LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les premier et second moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de caissier, à compter du 29 octobre 1997, par la société Impérial palace ; qu'il était titulaire de plusieurs mandats électifs ; que le 1er septembre 2008, M. X... et la société Impérial palace ont signé une convention de rupture du contrat de travail contenant la clause selon laquelle les parties soussignées renoncent irrévocablement à toutes autres actions ou prétentions de quelque nature que ce soit qui résulteraient de l'exécution ou de la cessation du contrat de travail ; que l'inspecteur du travail a autorisé la rupture conventionnelle le 20 octobre 2008 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de l'acte en transaction et voir prononcer sa nullité en l'absence de rupture antérieure du contrat de travail ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que saisie de demandes du salarié tendant à titre principal à la requalification de l'acte en transaction nulle et à titre subsidiaire, à son annulation totale auxquelles était opposé leur rejet pur et simple par l'employeur, la cour d'appel qui a d'office déclaré que la clause de renonciation devait être déclarée non écrite a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2°/ que la rupture conventionnelle a pour seul objet de mettre fin aux relations des parties ; qu'elle ne constitue pas une transaction destinée à mettre fin à toute contestation née ou à naître résultant de la rupture définitive du contrat de travail, et ne peut avoir pour effet, peu important les termes de l'accord, de priver le salarié des droits nés de l'exécution du contrat de travail ; qu'en présence d'une clause ayant ce dernier objet, le juge ne peut refaire le contrat en la déclarant non écrite et doit requalifier la convention de rupture en transaction nulle ; qu'en déclarant néanmoins que la clause de renonciation du salarié à tout droit devait être déclarée non écrite et que la convention ne pouvait être requalifiée en une transaction, la cour d'appel a violé l'article L. 1237-11 du code du travail et les articles 1134 et 2044 du code civil ;
3°/ que subsidiairement visant à mettre un terme définitif à toute contestation née ou à naître et emportant renonciation des parties à tout droit tiré de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail, cette clause, par l'ampleur de ses conséquences juridiques, était nécessairement un élément essentiel du contrat ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a dénaturé le sens et la portée de l'acte sous seing privé du 1er septembre 2008 en méconnaissance des articles 1134 et 2044 du code civil ;
4°/ que le juge judiciaire n'est pas lié par l'appréciation portée par l'autorité administrative sur l'existence du consentement d'un particulier à une convention ; qu'en se basant néanmoins sur l'appréciation faite par l'inspecteur du travail sur l'existence du consentement du salarié à la rupture conventionnelle de son contrat de travail, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs, en méconnaissance de la loi des 16 et 24 août 1790, ensemble du décret de fructidor An III ;
5°/ que la conclusion d'un accord de rupture d'un commun accord du contrat de travail suppose l'absence de litige sur son exécution ou sa rupture ; qu'ayant constaté qu'une décision de justice statuant sur un litige afférent à l'exécution du contrat de travail avait été rendue deux mois avant la signature de la rupture conventionnelle et que celle-ci contenait une clause portant renonciation des parties à toute contestation née ou à naître tirée l'exécution et de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel ne pouvait exclure l'existence d'un litige antérieur à la conclusion de la convention litigieuse et, partant, a tiré des conséquences erronées de ses propres constatations en méconnaissance des articles L. 1237-11 du code du travail, 1134 et 2044 du code civil ;
6°/ que M. X... s'était prévalu d'un autre désaccord tenant à la retenue opérée sur une prime de caisse ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce désaccord, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
7°/ que peu importe à la validité de la convention la connaissance du droit qu'est supposé avoir le salarié ; qu'en se fondant sur cette connaissance, la cour d'appel a violé les articles L. 2411-5, L. 2411-13 et L. 2411-22 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que l'existence d'un différend au moment de la conclusion d'une convention de rupture intervenue en application de l'article L. 1237-11 du code du travail n'affecte pas en elle-même la validité de cette convention ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel a retenu à bon droit qu'une clause de renonciation à tout recours contenue dans une convention de rupture conclue en application de l'article L. 1237-11 du code du travail devait être réputée non écrite, comme contraire à l'article L. 1237-14 du même code, sans qu'en soit affectée la validité de la convention elle-même ;
