La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2011 | FRANCE | N°10DA00944

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 01 décembre 2011, 10DA00944


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 29 juillet 2010 et régularisée par la production de l'original le 30 juillet 2010, présentée pour :

- Mme Zohra C veuve A, demeurant ...,

- Mlle Sihame A, demeurant ...,

- Mlle Sohrania A, demeurant ...,

- Mlle Assiba A, demeurant ...,

- Mlle Yaël A, demeurant ...,

- M. Mayouf A, demeurant chez Mlle Nora D, ...,

par Me Akaba ; Mme A et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802942-0900208 en date du 3 juin 2010

par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs demandes tendant, d'une part, à l'annulation ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 29 juillet 2010 et régularisée par la production de l'original le 30 juillet 2010, présentée pour :

- Mme Zohra C veuve A, demeurant ...,

- Mlle Sihame A, demeurant ...,

- Mlle Sohrania A, demeurant ...,

- Mlle Assiba A, demeurant ...,

- Mlle Yaël A, demeurant ...,

- M. Mayouf A, demeurant chez Mlle Nora D, ...,

par Me Akaba ; Mme A et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802942-0900208 en date du 3 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision de la direction de l'administration pénitentiaire en date du 26 novembre 2008 rejetant leur demande préalable tendant à l'indemnisation des préjudices économiques et moraux qu'ils ont subis en raison du décès de leur époux, père et frère, d'autre part, de condamner l'Etat à payer en réparation la somme de 200 000 euros à Mme Zohra C veuve A, celle de 150 000 euros à chacune des filles de M. Boudjema D et celle de 100 000 euros à son frère et, enfin, de condamner l'Etat à payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner l'Etat à payer les sommes de 200 000 euros à Mme Zohra C veuve A, 150 000 euros à Mlle Sihame A, 150 000 euros à Mlle Sohrania A, 150 000 euros à Mlle Assiba A, 150 000 euros à Mlle Yaël A et 100 000 euros à M. Mayouf A ;

3°) de condamner l'Etat à leur payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que Mme C veuve A et autres relèvent appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs demandes tendant à ce que l'Etat soit condamné à les indemniser des préjudices subis à la suite du décès de M. Boudjema D, survenu le dimanche 10 octobre 2004 au centre de semi-liberté de la maison d'arrêt de Rouen ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant que M. Boudjema D, né en 1956, avait été incarcéré le 6 juillet 2004 à la maison d'arrêt de Rouen et, le 8 juillet 2004, avait été examiné par l'unité de consultations et de soins ambulatoires de cet établissement pénitentiaire ; que, par jugement du 6 septembre 2004, le juge de l'application des peines l'a admis au bénéfice de la semi-liberté à compter du 27 septembre 2004 ; que, dans la matinée du dimanche 10 octobre 2004, M. D, qui ressentait des douleurs thoraciques et gastriques, a été examiné par l'infirmière de l'unité de consultations et de soins ambulatoires de la maison d'arrêt ; que le même jour, vers 13 h 55, un détenu a averti l'agent en poste à la porte d'entrée principale du centre de semi-liberté avoir découvert M. D gisant inanimé dans la cuisine de ce centre ; que cet agent et un surveillant ont alors trouvé M. D allongé sans connaissance sur le sol de cette cuisine, placé en position latérale de sécurité par un autre détenu et respirant très faiblement ; que, malgré l'arrivée d'un service mobile d'urgence et de réanimation et une tentative de réanimation cardiaque pratiquée par un médecin de ce service, le décès a été constaté quelques minutes plus tard ; que le rapport de l'autopsie pratiquée le 11 octobre 2004 a conclu à une mort subite d'origine cardiaque dans un contexte de cardiopathie ischémique sur athérosclérose coronarienne ;

