LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Vu les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par actes sous seing privé des 30 novembre 2004, 27 juin 2005 et 12 avril 2006, Mme X..., M. Philippe X... puis Mme X... et M. Christian X... (les consorts X...) se sont rendus respectivement cautions solidaires envers la Banque populaire Atlantique (la banque) des sommes pouvant être dues par la société Nouvelle Manche Océan (la société) ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a déclaré sa créance et a assigné les consorts X... en paiement ; qu'un jugement a fait droit à la demande ; que les consorts X... ont interjeté appel de cette décision, en se prévalant de la nullité de leurs engagements de caution non conformes par leurs mentions manuscrites aux dispositions des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ;
Attendu que pour déclarer nuls les actes de cautionnements souscrits par les consorts X..., l'arrêt constate qu'ils portent tous une mention manuscrite unique établie selon le modèle, suivie d'une signature, et retient que le fait de joindre les deux mentions manuscrites prévues par la loi aboutit à une phrase et qu'une telle juxtaposition des mentions prescrites par la loi, qui doivent être apposées successivement par la caution et non pas mélangées en une phrase incertaine lui rendant plus difficile de mesurer la portée de chacun de ses deux engagements, n'est pas conforme aux prescriptions d'ordre public des articles susvisés ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'apposition d'une virgule entre la formule caractérisant l'engagement de caution et celle relative à la solidarité n'affecte pas la portée des mentions manuscrites conformes aux dispositions légales, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour la société Banque populaire Atlantique.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré nuls les actes de cautionnements souscrits le 12 avril 2006 par Monsieur Christian X... et Madame Geneviève X... pour un montant global de 150.000 €, le 27 juin 2005 par Monsieur Philippe X... pour un montant de 120.000 € et le 30 novembre 2004, Madame Geneviève X... pour 72.000 € ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 341-2 du Code de la consommation, toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement celle-ci : « En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de … couvrant le paiement principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de…, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n'y satisfait pas lui-même » ; que selon l'article L. 341-3, lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : « En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X…, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X… » ; que les consorts X... soutiennent que, dès lors que leurs engagements de caution et de solidarité sont rédigés sans discontinuité avant leur signature unique, ils ne peuvent savoir qu'il s'agissait d'obligations juridiquement distinctes par leur objet et leur portée, alors que l'acceptation d'un engagement de caution n'impliquent pas la solidarité ; qu'ils estiment que les deux articles de loi précités exigent deux mentions manuscrites distinctes, chacune suivie d'une signature ; que l'acte de cautionnement souscrit par Monsieur Christian X... et Madame Geneviève X... le 12 avril 2006 pour un montant global de 150.000 €, l'acte de cautionnement souscrit par Monsieur Philippe X... le 27 juin 2005 pour un montant de 120.000 € et l'acte de cautionnement souscrit le 30 novembre 2004 pour un montant de 72.000 € par Madame Geneviève X... portent tous une mention manuscrite unique, établie selon le même modèle, suivie d'une signature ; que le fait de joindre deux mentions manuscrites prévues par la loi en une seule et même mention et en les séparant d'une virgule aboutit à une phrase selon laquelle la caution s'engage à rembourser les sommes dues si l'emprunteur n'y satisfait pas lui-même, en renonçant au bénéfice de discussion… ; qu'une telle juxtaposition des mentions prescrites par la loi, qui doivent être apposées successivement par la caution et non pas mélangées en une phrase incertaine lui rendant plus difficile de mesurer la portée de chacun de ses deux engagements, n'est pas conforme aux prescriptions d'ordre public des articles L. 341-2 et L. 341-3 du Code de la consommation ; qu'il y a donc lieu, en infirmant le jugement, de constater la nullité des engagements de caution des consorts X... et de débouter la Société BANQUE POPULAIRE ATLANTIQUE de ses demandes ;
1) ALORS QUE l'article L. 341-2 du Code de la consommation exige, à peine de nullité, que tout cautionnement souscrit par acte sous privé par une personne physique envers un créancier professionnel comporte la mention manuscrite suivante : « En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de…couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de…, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n'y satisfait pas lui-même » ; que l'article L. 341-3 du même Code prévoit, sous la même sanction, que soit portée à l'acte de caution, en cas de cautionnement solidaire, la mention manuscrite supplémentaire suivante : «En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 (anciennement 2021) du code civil et en m'obligeant solidairement avec X…, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X… » ; qu'en l'espèce, l'acte de cautionnement souscrit par Monsieur Philippe X... le 27 juin 2005 pour un montant global de 120.000 € comportait les mentions suivantes, rédigées de la main de la caution et précédant sa signature : « En me portant caution de la Société Nouvelle Manche Océan dans la limite de la somme de 120.000 Euros - Cent vingt mille euros - couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de 10 ans, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si la Société Nouvelle Manche Océan n'y satisfait pas lui-même, en renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2021 du Code civil et en m'obligeant solidairement avec la Société Nouvelle Manche Océan, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement Société Nouvelle Manche Océan» ; qu'ainsi, ledit acte de cautionnement comportait, mot pour mot, les mentions manuscrites prescrites à peine de nullité par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du Code de la consommation ; qu'en prononçant néanmoins la nullité de cet acte de cautionnement, au motif - inopérant dès lors que ces mentions manuscrites étaient conformes aux exigences légales - que les mentions litigieuses n'étaient séparées que par une virgule, la Cour d'appel a violé les articles susvisés en y ajoutant une condition qui n'y figurait pas ;
