Vu la requête, enregistrée le 12 juin 2009, présentée pour M. Claude A, domicilié rue des Genêts, lotissement Simpal à Vieille Brioude (43100) ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 081258 du 24 mars 2009 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande relatives à l'arrêté du 20 juillet 2004 du préfet de la Haute-Loire portant autorisation d'exploiter une unité de traitement du lait par SODIAAL international - les fromageries Riches Monts ;
2°) d'annuler l'arrêté susmentionné ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Loire de réexaminer la demande d'autorisation d'exploitation et d'ordonner, dans l'attente d'un nouvel arrêté préfectoral, la suspension de l'exploitation de l'installation classée ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la demande d'autorisation d'exploitation déposée par les fromageries Riches Monts était incomplète, en ce qu'elle ne faisait pas état de l'exploitation de tours aéroréfrigérantes, ni du bilan des rejets gazeux, alors qu'ils étaient obligatoires en application de l'article R. 512-45 du code de l'environnement ;
- cette demande était erronée, en ce que l'entreprise, qui produit à elle-seule plus de 50 % de la pollution globale reçue par la station d'épuration de la ville, devait avoir sa propre station d'épuration et ne pas être reliée au réseau collectif, les chiffres concernant la consommation journalière d'eau sont inexacts, les bilans présentés en cas d'incendie ne tiennent pas compte des isolants polystyrènes sur les murs et plafonds, et la réfrigération des cuves de fabrication se fait en circuit ouvert, en méconnaissance de l'arrêté portant autorisation d'exploitation du 14 avril 1982 ;
- la société a expressément reconnu dans sa demande ne pas respecter certaines prescriptions de l'arrêté ministériel du 27 janvier 1997, relatives à la taille minimale de la cheminée des chaudières et à l'absence de double paroi des cuves enterrées ; aucune demande d'autorisation n'a été déposée entre 1982 et 2004 alors que plusieurs permis de construire ont permis à l'entreprise de doubler la surface de l'usine ; les contrôles des rejets gazeux ne sont pas définis en surveillance interne ;
- l'arrêté préfectoral du 20 juillet 2004 est illégal, en ce que la date retenue pour la remise du bilan de fonctionnement est erronée, dès lors que le bilan devait être présenté au plus tard le 31 décembre 2004, et en ce que le contenu du bilan de fonctionnement réclamé est incomplet, dès lors qu'il a omis d'exiger une analyse du fonctionnement de l'installation au cours de la décennie passée, de réclamer les flux des principaux polluants sur la même période, qu'il accepte que le réseau des eaux pluviales soit équipé d'une vanne de sectionnement maintenue fermée en permanence, et qu'il ne fixe aucun délai pour la mise en conformité des irrégularités présentées par l'entreprise ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance en date du 3 mai 2010, par laquelle la date de la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juin 2010 ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 mai 2010, présenté pour la société Compagnie des Fromages et RichesMonts, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors que, d'une part, les conclusions de la requête dirigées contre l'arrêté préfectoral du 20 juillet 2004 sont nouvelles en appel, et que, d'autre part, la qualité de directeur de la fromagerie de Brioude qui était celle du requérant de 1996 à 1999 n'est pas de nature à lui donner un intérêt à agir contre l'arrêté préfectoral du 20 juillet 2004 ;
- contrairement à ce que soutient M. A, la décision préfectorale a été prise au regard d'un dossier de demande d'autorisation complet, dès lors que les tours aéroréfrigérantes n'étaient pas, à la date de l'arrêté, au nombre des équipements devant figurer dans le dossier, et qu'il a été ensuite indiqué, en 2005, qu'elles fonctionnaient au bénéfice des droits acquis, et que le document produit comporte un paragraphe relatif à la pollution potentielle de l'air ;
- contrairement à ce que soutient M. A, la décision préfectorale n'a pas été prise au regard d'un dossier de demande d'autorisation comportant des éléments erronés, dès lors que la comparaison des volumes de consommation journalière d'eau, d'une part, et des eaux usées industrielles, d'autre part, ne permet pas de justifier que la fromagerie déverserait illégalement des eaux usées dans le réseau d'eau propre, et alors que les allégations du requérant sur le bilan en cas d'incendie et la réfrigération des cuves en circuit ouvert ne sont pas étayées par des documents ;