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 6112-1 du code de la santé publique : Le service public hospitalier exerce, dans les conditions fixées par voie réglementaire, les examens de diagnostic et les soins dispensés aux détenus en milieu pénitentiaire et, si nécessaire, en milieu hospitalier (...) ; qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article D. 368 du code de procédure pénale, dans leur rédaction applicable en l'espèce : Les missions de diagnostic et de soins en milieu pénitentiaire et la coordination des actions de prévention et d'éducation pour la santé sont assurées par une équipe hospitalière placée sous l'autorité médicale d'un praticien hospitalier, dans le cadre d'une unité de consultations et de soins ambulatoires, conformément aux dispositions des articles R. 711-7 à R. 711-18 du code de la santé publique. / En application de l'article R. 711-7 du code de la santé publique, le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation désigne, pour chaque établissement pénitentiaire de la région, l'établissement public de santé situé à proximité de l'établissement pénitentiaire, qui est chargé de mettre en oeuvre les missions décrites au premier alinéa du présent article ; que les anciens articles R. 711-7 à R. 711-18 du code de la santé publique, relatifs aux soins dispensés aux détenus par certains établissements de santé assurant le service public hospitalier et aux actions de prévention exercées par ces établissements ont, depuis l'entrée en vigueur du décret n° 2005-840 du 20 juillet 2005 relatif à la sixième partie (dispositions réglementaires) du code de la santé publique et modifiant certaines dispositions de ce code, été remplacés par les articles R. 6112-14 à R. 6112-27, relatifs aux soins dispensés en milieu pénitentiaire ; que l'article R. 6112-14 prévoit que, pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 6112-1, le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation, auquel a ensuite été substitué le directeur général de l'agence régionale de santé, désigne, pour chaque établissement pénitentiaire de la région, l'établissement public de santé, situé à proximité de l'établissement pénitentiaire, chargé de dispenser les soins aux détenus, de participer à l'accueil et au traitement des urgences et de concourir aux actions de prévention et d'éducation pour la santé organisées en milieu pénitentiaire ; que l'article R. 6112-19 ajoute que l'établissement public de santé désigné en application de l'article R. 6112-14 dispense en milieu pénitentiaire et, le cas échéant, hospitalier, des soins aux détenus dont l'état ne nécessite pas une hospitalisation ; qu'il résulte de ces diverses dispositions législatives et réglementaires que seule peut être engagée, à raison des fautes susceptibles d'avoir été commises dans l'exercice des missions de diagnostic et de soins réalisées en milieu pénitentiaire, la responsabilité de l'établissement public dont relève l'unité de consultations et de soins ambulatoires chargée de ces missions auprès des détenus ;

Considérant, en premier lieu, que les requérants, s'appuyant à cet égard sur une expertise médicale du 15 décembre 2009 réalisée à la demande d'un juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Rouen, soutiennent que l'infirmière de l'unité de consultations et de soins ambulatoires de la maison d'arrêt de Rouen a eu une mauvaise appréciation de l'état de M. D lorsque, le 10 octobre 2004 dans la matinée, elle l'a examiné et lui a administré un médicament utilisé dans le traitement des reflux acides de l'estomac vers l'oesophage, alors que, d'après ce rapport, la symptomatologie présentait plusieurs signes qui auraient dû faire suspecter une pathologie thoracique grave et motiver une consultation par un médecin ; qu'il est ajouté que l'intéressé présentait une pathologie cardiovasculaire évolutive depuis plusieurs années, qui s'est manifestée le 10 octobre 2004 par une symptomatologie atypique difficile à interpréter par un personnel paramédical ; que, toutefois, la faute ainsi alléguée, à la supposer avérée, n'est pas imputable à l'administration pénitentiaire, c'est-à-dire à l'Etat, seul recherché par la requête ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que, le 8 juillet 2004, M. D avait été examiné par l'unité de consultations et de soins ambulatoires de la maison d'arrêt de Rouen dans le cadre de la visite des détenus arrivants ; qu'à la suite de cette consultation n'ont pas été portés à la connaissance de l'administration pénitentiaire des antécédents médicaux particuliers et notamment pas deux infarctus anciens du ventricule gauche dont fait état le rapport susmentionné du 15 décembre 2009, dont, d'après ce rapport, le plus récent datait d'environ trois à cinq semaines avant le décès ; que ce rapport confirme que le dossier médical ouvert le 7 juillet 2004, lendemain de l'incarcération, ne faisait référence à aucun antécédent cardiaque, alors d'ailleurs que l'administration pénitentiaire n'avait pas légalement accès à ce dossier ; que, dès lors, cette administration n'a pas commis de faute en ne soumettant pas l'intéressé à un régime particulier de surveillance médicale ; qu'il n'est pas contesté que, dès qu'ils ont été avisés que M. D avait été découvert inanimé, les agents alors de service ont fait appel avec célérité aux secours, qui sont arrivés dans les minutes qui ont suivi ; qu'ainsi, l'administration pénitentiaire n'a pas non plus commis de faute dans la prise en charge de M. D dans l'après-midi du 10 octobre 2004 ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer une somme au titre des frais de l'instance non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C veuve A et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Zohra C veuve A, Mlle Sihame A, Mlle Sohrania A, Mlle Assiba A, Mlle Yaël A, M. Mayouf A et au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

''

''

''

''

N°10DA00944 2


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award