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01/10/2013 | FRANCE | N°12BX00673

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 01 octobre 2013, 12BX00673


Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 20 mars 2012, présentée pour Mme H...F..., Mlle C...G...et M. D...G...demeurant..., par Me B... ;

MmeF..., Mlle G...et M. G...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1001504 du 17 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Dax à verser à Mme H...F...la somme de 2 219,01 euros en règlement des frais d'obsèques de sa mère Mme A...F..., avec les intérêts de droit à compter du j

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Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 20 mars 2012, présentée pour Mme H...F..., Mlle C...G...et M. D...G...demeurant..., par Me B... ;

MmeF..., Mlle G...et M. G...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1001504 du 17 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Dax à verser à Mme H...F...la somme de 2 219,01 euros en règlement des frais d'obsèques de sa mère Mme A...F..., avec les intérêts de droit à compter du jour du dépôt de la requête devant le tribunal administratif et la somme de 40 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi du fait du décès accidentel de sa mère avec les intérêts de droit à compter du jour du dépôt de la requête, à Mlle C...G..., petite-fille de Mme A...F..., la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice moral, avec les intérêts de droit à compter du jour du dépôt de la requête, enfin à M. D...G..., petit-fils de Mme A...F..., la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice moral avec les intérêts de droit à compter du jour du dépôt de la requête ;

2°) de retenir la responsabilité de la commune de Dax dans le décès accidentel de leur mère et grand-mère et de condamner la commune de Dax au paiement de ces sommes ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Dax le versement de la somme de 1 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'arrêté du 3 décembre 2012 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 septembre 2013:

- le rapport de M. Philippe Cristille, premier conseiller ;

- les conclusions de M. E...de la Taille Lollainville, rapporteur public ;

- les observations de Me Corbier-Labasse, avocat de Mme F...et des consortsG... ;

Vu, enregistrée le 10 septembre 2013, la note en délibéré présentée pour les requérants ;

1. Considérant que le 9 juillet 2009 vers 17 h, Mme A...F..., âgée de 86 ans, a fait une chute dans le bassin, alors à sec, de la " fontaine du légionnaire " située sur la place de la Cathédrale à Dax ; que MmeF..., victime d'un traumatisme crânien, est décédée des suites de ses blessures ; que sa fille, Mme H...F..., et ses petits-enfants, Mlle C...G...et M. D...G..., ont recherché la responsabilité de la commune de Dax pour défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ; qu'ils font appel du jugement en date du 17 janvier 2012 du tribunal administratif de Pau qui a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Dax à les indemniser du préjudice matériel résultant des frais d'obsèques de Mme F...et du préjudice moral qu'ils ont subis du fait du décès de leur mère et grand-mère ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Landes demande à nouveau, en cause d'appel, le remboursement de ses débours et le paiement de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Dax :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : "Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ; que l'action de Mme H...F..., Mlle C...G...et M. D...G..., qui a pour fondement le défaut d'entretien normal d'un ouvrage public, se rattache aux dommages de travaux publics et n'avait, dès lors, pas à être précédée d'une demande préalable en application des dispositions précitées ; que la fin de non-recevoir tirée d'un défaut de réclamation préalable doit, par suite, être écartée ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4 (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que les consorts F...-G... ont reçu notification du jugement attaqué le 23 janvier 2012 ; que leur requête a été enregistrée au greffe de la cour le 15 mars 2012, soit dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête ne peut qu'être écartée ;

Sur la responsabilité de la commune de Dax :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des témoignages versés au dossier, que Mme F...marchait place de la Cathédrale à Dax lorsqu'elle a basculé dans le bassin de la " fontaine du légionnaire " creusée dans la continuité du pavement de cette place ; qu'elle avait ainsi la qualité d'usager de la voie publique communale ; que la responsabilité de la commune de Dax est susceptible d'être recherchée sur le fondement du défaut d'entretien normal ;

5. Considérant qu'une collectivité publique peut en principe s'exonérer de la responsabilité qu'elle encourt à l'égard des usagers d'un ouvrage public victimes d'un dommage causé par l'ouvrage si elle apporte la preuve que ledit ouvrage a été normalement aménagé et entretenu ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des documents graphiques et photographiques produits que " la fontaine du légionnaire " est un ouvrage rectangulaire aménagé dans le prolongement du dallage de la place de la Cathédrale, creusé à même le sol, sans parapet ni protection, d'une dizaine de mètre de long et de deux mètres de large, en forme de caniveau, profond au point le plus bas du bassin, d'une quarantaine de centimètres et présentant d'un côté une paroi abrupte et de l'autre un plan incliné ; que la fontaine est normalement alimentée par des jets d'eau qui projettent une eau brumisée sur le plan incliné du bassin créant ainsi une lame d'eau qui ruisselle le long de la pente ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jour où l'accident s'est produit, une panne, survenue plusieurs semaines auparavant, affectait les jets d'eau alimentant la fontaine ; que l'examen des clichés photographiques versés au dossier montre que si, en temps normal, le film d'eau qui s'écoule le long du plan incliné du bassin réfléchit la lumière et colore la pierre d'une teinte plus foncée, ce qui, par contraste, permet de distinguer la différence de niveau du sol, l'assèchement du bassin consécutif à la panne persistante des jets d'eau rendait difficilement visible le dénivelé pour un usager abordant la fontaine par la paroi abrupte, ce qui était le cas de Mme F...le jour de l'accident ; que l'état de l'ouvrage public le jour de l'accident rendait nécessaire une signalisation ou un dispositif de protection que la commune de Dax a, d'ailleurs, ultérieurement fait installer en entourant la fontaine de barrières et en faisant recouvrir le bassin d'un capotage après qu'un autre usager a fait une chute quelques semaines après Mme F...dans des circonstances similaires ; que la présence d'une rangée d'arbres et de mobilier urbain autour de la fontaine, que Mme F...a dû franchir avant de chuter, ne pouvait constituer une signalisation suffisante ; qu'ainsi, la commune de Dax n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'entretien normal de la fontaine du légionnaire et de ses abords le jour de l'accident ;

