LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., épouse Y..., qui avait été engagée le 18 avril 1994 en qualité de secrétaire comptable par la société Adis, a accepté le 1er mars 2007 la convention de reclassement personnalisé qui lui avait été remise lors de l'entretien préalable à son licenciement pour motif économique le 20 février 2007 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de paiement d'une indemnité de préavis et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer des indemnités au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'une convention de reclassement personnalisé, l'employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d'information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail ; que, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié de la proposition de convention, il suffit que le motif économique soit énoncé dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation ; qu'en affirmant en l'espèce que la rupture du contrat de travail de la salariée résultant de son acceptation de la convention de reclassement personnalisée, avant que l'employeur ne puisse envoyer la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement, était dépourvue de cause réelle et sérieuse dès lors que l'employeur n'avait pas adressé de lettre énonçant le motif économique de la rupture, quand un tel courrier n'était pas nécessaire, la cour d'appel a violé l'article 4 de la convention du 27 avril 2005 relative à la convention de reclassement personnalisé agréée par arrêté du 24 mai 2005 et les articles L. 1233-65 et L. 1233-67 du code du travail ;
2°/ que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'une convention de reclassement personnalisé, l'employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d'information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail ; que, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié de la proposition de convention, il suffit que le motif économique soit énoncé dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation ; qu'en affirmant en l'espèce que la rupture du contrat de travail de la salariée résultant de son acceptation de la convention de reclassement personnalisée était dépourvue de cause réelle et sérieuse dès lors que l'employeur n'avait pas adressé de lettre énonçant le motif économique de la rupture, sans rechercher si le motif de licenciement n'était pas énoncé soit dans le document écrit d'information sur la convention de reclassement personnalisé remis à la salariée, soit dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, soit dans tout autre document écrit remis ou adressé à la salariée au plus tard au moment de son acceptation, quand la cour d'appel a elle-même constaté que l'employeur soutenait la salariée avait eu connaissance de la note explicative, du projet et des motifs de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 de la convention du 27 avril 2005 relative à la convention de reclassement personnalisé agréée par arrêté du 24 mai 2005 et des articles L. 1233-65 et L. 1233-67 du code du travail ;
Mais attendu que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'une convention de reclassement personnalisé, l'employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d'information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit lorsqu'il ne lui est pas possible d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié de la proposition de convention, dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation ;
Que l'employeur n'ayant pas soutenu qu'il avait remis personnellement à la salariée un document écrit énonçant le motif économique de la rupture, la cour d'appel, qui, n'ayant pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a constaté qu'il n'avait pas adressé à l'intéressée de lettre motivée, a exactement décidé que la rupture était dépourvue de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles L. 1233-69 et L. 1235-4 du code du travail ;
Attendu que l'arrêt condamne également l'employeur au remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage payées à la salariée du jour de son licenciement au jour de l'arrêt dans la limite de trois mois d'indemnités ;
Attendu cependant qu'en l'absence de motif économique, la convention de reclassement personnalisé devenant sans cause, l'employeur est tenu de rembourser les indemnités de chômage éventuellement versées au salarié, sous déduction de la contribution prévue à l'article L. 1233-69 du code du travail ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a ordonné le remboursement par l'employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à la salariée du jour de son licenciement au jour de l'arrêt dans la limite de trois mois d'indemnités, l'arrêt rendu le 20 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Adis.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit le licenciement économique de Madame X... épouse
Y...
dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société ADIS à lui payer 20. 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 3. 788, 70 euros au titre du préavis outre congés payés afférents et 1. 200 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile, et d'AVOIR ordonné le remboursement par la société ADIS aux organismes concernés les indemnités chômage versées à la salariée ;
AUX MOTIFS QUE la société ADIS prétend qu'elle a subi des pertes de marchés en 2006 et que le bilan a confirmé ces difficultés ; qu'elle a dû prendre des mesures et envisager de diminuer les effectifs ; que Madame
Y...
a été avertie comme les autres salariés ; qu'en tant que secrétaire comptable, elle ne pouvait les ignorer ; que les délégués du personnel, informés du projet de licenciement le 7 février 2007, n'ont émis aucune objection ; que Madame
Y...
a eu connaissance de la note explicative, du projet et des motifs de licenciement ; qu'elle a adhéré à la convention de reclassement personnalisé et le contrat de travail a donc été rompu d'un commun accord entre les parties ; que la Cour de Cassation n'impose que l'information, non une lettre ; que Madame
Y...
a ensuite contesté son licenciement, car elle a été la seule à être licenciée alors que la société avait envisagé plusieurs licenciements ; que le licenciement économique est fondé ; qu'il n'existait pas de poste permettant de reclasser la salariée puisqu'il n'existe que quatre postes administratifs et commerciaux, les autres étant liés à la production et Madame
Y...
ne conteste pas que son poste a été supprimé et ses tâches réparties sur d'autres salariés ; que les critères de l'ordre des licenciements ont été acceptés par les délégués du personnel et Madame
Y...
