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25/10/2012 | FRANCE | N°11DA01754

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (quater), 25 octobre 2012, 11DA01754


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 18 novembre 2011, présentée pour la COMMUNE DE LAMORLAYE, représentée par son maire en exercice, par la SCP Uettwiller, Grelon, Gout, Canat et associés, avocat ; la COMMUNE DE LAMORLAYE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903116 du 20 septembre 2011 du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a annulé, à la demande de l'association Cadre de vie et environnement de Lamorlaye (ACVEL), de Mme Halina B et de M. Jean-Michel A, la délibération du 29 mai 2009 de son conseil munic

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 18 novembre 2011, présentée pour la COMMUNE DE LAMORLAYE, représentée par son maire en exercice, par la SCP Uettwiller, Grelon, Gout, Canat et associés, avocat ; la COMMUNE DE LAMORLAYE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903116 du 20 septembre 2011 du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a annulé, à la demande de l'association Cadre de vie et environnement de Lamorlaye (ACVEL), de Mme Halina B et de M. Jean-Michel A, la délibération du 29 mai 2009 de son conseil municipal approuvant le plan de zonage d'assainissement de la commune ;

2°) de rejeter la demande d'annulation présentée devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'ACVEL, de Mme B et de M. A une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hubert Delesalle, premier conseiller,

- les conclusions de M. David Moreau, rapporteur public,

- et les observations de Me Ph. Hansen, avocat de la COMMUNE DE LAMORLAYE ;

Considérant que la COMMUNE DE LAMORLAYE, abritant une population de 9 000 habitants sur environ 15 km², comprend un bourg, doté d'un système d'assainissement collectif, et le secteur boisé du " Domaine du Lys ", regroupant environ 40 % de la population de la commune, non doté d'un assainissement collectif ; que, par une première délibération en date du 22 juin 2007 adoptée après une enquête publique, la commune a approuvé le plan de zonage d'assainissement de son territoire fondé sur un système mixte d'assainissement collectif et non collectif, ce dernier couvrant, en ce qui concerne le secteur du " Domaine du Lys ", 724 de ses 1 442 habitations ; que, toutefois, par une délibération en date du 31 juillet 2008, le conseil municipal de Lamorlaye a retiré cette délibération et décidé l'organisation d'une nouvelle enquête publique relative au zonage d'assainissement, laquelle s'est déroulée du 2 mars au 3 avril 2009 ; qu'à sa suite, par la délibération du 29 mai 2009 en litige, le conseil municipal a approuvé un nouveau plan de zonage d'assainissement fondé sur un système exclusivement collectif couvrant l'ensemble des habitations du secteur du " Domaine du Lys ", portées au chiffre de 1 522 et ayant vocation à s'étendre à 300 habitations situées sur le territoire limitrophe de la commune de Gouvieux outre au golf ; que la COMMUNE DE LAMORLAYE relève appel du jugement du 20 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de l'association Cadre de vie et environnement de Lamorlaye (ACVEL), annulé cette délibération pour le motif tiré de l'irrégularité du dossier soumis à enquête publique ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction alors applicable : " Les communes ou leurs établissements publics de coopération délimitent, après enquête publique : / 1° Les zones d'assainissement collectif où elles sont tenues d'assurer la collecte des eaux usées domestiques et le stockage, l'épuration et le rejet ou la réutilisation de l'ensemble des eaux collectées ; / 2° Les zones relevant de l'assainissement non collectif où elles sont tenues d'assurer le contrôle de ces installations et, si elles le décident, le traitement des matières de vidange et, à la demande des propriétaires, l'entretien et les travaux de réalisation et de réhabilitation des installations d'assainissement non collectif (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 2224-8 de ce code dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération litigieuse : " L'enquête publique préalable à la délimitation des zones mentionnées aux 1° et 2° de l'article L. 2224-10 est conduite par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent, dans les formes prévues par les articles R. 123-6 à R. 123-23 du code de l'environnement " ; qu'aux termes de l'article R. 2224-9 du même code : " Le dossier soumis à l'enquête comprend un projet de délimitation des zones d'assainissement de la commune, faisant apparaître les agglomérations d'assainissement comprises dans le périmètre du zonage, ainsi qu'une notice justifiant le zonage envisagé " ;