8. Considérant que la commune n'avance aucune explication alternative à la chute de MmeF... ; que les requérants sont donc fondés à soutenir que l'accident de leur mère et grand-mère a été causé par ce défaut d'entretien normal ;

9. Considérant qu'il résulte, toutefois, de l'instruction que Mme F...a chuté en plein jour et sur une place qu'elle connaissait même si elle ne s'y rendait pas fréquemment ; qu'elle se devait, en outre, de prêter d'autant plus attention à sa marche qu'elle ne circulait pas sur le trottoir ; qu'ainsi, les conséquences dommageables de l'accident sont imputables non seulement au défaut d'entretien normal de l'ouvrage public mais également à l'inattention de la victime ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'affaire en retenant la responsabilité de la commune de Dax, maître de l'ouvrage, à concurrence de la moitié seulement desdites conséquences ;

Sur la réparation :

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la caisse primaire d'assurance maladie des Landes a exposé des dépenses de santé d'un montant non contesté de 542,60 euros correspondant à des frais d'hospitalisation de Mme F...; que, compte tenu du partage de responsabilité de 50% retenu, la commune de Dax est condamnée à verser à ladite caisse la somme de 271,30 euros ;

11. Considérant que Mme H...F..., Mlle C...G..., et M. D... G...ont droit à l'indemnisation du préjudice moral qu'ils ont éprouvé à la suite du décès accidentel de leur mère et grand-mère ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice subi en l'évaluant, dans les circonstances de l'espèce, à 10 000 euros pour Mme H...F..., à 5 000 euros pour Mlle C...G...et à 5 000 euros pour M. D...G...et en fixant, compte tenu du partage de la responsabilité, à 5 000 euros, à 2 500 euros et à 2 500 euros l'indemnité due par la commune de Dax respectivement à Mme H...F..., à Mlle C...G...et à M. D...G... ;

12. Considérant que Mme H...F...a droit au remboursement des frais qu'elle a exposés pour les obsèques de sa mère ; qu'elle justifie d'un préjudice matériel au titre des frais funéraires et d'obsèques pour un montant de 2 219 euros ; que, compte tenu du partage de la responsabilité, il y a lieu de lui allouer en remboursement de ces frais, 50 % de leur montant, soit 1 109,50 euros ;

13. Considérant que les consorts F...-G... ont droit à ce que les sommes qui leur sont accordées portent intérêts au taux légal à compter du 6 août 2010, date d'enregistrement de leur demande de première instance ;

14. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie des Landes a droit à ce que la somme qui lui est accordée porte intérêts à compter du 28 mars 2013 ainsi qu'elle le demande ;

Sur l'indemnité prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

15. Considérant, que selon le cinquième alinéa de l'article L. 376-1 : " En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, en fonction du taux de progression de l'indice des prix à la consommation hors tabac prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année considérée. " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 3 décembre 2012 : " Les montants maximum et minimum de l'indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 1 015 € et à 101 € à compter du 1er janvier 2013. " ;

16. Considérant qu'eu égard au montant des sommes accordées à la caisse primaire d'assurance maladie des Landes tel que mentionné au point 10 du présent arrêt, il y a lieu de condamner de la commune de Dax à lui verser une indemnité forfaitaire de 101 euros en application des dispositions précitées ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'expertise sollicitée par les consorts F...-G... qui n'est pas utile à la solution du litige, que ces derniers et la caisse primaire d'assurance maladie des Landes sont fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

18. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des consorts F...-G..., qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Dax demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Dax le versement de la somme de 1 500 euros au profit des consorts F...-G... et de la somme de 300 euros au profit de la caisse primaire d'assurance maladie des Landes au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : le jugement n°1001504 du 17 janvier 2012 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2: La commune de Dax est condamnée à verser à Mme H...F...la somme de 6 109,50 euros. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 6 août 2010.

Article 3 : La commune de Dax est condamnée à verser à Mlle C...G...et à M. D... G...la somme de 2 500 euros chacun. Ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du 6 août 2010.

Article 4 : La commune de Dax est condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie des Landes la somme de 271,30 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2013.

Article 5 : La commune de Dax versera à la caisse primaire d'assurance maladie des Landes une indemnité forfaitaire de gestion d'un montant de 101 euros.

Article 6 : La commune de Dax versera aux consorts F...-G... la somme de 1 500 euros en tout et à la caisse primaire d'assurance maladie des Landes la somme de 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête des consorts F...-G... est rejeté.

Article 8 : Les conclusions de la commune de Dax tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N°12BX00673


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX00673
Date de la décision : 01/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02-04-01 Travaux publics. Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics. Causes d'exonération. Faute de la victime.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CAMBOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-10-01;12bx00673 ?
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