La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2011 | FRANCE | N°11NC00321

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 29 septembre 2011, 11NC00321


Vu la requête, enregistrée le 9 mai 2008, présentée pour la SARL LAURENTI, ayant son siège social 5 rue de la Contrescarpe aux Riceys (10340), représentée pas son gérant, par Me Honnet, avocat ; la SARL LAURENTI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502245 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 juillet 2005 du préfet de l'Aube l'excluant du bénéfice des aides compensatoires aux surfaces cultivées au titre des années 1996 ainsi que de la décision du direc

teur départemental de l'agriculture de l'Aube en date du 29 août 2005 reje...

Vu la requête, enregistrée le 9 mai 2008, présentée pour la SARL LAURENTI, ayant son siège social 5 rue de la Contrescarpe aux Riceys (10340), représentée pas son gérant, par Me Honnet, avocat ; la SARL LAURENTI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502245 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 juillet 2005 du préfet de l'Aube l'excluant du bénéfice des aides compensatoires aux surfaces cultivées au titre des années 1996 ainsi que de la décision du directeur départemental de l'agriculture de l'Aube en date du 29 août 2005 rejetant son recours ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance et d'annuler la décision du 7 juillet 2005 du préfet de l'Aube l'excluant du bénéfice des aides compensatoires aux surfaces cultivées au titre des années 1996 et la décision du directeur départemental de l'agriculture de l'Aube en date du 29 août 2005 rejetant son recours ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le directeur départemental de l'agriculture n'était pas compétent pour signer la décision de rejet du recours gracieux ;

- les contrôles sur place et la procédure suivie n'ont pas respecté le principe du contradictoire ;

- la vérification qu'elle a fait effectuer par les services de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricole de l'Aube remet en cause les résultats du contrôle de l'Office national interprofessionnel des céréales ;

Vu l'arrêt de la Cour n° 08NC00668 du 7 décembre 2009 ;

Vu la décision du Conseil d'Etat n° 336258 du 11 février 2011 annulant l'arrêt du 7 décembre 2009 et renvoyant l'affaire à la Cour ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 25 avril 2011, complété par les mémoires enregistrés le 8 septembre 2011, présenté par la SARL LAURENTI, et tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens que précédemment ; la SARL LAURENTI demande en outre que l'administration soit condamnée à lui verser les aides compensatoires dont elle a été illégalement exclue et à ce qu'elle soit invitée, pour ce faire, à se rapprocher de l'administration afin de liquider l'aide litigieuse ;

Vu, enregistré le 24 août 2011, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire tendant au rejet de la requête ;

Vu le moyen d'ordre public, communiqué aux parties le 6 septembre 2011, tiré de ce que le greffe de la Cour ayant, à la suite de la décision du Conseil d'Etat du 11 février 2011, invité les parties, par une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 28 mars 2011, à présenter leurs observations dans le délai d'un mois à compter de la réception dudit courrier, les conclusions nouvelles présentées par la SARL LAURENTI dans son mémoire enregistré le 25 avril 2011 au greffe de la Cour sont tardives et donc irrecevables ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil du 30 juin 1992 ;

Vu le règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil du 27 novembre 1992 ;

Vu le règlement (CEE) n° 3887/92 de la Commission du 23 décembre 1992 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 2011 :

- le rapport de M. Luben, président ;

- et les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public ;