Considérant que le dossier soumis à l'enquête publique de 2009 comportait la délibération du 31 juillet 2008, des documents de synthèse pour la modification du plan de zonage, le rapport d'étude du schéma directeur d'assainissement portant sur deux phases établi au cours de l'année 2005 et son actualisation effectuée en 2008 ainsi que " le dossier d'enquête publique relatif au zonage d'assainissement de la commune de Lamorlaye " et diverses annexes ; que ce dernier document comportait une présentation des raisons retenues par la commune pour justifier son choix de zonage valant ainsi " notice " au sens de l'article R. 2224-9 du code général des collectivités territoriales ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier d'enquête publique que la COMMUNE DE LAMORLAYE a justifié le choix d'un système d'assainissement collectif sur l'ensemble du territoire communal en retenant l'existence d'un double impératif ; que, selon elle, d'une part, l'ensemble de son territoire constituait une zone d'agglomération d'assainissement au sens de l'article R. 2224-6 du code général des collectivités territoriales et, d'autre part, l'extension du réseau d'assainissement collectif s'imposait au regard tant d'un critère environnemental lié à la situation du secteur du " Domaine du Lys " par rapport au périmètre éloigné du captage d'eau potable de Bornan-sur-Oise, que d'un critère économique tiré du moindre coût de ce système par rapport au système mixte ; qu'à l'appui de cette position, la commune a fourni les documents et données qu'elle estimait pertinents ; que la seule circonstance que les résultats auxquels elle aboutissait au terme d'une analyse des documents produits étaient discutables, notamment s'agissant du coût des travaux et du prix prévisible de l'eau, et pouvaient être regardés par les opposants au projet comme erronés, ne suffit pas à faire regarder le dossier d'enquête publique, ainsi que sa notice, comme étant incomplets ou comme comportant des informations erronées ou insuffisantes ; que si la commune n'a pas produit les rapports établis en 2006 par M. C et surtout en 2007 par M. D, respectivement hydrogéologue et coordinateur des hydrogéologues agréés, dans le cadre de la première enquête publique, mais s'est bornée à produire celui établi par un autre hydrogéologue, M. E, au mois de décembre 2006, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment du rapport du commissaire enquêteur et des observations figurant au registre d'enquête que, dans les circonstances de l'espèce, l'absence de ces deux rapports, au regard des autres informations présentées, ait été de nature à fausser l'information du public ; que, par suite, la COMMUNE DE LAMORLAYE est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens s'est, pour prononcer l'annulation de sa délibération attaquée, fondé sur l'existence d'erreurs affectant le dossier d'enquête publique et entachant la procédure d'enquête d'irrégularité ;

Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de l'ACVEL ;

Sur l'absence de consultation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-5 du code de l'urbanisme : " Les associations locales d'usagers agréées dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, ainsi que les associations agréées mentionnées à l'article L. 141-1 du code de l'environnement sont consultées, à leur demande, pour l'élaboration des schémas de cohérence territoriale, des schémas de secteur et des plans locaux d'urbanisme. Elles ont accès au projet de schéma ou de plan dans les conditions prévues à l'article 4 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal " ;

Considérant que ces dispositions n'étant pas applicables à l'élaboration des plans de zonage d'assainissement, l'ACVEL ne saurait utilement se prévaloir de leur méconnaissance ;

Sur l'absence d'enquête publique associant la commune de Gouvieux :

Considérant, en premier lieu, que si la COMMUNE DE LAMORLAYE a pris en compte le raccordement de 300 habitations situées sur le territoire de la commune limitrophe de Gouvieux pour élaborer ses hypothèses notamment financières dans le cadre du scénario n° 2, cette seule circonstance ne l'obligeait pas à organiser une enquête publique conjointement avec cette commune ; que la délibération en litige n'a d'ailleurs eu ni pour objet, ni pour effet de déterminer le plan de zonage d'assainissement sur le territoire de la commune de Gouvieux ;

Sur le caractère erroné de l'avis du commissaire enquêteur :

Considérant que la circonstance, à la supposer même établie, que le rapport du commissaire enquêteur aurait comporté des erreurs est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la délibération en litige ;

Sur l'information insuffisante du conseil municipal et l'inexactitude matérielle des faits :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des termes de la délibération en litige, que les conseillers municipaux auraient reçu une information insuffisante ou auraient fondé leur délibération sur des faits matériellement inexacts ; que si l'association estime que les erreurs affectant, selon elle, la régularité de l'enquête publique auraient conduit le conseil municipal à être insuffisamment informé, il résulte de ce qui a été dit que ces erreurs, à les supposer même établies, concernent non pas le contenu du dossier lui-même mais les analyses faites à partir de ces pièces ; que, par suite, son moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur l'existence d'une agglomération d'assainissement et l'erreur manifeste d'appréciation :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 2224-10 du code général des collectivités territoriales : " Les communes dont tout ou partie du territoire est compris dans une agglomération d'assainissement dont les populations et les activités économiques produisent des eaux usées dont la charge brute de pollution organique est supérieure à 120 kg par jour doivent être équipées, pour la partie concernée de leur territoire, d'un système de collecte des eaux usées " ; qu'aux termes de l'article R. 2224-6 du même code au sein de la section " Eau et assainissement " : " Les dispositions de la présente section s'appliquent aux eaux usées mentionnées aux articles L. 2224-8 et L. 2224-10. / Pour l'application de la présente section, on entend par : / - " agglomération d'assainissement " une zone dans laquelle la population et les activités économiques sont suffisamment concentrées pour qu'il soit possible de collecter les eaux usées pour les acheminer vers une station d'épuration ou un point de rejet final ; / - " charge brute de pollution organique " le poids d'oxygène correspondant à la demande biochimique en oxygène sur cinq jours (DBO5) calculé sur la base de la charge journalière moyenne de la semaine au cours de laquelle est produite la plus forte charge de substances polluantes dans l'année ; / - " équivalent habitant (EH) " la charge organique biodégradable ayant une demande biochimique d'oxygène en cinq jours (DBO5) de 60 grammes d'oxygène par jour " ;

