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17/03/2011 | FRANCE | N°09MA00510

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 17 mars 2011, 09MA00510


Vu la requête, enregistrée le 11 février 2009, présentée par la SCP Delaporte, Briard et Trichet pour la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES, dont le siège est Les Bailletas à Porta (66000), représentée par son représentant légal en exercice ; la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé sur déféré du préfet des Pyrénées Orientales, la délibération du conseil municipal de Porta du 9 mars 2007 créant la zone d'aménagement concerté de Porta dite P

orte des Neiges ;

2°) de rejeter le déféré du préfet des Pyrénées Orientales ...

Vu la requête, enregistrée le 11 février 2009, présentée par la SCP Delaporte, Briard et Trichet pour la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES, dont le siège est Les Bailletas à Porta (66000), représentée par son représentant légal en exercice ; la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé sur déféré du préfet des Pyrénées Orientales, la délibération du conseil municipal de Porta du 9 mars 2007 créant la zone d'aménagement concerté de Porta dite Porte des Neiges ;

2°) de rejeter le déféré du préfet des Pyrénées Orientales devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 modifiée concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvage (articles 4 et 6) journal officiel n° L 206 du 22/07/1992 p. 0007 - 0050 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le vice-président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mars 2011 :

- le rapport de M. Massin, rapporteur ;

- les conclusions de M. Bachoffer, rapporteur public ;

- et les observations de Me Briard pour la SAS RESIDENCE PORTE DES NEIGES ;

Considérant que par un jugement du 25 novembre 2008, le tribunal administratif de Montpellier a annulé, sur déféré du préfet des Pyrénées-Orientales, la délibération du conseil municipal de Porta du 9 mars 2007 créant la zone d'aménagement concerté de Porta dite Porte des Neiges ; que la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES interjette appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ainsi que de la viser ; qu'il est constant que la minute ne vise pas la note en délibéré présentée pour la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES, enregistrée le 20 novembre 2008 par le greffe du tribunal administratif de Montpellier ; qu'ainsi, le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 25 novembre 2008 doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur le déféré présenté par le préfet des Pyrénées-Orientales devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Sur l'intervention de la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES :

Considérant que la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES a intérêt au rejet du déféré du préfet des Pyrénées-Orientales ; qu'ainsi, son intervention en défense est recevable ;

Sur la légalité de la délibération attaquée :

Considérant que le préfet des Pyrénées-Orientales soutient que le projet de création de zone d'aménagement concerté de Porta dite Porte des Neiges approuvé par la délibération du conseil municipal de Porta du 9 mars 2007 méconnaît les dispositions de l'article L.414-4 du code de l'environnement et celles de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 ;

Considérant que le titre III de l'ordonnance du 11 avril 2001, ratifié implicitement par la loi du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt, comporte un unique article, qui insère au chapitre IV du titre Ier du code de l'environnement une section I, intitulée sites Natura 2000 , créant les articles L.414-1 à L.414-7 du code de l'environnement ; que l'article L.414-1 transpose en droit interne la procédure de sélection et de désignation des sites d'importance communautaire dits sites Natura 2000 telle qu'elle est organisée par l'article 4 de la directive 92/43/CEE ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.414-1 du code de l'environnement dans sa version alors en vigueur : III. - Avant la notification à la Commission européenne de la proposition d'inscription d'une zone spéciale de conservation ou avant la décision de désigner une zone de protection spéciale, le projet de périmètre de la zone est soumis à la consultation des organes délibérants des communes et des établissements publics de coopération intercommunale concernés. L'autorité administrative ne peut s'écarter des avis motivés rendus à l'issue de cette consultation que par une décision motivée.// Avant la notification à la Commission européenne de la proposition d'inscription d'un périmètre modifié d'une zone spéciale de conservation ou avant la décision de modifier le périmètre d'une zone de protection spéciale, le projet de périmètre modifié de la zone est soumis à la consultation des organes délibérants des communes et des établissements publics de coopération intercommunale territorialement concernés par la modification du périmètre. L'autorité administrative ne peut s'écarter des avis motivés rendus à l'issue de cette consultation que par une décision motivée.// IV. - Les sites désignés comme zones spéciales de conservation et zones de protection spéciale par décision de l'autorité administrative concourent, sous l'appellation commune de sites Natura 2000 , à la formation du réseau écologique européen Natura 2000 (...). ; qu'aux termes de l'article R.414-4 du code de l'environnement dans sa version alors en vigueur : Saisi d'un projet de désignation d'une zone spéciale de conservation, le ministre chargé de l'environnement peut proposer la zone pour la constitution du réseau écologique européen Natura 2000. Cette proposition est notifiée à la Commission européenne.// Le préfet porte à la connaissance des maires des communes intéressées la notification de la proposition de site à la Commission européenne. // Lorsque la zone proposée est inscrite par la Commission européenne sur la liste des sites d'importance communautaire, le ministre chargé de l'environnement prend un arrêté la désignant comme site Natura 2000. ;

