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13/10/2011 | FRANCE | N°09PA01620

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Formation plénière, 13 octobre 2011, 09PA01620


Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2009, présentée pour M. Daniel A, ..., par Me Quinquis ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800583 en date du 17 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les transactions et des pénalités pour manoeuvres frauduleuses auxquelles il a été assujetti au titre des années 1999, 2000, 2001 et 2002, mises en recouvrement par voie de rôle le 10 décembre 2007 ;

2°) de prononcer la d

charge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie français...

Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2009, présentée pour M. Daniel A, ..., par Me Quinquis ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800583 en date du 17 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les transactions et des pénalités pour manoeuvres frauduleuses auxquelles il a été assujetti au titre des années 1999, 2000, 2001 et 2002, mises en recouvrement par voie de rôle le 10 décembre 2007 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu le code des impôts de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 96-313 du 12 avril 1996 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2011 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, rapporteur,

- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public ;

Considérant que le service des contributions de la Polynésie française a remis en cause le crédit d'impôt dont M. A avait bénéficié, en application des dispositions de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française, au titre du financement d'un projet de construction immobilière réalisé par la SCI Vairaatoa Nui ; que M. A relève appel du jugement du 17 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les transactions, ainsi que des pénalités pour manoeuvres frauduleuses, auxquelles il a été assujetti au titre des années 1999, 2000, 2001 et 2002 ;

Sur les conclusions à fin de décharge des impositions litigieuses :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige issue de la délibération n° 1999-224 du 14 décembre 1999 de l'assemblée de la Polynésie française : "Les personnes assujetties à l'impôt sur les transactions bénéficient d'un crédit d'impôt pour tout financement égal ou supérieur à 10 millions de francs dans un projet de construction immobilière, à l'exception des projets à vocation hôtelière, d'un coût total égal ou supérieur à 100 millions de francs dont la demande de permis de construire aura été déposée avant le 31 décembre 2000. (...) / Sont considérés comme financements au sens du présent article : / - les souscriptions d'actions et de parts en numéraire, ou par apport de terrains affectés au projet dans la limite indiquée au premier alinéa, effectuées lors de la constitution ou de l'augmentation du capital de la société s'engageant à réaliser le projet ainsi que les souscriptions en numéraire par voie d'incorporation au capital des sommes laissées en compte courant à la disposition de ladite société ; / (...) Le bénéfice du crédit d'impôt est subordonné à l'engagement pris par le bénéficiaire de conserver les immeubles, les actions ou parts, pendant dix-huit mois au moins ou jusqu'à la date de délivrance du certificat de conformité, si celle-ci intervient avant l'expiration de ce délai. / Ce crédit d'impôt s'élève : / - à 40% si ce financement intervient avant le 31 décembre 1997 ; / à 30 % si ce financement intervient entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 2001 ; / Ce crédit d'impôt est imputable sur la moitié de l'impôt sur les transactions dû, établi au titre de l'exercice de la réalisation du financement, sur présentation d'une attestation précisant les modalités de financement délivrée par le constructeur. / Il en est tenu compte pour le calcul des acomptes. / Le solde éventuel du crédit d'impôt est imputable dans la même limite sur les cinq exercices suivants. (...) / Ces avantages sont remis en cause, et l'impôt dont le crédit a été préalablement accordé devient immédiatement exigible, nonobstant le cas échéant l'expiration des délais de prescription, dans les circonstances suivantes : / - non-respect des conditions prévues par les dispositions du présent article (...) " ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la Polynésie française, les dispositions précitées de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française ne peuvent être regardées, dès lors qu'elles écartent de manière générale l'application des délais de prescription, comme réservant implicitement l'application de la prescription trentenaire de droit commun alors prévue par le code civil ou comme limitant implicitement à sept ans le délai dans lequel l'administration peut remettre en cause le crédit d'impôt institué par ces dispositions, au motif que, en vertu de l'article 444-1 de ce code, les contribuables ne sont tenus de conserver les documents sur lesquels peut s'exercer le droit de communication dont jouit l'administration que pendant cette durée ; qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées de l'article 184-2 que le crédit d'impôt qu'elles instituent peut être remis en cause par l'administration sans limitation dans le temps, notamment dans le cas où les conditions permettant l'octroi de l'avantage fiscal n'étaient pas remplies dès l'origine ;

