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12/11/2013 | FRANCE | N°12MA00623

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 12 novembre 2013, 12MA00623


Vu la requête enregistrée le 15 février 2012, présentée pour Mme D...A..., demeurant..., par Me B...C... ; Mme A...demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 1001968 rendu le 16 décembre 2011 par le tribunal administratif de Toulon ;

- d'annuler la décision par laquelle le centre communal d'action sociale d'Hyères les Palmiers a implicitement refusé de régulariser sa situation administrative et de l'affecter dans un emploi correspondant à un niveau hiérarchique au moins équivalent à celui qu'elle détenait avant son accident du travail survenu le 19 mai 2009

;

- d'ordonner, avant dire-droit, une expertise aux fins d'évaluer les gr...

Vu la requête enregistrée le 15 février 2012, présentée pour Mme D...A..., demeurant..., par Me B...C... ; Mme A...demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 1001968 rendu le 16 décembre 2011 par le tribunal administratif de Toulon ;

- d'annuler la décision par laquelle le centre communal d'action sociale d'Hyères les Palmiers a implicitement refusé de régulariser sa situation administrative et de l'affecter dans un emploi correspondant à un niveau hiérarchique au moins équivalent à celui qu'elle détenait avant son accident du travail survenu le 19 mai 2009 ;

- d'ordonner, avant dire-droit, une expertise aux fins d'évaluer les grade, échelon et ancienneté qui devraient être les siens au jour de l'arrêt à intervenir, d'évaluer ses chances d'avancement et de chiffrer le montant des rappels de salaires et de toute autre rémunération ;

- d'enjoindre au centre communal d'action sociale d'Hyères les Palmiers de la rétablir dans les grade, échelon et ancienneté auxquels elle devait accéder ; à défaut d'expertise, d'enjoindre au centre communal d'action sociale de la rétablir dans le grade de puéricultrice de classe supérieure 7ème échelon avec une ancienneté courant à compter du 1er janvier 2005 ; d'enjoindre audit centre de l'affecter sur un emploi correspondant au niveau hiérarchique qu'elle détenait avant son accident du travail ;

- de condamner le centre communal d'action sociale d'Hyères les Palmiers à lui verser une somme globale de 38 000 euros correspondant aux rappels de salaires pour la période du 1er avril 1994 au 1er février 2012 (35 000 euros) et au préjudice lié à la perte d'une chance dans le cadre du déroulement de sa carrière (3 000 euros), avec intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2010 et capitalisation des intérêts ;

- de condamner le centre communal d'action sociale d'Hyères les Palmiers à lui verser une somme de 1 802 euros correspondant à la perte de la nouvelle bonification indiciaire pour la période du 7 décembre 2009 au 1er février 2012, avec intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2010 et capitalisation des intérêts, somme à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir ;

- de condamner le centre communal d'action sociale d'Hyères les Palmiers à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral causé par le traitement dévalorisant qui lui a été infligé tant avant qu'après son accident du travail ;

- de mettre à la charge du centre communal d'action sociale d'Hyères les Palmiers le paiement d'une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que le paiement des entiers dépens ;

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Vu le jugement attaqué ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 88-1077 du 30 novembre 1988 portant statuts particuliers des personnels infirmiers de la fonction publique hospitalière ;

Vu l'arrêté du 30 novembre 1988 relatif à l'échelonnement indiciaire des personnels infirmiers de la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 relatif à certaines positions des fonctionnaires hospitaliers, à l'intégration et à certaines modalités de mise à disposition ;

Vu le décret n° 92-859 du 28 août 1992 portant statut particulier du cadre d'emplois des puéricultrices territoriales ;

Vu le décret n° 92-860 du 28 août 1992 portant échelonnement indiciaire applicable aux puéricultrices territoriales ;

Vu le décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2013,

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur,

- les conclusions de, Mme Hogedez, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour MmeA... ;

