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23/02/2012 | FRANCE | N°10NT00039

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 23 février 2012, 10NT00039


Vu la requête, enregistrée le 8 janvier 2010, présentée pour la société GEVELOT EXTRUSION, dont le siège est 6 boulevard Bineau à Levallois-Perret (92532) par Me Kuntz, avocat au barreau de Paris et par Me Pralong-Bone, avocat au barreau de Nantes ; la société GEVELOT EXTRUSION demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 084175 du 4 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. X, la décision du 15 mai 2008 par laquelle l'inspecteur du travail de la 1ère section de la direction départementale du travail, de l'emploi et d

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Vu la requête, enregistrée le 8 janvier 2010, présentée pour la société GEVELOT EXTRUSION, dont le siège est 6 boulevard Bineau à Levallois-Perret (92532) par Me Kuntz, avocat au barreau de Paris et par Me Pralong-Bone, avocat au barreau de Nantes ; la société GEVELOT EXTRUSION demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 084175 du 4 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. X, la décision du 15 mai 2008 par laquelle l'inspecteur du travail de la 1ère section de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de la Mayenne a autorisé son licenciement pour faute, ensemble la décision du ministre en date du 14 novembre 2008 rejetant son recours hiérarchique ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Nantes ;

3°) de mettre à la charge de M. X le paiement d'une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 janvier 2012 :

- le rapport de M. Etienvre, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Specht, rapporteur public,

- et les observations de M. X ;

Considérant que, par décision du 15 mai 2008, l'inspecteur du travail de la 1ère section de la Mayenne a autorisé la société GEVELOT EXTRUSION à licencier pour faute M. Gérard X, directeur des ressources humaines de l'entreprise et conseiller prud'homal ; que, sur recours hiérarchique de M. X, cette décision a été confirmée le 14 novembre suivant par le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité ; que la société GEVELOT EXTRUSION interjette appel du jugement du 4 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé les décisions des 15 mai 2008 et 14 novembre 2008 ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'en jugeant que la demande de M. X tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 2008 par laquelle l'inspecteur du travail de la 1ère section de la Mayenne avait autorisé son licenciement devait être regardée comme tendant également à l'annulation de la décision par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité avait, en cours d'instance, le 14 novembre 2008, rejeté le recours hiérarchique de M. X, les premiers juges n'ont pas statué ultra petita ;

Considérant, en second lieu, qu'en indiquant qu'il ressortait des pièces du dossier et, en particulier, de l'attestation de l'ancien dirigeant de la société, que la suppression de la clause de non-concurrence liant certains salariés avait été décidée par le président directeur général de la société GEVELOT EXTRUSION, qui avait approuvé la liste des personnes concernées et que dans ces conditions, la lettre du 2 mars 2006 adressée à M. X, en qualité de salarié lié par une telle clause, et signée de lui-même, en qualité de directeur des ressources humaines, ne constituait pas une faute disciplinaire, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement sur ce point ;

Sur la légalité des décisions contestées :

Considérant que dans le cas où la demande d'autorisation de licencier un salarié protégé est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu notamment de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé ;

Considérant qu'à l'appui de sa demande d'autorisation de licenciement pour faute de M. X, la société GEVELOT EXTRUSION a fait état de sept griefs ; que pour accorder cette autorisation, l'inspecteur du travail s'est fondé sur ce qu'en ayant fait obstacle à une priorité de réembauchage, en s'étant lui-même délivré de sa clause de non-concurrence, en ayant entretenu un climat de conflit permanent au sein de l'entreprise, en ayant proposé le déclassement d'un salarié physiquement inapte et en n'ayant pas pris en compte les consignes de la direction concernant le paiement d'heures supplémentaires, M. X avait commis des fautes de nature à justifier son licenciement ; que pour rejeter le recours hiérarchique de M. X, le ministre chargé du travail n'a retenu que le premier et le dernier de ces cinq griefs ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail : En cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié ;