Considérant que le principe de sécurité juridique s'oppose à ce que puisse être légalement édictée une disposition qui institue un droit de reprise au profit de l'administration fiscale en excluant, de façon générale et absolue, l'application de toute prescription ;

Considérant que M. A est dès lors fondé à soutenir, par la voie de l'exception d'illégalité, que les dispositions précitées de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française, en tant qu'elles excluent tout délai de prescription, méconnaissent le principe de sécurité juridique ; qu'il s'ensuit qu'il y a lieu d'en écarter l'application dans le présent litige ;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence, de faire application des dispositions de droit commun prévues, en ce qui concerne la prescription du droit de reprise de l'administration fiscale, par le code des impôts de la Polynésie française ;

Considérant qu'aux termes de l'article 451-1 du code des impôts de la Polynésie française, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette ou la liquidation des impôts et taxes visés au présent code ainsi que les erreurs commises dans l'établissement des impositions, dans l'application des tarifs ou dans le calcul des cotisations peuvent être réparées jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due " ;

Considérant que l'administration disposait, en application de cet article, d'un délai expirant au plus tard, s'agissant de l'année 2002, le 31 décembre 2005, pour réparer les omissions et insuffisances constatées dans l'assiette ou la liquidation de l'impôt sur les transactions au titre des années 1999 à 2002 ; que la notification de redressements portant sur les impositions en litige, intervenue le 28 février 2006, soit après l'expiration du délai de prescription, n'a pu interrompre celui-ci ; que, dès lors, le requérant est fondé à soutenir que ces impositions étaient prescrites à la date du 10 décembre 2007 à laquelle elles ont été mises en recouvrement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la Polynésie française au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Polynésie française la somme demandée par M. A au titre des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0800583 du Tribunal administratif de la Polynésie française en date du 17 février 2009 est annulé.

Article 2 : M. A est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur les transactions ainsi que des pénalités pour manoeuvres frauduleuses auxquelles il a été assujetti au titre des années 1999, 2000, 2001 et 2002.

Article 3 : Les conclusions de M. A et de la Polynésie française tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 09PA01620


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Formation plénière
Numéro d'arrêt : 09PA01620
Date de la décision : 13/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA RÈGLE DE DROIT - PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT - PRINCIPES INTÉRESSANT L'ACTION ADMINISTRATIVE - CRÉDIT D'IMPÔT INSTITUÉ PAR L'ARTICLE 184-2 DU CODE DES IMPÔTS DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE - DISPOSITIONS EXCLUANT L'APPLICATION DE TOUT DÉLAI DE PRESCRIPTION DU DROIT DE REPRISE DONT JOUIT L'ADMINISTRATION FISCALE - EFFET - VIOLATION DU PRINCIPE DE SÉCURITÉ JURIDIQUE - CONSÉQUENCE - APPLICATION DES DISPOSITIONS DE DROIT COMMUN PRÉVUES EN CE QUI CONCERNE LA PRESCRIPTION DE CE DROIT DE REPRISE.

01-04-03-07 L'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française, dans sa rédaction issue de la délibération n° 1999-224 du 14 décembre 1999 de l'assemblée de la Polynésie française, institue en faveur des personnes assujetties à l'impôt sur les transactions un crédit d'impôt pour tout financement égal ou supérieur à 10 millions de francs dans un projet de construction immobilière, à l'exception des projets à vocation hôtelière. En l'absence de respect des conditions prévues par cet article, cet avantage est remis en cause et l'impôt dont le crédit a été préalablement accordé devient immédiatement exigible, nonobstant, le cas échéant, l'expiration des délais de prescription. Dès lors qu'elles écartent de manière générale l'application des délais de prescription, les dispositions précitées ne peuvent être regardées comme réservant implicitement l'application de la prescription trentenaire de droit commun alors prévue par le code civil ou comme limitant implicitement à sept ans le délai dans lequel l'administration peut remettre en cause le crédit d'impôt institué par ces dispositions, au motif que les contribuables ne sont tenus, en vertu de l'article 444-1 du code des impôts de la Polynésie française, de conserver les documents sur lesquels peut s'exercer le droit de communication dont jouit l'administration que pendant cette durée de sept ans. Il résulte en effet des termes mêmes des dispositions de l'article 184-2 que le crédit d'impôt consenti peut être remis en cause par l'administration sans limitation dans le temps, notamment dans le cas où les conditions permettant l'octroi de l'avantage fiscal n'étaient pas remplies dès l'origine. Or, le principe de sécurité juridique s'oppose à ce que puisse être légalement édictée une disposition instituant un droit de reprise au profit de l'administration fiscale en excluant, de façon générale et absolue, l'application de toute prescription. Dès lors, les dispositions de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française, en tant qu'elles excluent tout délai de prescription, méconnaissent ce principe et il ne peut, par suite, être fait application de ces dispositions dans le litige. En conséquence, il y a lieu de faire application des dispositions de droit commun prévues, en ce qui concerne la prescription du droit de reprise de l'administration fiscale, par l'article 451-1 du code des impôts de la Polynésie française selon lequel les omissions ou insuffisances constatées dans l'assiette ou la liquidation d'un impôt prévu par ce code peuvent être réparées jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due.