2) ALORS QUE l'article L. 341-2 du Code de la consommation exige, à peine de nullité, que tout cautionnement souscrit par acte sous privé par une personne physique envers un créancier professionnel comporte la mention manuscrite suivante : «En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de…couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de …, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n'y satisfait pas lui-même » ; que l'article L. 341-3 du même Code requiert, sous la même sanction, que soit portée à l'acte de caution, en cas de cautionnement solidaire, la mention manuscrite supplémentaire suivante : «En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 (anciennement 2021) du code civil et en m'obligeant solidairement avec X…, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X… » ; qu'en l'espèce, l'acte de cautionnement souscrit par les époux Christian et Geneviève X... le 12 avril 2006 pour un montant global de 150.000 €, comportait les mentions suivantes, rédigées de la main de chacun des époux et précédant leurs signatures respectives : « En me portant caution de la Société Nouvelle Manche Océan dans la limite de la somme de 150.000 Euros « cent cinquante mille euros » couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de 10 ans, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si la Société Nouvelle Manche Océan n'y satisfait pas lui-même, En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2021 du Code civil et en m'obligeant solidairement avec la Société Nouvelle Manche Océan, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement Société Nouvelle Manche Océan» ; qu'ainsi, ledit acte de cautionnement comportait, mot pour mot, les mentions manuscrites prescrites à peine de nullité par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du Code de la consommation ; qu'en prononçant néanmoins la nullité de cet acte de cautionnement, au motif - inopérant dès lors que ces mentions manuscrites étaient conformes aux exigences légales - que les mentions litigieuses n'étaient séparées que par une virgule, la Cour d'appel a violé les articles susvisés en y ajoutant une condition qui n'y figurait pas ;
3) ALORS QUE l'article L. 341-2 du Code de la consommation exige, à peine de nullité, que tout cautionnement souscrit par acte sous privé par une personne physique envers un créancier professionnel comporte la mention manuscrite suivante : « En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de…couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de…, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n'y satisfait pas lui-même » ; que l'article L. 341-3 du même Code prévoit, sous la même sanction, que soit portée à l'acte de caution, en cas de cautionnement solidaire, la mention manuscrite supplémentaire suivante : «En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 (anciennement 2021) du code civil et en m'obligeant solidairement avec X…, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X… » ; qu'en l'espèce, l'acte de cautionnement souscrit par Madame Geneviève X... le 30 novembre 2004 pour un montant global de 72.000 €, comportait les mentions suivantes, rédigées de la main de la caution et précédant sa signature : « En me portant caution de la SA Nouvelle Manche Océan dans la limite de la somme de 72.000 Euros (soixante douze mille euros) couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de 10 ans, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues de mes revenus et mes biens si la SA Nouvelle Manche Océan n'y satisfait pas lui-même, En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2021 du Code civil et en m'obligeant solidairement avec la SA Nouvelle Manche Océan, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement SA Nouvelle Manche Océan» ; qu'ainsi, ledit acte de cautionnement comportait, mot pour mot, les mentions manuscrites prescrites à peine de nullité par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du Code de la consommation, de sorte qu'aucun manquement à une règle impérative de formalisme prévue par le Code de la consommation ne pouvait être reprochée à la BANQUE POPULAIRE ATLANTIQUE ; qu'en prononçant néanmoins la nullité de cet acte de cautionnement, au motif - inopérant dès lors que ces mentions manuscrites étaient conformes aux exigences légales - que les mentions litigieuses n'étaient séparées que par une virgule, la Cour d'appel a violé les articles susvisés en y ajoutant une condition qui n'y figurait pas ;
4) ALORS, EN OUTRE, QU'en affirmant, pour prononcer la nullité des trois actes de cautionnement litigieux, « que le fait de joindre deux mentions manuscrites prévues par la loi en une seule et même mention et en les séparant d'une virgule aboutit à une phrase selon laquelle la caution s'engage à rembourser les sommes dues si l'emprunteur n'y satisfait pas lui-même, en renonçant au bénéfice de discussion… » quand ces mentions étaient, en réalité, ainsi rédigés : «« En me portant caution de la Société Nouvelle Manche Océan dans la limite de la somme de…. Euros (somme en chiffres) couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de 10 ans, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si la Société Nouvelle Manche Océan n'y satisfait pas lui-même, En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2021 du Code civil et en m'obligeant solidairement avec la Société Nouvelle Manche Océan, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement Société Nouvelle Manche Océan», ce qui n'affectait en rien leur sens et leur portée, la Cour d'appel a dénaturé ces actes de cautionnement et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil.