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07/05/2013 | FRANCE | N°11LY00842

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 07 mai 2013, 11LY00842


Vu le recours, enregistré le 31 mars 2011 au greffe de la Cour, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 0706062 du 1er février 2011 par lesquels le Tribunal administratif de Lyon a, d'une part, déchargé la SARL Gamboni Restauration des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de ses exercices clos les 31 décembre 2000, 31 décembre 2001 et 31 décembre 2002 e

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Vu le recours, enregistré le 31 mars 2011 au greffe de la Cour, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 0706062 du 1er février 2011 par lesquels le Tribunal administratif de Lyon a, d'une part, déchargé la SARL Gamboni Restauration des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de ses exercices clos les 31 décembre 2000, 31 décembre 2001 et 31 décembre 2002 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 2000 au 31 août 2003 et, d'autre part, mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de remettre à la charge de la SARL Gamboni Restauration les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés des années 2000, 2001 et 2002 ainsi que les pénalités y afférentes et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à la période du 1er octobre 2000 au 31 août 2003 ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal administratif de Lyon a considéré que les impositions correspondant à l'année 2000 sont entachées d'un vice de procédure au motif que les constatations faites par les agents des impôts au cours des mois de février et avril 2003 constituent des contrôles inopinés qui n'ont pas été accompagnés de la remise d'un avis de vérification, conformément aux dispositions de l'article L. 47 du livre de procédures fiscales, car les éléments recueillis étaient extrêmement sommaires et n'ont pas servi à asseoir les rectifications opérées ;

- c'est à tort que le Tribunal administratif de Lyon a considéré que le fait de ne pas conserver des données antérieures à l'avis de vérification n'est pas constitutif d'une opposition à contrôle fiscal au sens de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales et que l'administration n'était, dès lors, pas en droit de procéder à une évaluation d'office des recettes au titre des années 2001 et 2002 ; en ne conservant pas les données informatiques permettant de déceler de manière exhaustive les modifications de montant de ses recettes auxquelles elle a procédé, la société a empêché l'administration d'effectuer son contrôle ; la non-conservation des données comptables résulte le plus souvent de faits survenus avant l'envoi d'un avis de vérification ;

- la procédure d'imposition est régulière ; l'administration était en droit, après avoir prononcé le dégrèvement des impositions, dans la mesure où l'établissement de celles-ci aurait dû être précédé du double recours hiérarchique demandé par le contribuable, de mettre à nouveau ces impositions en recouvrement après en avoir informé préalablement le contribuable ; l'absence de rencontre avec l'interlocutrice interrégionale n'est pas imputable à l'administration ; le défaut de débat oral et contradictoire allégué manque en fait ; l'absence de distribution des avis de vérification par le service des postes est sans incidence car ces avis de vérification ont été remis en mains propres au dirigeant de la société avant le début des opérations de vérification sur place ; la demande du service tendant à ce que le contribuable formalise par écrit sa demande de déplacer le lieu du contrôle au cabinet de son avocat est conforme à la jurisprudence ; le moyen tiré de ce que le compte rendu établi par le supérieur hiérarchique du vérificateur serait excessivement succinct est inopérant dès lors que la charte du contribuable n'impose pas de prise de position écrite sur la demande du contribuable ;

- le rejet de la comptabilité est fondé car l'administration a constaté que la société utilisait un logiciel de caisse permettant de manipuler les justificatifs de recettes et plus particulièrement de faire disparaître certains éléments figurant sur les tickets de caisse ;

- les critiques de la société sur la reconstitution de recettes ne sont pas fondées ;

- c'est à bon droit que les rehaussements litigieux ont été assortis, au titre de l'année 2000, d'une pénalité de 80 % pour manoeuvres frauduleuses, au titre de 2001 et 2002, d'une pénalité de 150 % pour opposition à contrôle fiscal et, au titre de ces trois années, de l'amende de 100 % prévue par l'ancien article 1763 A du code général des impôts, la société requérante n'ayant pas révélé les bénéficiaires des minorations de recettes, lesquelles doivent être regardées comme des revenus distribués ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2011, présenté pour la SARL Gamboni Restauration ; elle conclut, d'une part, à la décharge des impositions supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2000, 2001 et 2002 et des pénalités y afférentes pour un montant de 2 169 355 euros et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités y afférentes, pour un montant de 642 227 euros, d'autre part, à la condamnation de l'Etat au paiement des dépens et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société soutient que :

Sur la régularité de la procédure :

- la procédure d'imposition est irrégulière car l'administration a commencé ses opérations de contrôle avant la remise de l'avis de vérification ; elle a ainsi procédé à des investigations sur place à quatre reprises qui ont permis de relever des prix pratiqués et d'estimer la fréquentation et le prix moyen d'un repas ; ces constatations ont servi à obtenir du juge judiciaire l'autorisation de procéder à une visite domiciliaire dont les résultats ont servi à écarter sa comptabilité ; l'imposition repose donc indirectement sur les constatations irrégulièrement effectuées sur place par les agents des impôts ;

- la procédure d'imposition de l'année 2000 est irrégulière car elle a été privée de débat oral et contradictoire ; l'administration n'a pas tenu compte de la demande de son conseil en date du 9 décembre 2003 de poursuivre la vérification de comptabilité à son cabinet et non dans les locaux de la société ; c'est à tort qu'elle lui a demandé de confirmer cette demande ; elle a tenté de poursuivre la vérification sur place alors que son gérant était absent et ne s'est jamais présentée au cabinet de son conseil, où se trouvaient ses documents comptables, comme cela lui avait été demandé ;

- la procédure d'évaluation d'office retenue pour 2001 et 2002 est irrégulière ; l'administration n'est pas fondée à considérer que, faute d'avoir conservé les données informatisées de ses caisses enregistreuses automatisées, elle se serait ainsi opposée au contrôle fiscal en l'empêchant d'effectuer des traitements informatiques et qu'ainsi elle était en droit d'avoir recours à la procédure d'évaluation d'office, en application des dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales ; elle conteste avoir eu les moyens matériels d'établir une comptabilité informatisée, avoir été dotée d'une comptabilité informatisée au sens de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales et s'être opposée à un contrôle ; en outre, le seul défaut de conservation des données informatiques ne peut établir à lui seul une opposition à contrôle fiscal, alors qu'elle a présenté une comptabilité papier régulière et qu'il n'est pas démontré qu'elle a volontairement soustrait des données pour empêcher le contrôle ;

- la seconde proposition de rectification est intervenue sans que l'administration l'ait informée de sa volonté de rétablir l'imposition ;

- l'administration n'a pas fait droit à sa demande du 6 décembre 2005 tendant à bénéficier du double recours hiérarchique sur le fondement de la charte des droits et obligations du contribuable, de telle sorte que les dispositions de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales ont été méconnues ;

Sur le bien-fondé des impositions :

- le rejet de sa comptabilité n'est pas fondé car l'administration n'établit ni qu'elle n'aurait pas conservé des données informatisées, ni que son système de caisse aurait présenté une quelconque permissivité, ni que sa comptabilité papier aurait été irrégulière ;

- les impositions mises à sa charge ne sont pas fondées, pour les motifs invoqués dans ses pièces 2 et 4 ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 31 janvier 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances ; il persiste dans ses précédentes conclusions, par les mêmes moyens et soutient, en outre, que :

- il n'y a pas eu de contrôle inopiné en ce qui concerne l'année 2000 et, en tout état de cause, les éléments recueillis n'ont pas été utilisés pour opérer les rectifications litigieuses, mais pour obtenir une ordonnance de visite et de saisie dont le caractère distinct de la procédure de vérification a été clairement reconnu par la jurisprudence ;

- la procédure d'opposition à contrôle fiscal mise en oeuvre au titre des années 2001 et 2002 est fondée ; le système de caisses utilisé par la société présentait bien le caractère d'un dispositif de traitement informatisé de sa comptabilité ; il était relié, sur la majeure partie de la période vérifiée, à un micro PC utilisé pour la gestion des caisses par recours à un logiciel KSD permettant l'exploitation et l'archivage des données ;

Vu les pièces, enregistrées le 7 février 2013, présentées par le ministre de l'économie et des finances en réponse à la demande de la Cour ;

Vu l'ordonnance en date du 8 février 2013 fixant la clôture de l'instruction au 22 février 2013 à 16H30, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense complémentaire, enregistré le 20 février 2013, présenté pour la SARL Gamboni Restauration ; elle persiste dans ses précédentes conclusions, par les mêmes moyens et soutient, en outre, que :

- la circonstance que, pour les années 2001 et 2002, les impositions ont été évaluées d'office ne rend pas inopérant le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales pour ces années ;

- il n'est pas établi qu'elle tenait une comptabilité informatisée et n'était pas ainsi tenue de conserver des données informatisées ; il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir exploité toutes les potentialités de son matériel ;

- le rejet de sa comptabilité n'est pas fondé car les écritures annulées apparaissent sur ses bandes de contrôle et elle fournit une partie des documents qui avaient été portés manquants, de sorte que quelques erreurs vénielles et normales ne sauraient justifier un rejet total de sa comptabilité ;

- la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a émis un avis défavorable au rejet de sa comptabilité de l'année 2000 au motif qu'il n'y a pas de motif suffisant pour ôter à la comptabilité son caractère probant ;

