Vu la requête, enregistrée le 9 juin 2011, présentée pour M. F... D..., demeurant..., par Me C...-E..., de la Selarl cabinet d'avocat Valette-E... ;
M. D... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0905459-1001556 du 8 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier :
- a décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 27 novembre 2009 par laquelle le conseil municipal de Saint-Brès a annulé sa précédente délibération du 15 mai 2008 approuvant l'échange d'une parcelle lui appartenant avec une partie de la parcelle cadastrée section A n°381 appartenant à la commune ;
- a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 4 mars 2010 ainsi que de la délibération rectificative pour erreur matérielle du même jour par lesquelles le conseil municipal de Saint-Brès a annulé sa précédente délibération du 27 novembre 2009 et abrogé celle du 15 mai 2008 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les deux délibérations du 4 mars 2010 et la délibération du 27 novembre 2009 ;
3°) d'enjoindre au maire de Saint-Brès d'exécuter l'ensemble des décisions adoptées par la délibération du 15 mai 2008, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Brès le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
......................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2013 :
- le rapport de M. Chanon, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;
- et les observations de Me A...pour M. D...et de Me B...pour la commune de Saint-Brès ;
Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 21 mars 2013, présentée pour la commune de Saint-Brès, par MeB... ;
1. Considérant que, par délibération du 15 mai 2008 faisant suite à une proposition d'échange foncier faite par M. D... le 14 avril 2008, le conseil municipal de Saint-Brès a approuvé l'échange d'une parcelle cadastrée section A n° 1447 d'une contenance de 898 m2 appartenant à M. D...avec une partie égale de la parcelle cadastrée section A n° 381 appartenant à la commune, décidé que les frais de géomètre et de notaire seraient à la charge de la commune et que celle-ci réaliserait un fossé pluvial délimité d'est en ouest au-dessus de la parcelle cédée et, enfin, autorisé le maire " à signer tous les documents relatifs à ces décisions " ; que, par délibération du 27 novembre 2009, le conseil municipal a " annulé " la délibération du 15 mai 2008 ; que, par une délibération du 4 mars 2010 rectifiée par une autre délibération du même jour, le conseil municipal a retiré la délibération du 27 novembre 2009 et abrogé la délibération du 15 mai 2008 ; que M. D...relève appel du jugement du 8 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier, d'une part, a décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 27 novembre 2009 et, d'autre part, a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux délibérations du 4 mars 2010 ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune :
2. Considérant que M. D...ne justifie pas d'un d'intérêt pour agir à l'encontre de la délibération du 4 mars 2010 en tant que celle-ci retire la délibération du 27 novembre 2009 dès lors que cette décision a pour effet de remettre en vigueur la délibération du 15 mai 2008 dont il revendique la mise en oeuvre ; que, par suite, les conclusions de M. D...doivent, dans cette mesure, être rejetées comme irrecevables ;
Sur la légalité de la délibération du 27 novembre 2009 et du surplus de la délibération modifiée du 4 mars 2010 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : (...) 7° De passer (...) les actes de vente, échange, partage, acceptation de dons ou legs, acquisition, transaction, lorsque ces actes ont été autorisés conformément aux dispositions du présent code " ; qu'aux termes de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d'une personne publique (...) est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l'usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public " ; que l'article L. 3111-1 de ce code dispose : " Les biens des personnes publiques (...) qui relèvent du domaine public, sont inaliénables et imprescriptibles " ;
4. Considérant que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer ou abroger une décision expresse individuelle créatrice de droits que dans le délai de quatre mois suivant l'intervention de cette décision et si elle est illégale ;
