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08/10/2012 | FRANCE | N°10MA04372

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 08 octobre 2012, 10MA04372


Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2010, présentée pour Mme , demeurant ..., , demeurant ..., Melle , demeurant ..., M. , demeurant ..., par Me Cartron ; Mme et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906538 du 18 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à payer à la somme de 608 098 euros, à la somme de 22 869 euros, à la somme de 73 480 euros en réparation de leur préjudice économique consécutif au décès de leur époux e

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Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2010, présentée pour Mme , demeurant ..., , demeurant ..., Melle , demeurant ..., M. , demeurant ..., par Me Cartron ; Mme et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906538 du 18 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à payer à la somme de 608 098 euros, à la somme de 22 869 euros, à la somme de 73 480 euros en réparation de leur préjudice économique consécutif au décès de leur époux et père, assorties des intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2009 et de leur capitalisation ;

2°) de faire droit à leurs conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'assistance publique de Marseille la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 septembre 2012 :

- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteure,

- les conclusions de Mme Fedi, rapporteure publique,

- et les observations de Me Laridan, pour les consorts ;

1. Considérant qu'à la suite d'un accident de circulation survenu le 3 juillet 1999, M. André a été hospitalisé au centre hospitalier de Pertuis, puis transféré le 4 juillet à l'hôpital Nord, qui dépend de l'Assistance publique de Marseille, où il est décédé ; que sa veuve et ses enfants ayant, le 26 juillet 2002, demandé à cet établissement de réparer les préjudices résultant des fautes commises par l'hôpital, le tribunal administratif de Marseille a, par un jugement avant dire droit du 11 janvier 2007, déclaré l'Assistance publique de Marseille responsable de ce décès et l'a condamnée à réparer divers préjudices, en réservant le préjudice économique ; que, par un jugement du 3 avril 2007, le tribunal a condamné l'Assistance publique de Marseille à réparer le préjudice économique de Mme et de ses enfants ; que, sur appel de cet établissement, la Cour a, par un arrêt devenu définitif, annulé le jugement du 3 avril 2007 en tant qu'il allouait à Mme une somme qui excédait 12 640,09 euros et en tant qu'il lui allouait, en sa qualité d'administratrice légale de une somme qui excédait 20 000 euros, le contentieux n'ayant pas été lié au delà de cette somme, et a ramené la somme due par cet établissement à à 14 073 euros, au motif que le tribunal avait fait une évaluation excessive de ses préjudices économiques ; que les consorts ont alors formé une nouvelle demande indemnitaire en vue d'obtenir une réparation plus complète de leur préjudice économique ; qu'ils relèvent appel du jugement du 18 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la réparation complète du préjudice économique résultant du décès de leur époux et père ;

Sur l'exception de chose jugée :

2. Considérant que si les consorts soutiennent, pour faire obstacle à l'exception de chose jugée qui leur a été opposée par les premiers juges, que la Cour aurait commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier dans son arrêt du 25 juin 2009, il leur appartenait, s'ils s'y croyaient fondés, de se pourvoir en temps utile contre cet arrêt ; que dès lors qu'il est devenu définitif, cette contestation ne peut être utilement présentée dans le cadre du présent litige ;

S'agissant de :

3. Considérant qu'il résulte de l'arrêt du 5 juin 2009 que la Cour a estimé que le préjudice économique annuel des enfants de M. s'élevait à la somme de 4 681 euros ; qu'elle a constaté que était âgée de 17 ans à la date du décès de son père, et a estimé que, dès lors qu'il n'était pas contesté qu'elle aurait été à la charge de son père jusqu'à l'âge de 20 ans, son préjudice économique devait être évalué à la somme de 14 073 euros ; qu'elle s'est ce faisant entièrement prononcée sur le bien-fondé des prétentions de Mlle auxquelles elle n'a opposé aucune irrecevabilité ; que c'est donc à bon droit que le tribunal a jugé que, s'agissant de , l'autorité qui s'attache à la chose jugée de cette décision devenue définitive, du fait de la triple identité des parties, de l'objet et de la cause entre le précédent litige et celui qui était soumis au Tribunal faisait obstacle à ce que ses prétentions puissent être accueillies ;