Sur la légalité des décisions attaquées, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SARL LAURENTI, qui a repris en 1996 l'exploitation agricole de plusieurs parcelles situées sur le territoire de la commune des Riceys, a saisi le préfet de l'Aube d'une déclaration de surfaces en vue de bénéficier, au titre de l'année 1996, des aides compensatoires prévues par le règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil du 30 juin 1992 instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables ; qu'à la suite de contrôles sur place effectués par des agents de l'Office national interprofessionnel des céréales les 30 juillet et 9 août 1996, le préfet de l'Aube a exclu la société du bénéfice du régime d'aides par une décision du 20 février 1997 ; qu'après l'annulation de cette première décision par un arrêt de la Cour de céans du 2 juin 2004, le préfet de l'Aube a pris le 7 juillet 2005 une nouvelle décision, confirmée sur recours gracieux le 29 août suivant, excluant la SARL LAURENTI du bénéfice des aides compensatoires aux surfaces cultivées au titre de l'année 1996, au motif que le contrôle effectué sur place le 30 juillet 1996 avait fait apparaître des anomalies constitutives de fausse déclaration par négligence grave ; que la Cour de céans, par un arrêt du 7 décembre 2009, a confirmé le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 13 mars 2008 rejetant son recours contre les décisions des 7 juillet et 29 août 2005 ; que, par la décision susvisé du 11 février 2011, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt précité du 7 décembre 2009 et a renvoyé l'affaire devant la Cour ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du règlement n° 1765/92 du 30 juin 1992 : 1. Les producteurs communautaires de cultures arables peuvent revendiquer un paiement compensatoire (...) / 2. (... ) / Le paiement compensatoire est accordé pour la superficie consacrée aux cultures arables ou au gel des terres (...) ; qu'aux termes de l'article 6 du règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil, du 27 novembre 1992, établissant un système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires : 1. Pour être admis au bénéfice d'un ou de plusieurs régimes communautaires soumis aux dispositions du présent règlement, chaque exploitant présente, pour chaque année, une demande d'aides surfaces (...) ; qu'aux termes de l'article 8 du même règlement : 1. L'Etat membre procède à un contrôle administratif des demandes d'aides (...) ; qu'aux termes de l'article 6 du règlement (CEE) n° 3887/92 du 23 décembre 1992 de la Commission, portant modalités d'application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires : (...) / 5. Les contrôles sur place sont effectués d'une manière inopinée et portent sur l'ensemble des parcelles agricoles ou des animaux couverts par une (ou plusieurs) demande(s). Un préavis limité au délai strictement nécessaire, qui en règle générale ne peut dépasser les quarante-huit heures, peut toutefois être donné. (...) / 7. La détermination de la superficie des parcelles agricoles se fait par tout moyen approprié défini par l'autorité compétente (...) ; qu'aux termes du paragraphe 2 de l'article 9 du même règlement : Lorsqu'il est constaté que la superficie déclarée dans une demande d'aides surfaces dépasse la superficie déterminée, le montant de l'aide est calculé sur la base de la superficie effectivement déterminée lors du contrôle. (...) / Au cas où l'excédent constaté est supérieur à 20 % de la superficie déterminée, aucune aide liée à la superficie n'est octroyée. / Toutefois, s'il s'agit d'une fausse déclaration faite délibérément ou par négligence grave : / - l'exploitant en cause est exclu du bénéfice du régime d'aides concerné au titre de l'année civile en cause (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 12 du même règlement : Chaque visite de contrôle doit être consignée dans un rapport qui indique notamment les motifs de la visite, les personnes présentes, le nombre des parcelles visitées, celles qui ont été mesurées, (...). / L'exploitant ou son représentant a la possibilité de signer ce rapport attestant, le cas échéant, au minimum de sa présence lors du contrôle ou en indiquant ses observations y relatives ;

Considérant que la décision que prend l'administration à l'issue du contrôle administratif prévu par le règlement n° 3887/92 revêt le caractère d'une sanction administrative lorsque l'écart constaté entre la déclaration de l'exploitant et le résultat du contrôle a pour effet de priver l'intéressé d'une part de l'aide plus que proportionnelle à cet écart ou de l'exclure pendant une certaine période du bénéfice du régime d'aides concerné ; qu'il en résulte notamment que l'administration doit respecter les droits de la défense et mettre l'intéressé en mesure de faire valoir ses observations sur les résultats du contrôle avant toute sanction ;

Considérant, en premier lieu, que si la SARL LAURENTI a été informée préalablement, par un courrier de l'Office national interprofessionnel des céréales en date du 25 juillet 1996, de la première visite de contrôle sur place qui a eu lieu le 30 juillet 1996, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait été informée de la seconde visite de contrôle sur place qui a eu lieu le 9 août 1996, comme il incombait à l'administration de le faire ; que, par suite, l'exploitant n'a pas pu être présent ou représenté lors dudit second contrôle sur place, dont il ressort des pièces du dossier, et notamment de la lettre en date du 29 août 2005 du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt de l'Aube rejetant le recours gracieux de la SARL requérante, à laquelle étaient jointes, à titre d'éléments probants, douze photographies prise sur les parcelles exploitées par la SARL LAURENTI qui portaient toutes la mention 9 août 1996 comme de la lettre du préfet de l'Aube en date du 27 décembre 2004 adressée à la SARL LAURENTI indiquant que le contrôle réalisé par les services de l'Office national interprofessionnel des céréales en juillet-août 1996 avait fait apparaître un certain nombre d'anomalies, qu'il a servi de fondement à la décision de sanction litigieuse, qui est ainsi entachée d'irrégularité ; que la seule circonstance que M. Laurenti, représentant de la SARL LAURENTI, ait signé le 9 août 1996 les comptes-rendus de contrôle n'établit ni qu'il ait été invité à être présent ou représenté lors dudit contrôle, ni qu'il l'ait effectivement été ; qu'au demeurant M. Laurenti a porté, sur le premier feuillet du compte-rendu de contrôle, la mention suivante: (...) Toutes réserves sont émises également quant à la validité de la procédure car je n'ai pas été informé du second passage des contrôleurs ce qui m'a privé de mon conseil. (...) , sur le 3ème feuillet la mention : Toutes réserves également sur la procédure et, sur les 4ème et 5ème feuillets, la mention : Toutes réserves également sur la procédure de contrôle ;

Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la SARL LAURENTI ait été mise à même, préalablement à la décision de sanction litigieuse, d'avoir communication de l'intégralité de son dossier afin de faire valoir, le cas échéant, ses observations sur les résultats du contrôle, et notamment du dossier de photographies prises le 9 août 1996, dont la SARL LAURENTI soutient n'avoir eu connaissance que lors de sa visite le 28 juillet 2005 à la direction départementale de l'agriculture et de la forêt de l'Aube et qui ne lui a été communiqué qu'en pièce jointe de la lettre du 29 août 2005 du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt de l'Aube rejetant son recours gracieux ; que la circonstance que, par une lettre en date du 27 décembre 2004, le préfet de l'Aube a indiqué à la SARL LAURENTI que le contrôle réalisé par les services de l'Office national interprofessionnel des céréales en juillet-août 1996 avait fait apparaître un certain nombre d'anomalies qu'il rappelle, pour chacun des douze îlots concernés, que toutes ces anomalies étaient susceptibles d'entraîner des pénalités et l'a invitée à lui faire parvenir toute observation pouvant justifier ces constats d'anomalies avant le 10 janvier 2005, ne saurait avoir pour effet de couvrir le vice de procédure dont est entachée la décision attaquée et qui résulte du défaut de communication de l'intégralité des pièces du dossier préalablement à l'édiction de la sanction contestée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la SARL LAURENTI est fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 13 mars 2008, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 juillet 2005 du préfet de l'Aube l'excluant du bénéfice des aides compensatoires aux surfaces cultivées au titre des années 1996 et de la décision du directeur départemental de l'agriculture de l'Aube en date du 29 août 2005 rejetant son recours gracieux ;

Sur les conclusions tendant à ce que l'administration soit condamnée à lui verser les aides compensatoires dont elle a été illégalement exclue et à ce que, pour ce faire, la société requérante soit invitée à se rapprocher de l'administration afin de liquider l'aide litigieuse :

Considérant qu'après communication aux parties de la décision du Conseil d'Etat du 11 février 2011, le greffe de la Cour a invité les parties, par une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 28 mars 2011, à présenter leurs observations dans le délai d'un mois à compter de la réception dudit courrier ; que, par suite, les conclusions nouvelles tendant à ce que l'administration soit condamnée à lui verser les aides compensatoires dont elle a été illégalement exclue et à ce que, pour ce faire, la société requérante soit invitée à se rapprocher de l'administration afin de liquider l'aide litigieuse, présentées par la SARL LAURENTI dans son mémoire enregistré le 25 avril 2011 au greffe de la Cour, soit après l'expiration du délai d'un mois susmentionné, sont tardives et donc irrecevables ; qu'au surplus, à supposer que la SARL LAURENTI ait entendu présenter des conclusions indemnitaires, elle ne peut se prévaloir d'une décision préalable ayant lié le contentieux ; que, par suite, les conclusions susvisées doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 13 mars 2008, la décision du 7 juillet 2005 du préfet de l'Aube et la décision du 29 août 2005 du directeur départemental de l'agriculture de l'Aube rejetant le recours gracieux sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la SARL LAURENTI est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL LAURENTI et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

''

''

''

''

2

11NC00321


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC00321
Date de la décision : 29/09/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-06 Agriculture, chasse et pêche. Exploitations agricoles. Aides communautaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : BLANC ; BLANC ; HONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-09-29;11nc00321 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award