Considérant que si par une décision du 22 décembre 2003 la Commission européenne a arrêté, sur proposition du gouvernement français, en application de la directive 92/43/CEE, la liste des sites d'importance communautaire pour la région biogéographique alpine et a identifié le site Capcir, Carlit et Campcardos (FR 9101471) comme site d'importance communautaire, le ministre chargé de l'environnement n'avait pas encore, à la date à laquelle a été adoptée la délibération attaquée, pris l'arrêté définitif le désignant comme site Natura 2000 ; que, par suite, la procédure d'inscription n'étant pas achevée, le préfet des Pyrénées-Orientales ne peut se fonder sur la méconnaissance des dispositions du code de l'environnement pour demander l'annulation de la délibération attaquée ;

Considérant, toutefois, que la transposition en droit interne des directives communautaires, qui est une obligation résultant du Traité instituant la Communauté européenne, revêt, en outre, en vertu de l'article 88-1 de la Constitution, le caractère d'une obligation constitutionnelle ; que, pour chacun de ces deux motifs, il appartient au juge national, juge de droit commun de l'application du droit communautaire, de garantir l'effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l'égard des autorités publiques ; que le préfet des Pyrénées-Orientales peut en conséquence, à l'appui de son déféré dirigé contre la délibération du conseil municipal de Porta du 9 mars 2007 créant la zone d'aménagement concerté de Porta dite Porte des Neiges qui est un acte administratif non réglementaire, demander au juge d'appliquer les dispositions précises et inconditionnelles de la directive 92/43/CEE, dès lors que celle-ci n'a pas été entièrement transposée en droit interne dans les délais impartis par celle-ci ;

Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la de la directive 92/43/CEE : (...) 2. Sur la base des critères établis à l'annexe III (étape 2) et dans le cadre de chacune des cinq régions biogéographiques mentionnées à l'article 1er point c) iii) et de l'ensemble du territoire visé à l'article 2 paragraphe 1, la Commission établit, en accord avec chacun des États membres, un projet de liste des sites d'importance communautaire, à partir des listes des États membres, faisant apparaître les sites qui abritent un ou plusieurs types d'habitats naturels prioritaires ou une ou plusieurs espèces prioritaires. (...) 3. La liste mentionnée au paragraphe 2 est établie dans un délai de six ans après la notification de la présente directive. 4. Une fois qu'un site d'importance communautaire a été retenu en vertu de la procédure prévue au paragraphe 2, l'État membre concerné désigne ce site comme zone spéciale de conservation le plus rapidement possible et dans un délai maximal de six ans en établissant les priorités en fonction de l'importance des sites pour le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation favorable, d'un type d'habitat naturel de l'annexe I ou d'une espèce de l'annexe II et pour la cohérence de Natura 2000, ainsi qu'en fonction des menaces de dégradation ou de destruction qui pèsent sur eux. 5. Dès qu'un site est inscrit sur la liste visée au paragraphe 2 troisième alinéa, il est soumis aux dispositions de l'article 6 paragraphes 2, 3 et 4. ; qu'aux termes de l'article 6 de la même directive : 1. Pour les zones spéciales de conservation, les États membres établissent les mesures de conservation nécessaires impliquant, le cas échéant, des plans de gestion appropriés spécifiques aux sites ou intégrés dans d'autres plans d'aménagement et les mesures réglementaires, administratives ou contractuelles appropriées, qui répondent aux exigences écologiques des types d'habitats naturels de l'annexe I et des espèces de l'annexe II présents sur les sites. 2. Les États membres prennent les mesures appropriées pour éviter, dans les zones spéciales de conservation, la détérioration des habitats naturels et des habitats d'espèces ainsi que les perturbations touchant les espèces pour lesquelles les zones ont été désignées, pour autant que ces perturbations soient susceptibles d'avoir un effet significatif eu égard aux objectifs de la présente directive. 3. Tout plan ou projet non directement lié ou nécessaire à la gestion du site mais susceptible d'affecter ce site de manière significative, individuellement ou en conjugaison avec d'autres plans et projets, fait l'objet d'une évaluation appropriée de ses incidences sur le site eu égard aux objectifs de conservation de ce site. Compte tenu des conclusions de l'évaluation des incidences sur le site et sous réserve des dispositions du paragraphe 4, les autorités nationales compétentes ne marquent leur accord sur ce plan ou projet qu'après s'être assurées qu'il ne portera pas atteinte à l'intégrité du site concerné et après avoir pris, le cas échéant, l'avis du public. 4. Si, en dépit de conclusions négatives de l'évaluation des incidences sur le site et en l'absence de solutions alternatives, un plan ou projet doit néanmoins être réalisé pour des raisons impératives d'intérêt public majeur,