Attendu, enfin, que la cour d'appel qui ne s'est pas fondée sur la décision d'autorisation de l'inspecteur du travail, a écarté tout vice du consentement ;
D'où il suit que le moyen qui s'attaque à un motif surabondant en sa dernière branche n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes tendant à la requalification de l'acte sous seing privé du 1er septembre 2008 en une transaction, à ce que celle-ci soit déclarée nulle, et de ses demandes tendant à la condamnation de la société IMPERIAL PALACE à lui verser une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité pour atteinte au statut de salarié protégé, une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents, une indemnité conventionnelle de licenciement ainsi qu'une indemnité pour non-respect du droit individuel à la formation ;
AUX MOTIFS QUE la convention de rupture conclue entre les parties le 1er septembre 2008 prévoit notamment la clause suivante : « En conséquence, sous réserve de l'exécution intégrale du présent accord par les deux parties, et celui-ci réglant définitivement tous les comptes sans exception des réserves pouvant exister entre elles, les parties soussignées renoncent irrévocablement à tout autre action ou prétention de quelque nature que ce soit qui résulterait de l'exécution ou de la cessation du contrat de travail » ; que Stéphane X... soutient que cette clause entraîne renonciation à un droit ; qu'unetelle clause ne pouvait être introduite dans la convention, qui ne peut avoir pour autre objet que de mettre fin à un contrat de travail à durée indéterminée ; que dès lors, cette clause de renonciation a dénaturé la convention, qui doit être requalifiée en transaction ; qu'une telle transaction est nulle, compte tenu de l'absence de rupture du contrat de travail antérieure à la date de sa signature ;que la convention de rupture ne peut porter que sur les modalités d'une rupture de contrat de travail convenue entre les parties ; qu'elle ne peut en conséquence entraîner renonciation à un droit ; qu'en l'espèce, la clause susvisée entraîne effectivement renonciation à un droit lié à l'exécution du contrat de travail, y compris juridictionnel, chacune des parties soussignées renonçant irrévocablement à toute action liée à l'exécution ou la cessation du contrat de travail ; qu'une telle clause ne pouvait en conséquence être valablement prévue dans une convention de rupture et doit être déclarée non écrite ; que cependant, cette clause ne constitue pas un élément essentiel de la convention, celle-ci ayant pour unique objet ¿à l'exception de ladite clause ¿ d'établir les modalités et conséquences indemnitaires d'une rupture d'un commun accord, dans des termes conformes aux dispositions légales ; qu'en conséquence, cette clause ne dénature pas le contenu de la convention ; qu'il n'y a donc pas lieu à requalification de la convention en transaction ; que cette analyse est d'ailleurs celle qu'a retenu l'inspecteur du travail, puisqu'après avoir considéré que la convention de rupture et son annexe étaient conformes aux obligations légales applicables, et avoir relevé l'existence de cette clause, il a accordé l'autorisation sollicitée, en relevant que les parties avaient librement consenti à la signature de la convention, conclue « à l'initiative première, puis démarche, de Stéphane X..., sans que celui-ci ait fait l'objet d'une quelconque pression de la part de son employeur » ; qu'en conséquence, il convient de déclarer ladite clause de renonciation non écrite, mais de rejeter la demande de requalification de la convention de rupture d'un commun accord ;
1/ ALORS QUE saisie de demandes du salarié tendant à titre principal à la requalification de l'acte en transaction nulle et à titre subsidiaire, à son annulation totale auxquelles était opposé leur rejet pur et simple par l'employeur, la cour d'appel qui a d'office déclaré que la clause de renonciation devait être déclarée non écrite a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE la rupture conventionnelle a pour seul objet de mettre fin aux relations des parties ; qu'elle ne constitue pas une transaction destinée à mettre fin à toute contestation née ou à naître résultant de la rupture définitive du contrat de travail, et ne peut avoir pour effet, peu important les termes de l'accord, de priver le salarié des droits nés de l'exécution du contrat de travail ; qu'en présence d'une clause ayant ce dernier objet, le juge ne peut refaire le contrat en la déclarant non écrite et doit requalifier la convention de rupture en transaction nulle ; qu'en déclarant néanmoins que la clause de renonciation du salarié à tout droit devait être déclarée non écrite et que la convention ne pouvait être requalifiée en une transaction, la cour d'appel a violé l'article L. 1237-11 du code du travail et les articles 1134 et 2044 du code civil ;