S'agissant de Nicole et

4. Considérant qu'il ressort de la lecture de l'arrêt du 5 juin 2009 que la Cour a refusé d'indemniser le préjudice économique de Mme au delà de la somme de 12 640,09 euros au motif que cette dernière avait limité, devant les premiers juges, ses prétentions à la somme de 35 000 euros et avait déjà vu ses préjudices indemnisés par jugement du 11 janvier 2007, à hauteur de 22 359,91 euros ; que la Cour a de même estimé que le chiffrage initial du préjudice de , fixé par les consorts dans leur requête de première instance à la somme de 30 000 euros, faisait obstacle au versement d'une somme supérieure à 20 000 euros au titre de la réparation de son préjudice économique dès lors qu'une somme de 10 000 euros lui avait déjà été allouée par le jugement du 11 janvier 2007 ; qu'il suit de là que la Cour ne s'est pas prononcée sur le bien-fondé des prétentions de Nicole et de au titre de la réparation de leur préjudice économique en tant quelles excèdent les montants respectifs de 12 640,09 euros et de 20 000 euros ; que, dès lors, l'exception de la chose jugée ne pouvait être opposée à leur nouvelle demande présentée devant le tribunal administratif de Montpellier le 9 octobre 2009 et tendant à la condamnation de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à leur verser respectivement une indemnité de 608 098 euros et de 73 480 euros, qu'à hauteur des sommes déjà allouées ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal a estimé que l'exception de chose jugée faisait entièrement obstacle à ce que leurs prétentions puissent être accueillies ;

5. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens invoqués par les consorts et, en défense par l'administration, tant en première instance qu'en appel ;

Sur la réparation des préjudices :

En ce qui concerne l'évaluation des revenus de M. :

6. Considérant que l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille, qui, à titre subsidiaire, renvoie aux observations de M. Lidzborski comme faisant corps au mémoire en défense qu'elle a présenté devant les premiers juges, doit être regardée comme faisant valoir que le montant des revenus retenus par les consorts pour l'évaluation de leur préjudice, tel qu'il figure sur le document intitulé " évaluation du préjudice économique subi par les ayants droits de M. " rédigé par une experte-comptable, qui mentionne des revenus de 35 976,60 euros en 1997, et de 39 946,93 euros en 1998, est sans cohérence avec les revenus agricoles de 24 565 francs et 11 500 francs respectivement déclarés par M. au titre des mêmes années sur sa déclaration de revenus ; que le revenu réel d'un contribuable ne coïncide toutefois pas nécessairement avec son revenu imposable, notamment lorsque, comme en l'espèce, ses bénéfices agricoles sont imposables selon le régime du forfait ; qu'il est en outre loisible au requérant qui sollicite la réparation d'un préjudice économique de justifier de l'étendue de ce dernier par tout moyen ; qu'ainsi, si la production d'une déclaration de revenus ou d'un avis d'imposition est au nombre des éléments qui peuvent valablement être pris en compte pour déterminer l'étendue de ce préjudice, cela n'exclut nullement la possibilité pour le requérant de produire d'autres éléments susceptibles d'éclairer ou de contredire les pièces ainsi produites ;

7. Considérant que les consorts produisent des éléments issus de la comptabilité du GAEC les Pimpants, dont la valeur probante n'est pas contestée, et qui justifient de la conformité des mentions retenues par leur expert comptable aux données de cette comptabilité ; qu'ils justifient, ce faisant, de ce que M. a bien retiré, de sa participation audit GAEC, des revenus qui se sont élevés en 1997 à la somme de 35 976,60 euros, en 1998 à la somme de 39 946,93 euros, et en 1999 à la somme de 8 537,14 euros ; que le calcul du préjudice économique résultant pour les consorts de son décès doit dès lors être opéré à partir de ces derniers éléments ;

En ce qui concerne la réparation du préjudice économique des consorts :Pettavino :

8. Considérant que les revenus que M. tirait de sa participation au GAEC Les Pimpants incluaient à la fois la rémunération de son travail, mais également sa participation aux résultats de l'exploitation, M. détenant 50 des 100 parts du capital du groupement ; que ses ayants droit ont continué, après son décès, à percevoir cette part de ses revenus ; qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite du décès, Mme s'est vu attribuer, de plein droit, 25 parts sociales dépendant de la communauté de biens sur les 50 que détenait son époux, les 25 autres parts sociales ayant été attribuées à Thomas lors du règlement de la succession ; que, dans ces conditions, Mme et ses enfants à charge n'ont été privés, du fait du décès de leur époux et père, que de la moitié des bénéfices liés à la détention de ces parts ; que l'étendue de leur préjudice économique doit être calculée par référence à la moitié des bénéfices qu'elles rapportaient jusque là à M. ;

9. Considérant, d'une part, qu'il ressort des éléments de la comptabilité du GAEC Les Pimpants produits en défense et non sérieusement contestés que le bénéfice d'exploitation du GAEC s'est élevé à la somme de 327 982 francs en 1997, de 356 069 francs en 1998, et de 754 685,56 francs en 1999 ; que, sur ces trois années, le bénéfice moyen, qu'il n'y a pas lieu de pondérer en l'espèce, s'établit à la somme de 479 578 francs ; que les consorts n'ont été privés de la part que M. consacrait à leur entretien qu'à hauteur du quart de cette somme, soit 18 278 euros ;