y compris de nature sociale ou économique, l'État membre prend toute mesure compensatoire nécessaire pour assurer que la cohérence globale de Nature 2000 est protégée. L'État membre informe la Commission des mesures compensatoires adoptées.// Lorsque le site concerné est un site abritant un type d'habitat naturel et/ou une espèce prioritaires, seules peuvent être évoquées des considérations liées à la santé de l'homme et à la sécurité publique ou à des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ou, après avis de la Commission, à d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur. ;

Considérant que la zone d'aménagement concerté Porte des Neiges, d'une superficie de 54 hectares, se situe à l'intérieur du périmètre couvert par le site d'intérêt communautaire Capcir, Carlit et Campcardos, d'une superficie de 39.781 ha ; que le projet prévoit la construction de

80 000 m² de surface hors oeuvre nette, dont 40 000 m² de logements, 28 000 m² d'hôtels et assimilés et 12 000 m² de commerces, services et équipements, ainsi que 2300 places de parking ;

Considérant que le document d'évaluation des incidences du projet de la zone d'aménagement concerté Porte des Neiges au regard des objectifs de conservation du site d'intérêt communautaire, répertorie au titre des habitats naturels prioritaires les formations herbeuses à Nards riches en espèces (code UE 6230) ainsi que les tourbières hautes actives (code UE 7110) ; qu'il ressort de ce document que le projet, qui n'a aucune incidence notable sur les objectifs de conservation des espèces d'oiseaux justifiant la zone de protection spéciale, conduit toutefois à une destruction irrémédiable de 14,28 hectares des formations herbeuses à Nardus riches en espèces sur substrats siliceux des zones montagnardes, soit 0,72% du site d'intérêt communautaire, à une destruction de 0,007 hectares des tourbières hautes actives, soit 0,02% du site d'intérêt communautaire ; que par ailleurs l'étude d'incidence montre qu'outre les zones herbeuses à Nard et les mosaïques à Nard, le projet affectera sur une étendue de 11 hectares, soit 0,55% du site d'intérêt communautaire, avec des effets faibles à très faibles, les landes alpines et boréales, les pelouses siliceuses héliophiles à Gispet, les mégaphorbiaies hygrophiles d'ourlets planitiaires, les éboulis ouest méditerranéens et thermophiles, les pentes rocheuses siliceuses avec végétation chasmophytique ;

Considérant qu'eu égard, d'une part, au caractère très limité des espaces affectés par le projet par rapport à la superficie totale du site d'intérêt communautaire et d'autre part, à la faible intensité des effets négatifs sur ces espaces, alors que sont prévues par l'étude d'impact du projet de zone d'aménagement concerté des mesures de réduction des impacts sur le milieu naturel ainsi que des mesures compensatoires, le préfet ne démontre pas que la création de la zone d'aménagement concerté serait susceptible d'affecter le site d'intérêt communautaire Capcir, Carlit et Campcardos de manière significative et méconnaîtrait ainsi l'obligation de protection des sites Natura 2000 ; que, l'objectif du classement d'un site en zone Natura 2000 étant d'éviter les atteintes majeures aux habitats naturels, l'interprétation utile de la demande d'avis à la Commission prévue à l'article 6-4 de la directive 92/43/CEE conduit à estimer qu'un tel avis ne peut concerner que des atteintes substantielles ; qu'en l'absence d'impact sur les espèces et compte tenu des impacts extrêmement limités sur les différents habitats naturels, il serait disproportionné d'exiger que la Commission soit sollicitée pour donner un avis sur le projet queréllé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le déféré du préfet des Pyrénées-Orientales doit être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à payer à la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 25 novembre 2008 est annulé.

Article 2 : L'intervention de la SAS Résidence Porte des Neiges est admise.

Article 3 : Le déféré du préfet des Pyrénées Orientales est rejeté.

Article 4 : L'Etat (ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement) versera à la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE RESIDENCE PORTE DES NEIGES, au préfet des Pyrénées Orientales et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

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N° 09MA005102

SC


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA00510
Date de la décision : 17/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAMBERT
Rapporteur ?: M. Olivier MASSIN
Rapporteur public ?: M. BACHOFFER
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD et TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-03-17;09ma00510 ?
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