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21/02/2014 | FRANCE | N°12MA02583

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 21 février 2014, 12MA02583


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 25 juin 2012, sous le numéro 12MA02583, présentée pour le département des Bouches-du-Rhône, dont le siège est hôtel du département, 52 avenue de Saint-Just à Marseille cedex 20 (13256), par Me B...-D... ;

Le département des Bouches-du-Rhône demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002871 du 23 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à verser la somme de 121 613,94 euros à la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil en réparation

des dommages causés dans ses locaux suite à l'incendie survenu le 8 novembre 2...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 25 juin 2012, sous le numéro 12MA02583, présentée pour le département des Bouches-du-Rhône, dont le siège est hôtel du département, 52 avenue de Saint-Just à Marseille cedex 20 (13256), par Me B...-D... ;

Le département des Bouches-du-Rhône demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002871 du 23 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à verser la somme de 121 613,94 euros à la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil en réparation des dommages causés dans ses locaux suite à l'incendie survenu le 8 novembre 2005, la somme de 9 045,95 euros à la société d'assurance AXA France Iard et la somme de 3 805,48 euros au titre des dépens, toutes ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 24 février 2010 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil et son assureur, la société d'assurance AXA France Iard devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil et de la société d'assurance AXA France Iard une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Pena, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;

- les observations de Me B...pour le département des Bouches-du-Rhône ;

- et les observations de Me A...substituant Me C...pour la Fondation des orphelins d'Auteuil et AXA France Iard ;

1. Considérant que par un jugement du tribunal pour enfants d'Aix-en-Provence en date du 22 février 2006, devenu définitif en ses dispositions pénales, deux mineurs ayant fait l'objet de mesures d'assistance éducative en application des articles 375 et suivants du code civil et confiés à ce titre au service départemental de l'aide sociale à l'enfance des Bouches-du-Rhône, ont été déclarés coupables de l'incendie qui s'est déclaré le 8 novembre 2005 dans une partie des locaux de la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil situés 20 boulevard Madeleine Remuzat à Marseille ; que le département des Bouches-du-Rhône relève appel du jugement du 23 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à verser la somme de 121 613,94 euros à la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil en réparation des dommages causés dans ses locaux suite audit incendie, la somme de 9 045,95 euros à la société d'assurance AXA France Iard et la somme de 3 805,48 euros au titre des dépens, toutes ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 24 février 2010 ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant que la décision par laquelle le juge confie la garde d'un mineur, dans le cadre d'une mesure d'assistance éducative prise en vertu des articles 375 et suivants du code civil, à l'une des personnes mentionnées à l'article 375-3 du même code, transfère à la personne qui en est chargée la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie du mineur ; qu'en raison des pouvoirs dont le département se trouve ainsi investi lorsque le mineur a été confié à un service qui relève de son autorité, sa responsabilité est engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ce mineur ; que cette responsabilité n'est susceptible d'être atténuée ou supprimée que dans le cas où elle est imputable à un cas de force majeure ou à une faute de la victime ;

3. Considérant qu'il résulte des principes sus énoncés que le département des Bouches-du-Rhône, à qui la garde a été confiée en vertu d'un jugement en assistance éducative du juge des enfants près le Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 25 février 2005 en ce qui concerne l'un d'eux et d'un jugement en assistance éducative du juge des enfants près le Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 1er juin 2005 en ce qui concerne l'autre, doit être regardé comme investi de la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie des mineurs à l'époque des faits, alors même qu'à cette date les deux jeunes étaient placés à la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil qui en assurait la garde effective, ce qu'au demeurant le département ne conteste plus en appel ; que dès lors, et nonobstant sa qualité de participante à l'exécution du service public de l'aide sociale à l'enfance que fait valoir le département, la fondation doit être considérée comme un tiers au regard de la mission de garde attribuée au département par le juge judiciaire ; qu'elle est donc en mesure de bénéficier de l'application d'un régime de responsabilité sans faute ; que si le département invoque le défaut de surveillance de la part du personnel de la fondation, aucun élément du dossier ne permet de tenir pour établies de telles allégations ; qu'il suit de là que le département des Bouches-du-Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à réparer l'intégralité des conséquences dommageables de l'incendie survenu dans les locaux marseillais de la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil le 8 novembre 2005 ;

Sur les préjudices :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté qu'immédiatement après la survenue de l'incendie dans ses locaux, la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil a été contrainte de faire réaliser, à ses frais, des travaux de remise en état et de racheter le mobilier utile à son fonctionnement et à l'accueil des jeunes ; que ces dommages aux biens matériels ont été évalués à la somme de 54 045,95 euros par les conclusions de l'expertise contradictoire rendue le 30 mai 2007 ; que si le département soutient que les investissements ont été couverts par l'augmentation du prix journée pour les années 2007 et 2008, de telles allégations ne ressortent nullement des pièces du dossier ; qu'ainsi, et compte tenu de l'indemnité d'un montant de 9 045,95 euros versée par la société d'assurance AXA France Iard à son assurée, le département des Bouches-du-Rhône doit être condamné à payer la somme de 45 000 euros à la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil et celle de 9 045,95 à son assureur en réparation de ce chef de préjudices ; que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date à laquelle le département a reçu leur demande préalable d'indemnisation, soit le 24 février 2010 ;

5. Considérant, en second lieu, que si la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil soutient avoir également été victime d'une perte d'exploitation en raison de l'indisponibilité d'une partie de ses locaux incendiés, perte évaluée à la somme de 76 613,94 euros par l'expertise judiciaire, il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des éléments produits pour la première fois devant la Cour par le département des Bouches-du-Rhône, que les subventions accordées par le conseil général, lesquelles constituent ses ressources exclusives, ont été augmentées de manière significative pour les années 2007 et 2008 ; qu'il résulte ainsi des documents d'autorisation budgétaire et de tarification pour les années 2007 et 2008 que l'intégralité des charges engagées en 2005 (hormis une dépense de photocopieur) et 2006, cette dernière année ayant été perturbée par les conséquences de l'incendie jusqu'en novembre, a été prise en compte dans le calcul du prix de journée allouée par le conseil général ; que par suite, la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil ne saurait prétendre à une condamnation du département à l'indemniser de ce chef de préjudice déjà compensé ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme à laquelle le département des Bouches-du-Rhône a été condamnée à verser à la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil, par le tribunal administratif de Marseille, doit être diminuée de la somme de 76 613,94 euros, sans qu'il soit besoin pour cela de diligenter une nouvelle expertise, inutile à la résolution du présent litige ;

Sur les frais d'expertise :

7. Considérant que les frais de l'expertise liquidés et taxés à hauteur de 3 805,48 euros et mis à la charge de la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil par une ordonnance du président du tribunal administratif de Marseille du 12 juin 2007 doivent être laissés à la charge du département des Bouches-du-Rhône qui demeure la partie perdante, ainsi que l'a décidé le tribunal ; que la fondation a également droit aux intérêts au taux légal sur cette somme à compter de la date du 24 février 2010 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties la charge des frais qu'elle a engagés pour l'instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que le département des Bouches-du-Rhône a été condamné à verser à la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil par le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 23 avril 2012 est ramenée à 45 000 (quarante-cinq mille) euros.

Article 2 : Le jugement attaqué est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête, les conclusions de la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil à fin d'expertise ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au département des Bouches-du-Rhône, à la fondation les orphelins apprentis d'Auteuil et à la société d'assurance AXA France Iard.

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N° 12MA02583

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA02583
Date de la décision : 21/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

60-01-02-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Eleonore PENA
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : SCP LESAGE - BERGUET - GOUARD-ROBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-02-21;12ma02583 ?
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