1. Considérant que Mme A...a été recrutée par l'assistance publique des hôpitaux de Marseille, en qualité d'infirmière de classe normale, le 3 mars 1980, et titularisée dans ce grade le 3 mars 1981 ; qu'elle a été titularisée dans le corps des puéricultrices de la fonction publique hospitalière le 7 novembre 1988 ; que, par un arrêté en date du 13 juillet 1993, elle a été détachée, à compter du 1er mai 1993, pour une durée de deux ans, auprès du cadre départemental du Var ; que, par l'article 2 de cet arrêté, elle a été placée au 5ème échelon de la classe normale de son corps ; qu'à l'issue de ce détachement, elle est revenue dans son corps d'origine au sein de la fonction publique hospitalière et a été affectée au centre hospitalier d'Hyères du 24 septembre 1994 au 31 décembre 1998 ; que, par un arrêté en date du 14 décembre 1998, elle a été détachée, pour une durée d'un an, au centre communal d'action sociale d'Hyères à compter du 1er janvier 1999 en qualité de puéricultrice de classe normale au 8ème échelon et affectée sur un emploi de directrice de crèche ; que ce détachement a été renouvelé à deux reprises ; qu'à l'issue desdits renouvellements, Mme A...a démissionné de la fonction publique hospitalière et demandé son intégration au sein du centre communal d'action sociale d'Hyères, laquelle a été effective à compter du 1er janvier 2002 ; que, par une lettre en date du 19 avril 2010, Mme A...a attiré l'attention de sa hiérarchie sur le fait qu'elle avait en réalité été promue au sein de l'assistance publique des hôpitaux de Marseille au 3ème échelon de la classe supérieure du corps des puéricultrices à compter du 1er janvier 1993, par arrêté du 28 octobre 1993 et demandé une régularisation de sa situation ; qu'en outre, ayant été victime d'un accident du travail ayant nécessité un congé de maladie du 19 mai 2009 au 7 décembre 2009, elle a, lors de sa reprise d'activité, été affectée sur un emploi de puéricultrice et non de directrice de crèche ; qu'elle a également, par le courrier précité du 19 avril 2010, demandé la régularisation de cette situation ; qu'une décision implicite de rejet est née sur les demandes de MmeA... ; que Mme A...interjette appel du jugement en date du 16 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite de rejet née sur ses demandes de régularisation, d'autre part, à ce que sa carrière soit reconstituée et à ce qu'elle soit affectée sur un emploi équivalent à celui qui était le sien avant son accident du travail et enfin, à la condamnation du centre communal d'action sociale à réparer les préjudices matériel et moral qu'elle estime avoir subis ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, en premier lieu, que si les premiers juges ont fait, à tort, mention de l'administration de l'éducation nationale alors que Mme A...relève du centre communal d'action sociale d'Hyères, cette erreur matérielle est sans incidence sur la régularité du jugement ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que le tribunal administratif de Toulon, en recherchant les textes applicables à la situation de Mme A...et en faisant notamment référence au décret du 13 octobre 1988 n'a pas procédé à une substitution de motifs ni soulevé un moyen d'ordre public dont les parties auraient dû, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, être informées ;

4. Considérant, en troisième lieu, que le tribunal, en indiquant "qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'affectation actuelle de la requérante soit entachée d'illégalité dès lors que celle-ci est conforme aux missions susceptibles de lui être confiées en application du statut qui est le sien" a suffisamment motivé le jugement sur la question afférente à l'affectation de Mme A...sur un poste autre que celui de directrice de crèche après son accident du travail ;

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de demande indemnitaire préalable :

5. Considérant qu'aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut être opposée à un requérant ayant introduit devant le juge administratif un contentieux indemnitaire à une date où il n'avait présenté aucune demande en ce sens devant l'administration lorsqu'il a formé, postérieurement à l'introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l'administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue, et ce, quelles que soient les conclusions du mémoire en défense de l'administration ; que lorsque ce mémoire en défense conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête faute de décision préalable et, à titre subsidiaire seulement, à son rejet au fond, ces conclusions font seulement obstacle à ce que le contentieux soit lié par ce mémoire lui-même ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si, à la date du 3 août 2010 à laquelle Mme A...a saisi le tribunal administratif de Toulon, cette dernière ne justifiait d'aucune décision expresse ou tacite lui refusant l'indemnité qu'elle sollicitait, elle a, le 18 octobre 2010, demandé au centre communal d'action sociale d'Hyères de lui allouer une indemnité ; que le silence gardé par l'établissement sur cette réclamation a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue ; qu'aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable, ne peut donc être opposée aux conclusions de la demande de première instance ;

Sur les conclusions relatives à la prise en compte de l'avancement au 3ème échelon de la classe supérieure du corps des puéricultrices à compter du 1er janvier 1993 :

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du directeur général de l'assistance publique des hôpitaux de Marseille en date du 28 octobre 1993, Mme A...a été promue, à compter du 1er janvier 1993, au 3ème échelon de la classe supérieure du corps des puéricultrices avec une ancienneté de 4 mois ;