était la seule de sa catégorie professionnelle ; Mais attendu que la rupture du contrat de travail résultant de l'acceptation par le salarié d'une convention de reclassement personnalisé doit avoir une cause économique réelle et sérieuse ; que la demande de Madame
Y...
est recevable, peu important son adhésion à la convention, et ne la prive pas de la possibilité de contester ultérieurement le motif économique de son licenciement ; que la convention qui entraîne la rupture du contrat de travail d'un commun accord des parties implique que le motif économique du licenciement existe et soit réel et sérieux et il appartient au juge de s'assurer de ce motif en cas de contestation ; que l'appréciation de cette cause ne peut résulter que des motifs énoncés par l'employeur ; qu'en n'adressant pas de lettre énonçant le motif économique de la rupture, le licenciement est nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés à titre subsidiaire par la salariée, tels que l'absence de recherche de reclassement et le non-respect des critères de l'ordre des licenciements, il convient de faire droit à la demande de Madame
Y...
et de condamner la société ADIS à lui payer la somme de 20. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au vu des éléments produits aux débats sur l'ancienneté (13 ans), l'âge (49 ans) et sa situation familiale et professionnelle dont elle a justifié … ; que le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, la convention de reclassement personnalisé n'a pas de cause et l'employeur doit être tenu à l'obligation de préavis et des congés payés afférents ;
1) ALORS QUE lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'une convention de reclassement personnalisé, l'employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d'information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du Code du travail ; que, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié de la proposition de convention, il suffit que le motif économique soit énoncé dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation ; qu'en affirmant en l'espèce que la rupture du contrat de travail de Madame
Y...
résultant de son acceptation de la convention de reclassement personnalisée, avant que l'employeur ne puisse envoyer la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement, était dépourvue de cause réelle et sérieuse dès lors que l'employeur n'avait pas adressé de lettre énonçant le motif économique de la rupture, quand un tel courrier n'était pas nécessaire, la Cour d'Appel a violé l'article 4 de la convention du 27 avril 2005 relative à la convention de reclassement personnalisé agréée par arrêté du 24 mai 2005 et les articles L. 1233-65 et L. 1233-67 du Code du travail ;
2) ALORS à tout le moins QUE lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'une convention de reclassement personnalisé, l'employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d'information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du Code du travail ; que, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié de la proposition de convention, il suffit que le motif économique soit énoncé dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation ; qu'en affirmant en l'espèce que la rupture du contrat de travail de Madame
Y...
résultant de son acceptation de la convention de reclassement personnalisée était dépourvue de cause réelle et sérieuse dès lors que l'employeur n'avait pas adressé de lettre énonçant le motif économique de la rupture, sans rechercher si le motif de licenciement n'était pas énoncé soit dans le document écrit d'information sur la convention de reclassement personnalisé remis à la salariée, soit dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, soit dans tout autre document écrit remis ou adressé à la salariée au plus tard au moment de son acceptation, quand la Cour d'Appel a elle-même constaté que l'employeur soutenait que Madame
Y...
a eu connaissance de la note explicative, du projet et des motifs de licenciements (arrêt attaqué page 3 § 1), la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 de la convention du 27 avril 2005 relative à la convention de reclassement personnalisé agréée par arrêté du 24 mai 2005 et des articles L. 1233-65 et L. 1233-67 du Code du travail.
SECOND MOYEN (subsidiaire) DE CASSATION
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR ordonné le remboursement par la société ADIS aux organismes concernés des indemnités chômage versées à la salariée ;
AUX MOTIFS QUE le salarié qui accepte la convention de reclassement personnalisé renonce au préavis et à l'indemnité de préavis s'il a plus de deux ans d'ancienneté, dans la limite de deux mois d'indemnité de préavis, ce qui est le cas en l'espèce ; qu'en réalité l'employeur contribue au financement de l'allocation spécifique de reclassement par un versement à l'ASSEDIC équivalent à deux mois de salaire sous réserve que la durée légale de préavis soit au moins égale à deux mois ; que le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, la convention de reclassement personnalisée n'a pas de cause et l'employeur doit être tenu à l'obligation de préavis et des congés payés afférents ; que la prétention de Madame
Y...
est fondée et il lui sera alloué une somme de 3. 778, 70 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis ainsi que la somme de 3378, 87 euros brut à titre de congés payés afférents ; QU'il est ordonné le remboursement par la société ADIS aux organismes concernés des indemnités de chômage payées au salarié du jour de son licenciement au jour de l'arrêt dans la limite de trois mois d'indemnités ;
ALORS QU'en l'absence de motif économique de licenciement, la convention de reclassement personnalisé devient sans cause de sorte qu'il y a lieu à compensation entre les sommes que l'employeur a versées, sans cause, au pôle emploi pour le financement de l'allocation spécifique de reclassement, et celle qu'il doit du fait de sa condamnation à rembourser les allocations chômage versées au salarié ; qu'en condamnant en l'espèce l'employeur à rembourser aux organismes concernés les indemnités chômages payées à la salariée dans la limite de trois mois après avoir retenu que la convention de reclassement personnalisée était sans cause et que c'est en application de cette convention que l'employeur avait contribué à l'allocation spécifique de reclassement auprès des mêmes organismes, la Cour d'Appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 4 de la convention du 27 avril 2005 relative à la convention de reclassement personnalisé agréée par arrêté du 24 mai 2005 et les articles L. 1233-65 et L. 1233-67 du Code du travail, ensemble l'article L. 1235-4 du même code.