Vu la requête, enregistrée le 1er août 2011, et le mémoire complémentaire, enregistré le 3 octobre 2011, présentés pour la COMMUNE DE NOGENT-SUR-MARNE (94130), par Me Lecomte ; la COMMUNE DE NOGENT-SUR-MARNE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0905175/4 du 18 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun, sur la demande de M. A, a annulé l'arrêté du maire de Nogent-sur-Marne en date du 12 mai 2009 décidant la préemption de l'ensemble immobilier sis au 69 de la rue des Héros Nogentais et a enjoint à la commune de proposer la rétrocession du bien préempté à M. A ;
2°) de rejeter la demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Melun ;
3°) de mettre à la charge de M. A une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, notamment son article 39 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mai 2012 :
- le rapport de M. Bergeret, rapporteur,
- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,
- les observations de Me de Maistre pour la COMMUNE DE NOGENT-SUR-MARNE et celles de Me Mathieu pour M. A,
- et connaissance prise des notes en délibéré, enregistrées le 4 juin 2012, présentée pour M. A, par Me Vos, et présentée le 11 juin 2012, pour la COMMUNE DE NOGENT SUR MARNE, par Me Lecomte ;
Considérant que M. B, propriétaire à Nogent-sur-Marne d'un terrain partiellement bâti de 4 ares 7 centiares, cadastré G 81, abritant un petit immeuble d'habitation et huit garages, en a promis la vente à M. A par acte notarié en date du 10 mars 2009, pour le prix de 170 000 euros ; qu'au vu de la déclaration d'intention d'aliéner reçue en mairie le 17 mars 2009, le maire de Nogent-sur-Marne, par décision en date du 12 mai 2009, a préempté ce bien au prix indiqué pour le compte de la commune ; que, par jugement en date du 18 mai 2011, le Tribunal administratif de Melun, sur la demande de M. A, a annulé cet arrêté et a enjoint à la commune de proposer la rétrocession du bien préempté à l'acquéreur évincé ; que la COMMUNE DE NOGENT-SUR-MARNE relève appel de ce jugement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions et opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 (...) " ; qu'au nombre des actions ou opérations mentionnées à l'article
L. 300-1 figurent celles qui ont pour objet de mettre en oeuvre une politique de l'habitat ; qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas du même article L. 210-1, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : " Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) / Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat ou, en l'absence de programme local de l'habitat, lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de logements locatifs sociaux, la décision de préemption peut, sauf lorsqu'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L. 211-4, se référer aux dispositions de cette délibération (...) " ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées qu'une commune peut motiver sa décision de préemption soit en mentionnant la nature du projet pour lequel le droit de préemption est exercé, soit, lorsqu'elle a adopté une délibération relative à la mise en oeuvre d'un programme local de l'habitat, par référence aux dispositions de ladite délibération ; que dans ce dernier cas, la réalité du projet pour lequel a été décidée la préemption doit être regardée comme établie dès lors que le bien préempté est de nature à permettre la réalisation des objectifs fixés par ce programme local de l'habitat ;
Considérant, en l'espèce, que la décision de préemption litigieuse vise la délibération en date du 17 juin 2002 par laquelle la communauté d'agglomération dont elle est membre a adopté un programme local de l'habitat prévoyant notamment la réalisation de logements sociaux avec l'objectif de parvenir, à terme, au respect du seuil de 20 % posé par l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation, et la délibération du conseil municipal de Nogent-sur-Marne du 15 décembre 2008 approuvant le contrat de mixité sociale ; qu'elle indique qu'elle a pour objet de " réaliser l'objet même du contrat de mixité sociale à savoir, poursuivre la construction de nouveaux logements et constituer les réserves foncières correspondantes tout en cherchant à mobiliser le foncier mutable même sur des biens immobiliers de dimension plus réduite, cette opération ayant notamment pour but de favoriser la réalisation de logements sociaux " ; que le contrat de mixité sociale auquel il est ainsi fait référence, qui a été signé le 20 février 2009 entre la commune et l'Etat, définit des objectifs chiffrés à atteindre sur la période 2008/2010 en matière de logements sociaux, en conformité avec l'objectif précité posé par le programme local de l'habitat ; qu'il ressort suffisamment des pièces du dossier que le bien préempté était de nature à permettre la réalisation des objectifs de la commune en matière de logements sociaux, ainsi fixés tant par le programme local de l'habitat de la communauté d'agglomération que par le contrat de mixité sociale ; qu'il suit de là que c'est à tort que le Tribunal administratif de Melun a annulé la décision de préemption du 12 mai 2009 au motif qu'il n'était pas établi que le droit de préemption avait été exercé au vu d'un projet réel relevant d'une action ou opération répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ;