8. Considérant que le détachement est la position du fonctionnaire qui continue à bénéficier de ses droits à avancement dans son corps d'origine ; qu'en dépit de son premier détachement à compter du 1er mai 1993 au sein du conseil général du Var, Mme A...devait donc bénéficier dans le corps des puéricultrices de la fonction publique hospitalière, de ses droits à avancement ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 18 du décret n° 88-1077 du 30 novembre 1988 portant statuts particuliers des personnels infirmiers de la fonction publique hospitalière, alors applicable : "Le corps des puéricultrices comprend le grade de puéricultrice de classe normale comptant huit échelons, le grade de puéricultrice de classe supérieure comptant cinq échelons et le grade de puéricultrice surveillante des services médicaux comptant sept échelons" ; qu'en vertu de l'article 21 dudit décret : "Dans la classe supérieure, l'ancienneté moyenne donnant accès à l'échelon supérieur est de trois ans dans chacun des trois premiers échelons et de quatre ans dans le 4ème échelon" ; qu'enfin l'article 37 dudit décret dispose que "Les durées maximales et minimales du temps passé dans les échelons des grades des différents corps auxquels s'applique le présent décret sont égales, respectivement, à l'ancienneté moyenne augmentée du quart et à l'ancienneté moyenne réduite du quart (...)" ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'avancement à l'ancienneté maximale du 3ème au 4ème échelon de la classe supérieure du corps des puéricultrices se faisait, à l'époque des faits litigieux, en 3 ans et 9 mois ; que MmeA..., promue le 1er janvier 1993 au 3ème échelon de la classe supérieure avec un reliquat d'ancienneté de 4 mois, devait donc accéder au 4ème échelon de cette classe au bout de 3 ans et 5 mois, soit le 1er juin 1996 ; que l'indice brut y afférent était, en application des dispositions de l'annexe II de l'arrêté du 30 novembre 1988 relatif à l'échelonnement indiciaire des personnels infirmiers de la fonction publique hospitalière, de 501 ; que le 5ème échelon de la classe supérieure n'aurait pu être atteint, à l'ancienneté maximale, avant le 1er juin 2001 ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article 15 du décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 relatif à la position des fonctionnaires hospitaliers : "(...) Le détachement a lieu à indice égal ou, à défaut immédiatement supérieur lorsque le corps ou emploi d'accueil ouvre droit à pension de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ou à pension du code des pensions civiles et militaires de retraite de l'Etat" ;

12. Considérant qu'au 1er janvier 1999, date à partir de laquelle Mme A...a été détachée au sein du centre communal d'action sociale d'Hyères, l'intéressée devait, en application des dispositions précitées, être détachée à indice égal ou, à défaut, immédiatement supérieur ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'elle a été détachée au 8ème échelon de la classe normale du cadre d'emplois des puéricultrices territoriales à l'indice brut 558 ; que l'avancement dont Mme A...se prévaut avait donc, contrairement à ce qu'elle soutient, nécessairement été pris en compte au moment de son détachement au sein de la fonction publique territoriale sans qu'il y ait eu d'erreur de gestion ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le centre communal d'action sociale d'Hyères a refusé de procéder à une régularisation de sa situation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et ses conclusions indemnitaires sans qu'il soit besoin, d'une part et en tout état de cause, d'ordonner l'expertise sollicitée par la requérante et, d'autre part, de statuer sur l'exception de prescription quadriennale soulevée par l'intimé ;

Sur les conclusions relatives à l'affectation de Mme A...à la suite de sa reprise d'activité le 7 décembre 2009 :

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation :

14. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du 28 août 1992 portant statut particulier du cadre d'emplois des puéricultrices territoriales, dans sa rédaction alors applicable : "Les puéricultrices territoriales exercent leurs fonctions dans les régions, les départements, les communes et leurs établissements publics, dans le cadre notamment de la protection maternelle et infantile, ainsi qu'au sein des établissements et services d'accueil des enfants de moins de six ans relevant de ces collectivités ou établissements publics, dans les conditions fixées par les articles R. 180 et suivants du code de la santé publique. / Les puéricultrices peuvent exercer les fonctions de directrice d'établissement ou service d'accueil des enfants de moins de six ans relevant des collectivités ou établissements publics précités" ;

15. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que les fonctions de directrice de crèche constituent un emploi distinct du grade de la puéricultrice qui l'occupe ; que les puéricultrices n'ont aucun droit, si l'intérêt du service s'y oppose, à conserver l'emploi de directrice de crèche ;

16. Considérant toutefois qu'il est constant que, depuis le 1er janvier 1999, Mme A...était affectée sur un emploi de directrice de crèche ; qu'à l'issue de son arrêt de travail, le 7 décembre 2009, le centre communal d'action sociale a refusé de la réaffecter sur un tel emploi ; que le centre communal d'action sociale intimé fait valoir qu'il a alors souhaité l'affecter sur un poste allégé ; que, toutefois, eu égard au handicap dont était atteint la requérante, il n'est pas établi que le poste de puéricultrice, lequel demande des efforts physiques plus importants dont le fait de porter des enfants, était allégé par rapport à l'emploi administratif de directrice de crèche qu'elle occupait jusqu'alors ; que, par ailleurs, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier, et notamment du rapport établi le 16 janvier 2010 par le Dr Alin, rhumatologue mandaté par le centre communal d'action sociale, ainsi que du certificat établi par le médecin du travail le 16 février 2010, que MmeA..., dont les fonctions de directrice de crèche étaient rappelées, était apte sans restrictions à l'exercice de ses fonctions ; que, par suite, ni l'intérêt du service ni la nécessité de modifier l'affectation de Mme A...du fait de son état de santé ne sont établis ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a refusé d'annuler la décision implicite par laquelle le centre communal d'action sociale d'Hyères a refusé de la réaffecter sur un emploi de directrice de crèche ; qu'il y a lieu, par l'effet dévolutif de l'appel, d'annuler ladite décision ;

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'injonction :

18. Considérant que le présent arrêt, qui annule la décision par laquelle le centre communal d'action sociale intimé a refusé de réaffecter Mme A...sur un emploi de directrice de crèche implique nécessairement qu'il soit enjoint audit centre d'affecter Mme A...sur un emploi de directrice de crèche dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

S'agissant du préjudice matériel :

19. Considérant qu'en l'absence d'exercice effectif des fonctions dont un agent public a été illégalement privé par l'administration, soit qu'il ait été évincé du service, soit qu'il ait été affecté à d'autres fonctions que celles qui étaient ou auraient dû être les siennes, celui-ci ne peut prétendre au rappel de la rémunération correspondante, mais est fondé à demander la réparation intégrale des préjudices de toute nature qu'il a réellement subis du fait des mesures prises à son encontre dans des conditions irrégulières ; qu'il convient, pour fixer l'indemnité à laquelle le requérant a droit, de tenir compte notamment de l'importance respective des fautes commises par l'administration et l'agent lui-même à l'origine des préjudices de ce dernier, telles qu'elles résultent de l'instruction, et d'en déduire tout élément de rémunération ou tout revenu de remplacement perçu pendant la période durant laquelle il a été privé de l'exercice de ses fonctions ou mis à l'écart du service ;

20. Considérant que, pour l'évaluation de l'ensemble des préjudices subis par cet agent, l'indemnité réparant le préjudice financier doit être déterminée en prenant en compte, outre le traitement qui aurait dû lui être versé, d'une part, les primes ou indemnités inhérentes aux fonctions que l' agent aurait exercées en l'absence de la mesure illégale, d'autre part, les primes ou indemnités rétribuant la qualité ou la quantité de son travail, dont il établit qu'il avait une chance sérieuse de les percevoir ; qu'en revanche cette évaluation ne peut inclure les indemnités visant à compenser des frais qui n'ont pas été exposés ;

21. Considérant qu'en vertu de l'article Annexe du décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 portant attribution d'une nouvelle bonification indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale, peuvent bénéficier d'une telle indemnité les personnes assurant la direction d'établissements et de services d'accueil de la petite enfance à hauteur de 15 points d'indice majoré ;

22. Considérant que cette NBI est versée à toutes les personnes chargées des fonctions auxquelles elle est attachée ; qu'elle doit ainsi être prise en compte dans la détermination du préjudice financier subi par l'agent qui aurait dû la percevoir s'il n'avait été illégalement affecté à d'autres fonctions ; qu'il suit de là que Mme A...est fondée à solliciter la condamnation du centre communal d'action sociale d'Hyères à lui verser une somme correspondant à la perte de la nouvelle bonification indiciaire afférente aux fonctions de directrice de crèche entre le 7 décembre 2009 et le jour de la lecture du présent arrêt ; qu'eu égard à l'évolution de la valeur du point d'indice sur la période considérée, il y a lieu de condamner le centre communal d'action sociale à verser à ce titre à Mme A...la somme de 3 261, 75 euros de laquelle seront déduits les prélèvements obligatoires ;

