LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Numec en qualité d'opérateur, coefficient 170 de la convention collective de la métallurgie de la Vendée le 20 septembre 1990 ; qu'ayant refusé une modification de son contrat de travail portant sur la diminution de son salaire horaire et la suppression d'une prime dite de 5/8, il a été licencié pour motif économique le 2 avril 2007 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes de rappels de salaire, dont l'une à titre du travail de nuit en application du principe « à travail égal, salaire égal », et en paiement de dommages et intérêts, notamment pour violation de l'obligation de formation ;
Sur les deuxième et troisième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement d'une somme à titre de salaire pour travail de nuit, alors, selon le moyen, que l'employeur est tenu d'assurer pour un travail identique ou de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'entreprise ; que la différence d'organisation du travail ne justifie pas une disparité de rémunération entre les salariés ; qu'en déboutant M. X... de sa demande de rappels de salaire fondée sur l'existence d'une discrimination salariale au titre de la majoration des heures de nuit au motif que M. X... qui travaillait dans le cadre d'une organisation de travail en continu par roulement d'équipes successives accomplissait régulièrement des heures de travail la nuit tandis que les autres salariés auxquels il se comparait n'accomplissaient qu'exceptionnellement ces mêmes heures, quand il n'était pas contesté que les salariés effectuaient un travail de valeur égale, la cour d'appel a violé les articles L. 3221-2, L. 3221-4 et L. 3221-7 du code du travail et le principe « à travail égal, salaire égal » ;
Mais attendu que la majoration de 40 % du salaire pour les heures exceptionnellement travaillées la nuit qui était accordée aux salariés de l'atelier de mécanique générale compensait une sujétion différente de celle subie par le salarié, qui travaillait habituellement la nuit, puisqu'en continu par équipes successives, justifiant une majoration spécifique de 25 % de sa rémunération ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article L. 6321-1 du code du travail ;
Attendu que selon ce texte, l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations ;
Attendu que pour rejeter la demande en paiement d'une somme à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de formation, l'arrêt retient que le salarié a été recruté sans compétence ni expérience au poste d'opérateur de lignes auquel il a été formé par l'employeur ; que son expérience lui permet désormais de prétendre à des postes similaires dans l'industrie mécanique ; que son poste de travail n'a connu depuis son embauche aucune évolution particulière nécessitant une formation d'adaptation ; qu'il lui appartenait par ailleurs de demander à bénéficier d'un congé individuel de formation ou du droit individuel de formation ; qu'en conséquence aucun manquement n'a été commis par l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de l'adaptation au poste de travail ou de l'utilisation des congé ou droit individuels de formation, alors qu'elle constatait qu'en seize ans d'exécution du contrat de travail l'employeur n'avait fait bénéficier le salarié, dans le cadre du plan de formation de l'entreprise, d'aucune formation permettant de maintenir sa capacité à occuper un emploi au regard de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande en paiement d'une somme à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de formation, l'arrêt rendu le 17 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne la société Numec aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande en paiement d'une somme à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de formation ;
AUX MOTIFS QUE M. X... soutient qu'en l'espèce, la société Numec a failli à ses obligations puisqu'il n'a bénéficié d'aucune formation depuis son recrutement ; que toutefois, M. X... a été recruté sans compétence ni expérience au poste d'opérateur de lignes, auquel il a été formé par l'employeur ; que son expérience lui permet désormais de prétendre à des postes similaires dans l'industrie mécanique ; que son poste de travail n'a connu depuis son embauche aucune évolution particulière nécessitant une formation d'adaptation ; qu'il lui appartenait par ailleurs de demander à bénéficier d'un congé individuel de formation ou du droit individuel de formation ; qu'aucun manquement n'a été commis par l'employeur ;
ALORS QUE viole son obligation d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail, l'employeur qui ne fait bénéficier le salarié d'aucune formation au cours d'une longue carrière professionnelle au sein de l'entreprise, quand bien même le salarié y aurait acquis une expérience ; qu'en décidant le contraire et en considérant que la société Numec n'avait pas failli à son obligation de formation et d'adaptation à l'égard de M. X... aux motifs inopérants qu'elle lui avait permis d'acquérir une expérience au poste d'opérateur de ligne et que le salarié n'avait pas pris l'initiative d'une formation dans le cadre d'un congé individuel de formation quand il n'était pas contesté que M. X... n'avait bénéficié d'aucune formation depuis son recrutement et ce, pendant seize ans, la Cour d'appel a violé l'article L. 6321-1 du code du travail ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes en paiement de sommes à titre de rappel de salaire pour travail le dimanche et d'heures supplémentaires ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 3132-14 du Code du travail dispose que dans les industries ou les entreprises industrielles, une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir la possibilité d'organiser le travail de façon continue pour des raisons économiques ou d'attribuer le repos hebdomadaire par roulement ; que tel est le cas en l'espèce ; que la convention collective applicable, qui est la Convention collective départementale du 16 décembre 2004 des industries de la métallurgie de la Vendée, prévoit la possibilité du travail en équipes successives et définit des modalités concrètes d'application en ce qui concerne le travail de nuit et la pause casse-croûte ; que la ligne de production d'arbres d'induit fonctionnait au sein de l'entreprise selon un horaire de travail en continu 3/8 par roulement ; qu'il en résultait que par dérogation au droit au repos dominical, le repos hebdomadaire était pris par roulement d'une journée entière un jour quelconque de la semaine ; qu'en conséquence, M. X... n'est pas fondé à revendiquer la majoration de 50 % pour les heures de travail effectuées le dimanche qui est prévue par la Convention collective des industries métallurgiques de la Vendée dans le cas où les heures de travail effectuées le dimanche le sont à titre exceptionnel pour exécuter un travail urgent ;