Considérant, en premier lieu, que s'il n'est pas contesté que M. X a adressé le 4 février 2008 au cabinet sollicité pour le recrutement d'un poste de responsable maintenance sécurité sur le site d'Offranville une fiche de poste dans laquelle il a indiqué les moyens à mettre en oeuvre pour contourner la priorité de réembauchage dont bénéficiait, en vertu de l'article L. 1233-45 du code du travail, jusqu'en juin 2008, un ancien salarié licencié pour motif économique pouvant prétendre au poste proposé, compte-tenu, en particulier, de son lieu de résidence à Offranville, et qu'il a adressé à ce dernier, le 27 février 2008, une lettre comportant une présentation volontairement faussée du poste à pourvoir afin de le dissuader de postuler, les pièces du dossier et le contexte dans lequel le licenciement de M. X, recruté en 2001, a été envisagé, ne permettent pas de tenir pour établi que celui-ci n'a pas agi à la demande de M. Y, président directeur général en poste depuis le mois de mars 2007, ou à tout le moins qu'il a accompli ces démarches sans que ce dernier n'en ait eu connaissance ; que, dans ces conditions, la faute commise par M. X ne peut être regardée comme étant de nature à justifier son licenciement ;

Considérant, en deuxième lieu, que le manquement déontologique dont M. X a fait preuve en signant lui-même le courrier le déliant de la clause de non-concurrence insérée dans son contrat de travail ne constitue pas davantage une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a agi sur autorisation du président directeur général en poste à cette date ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aucune pièce du dossier ne permet de tenir pour établi que M. X se soit rendu coupable de harcèlement moral à l'encontre d'une salariée ; que la sévérité ou la rigidité du comportement dont M. X a pu faire preuve à l'égard des salariés de l'entreprise ne constituent pas des fautes disciplinaires susceptibles de justifier un licenciement ;

Considérant, en quatrième lieu, que si la société reproche à M. X d'avoir envisagé de proposer à un salarié, à la suite de son inaptitude médicalement constatée, d'occuper un poste moins qualifié et moins rémunéré et en cas de refus de licencier celui-ci, il ressort des pièces du dossier que M. X s'est contenté, le 17 mars 2008 de rappeler à l'intéressé la législation applicable et n'a à cette occasion commis aucune faute de nature à justifier son licenciement ;

Considérant, en cinquième et dernier lieu, que s'il est reproché à M. X d'avoir tardé à mettre en oeuvre l'engagement pris par le président directeur général, le 20 septembre 2007, auprès des délégués syndicaux du site de Laval, d'un paiement des heures supplémentaires conforme à la réglementation et d'avoir tardé à appliquer le protocole d'accord conclu le 4 novembre 2007 avec les organisations syndicales prévoyant une nouvelle assiette de calcul des heures supplémentaires, conforme au droit applicable, et un rattrapage des cinq dernières années via l'octroi d'une prime exceptionnelle, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier, compte-tenu, en particulier, de l'absence de relances de la part de la direction générale, que ces carences soient d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de M. X ;

Considérant qu'aucun des griefs retenus par l'autorité administrative n'étant de nature à justifier le licenciement pour faute de M. X, la société GEVELOT EXTRUSION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 15 mai 2008 par laquelle l'inspecteur du travail de la 1ère section de la Mayenne a autorisé le licenciement de M. X et la décision du 14 novembre 2008 du ministre chargé du travail rejetant le recours hiérarchique de M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le paiement de la somme que la société GEVELOT EXTRUSION demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ladite société le paiement d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes frais exposés par M. X ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société GEVELOT EXTRUSION est rejetée.

Article 2 : La société GEVELOT EXTRUSION versera une somme de 1 500 euros (mille cinq cent euros) à M. X en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société GEVELOT EXTRUSION, à M. Gérard X et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

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N° 10NT00039


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10NT00039
Date de la décision : 23/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : PRALONG-BONE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-02-23;10nt00039 ?
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