Vu l'ordonnance en date du 21 février 2013 portant report de la clôture de l'instruction du 22 février 2013 au 8 mars 2013 à 16H30 heures, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en duplique, enregistré le 8 mars 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances ; il persiste dans ses précédentes conclusions, par les mêmes moyens, et soutient, en outre, que :

- le moyen tiré d'une irrégularité de procédure est inopérant en cas d'opposition à contrôle fiscal ;

- la comptabilité n'est pas probante car la permissivité du système de caisse a été démontrée lors de la visite domiciliaire du 13 mai 2003 ; le caractère probant de la comptabilité papier a été à juste titre écarté compte tenu des manquements constatés dans la conservation des pièces justificatives de recettes, des anomalies relevées dans les justificatifs de charges et de recettes et dans l'inventaire du stock de vin au 1er janvier 2002 ;

Vu l'ordonnance en date du 11 mars 2013 portant report de la clôture de l'instruction du 8 mars 2013 au 26 mars 2013 à 16H30 heures, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 avril 2013 :

- le rapport de Mme Mear, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

1. Considérant que la SARL Gamboni Restauration a absorbé sa filiale la SA Restauration René Gamboni le 23 décembre 2002, avec effet rétroactif au 1er janvier 2002 ; qu'elle est ainsi devenue exploitante depuis 2002 d'un restaurant à l'enseigne de " La maison Gamboni " sis à Lyon ; qu'à la suite de vérifications de comptabilité dont ont fait l'objet ces deux sociétés, la SARL Gamboni Restauration a été supplémentairement imposée à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sur l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos les 31 décembre 2000, 2001 et 2002 et à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er octobre 2000 au 31 août 2003 ; que, par jugement n° 0706062 du 1er février 2011, le Tribunal administratif de Lyon a déchargé la SARL Gamboni Restauration de ces rappels d'impôts pour vices de procédure ; que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat relève appel de ce jugement ;

Sur l'année 2000 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales : " I. Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou de la taxe sur la valeur ajoutée en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des impôts, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus et procéder à leur saisie, quel qu'en soit leur support. / Chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 47 du même livre : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / L'avis envoyé ou remis au contribuable avant l'engagement d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle peut comporter une demande des relevés de compte. / En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification de comptabilité est remis au début des opérations de constatations matérielles. L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'attestation établie le 28 avril 2003 par trois agents des impôts appartenant à la brigade d'intervention interrégionale de Lyon, qu'à quatre reprises, ces agents ont, au cours des mois de février et avril 2004, procédé à des constatations dans le restaurant " La maison Gamboni " pour déterminer le nombre moyen des couverts et le ticket moyen d'un repas servis par ce restaurant afin d'estimer son chiffre d'affaires annuel des ventes à consommer sur place ; qu'il ressort de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Lyon en date du 12 mai 2003 que les constatations recueillies n'ont été utilisées que pour obtenir du juge judiciaire l'autorisation de procéder à des visites domiciliaires et saisies nécessaires à la recherche d'informations sur une fraude fiscale présumée, conformément aux dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, ces constatations n'ont pas été directement utilisées pour établir les impositions contestées ; que, par suite, le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour prononcer la décharge des impositions correspondant à l'année 2000, le Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur le motif que ces impositions sont entachées d'un vice de procédure dès lors que les constatations faites par les agents des impôts constituent des contrôles inopinés qui n'ont pas été accompagnés de la remise d'un avis de vérification, conformément aux dispositions de l'article L. 47 du livre de procédures fiscales ;

4. Considérant, qu'il appartient toutefois à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la SARL Gamboni Restauration ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :

5. Considérant qu'il résulte de la notification de redressements du 16 décembre 2003 que, pour fonder le rejet de la comptabilité de la SARL Gamboni Restauration, l'administration a relevé cinq tickets RAZ manquants en janvier et février 2000, des anomalies dans deux autres tickets RAZ de ces mêmes mois, la non-comptabilisation d'une note obtenue par le service dans le cadre de la vérification de la SARL Loc'Espace Double mixte, le fait que de janvier à août 2000 les recettes journalières ont été inscrites en comptabilité pour un montant global mensuel dans le journal de caisse, l'existence d'une différence de chiffre d'affaires entre le chiffre d'affaires figurant sur une pièce saisie relative aux années 2000 à 2003 et le chiffre d'affaires des huit premières semaines de 2000 et le fait que les bandes de contrôle présentées à l'appui des tickets RAZ ne présentent pas de signes indiquant leur intégrité et intégralité ; qu'elle a également indiqué à la société qu'elle s'exposait, en application de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, à une évaluation d'office de ses bases d'imposition pour opposition à contrôle fiscal dans les conditions prévues à l'article L. 47 A du même livre ; que, toutefois, le nombre d'anomalies ainsi relevées dans les tickets RAZ est très limité et l'administration n'établit pas que le détail des sommes globalement comptabilisées et les chiffres mentionnés dans la note saisie ne figurent pas dans la comptabilité papier produite par la SARL Gamboni Restauration ; que l'administration n'a pas mis en oeuvre, au titre de 2000, une procédure d'évaluation d'office pour opposition à contrôle fiscal dans les conditions prévues à l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales ; que, par ces seuls éléments, l'administration n'établit pas ainsi, comme cela lui incombe, qu'elle était fondée à rejeter la comptabilité de la SARL Gamboni Restauration comme étant irrégulière et non probante ; que le rejet de la comptabilité n'étant pas fondé, l'administration n'était pas en droit de procéder à une reconstitution des recettes de cette société au titre de l'année 2000 ; que, par suite, les impositions résultant de ce rejet de comptabilité et de cette reconstitution de recettes, qui ont été mises à la charge de la SARL Gamboni Restauration au titre de l'année 2000, doivent être déchargées ;