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE DANS LES COLLECTIVITÉS D'OUTRE-MER ET EN NOUVELLE-CALÉDONIE - AUTRES LOIS ET RÈGLEMENTS - AUTRES COLLECTIVITÉS D'OUTRE-MER ET NOUVELLE-CALÉDONIE - POLYNÉSIE FRANÇAISE - CRÉDIT D'IMPÔT INSTITUÉ PAR L'ARTICLE 184-2 DU CODE DES IMPÔTS DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE - DISPOSITIONS EXCLUANT L'APPLICATION DE TOUT DÉLAI DE PRESCRIPTION DU DROIT DE REPRISE DONT JOUIT L'ADMINISTRATION FISCALE - EFFET - VIOLATION DU PRINCIPE DE SÉCURITÉ JURIDIQUE - CONSÉQUENCE - APPLICATION DES DISPOSITIONS DE DROIT COMMUN PRÉVUES EN CE QUI CONCERNE LA PRESCRIPTION DE CE DROIT DE REPRISE.

46-01-03-02-03 L'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française, dans sa rédaction issue de la délibération n° 1999-224 du 14 décembre 1999 de l'assemblée de la Polynésie française, institue en faveur des personnes assujetties à l'impôt sur les transactions un crédit d'impôt pour tout financement égal ou supérieur à 10 millions de francs dans un projet de construction immobilière, à l'exception des projets à vocation hôtelière. En l'absence de respect des conditions prévues par cet article, cet avantage est remis en cause et l'impôt dont le crédit a été préalablement accordé devient immédiatement exigible, nonobstant, le cas échéant, l'expiration des délais de prescription. Dès lors qu'elles écartent de manière générale l'application des délais de prescription, les dispositions précitées ne peuvent être regardées comme réservant implicitement l'application de la prescription trentenaire de droit commun alors prévue par le code civil ou comme limitant implicitement à sept ans le délai dans lequel l'administration peut remettre en cause le crédit d'impôt institué par ces dispositions, au motif que les contribuables ne sont tenus, en vertu de l'article 444-1 du code des impôts de la Polynésie française, de conserver les documents sur lesquels peut s'exercer le droit de communication dont jouit l'administration que pendant cette durée de sept ans. Il résulte en effet des termes mêmes des dispositions de l'article 184-2 que le crédit d'impôt consenti peut être remis en cause par l'administration sans limitation dans le temps, notamment dans le cas où les conditions permettant l'octroi de l'avantage fiscal n'étaient pas remplies dès l'origine. Or, le principe de sécurité juridique s'oppose à ce que puisse être légalement édictée une disposition instituant un droit de reprise au profit de l'administration fiscale en excluant, de façon générale et absolue, l'application de toute prescription. Dès lors, les dispositions de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française, en tant qu'elles excluent tout délai de prescription, méconnaissent ce principe et il ne peut, par suite, être fait application de ces dispositions dans le litige. En conséquence, il y a lieu de faire application des dispositions de droit commun prévues, en ce qui concerne la prescription du droit de reprise de l'administration fiscale, par l'article 451-1 du code des impôts de la Polynésie française selon lequel les omissions ou insuffisances constatées dans l'assiette ou la liquidation d'un impôt prévu par ce code peuvent être réparées jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due.


Composition du Tribunal
Président : M. FRYDMAN
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : QUINQUIS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-10-13;09pa01620 ?
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