Considérant, d'une part, que, si, par un arrêté du 18 janvier 1999 pris sur le fondement des dispositions de l'article 5 du décret n° 94-469 du 3 juin 1994 relatif à la collecte et au traitement des eaux usées mentionnées aux articles L. 372-1-1 et L. 372-3 du code des communes alors en vigueur et non reprises depuis par le code général des collectivités territoriales, le préfet de l'Oise a inclus le territoire de la COMMUNE DE LAMORLAYE dans les agglomérations d'assainissement du département, cet arrêté se bornait à prévoir que les " agglomérations d'assainissement " étaient celles " regroupant l'ensemble ou une partie du territoire des communes dont la liste figure en annexe " ; que cette circonstance n'est donc pas de nature, en tout état de cause, à établir que le secteur du " Domaine du Lys " serait par lui-même constitutif d'une telle agglomération d'assainissement ; que, néanmoins, il ressort des pièces du dossier, et notamment des plans produits, qu'en dépit de la faible densité de la population rapportée à la superficie de l'ensemble du secteur du " Domaine du Lys " compte tenu notamment de la taille des parcelles supportant une habitation et de la faible présence d'activités économiques dans le secteur en-dehors de l'hôtellerie-restauration, il ressort des pièces du dossier qu'environ 40 % de la population communale se trouve concentrée dans des habitations du " Domaine du Lys " dont la plupart sont situées le long des axes le desservant ; qu'en outre, à la population résidente s'ajoute celle fréquentant les équipements d'hôtellerie et de restauration du secteur ; que, dès lors, cette concentration de population n'apparaît pas insuffisante pour permettre la collecte des eaux usées afin de les acheminer vers une station d'épuration ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort du dossier soumis à enquête publique, et notamment du rapport d'étude du schéma directeur d'assainissement de 2005, et il n'est pas contesté, que l'ensemble du secteur du " Domaine du Lys " produit une charge brute de pollution organique supérieure à 120 kg par jour, ce rapport l'évaluant, sur la base des seules 1 442 habitations alors concernées, soit 4 326 équivalent habitant, à 259,6 kg par jour de DBO5 ; que ce seuil de 120 kg par jour se trouve également dépassé dans la seule zone du secteur regroupant les 724 habitations, désormais portées à 784, envisagées initialement comme devant relever d'un système autonome ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le secteur du " Domaine du Lys " constitue une zone d'agglomération d'assainissement qui doit être placée en zone d'assainissement collectif en application des dispositions de l'article R. 2224-10 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite et en tout état de cause, l'ACVEL ne peut utilement soutenir que, compte tenu notamment du coût élevé d'un tel système, de son impact sur la forêt ou de l'absence de sensibilité du sous-sol, le conseil municipal, en incluant cette partie du territoire communal dans une telle zone, aurait entaché sa délibération d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 2224-7 du même code en vertu desquelles peuvent être placées en zones d'assainissement non collectif les parties du territoire d'une commune dans lesquelles l'installation d'un système de collecte des eaux usées ne se justifie pas, soit parce qu'elle ne présente pas d'intérêt pour l'environnement et la salubrité publique, soit parce que son coût serait excessif ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE LAMORLAYE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de l'ACVEL, de Mme B et de M. A, la délibération du 29 mai 2009 de son conseil municipal approuvant le plan de zonage d'assainissement de la commune ; qu'il n'apparaît pas inéquitable, toutefois, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE LAMORLAYE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande l'ACVEL au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 20 septembre 2011 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La demande d'annulation présentée par l'ACVEL devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE LAMORLAYE et les conclusions de l'ACVEL tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE LAMORLAYE, à l'association Cadre de vie et environnement de Lamorlaye, à Mme Halina B et à M. Jean-Michel A.

Copie sera adressée pour information au préfet de l'Oise.

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N°11DA01754


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 11DA01754
Date de la décision : 25/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-01-01-04-01 Santé publique. Protection générale de la santé publique. Police et réglementation sanitaire. Salubrité des agglomérations. Évacuation des eaux usées.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Hubert Delesalle
Rapporteur public ?: M. Moreau
Avocat(s) : CABINET UGGC et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-10-25;11da01754 ?
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