2/ ALORS QUE subsidiairement visant à mettre un terme définitif à toute contestation née ou à naître et emportant renonciation des parties à tout droit tiré de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail, cette clause, par l'ampleur de ses conséquences juridiques, était nécessairement un élément essentiel du contrat ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a dénaturé le sens et la portée de l'acte sous seing privé du 1er septembre 2008 en méconnaissance des articles 1134 et 2044 du code civil ;
3/ ALORS QUE le juge judiciaire n'est pas liée par l'appréciation portée par l'autorité administrative sur l'existence du consentement d'un particulier à une convention ; qu'en se basant néanmoins sur l'appréciation faite par l'inspecteur du travail sur l'existence du consentement du salarié à la rupture conventionnelle de son contrat de travail, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs, en méconnaissance de la loi des 16 et 24 août 1790, ensemble du décret de fructidor An III.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes tendant à l'annulation de l'acte sous seing privé en date du 1er septembre 2008 en ce qu'il a été signé en fraude à ses droits et à la condamnation de la société IMPERIAL PALACE à lui verser une indemnité pour licenciement nul et sans cause réelle et sérieuse, une indemnité pour atteinte au statut de salarié protégé, une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents, une indemnité conventionnelle de licenciement ainsi qu'une indemnité pour non-respect du droit individuel à la formation ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des pièces versées aux débats, et notamment des mails échangés entre les parties, que la convention de rupture a été conclue à l'initiative de Stéphane X..., quia lui-même soumis un projet d'accord à l'employeur le 7 juillet 2008, qu'il y a eu un entretien préparatoire le 12 août 2008, les modalités précises de l'acte ont été débattues et que la délégation unique du personnel a été consultée ; que ces échanges ne font apparaître aucune divergence entre les parties concernant les droits du salarié, ni aucune demande particulière de ce dernier concernant une demande de rappel d'heures de délégation ou de prime de caisse ; que si un conflit avait opposé les parties concernant divers rappels de rémunération sollicités par Stéphane X..., ce conflit avait fait l'objet d'une décision devenue définitive de la cour d'appel de Chambéry, suite à un arrêt rendu le 26 juin 2008 ; qu'au regard de ces pièces, Stéphane X... ne justifie pas de l'existence d'un conflit entre les parties lors de la conclusion de la convention de rupture ; que dès lors, le consentement de Stéphane X..., qui est à l'initiative du projet de convention et en a rédigé la teneur, n'apparaît nullement vicié par un conflit persistant ; qu'il convient en outre de rappeler que Stéphane X... disposait d'une très bonne connaissance du droit du travail, compte tenu de ses divers mandats syndicaux, et pour avoir exercé les fonctions de conseiller prud'homal de décembre 2002 à juin 2008, el qu'il n'a pas exercé son droit de rétractation dans les 15 jours de la signature de la convention ;
ALORS QUE la conclusion d'un accord de rupture d'un commun accord du contrat de travail suppose l'absence de litige sur son exécution ou sa rupture ; qu'ayant constaté qu'une décision de justice statuant sur un litige afférent à l'exécution du contrat de travail avait été rendue deux mois avant la signature de la rupture conventionnelle et que celle-ci contenait une clause portant renonciation des parties à toute contestation née ou à naître tirée l'exécution et de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel ne pouvait exclure l'existence d'un litige antérieur à la conclusion de la convention litigieuse et, partant, a tiré des conséquences erronées de ses propres constatations en méconnaissance des articles L. 1237-11 du code du travail, 1134 et 2044 du code civil ;
ALORS au demeurant QUE Monsieur X... s'était prévalu d'un autre désaccord tenant à la retenue opérée sur une prime de caisse (conclusions page 11) ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce désaccord, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile
Et ALORS encore QUE peu importe à la validité de la convention la connaissance du droit qu'est supposé avoir le salarié ; qu'en se fondant sur cette connaissance, la Cour d'appel a violé les articles L 2411-5, L 2411-13 et L 2411-22 du Code du travail.