ET QUE les accords nationaux de la métallurgie applicables prévoient une durée de travail qui ne peut excéder 33,6 heures par semaine calculée sur une année ; qu'il en résulte que le calcul de la moyenne des heures s'effectue sur une année et par semaine travaillée et que seules les heures effectuées au-delà de la moyenne hebdomadaire sont considérées comme des heures supplémentaires ; qu'en l'espèce, la société Numec justifie, par la production des feuilles de temps hebdomadaire complétées par chaque salarié du temps de travail des salariés affectés à la ligne de production d'arbres d'induit dont il résulte qu'ils accomplissaient moins de 33,36 heures de travail par semaine en moyenne ;
ALORS QUE M. X... a fait valoir dans ses conclusions d'appel que l'article 2 de l'accord national étendu de la métallurgie du 17 juillet 1986 sur l'aménagement du temps de travail prévoit que la mise en place du travail en continu et du travail en équipes successives doit résulter d'un accord d'entreprise et qu'un tel accord n'a jamais été signé par la société Numec, ce que celle-ci n'a jamais contesté ; qu'il s'en évince que ce mode d'organisation de travail étant illicite au sein de la société Numec, les dispositions législatives ou conventionnelles relatives au décompte du repos hebdomadaire et des heures supplémentaires afférentes au travail en continu par roulement d'équipes n'étaient pas applicables ; qu'en se fondant cependant sur les dispositions de la Convention collective départementale du 16 décembre 2004 des industries de la métallurgie de la Vendée ou des accords nationaux de la métallurgie afférentes à ce mode d'organisation du travail, pour débouter M. X... de ses demandes au titre du travail effectué le dimanche ou des heures supplémentaires, sans répondre à ses conclusions qui insistaient sur la signature en préalable d'un accord d'entreprise, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande en paiement d'une somme de 1.892,67 € à titre de rappel de congés payés ;
AUX MOTIFS propres et adoptés des premiers juges QUE M. X... soutient avoir bénéficié au titre de l'année 2004-2005 de 21 jours de congé au lieu de 25 jours ; qu'il s'appuie sur un courrier de l'inspecteur du travail qui rappelait au chef d'entreprise qu'il devait attribuer 25 jours de congés ; qu'il apparaît que le raisonnement porte sur les jours ouvrés et ouvrables ; que M. X... n'apporte aucune preuve que des congés payés lui seraient dus et aussi sans démontrer qu'il ne les aurait pas pris ;
ALORS QU'en cas de litige sur le décompte des congés payés en jours ouvrés, il appartient à l'employeur de démontrer que le salarié a bénéficié de trente jours ouvrables de congés payés ; qu'en l'espèce, la société Numec a reconnu avoir procédé à un calcul des congés payés en jours ouvrés ; qu'en reprochant cependant à M. X... de n'apporter aucune preuve que des congés payés lui étaient dus, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du Code civil, ensemble l'article L. 3143-3 du Code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
ll est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande en paiement d'une somme de 3.654,56 €, outre les congés payés à titre de salaire pour travail de nuit ;
AUX MOTIFS QUE M. X... bénéficiait d'une majoration de 25 % pour travail de nuit ; qu'il revendique une majoration de 40% pour ses heures de nuit comme ses collègues travaillant dans l'atelier de mécanique générale ; que toutefois, les salariés de l'autre atelier travaillaient exceptionnellement la nuit, alors que les salariés de l'atelier arbres d'induit, du fait de l'organisation de leur travail en continu par équipes successives, effectuaient régulièrement des heures de travail de nuit et avaient la qualification de travailleurs de nuit ; qu'or la Convention collective applicable des industries de la métallurgie de Vendée prévoit que les heures de travail effectuées de nuit par un salarié qualifié de travailleur de nuit donnent lieu à une majoration égale à 25 % ; qu'en ce qui concerne les salariés travaillant de jour, l'employeur reconnaît avoir appliqué la Convention collective dans un sens plus favorable en majorant de 40 % les heures qu'ils faisaient exceptionnellement la nuit ; que pour autant, M. X... qui avait un statut différent, ne peut pas invoquer une discrimination pour revendiquer cette majoration ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE la société Numec a recours exceptionnellement dans un autre atelier au travail de nuit ; qu'elle a considéré que c'était une gêne pour les salariés concernés et a décidé de majorer les heures de nuit à 40% ; que M. X... travaille en 5/8 et le travail de nuit fait partie intégrante de ce type d'organisation ; qu'il paraît évident que les deux conditions de travail sont différentes entre le travail de nuit exceptionnel et celui en 5/8 ; que M. X... veut tirer profit des conditions de majoration du travail de nuit (40%) exceptionnel et le généraliser à tort sur le travail en 5/8 ;
ALORS QUE l'employeur est tenu d'assurer pour un travail identique ou de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'entreprise ; que la différence d'organisation du travail ne justifie pas une disparité de rémunération entre les salariés ; qu'en déboutant M. X... de sa demande de rappels de salaire fondée sur l'existence d'une discrimination salariale au titre de la majoration des heures de nuit au motif que M. X... qui travaillait dans le cadre d'une organisation de travail en continu par roulement d'équipes successives accomplissait régulièrement des heures de travail la nuit tandis que les autres salariés auxquels il se comparait n'accomplissait qu'exceptionnellement ces mêmes heures, quand il n'était pas contesté que les salariés effectuaient un travail de valeur égale, la Cour d'appel a violé les articles L. 3221-2, L. 3221-4 et L. 3221-7 du Code du travail et le principe « à travail égal, salaire égal ».