S'agissant du préjudice moral :

23. Considérant que l'affectation de Mme A...sur un emploi de puéricultrice qui impliquait qu'elle soit désormais sous l'autorité d'une autre directrice de crèche a été à l'origine, pour l'intéressée, d'un sentiment de dévalorisation et a généré un préjudice moral dont il sera fait une juste évaluation en l'estimant à la somme de 5 000 euros ;

S'agissant des intérêts et de la capitalisation des intérêts :

24. Considérant, d'une part, que, lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter de la réception par la partie débitrice de la réclamation de la somme principale ; que la somme que le centre communal d'action sociale d'Hyères est condamné à verser à Mme A...portera intérêts au taux légal à compter non pas du 22 avril 2010 comme le demande la requérante, dès lors que la lettre du 19 avril 2010 ne comportait aucune demande indemnitaire, mais du 20 octobre 2010, date de réception de la demande indemnitaire de l'intéressée ;

25. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : "Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière" ; que pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que Mme A...a demandé la capitalisation des intérêts dans sa requête de première instance enregistrée le 3 août 2010 et a réitéré sa demande en appel ; que cette demande prend effet à compter du 20 octobre 2011, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière ;

Sur les conclusions du centre communal d'action sociale d'Hyères tendant à la suppression de passages injurieux :

26. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-2 du code de justice administrative : "Sont également applicables les dispositions des alinéas 3 à 5 de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ci-après reproduites : "Art. 41, alinéas 3 à 5. - Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux. / Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts. / Pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux et, dans tous les cas, à l'action civile des tiers" ;

27. Considérant que les passages du mémoire du 15 février 2012 présenté par Mme A... commençant par les termes "il est évident que des erreurs" et finissant par les termes "persiste dans son impéritie" n'excèdent pas le droit à la libre discussion et ne sont pas injurieux, outrageants ou diffamatoires au sens des dispositions précitées ; qu'il n'y a donc pas lieu d'en ordonner la suppression ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

28. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;

29. Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que soit mis à la charge de MmeA..., qui n'est pas la partie perdante, le paiement des frais exposés par le centre communal d'action sociale d'Hyères et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre communal d'action sociale intimé le paiement d'une somme de 2 000 euros qui sera versée à Mme A...sur le même fondement ;

Sur les dépens :

30. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : "Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat./ Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens" ;

31. Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions susmentionnées de mettre à la charge du centre communal d'action sociale d'Hyères le paiement d'une somme de 35 euros correspondant au remboursement des frais de timbre exposés ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1001968 du tribunal administratif de Toulon en date du 16 décembre 2011 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme A...relatives au refus du centre communal d'action sociale d'Hyères de la réaffecter sur un emploi distinct de celui de directrice de crèche à la suite de son accident du travail.

Article 2 : La décision implicite par laquelle le centre communal d'action sociale d'Hyères a refusé d'affecter Mme A...sur un emploi de directrice de crèche est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au centre communal d'action sociale d'Hyères d'affecter Mme A...sur un emploi de directrice de crèche dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le centre communal d'action sociale d'Hyères est condamné à verser à Mme A...la somme de 5 000 euros (cinq mille euros) au titre de son préjudice moral et la somme de 3 261,75 euros (trois mille deux cent soixante et un euros et soixante quinze centimes) de laquelle seront déduits les prélèvements obligatoires. Ces sommes après cette déduction porteront intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2010 et capitalisation des intérêts à compter du 20 octobre 2011 et à chaque échéance annuelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme A...est rejeté.

Article 6 : Le centre communal d'action sociale versera à Mme A...une somme globale de 2 035 euros (deux mille trente cinq euros) en application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Les conclusions présentées par le centre communal d'action sociale d'Hyères sur le fondement des dispositions des articles L. 741-2 et L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...et au centre communal d'action sociale d'Hyères.

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N° 12MA006232


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00623
Date de la décision : 12/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Affectation et mutation - Affectation.

Fonctionnaires et agents publics - Notation et avancement - Révision des situations.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : BOURREL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-11-12;12ma00623 ?
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