10. Considérant, d'autre part, que les consorts ont également été privés de la part des revenus de son travail que M. consacrait à leur entretien ; qu'il résulte de l'instruction que ces revenus se sont élevés en 1997 à la somme de 72 000 francs, à la somme de 84 000 francs en 1998, et à la somme de 56 000 francs sur les six premiers mois de l'année 1999 ; que le revenu annuel moyen que M. tirait de son travail s'établit ainsi à la somme de 12 928 euros ;

11. Considérant que les parties s'accordent sur la part de ses revenus que la victime consacrait à l'entretien de son épouse et de ses deux enfants à charge à la date de son décès ; qu'ainsi cette part doit être évaluée à 40 % pour sa veuve et à 15 % pour chacun des enfants à charge ; que les revenus dont s'agit devant être évalués, à partir des éléments indiqués ci-dessus à la somme de 31 206 euros, le préjudice économique annuel de Mme doit ainsi être évalué à la somme de 12 482 euros, et celui de son fils Raphaël à la somme de 4 681 euros ;

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de convertir ces montants annuels en un capital ; qu'il y a lieu, en l'espèce, pour procéder à la conversion, de retenir un barème de capitalisation reposant sur la table de mortalité 2001 pour les femmes publiée par l'institut national de la statistique et des études économiques et un taux d'intérêt de 3,20 % qui correspond aux données économiques à la date de l'évaluation du préjudice ; que, sur la base de ces éléments rapportés à une victime âgée de 43 ans à la date du 7 juillet 2009 à laquelle, en l'état du dossier, il y a lieu de se placer pour évaluer les frais futurs, et pour une rente versée jusqu'à l'âge de 65 ans, le coefficient de capitalisation s'élève à 15,757 ; que le préjudice économique de Mme s'élève ainsi à la somme de 196 679 euros ; qu'ainsi qu'il a été dit, elle s'est vu allouer en réparation de son préjudice économique, par l'arrêt du 25 juin 2009, une somme de 12 640,09 euros ; qu'elle est seulement en droit de prétendre au versement d'une somme complémentaire de 184 039 euros ;

13. Considérant que, de la même manière, le chiffrage du préjudice économique de âgé de neuf ans à la date du décès de son père et alors qu'il n'est pas contesté qu'il aurait été à la charge de son père jusqu'à l'âge de 20 ans peut être évalué, sur la base des éléments mentionnés ci-dessus, et d'un coefficient de capitalisation de 9,434 à la somme de 44 160 euros ; que, compte tenu de la somme de 20 000 euros qui lui a été allouée, au même titre, par l'arrêt du 25 juin 2009, il est en droit de prétendre au versement d'une somme complémentaire de 24 160 euros ;

14. Considérant enfin que Mme est également fondée à demander le remboursement des frais de conseil qu'elle seule a été amenée à exposer, à hauteur de 1 794 euros, en vue de l'évaluation, par un expert-comptable, du préjudice économique subi par les ayant droits de M. ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts sont fondés à soutenir, dans la limite des motifs exposés ci-dessus, que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande, en tant qu'elle émanait de Nicole et de ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

16. Considérant que Nicole et ont droit, respectivement, aux intérêts de la somme de 185 833 euros et 24 160 euros à compter du 21 juillet 2009, jour de la réception par l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille de leur demande ;

17. Considérant que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année ; qu'en ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 9 octobre 2009 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 22 juillet 2010, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

18. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Nicole et et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 octobre 2010 est annulé en tant qu'il a opposé l'exception de chose jugée à et à au delà des sommes respectives de 12 640,09 euros et de 20 000 euros.

Article 2 : L'Assistance publique des hôpitaux de Marseille versera à une somme de 185 833 euros et une somme de 24 160 euros à . Ces sommes porteront intérêt à compter du 21 juillet 2009. Les intérêts échus à la date du 22 juillet 2010 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : L'Assistance publique des hôpitaux de Marseille versera à Mme et à , conjointement, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des consorts est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme , à , à Mlle , à M. , à la mutuelle sociale agricole de Vaucluse et à l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille.

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N° 10MA04372


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA04372
Date de la décision : 08/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Jugements - Chose jugée - Chose jugée par la juridiction administrative - Absence.

Procédure - Jugements - Chose jugée - Chose jugée par la juridiction administrative - Étendue.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS DOMINIQUE CARTRON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-10-08;10ma04372 ?
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