5. Considérant que la délibération par laquelle un conseil municipal décide d'échanger, sans aucune condition, un terrain à un particulier crée des droits au profit de ce dernier ; que la délibération du 15 mai 2008 n'est soumise à aucune condition et comporte les mentions nécessaires pour la faire regarder comme une décision du conseil municipal, ce qui n'est d'ailleurs pas débattu dans l'instance ; que cette délibération porte sur un terrain, d'une superficie de 898 m2, ainsi qu'il a déjà été dit, faisant partie de la parcelle cadastrée section A n° 381 d'une superficie totale de 9 901 m2, dont il n'est pas contesté en défense qu'elle était intégrée au domaine privé de la commune de Saint-Brès à l'époque où l'échange a été envisagé pour la première fois entre les parties, soit à compter de l'année 1985 ;
6. Considérant que M. D...soutient que le terrain en cause fait partie du domaine privé communal tandis que la commune fait valoir qu'il relevait, tant à la date du 15 mai 2008 qu'à celle des délibérations en litige, du domaine public, en vertu des dispositions de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, et ne pouvait donc être cédé sans méconnaître les principes d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine public, rappelés par les dispositions de l'article L. 3111-1 du même code, la délibération du 15 mai 2008, qui n'a ainsi créé aucun droit au profit de M.D..., pouvant dès lors être retirée ou abrogée à tout moment ;
7. Considérant que la commune ne peut utilement invoquer l'existence d'un parc public de stationnement dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que celui-ci est implanté sur la parcelle cadastrée A n° 382, non concernée en l'espèce ; qu'il ressort également des pièces du dossier que, sur la parcelle cadastrée A n° 381, un terrain multisports avec gazon synthétique a été aménagé, à la fin de l'année 2007 ou au début de l'année 2008, ainsi qu'un " skatepark " et un parcours de santé ; que l'emprise de ces équipements affectés à l'usage direct du public, et qui a fait l'objet d'aménagements indispensables à l'exercice du service public de la jeunesse et du sport, appartient au domaine public communal ; que, toutefois, il résulte tant des photographies produites que d'un constat d'huissier du 10 juin 2011 que ces installations ne sont pas situées sur le terrain visé par la délibération du 15 mai 2008, dont elles sont séparées par une barrière en bois ; que, dans ces conditions, ce terrain, qui n'est pas affecté à l'usage direct du public et ne fait l'objet d'aucun aménagement, appartient au domaine privé de la commune de Saint-Brès, sans que cette dernière puisse se prévaloir de ce que l'intégralité de la parcelle A n° 381 relève de son domaine public ; que, par suite et en tout état de cause, le conseil municipal de Saint-Brès ne pouvait sans méconnaître les droits acquis résultant de la délibération du 15 mai 2008 retirer ou abroger celle-ci au-delà du délai de quatre mois, et au demeurant sans se fonder sur les principes précédemment rappelés régissant la domanialité publique ; que, dès lors, la délibération du 27 novembre 2009 et le surplus de la délibération modifiée du 4 mars 2010 sont entachés d'illégalité ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé un non-lieu à statuer sur la délibération du 27 novembre 2009 et rejeté ses demandes dirigées contre les délibérations du 4 mars 2010 ; que, par suite, le jugement, la délibération du 27 novembre 2009 et la délibération modifiée du 4 mars 2010, en tant que cette dernière porte abrogation de la délibération du 15 mai 2008, doivent être annulés ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;
10. Considérant que l'exécution du présent arrêt, qui ne se prononce pas sur la légalité de la délibération du 15 mai 2008 mais seulement sur celle de son retrait ou de son abrogation, n'implique pas nécessairement que le maire de Saint-Brès procède à l'exécution de " l'ensemble des décisions adoptées " par la délibération du 15 mai 2008 ; que, par suite, la demande d'injonction sous astreinte correspondante doit être rejetée ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Saint-Brès, partie perdante dans la présente instance, le versement à M. D...de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche les conclusions de la commune formulées sur le même fondement doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 8 avril 2011, la délibération du 27 novembre 2009 et la délibération modifiée du 4 mars 2010, en tant que cette dernière porte abrogation de la délibération du 15 mai 2008, sont annulés.
Article 2 : La commune de Saint-Brès versera à M. D...la somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D...et à la commune de Saint-Brès.
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N° 11MA02229
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