de cession, dont la valeur locative a été retenue au.titre de l'année précédant l'opération) (.... Pour les opérations mentionnées au premier alinéa réalisées à compter du 1 er janvier 1992, la valeur locative des immobilisations corporelles ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes de son montant avant l'opération (...) Les dispositions du présent article s'appliquent distinctement aux trois catégories d'immobilisations suivantes : terrains, constructions, équipements et biens mobiliers " ;

3. Considérant qu'il résulte des termes mêmes du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts que les cessions de biens qu'il vise s'entendent des seuls transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire ; que ces dispositions, dont les termes renvoient à une opération définie et régie par le droit civil, ne sauraient s'entendre comme incluant toutes autres opérations qui, sans constituer des " cessions " proprement dites, ont pour conséquence une mutation patrimoniale ;

4. Considérant, cependant, que la notion de cession au sens du droit civil recouvre tous les transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire, effectués à titre gratuit ou à titre onéreux ; que l'opération par laquelle une société apporte une partie de ses éléments d'actif à une autre société en échange de titres de cette dernière doit être regardée comme une cession à titre onéreux au sens du droit civil dès lors que cette opération manifeste la rencontre de deux volontés, celle du cessionnaire et celle du cédant et s'applique à une situation où, après l'opération, ces deux personnes subsistent ; que les apports partiels d'actifs réalisés par la société Sollac Lorraine au profit de la SAS Arcelor Lorraine et Atlantique entrent ainsi dans les prévisions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article 1518 B du code qui n'ont pour objet que de garantir aux collectivités le maintien en toute circonstance d'une valeur locative minimum ; que le ministre est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts pour prononcer la réduction de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle qui a été assignée à la SAS Arcelor Atlantique et Lorraine au titre de l'année 2006 pour son établissement de Rombas ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société SAS Arcelor Atlantique et Lorraine devant le tribunal administratif et la cour administrative d'appel ;

6. Considérant que contrairement à ce que soutient la société SAS Arcelor Atlantique, l'administration fiscale n'a pas fait application des dispositions de l'article 1518 B dans leur rédaction issue de la loi de finances pour 2007 qui n'étaient pas applicables aux années en litige, qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le service a appliqué à tort ces dispositions, est inopérant ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre délégué chargé du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé la réduction de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle qui a été assignée à la SAS Arcelor Atlantique et Lorraine au titre de l'année 2006 pour son établissement de Rombas ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et de rétablir la société SAS Arcelor Atlantique et lorraine au rôle de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle au titre de l'année 2006 à hauteur de 187 859 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société SAS Arcelor Atlantique et Lorraine la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement en date du 26 juillet 2012 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles la société SAS Arcelor Atlantique et Lorraine a été assujettie au titre de l'année 2006 à hauteur de 187 859 euros pour son établissement situé à Rombas sont remises à sa charge.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société SAS Arcelor Atlantique et Lorraine sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à la société SAS Arcelor Atlantique et Lorraine.

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12NC01628


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC01628
Date de la décision : 27/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-03-04-04 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Assiette.


Composition du Tribunal
Président : Mme STEFANSKI
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-03-27;12nc01628 ?
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