Considérant toutefois qu'il incombe à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A, de même que le moyen d'ordre public porté à la connaissance des parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à l'espèce, issue de l'article 39 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 " de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion " : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / Pendant la durée d'application d'un arrêté préfectoral pris sur le fondement de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, le droit de préemption est exercé par le représentant de l'Etat dans le département lorsque l'aliénation porte sur un terrain, bâti ou non bâti, affecté au logement ou destiné à être affecté à une opération ayant fait l'objet de la convention prévue à l'article L. 302-9-1 précité. Le représentant de l'Etat peut déléguer ce droit à un établissement public foncier créé en application de l'article L. 321-1 du présent code, à une société d'économie mixte ou à un des organismes d'habitations à loyer modéré prévus par l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation. Les biens acquis par exercice du droit de préemption en application du présent alinéa doivent être utilisés en vue de la réalisation d'opérations d'aménagement ou de construction permettant la réalisation des objectifs fixés dans le programme local de l'habitat ou déterminés en application du premier alinéa de l'article L. 302-8 du même code. / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) " ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation : " Lorsque, dans les communes soumises au prélèvement défini à l'article L. 302-7, au terme de la période triennale échue, les engagements figurant dans le programme local de l'habitat n'ont pas été tenus (...) le préfet informe le maire de la commune de son intention d'engager la procédure de constat de carence. Il lui précise les faits qui motivent l'engagement de la procédure et l'invite à présenter ses observations dans un délai au plus de deux mois. / En tenant compte de l'importance de l'écart entre les objectifs et les réalisations constatées au cours de la période triennale échue, du respect de l'obligation, visée à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 302-8, de mettre en chantier, pour chaque période triennale, au moins 30 % de logements locatifs sociaux rapportés au nombre total de logements commencés, des difficultés rencontrées le cas échéant par la commune et des projets de logements sociaux en cours de réalisation, le préfet peut, par un arrêté motivé pris après avis du comité régional de l'habitat, prononcer la carence de la commune. Par le même arrêté, il fixe, pour une durée maximale de trois ans à compter du 1er janvier de l'année suivant sa signature, la majoration du prélèvement défini à l'article L. 302-7. Le taux de la majoration est égal au plus au rapport entre le nombre des logements sociaux non réalisés et l'objectif total de logements fixé dans le programme local de l'habitat ou déterminé par application du dernier alinéa de l'article L. 302-8. Le prélèvement majoré ne peut excéder 5 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune figurant dans le compte administratif établi au titre du pénultième exercice. / L'arrêté préfectoral peut faire l'objet d'un recours de pleine juridiction. / Lorsqu'il a constaté la carence d'une commune en application du présent article, le préfet peut conclure une convention avec un organisme en vue de la construction ou l'acquisition des logements sociaux nécessaires à la réalisation des objectifs fixés dans le programme local de l'habitat ou déterminés en application du premier alinéa de l'article L. 302-8. / La commune contribue au financement de l'opération pour un montant égal à la subvention foncière versée par l'Etat dans le cadre de la convention, sans que cette contribution puisse excéder la limite de 13 000 euros par logement construit ou acquis en Ile-de-France et 5 000 euros par logement sur le reste du territoire " ;
Considérant que les dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, issues de l'article 39 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, qui prescrivent que le préfet est substitué à la commune pour l'exercice du droit de préemption urbain portant sur les opérations qu'elles définissent, sont entrées en vigueur au 28 mars 2009, lendemain de la publication de cette loi au Journal officiel ; qu'elles ne prévoient aucune mesure d'application et se sont appliquées immédiatement, en l'absence d'impossibilité manifeste, y compris dans les cas où un arrêté de carence était antérieurement intervenu ;
Considérant que par arrêté en date du 16 septembre 2008, le préfet du Val-de-Marne a constaté la carence de la COMMUNE DE NOGENT-SUR-MARNE en application des dispositions précitées de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, et a appliqué une majoration de 68 % sur le prélèvement par logement manquant visé à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation, pour une période de trois ans à compter du 1er janvier 2009 ; qu'en application des dispositions précitées du second alinéa de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, le droit de préemption urbain de la commune était dès lors transféré au préfet pour l'opération en cause, consistant à préempter une unité foncière bâtie affectée au logement, en vue de la réalisation d'une opération d'aménagement permettant la réalisation des objectifs fixés dans le programme local de l'habitat ; que dès lors, la décision du 12 mai 2009 par laquelle le maire de Nogent-sur-Marne a exercé le droit de préemption urbain pour le compte de la commune est entachée d'incompétence ;
Considérant qu'il y a lieu de préciser, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'aucun des moyens présentés par M. A à l'encontre de la décision attaquée n'apparaît de nature à l'entacher d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE de NOGENT-SUR-MARNE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a annulé la décision du 12 mai 2009 portant préemption ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la COMMUNE DE NOGENT-SUR-MARNE doivent dès lors être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de celle-ci une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE NOGENT-SUR-MARNE est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE DE NOGENT-SUR-MARNE versera une somme de 2 000 euros à M. A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 11PA03557