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28/06/2012 | FRANCE | N°11-20011

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 juin 2012, 11-20011


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 10 mai 2011, RG n° 10/01926), que Mme X... s'est portée caution envers la caisse de crédit agricole mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne, aux droits de laquelle vient celle de Champagne-Bourgogne (la banque), des engagements contractés par deux sociétés civiles immobilières auprès de cet établissement de crédit ; que la banque a engagé le 1er août 1994 une action paulienne afin que lui soit déclaré inopposable l'apport de certains b

iens, par Mme X..., à une autre société ; qu'un arrêt devenu irrévocable, ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 10 mai 2011, RG n° 10/01926), que Mme X... s'est portée caution envers la caisse de crédit agricole mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne, aux droits de laquelle vient celle de Champagne-Bourgogne (la banque), des engagements contractés par deux sociétés civiles immobilières auprès de cet établissement de crédit ; que la banque a engagé le 1er août 1994 une action paulienne afin que lui soit déclaré inopposable l'apport de certains biens, par Mme X..., à une autre société ; qu'un arrêt devenu irrévocable, du 13 octobre 2008, a accueilli cette action ; que la banque ayant fait délivrer à Mme X... un commandement valant saisie immobilière le 8 janvier 2010, celle-ci a saisi un juge de l'exécution en soutenant, notamment, que la créance de la banque était prescrite ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de dire que l'action en recouvrement forcé engagée par la banque au moyen du commandement de payer valant saisie immobilière du 8 janvier 2010 n'était pas prescrite, alors, selon le moyen :
1°/ que l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre ; que l'action de la banque en inopposabilité d'un apport fait par Mme X... à une société civile immobilière n'avait pas le même objet que l'action en paiement du solde des prêts (violation de l'article 2244 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause) ;
2°/ que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants se prescrivent par dix ans ; que la dénonciation d'inscription d'hypothèque du 25 août 1994 est antérieure de plus de dix ans à l'introduction de l'instance, le 8 janvier 2010 (violation de l'article L. 110-4 du code de commerce) ;
3°/ que le renouvellement de l'inscription d'hypothèque est dépourvu d'effet interruptif ; qu'à tort la cour d'appel a retenu que la prescription avait été interrompue par les renouvellements intervenus les 24 juillet 1997, 17 juillet 2000 et 26 juin 2006 (violation de l'article 2244 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause) ;
4°/ que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir ; que la cour d'appel qui a retenu qu'en raison de l'apport opéré par Mme X..., ayant justifié l'action paulienne, la banque s'était trouvée dans l'impossibilité d'appréhender sa créance jusqu'à l'issue de cette action, a caractérisé l'impossibilité d'obtenir l'exécution d'une décision de justice, mais non pas l'impossibilité d'agir en justice (violation de l'article 2251 du code civil) ;
Mais attendu que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; qu'ayant relevé que l'action paulienne avait été engagée, dans le délai de prescription, afin de rendre inopposable à la banque l'apport fait par Mme X... de certains biens à une société, et que la mesure d'exécution engagée ultérieurement portait sur ces mêmes biens, la cour d'appel a pu en déduire, justifiant sa décision par ce seul motif, que l'assignation du 1er août 1994 avait interrompu la prescription de l'action en recouvrement de la créance jusqu'au prononcé de l'arrêt du 13 octobre 2008 ;
Et attendu que le rejet de la première branche du moyen rend sans objet les autres branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Blanc et Rousseau, avocat aux Conseils, pour Mme Y... épouse X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'action en recouvrement forcé engagée par la CRCAM Champagne-Bourgogne au moyen du commandement de payer valant saisie-immobilière du 8 janvier 2010 n'était pas prescrite.
Aux motifs que Madame X... s'était portée caution de deux prêts consentis à une société civile immobilière, prêts qui n'avaient pas été remboursés à leurs échéances ; que le point de départ de la prescription de l'action du Crédit Agricole contre Madame X... était la mise en demeure de payer du 22 janvier 1993 adressée à la débitrice principale ; que le 1er août 1994, la banque avait exercé une action paulienne tendant à ce que lui soit déclaré inopposable un apport fait par Madame X... à une autre société, action accueillie par un arrêt du 13 octobre 2008 ; que cette assignation du 1er août 1994, qui exprimait la volonté de la banque de se prévaloir d'une créance, avait interrompu la prescription jusqu'à cet arrêt ; que surabondamment, une ordonnance du juge-commissaire du 27 juillet 1994 avait autorisé la banque à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur les biens frauduleusement donnés, inscription dénoncée le 25 août 1994 ; que la prescription avait été à nouveau interrompue lors du renouvellement de cette hypothèque, les 24 juillet 1997, 17 juillet 2000 et 26 juin 2006 ; qu'encore, la banque faisait justement valoir qu'en raison de l'apport opéré en fraude de ses droits par Madame X..., elle s'était trouvée dans l'impossibilité d'appréhender sa créance jusqu'à l'issue de cette action, de sorte que la prescription avait été en tout état de cause suspendue jusqu'à la publication de l'arrêt du 13 octobre 2008.
Alors 1°) que l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre ; que l'action de la banque en inopposabilité d'un apport fait par Madame X... à une société civile immobilière n'avait pas le même objet que l'action en paiement du solde des prêts (violation de l'article 2244 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause).
Alors 2°) que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants se prescrivent par dix ans ; que la dénonciation d'inscription d'hypothèque du 25 août 1994 est antérieure de plus de dix ans à l'introduction de l'instance, le 8 janvier 2010 (violation de l'article L.110-4 du code de commerce).
Alors 3°) que le renouvellement de l'inscription d'hypothèque est dépourvu d'effet interruptif ; qu'à tort la cour d'appel a retenu que la prescription avait été interrompue par les renouvellements intervenus les 24 juillet 1997, 17 juillet 2000 et 26 juin 2006 (violation de l'article 2244 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause).
Alors 4°) que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir ; que la cour d'appel qui a retenu qu'en raison de l'apport opéré par Madame X..., ayant justifié l'action paulienne, la banque s'était trouvée dans l'impossibilité d'appréhender sa créance jusqu'à l'issue de cette action, a caractérisé l'impossibilité d'obtenir l'exécution d'une décision de justice, mais non pas l'impossibilité d'agir en justice (violation de l'article 2251 du code civil).


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-20011
Date de la décision : 28/06/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PRESCRIPTION CIVILE - Interruption - Acte interruptif - Action en justice - Actions tendant à un seul et même but - Cas - Action en recouvrement - Action paulienne tendant à ce que l'apport d'un bien à un tiers soit déclaré inopposable au créancier

Si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; Ainsi, la prescription de l'action en recouvrement peut être interrompue par l'exercice, par le créancier, d'une action paulienne tendant à ce que l'apport d'un bien par le débiteur à un tiers lui soit déclaré inopposable


Références :

article 2244 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 10 mai 2011

à rapprocher :2e Civ., 21 janvier 2010, pourvoi n° 09-10944, Bull. 2010, II, n° 22 (cassation partielle) ;3e Civ., 19 mai 2010, pourvoi n° 09-12689, Bull. 2010, III, n° 97 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 jui. 2012, pourvoi n°11-20011, Bull. civ. 2012, II, n° 123
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, II, n° 123

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : M. Mucchielli
Rapporteur ?: Mme Leroy-Gissinger
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Defrenois et Levis

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.20011
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