Sur les années 2001 et 2002 :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contrôle porte sur l'ensemble des informations, données et traitements informatiques qui concourent directement ou indirectement à la formation des résultats comptables ou fiscaux et à l'élaboration des déclarations rendues obligatoires par le code général des impôts ainsi que sur la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l'exécution des traitements. " ; qu'aux termes de l'article L. 47 A du même livre : " Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, les agents de l'administration fiscale peuvent effectuer la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable. / Celui-ci peut demander à effectuer lui-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification (...) / Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il met alors à la disposition de l'administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 74 de ce livre : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait de contribuable ou de tiers. / Ces dispositions s'appliquent en cas d'opposition à la mise en oeuvre du contrôle dans les conditions prévues à l'article L. 47 A " ; qu'aux termes de l'article L. 102 B dudit livre : " I (...) lorsque les livres, registres, documents ou pièces mentionnés au premier alinéa sont établis ou reçus sur support informatique, ils doivent être conservés sous cette forme pendant une durée au moins égale au délai prévu au premier alinéa de l'article L. 169 (...) " ;

7. Considérant que le ministre soutient que la SARL Gamboni Restauration a disposé au cours des années 2002 et 2003 d'une comptabilité informatisée et que le fait de ne pas avoir conservé ses données sur support informatique en méconnaissance de l'article L. 102 B du livre des procédures fiscales est constitutif d'une opposition à contrôle fiscal au sens de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales ;

8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de la période litigieuse, la société disposait de plusieurs caisses enregistreuses et d'un micro PC avec un logiciel KSD permettant de centraliser leurs données et d'assurer leur conversion au format ASCII en vue de l'exploitation de ces données et de leur archivage ; que, toutefois, l'administration fiscale n'établit ni que l'ensemble des recettes étaient effectivement centralisées, alors que la SARL Gamboni Restauration soutient que l'une de ses caisses n'était pas reliée aux autres, que les recettes de ses repas d'affaires n'étaient pas enregistrées par lesdites caisses et produit des fiches manuscrites de centralisation de ses données journalières de caisse, ni que la société disposait d'un progiciel de comptabilité utilisé par cette dernière pour l'établissement de ses documents comptables ; que la circonstance que ces caisses permettent l'édition de ticket selon différents critères ne permet pas de pallier l'absence de centralisation des recettes et d'un progiciel de comptabilité nécessaire à l'établissement des documents comptables ; que, dès lors, l'administration n'est fondée ni à soutenir que la SARL Gamboni Restauration disposait au cours des années litigieuses d'une comptabilité informatisée au sens de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, ni, dès lors, à faire valoir qu'en ne présentant pas les supports d'une telle comptabilité elle se serait volontairement opposée au contrôle fiscal, alors que ladite société a produit une comptabilité papier ; que, par suite, en procédant sur le fondement des dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales à l'évaluation d'office des recettes de cette société au titre des années 2001 et 2002, l'administration a entaché d'une irrégularité substantielle la procédure d'imposition ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances n'est pas fondé à se plaindre de ce que Tribunal administratif de Lyon a déchargé la SARL Gamboni Restauration des impositions supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquelles celle-ci a été assujettie au titre des exercices clos en 2000, 2001 et 2002 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 2000 au 31 août 2003, ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur les conclusions tendant au remboursement des dépens :

10. Considérant que la SARL Gamboni Restauration ne fait état d'aucun dépens ; que, dès lors, ses conclusions tendant au remboursement de dépens doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à la SARL Gamboni Restauration au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SARL Gamboni Restauration une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la SARL Gamboni Restauration est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à la SARL Gamboni Restauration.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2013 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 mai 2013.

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N° 11LY00842


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY00842
Date de la décision : 07/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité.

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SCP LAVISSE BOUAMRIRENE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-05-07;11ly00842 ?
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