- les affirmations du requérant sur les irrégularités contenues dans le dossier de demande d'autorisation sont dénuées de fondement, s'agissant du raccordement à la station d'épuration, du bruit, de la hauteur de la cheminée de la chaudière, des cuves de stockage, de la retenue des eaux d'incendie, de l'extension de l'activité de la fromagerie et de la surveillance des rejets gazeux ;
- la présentation d'un nouveau bilan de fonctionnement au 31 décembre 2004 aurait été dénué de fondement et d'intérêt ;
- les aménagements relatifs au réseau d'eaux pluviales répondent aux exigences de prévention rappelées à l'article 5.4.1 de l'arrêté préfectoral en litige ;
- alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose qu'un arrêté d'autorisation d'une installation classée comporte un délai de mise en conformité, l'arrêté en litige prévoit une obligation générale de mise en conformité, la surveillance de l'exploitation par l'inspecteur des installations classées et des mesures de contrôle à brève échéance des rejets gazeux, des rejets d'eaux résiduaires et du niveau de bruit ;
Vu le mémoire, enregistré le 28 mai 2010, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- la requête est irrecevable, dès lors que M. A n'apporte aucun élément permettant d'établir que le fonctionnement de l'installation en cause est susceptible de présenter pour lui des inconvénients ou des dangers au regard des intérêts visés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement, et qu'il ne peut, en sa qualité d'ancien directeur de l'installation, justifier d'un intérêt à agir contre l'arrêté en litige ;
- le requérant n'apporte aucun élément permettant d'établir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le dossier présenté par la société répondait aux exigences réglementaires, et les affirmations du requérant relatives au caractère erroné du dossier de demande d'autorisation ne sont étayées d'aucun élément probant ; les moyens tirés du caractère incomplet et erroné du dossier de demande d'autorisation ne pourront donc qu'être écartés ;
- dès lors qu'aucune disposition n'impose à une personne qui se propose d'exploiter une installation classée de déposer une nouvelle demande d'autorisation lorsqu'elle a obtenu le permis de construire relatif à la construction de l'installation concernée, la circonstance que la société Sodiaal n'a pas déposé de dossier de demande d'autorisation entre 1982 et 2004 est sans influence sur la légalité de l'arrêté en litige ;
- M. A n'établit pas que l'arrêté d'autorisation contreviendrait aux dispositions de l'article R. 512-28 du code de l'environnement ;
- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 512-45 du code de l'environnement doit être écarté, dès lors que l'article 3.6 de l'arrêté prévoit la date de communication du bilan de fonctionnement conformément aux exigences réglementaires et que la société Sodiaal n'était pas tenue, au regard de la date de délivrance de l'autorisation, de fournir un bilan avant le 20 juillet 2014, en vertu de l'article 3 de l'arrêté ministériel du 29 juin 2004 ;
- le moyen tiré du caractère incomplet du bilan de fonctionnement demandé à l'exploitant doit être écarté comme inopérant, dès lors que le bilan de fonctionnement n'était pas exigible au regard de la date de l'autorisation en litige ;
Vu l'ordonnance en date du 1er juin 2010, par laquelle la date de la clôture de l'instruction a été reportée au 30 juin 2010 ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 juin 2010, présenté pour M. A, qui maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ;
Il soutient, en outre, que sa requête est recevable, dès lors, d'une part, que sa demande devant le Tribunal comportait des conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté préfectoral du 20 juillet 2004 et, d'autre part, qu'il peut invoquer un intérêt à agir personnel direct et certain, en premier lieu en sa qualité d'habitant de la ville de Brioude, directement exposé aux effets néfastes des rejets illégaux d'eaux résiduaires dans la station d'épuration de cette ville et des rejets gazeux très polluants, et en second lieu en sa qualité de président de l'association environnementale créée le 16 janvier 2006 ;
Vu l'ordonnance en date du 15 juillet 2010, par laquelle la date de la clôture de l'instruction a été reportée au 30 septembre 2010 ;
Vu le mémoire, enregistré le 14 septembre 2010, présenté pour la société Compagnie des Fromages et RichesMonts, qui maintient ses conclusions pour les mêmes motifs ;
Elle soutient, en outre, que le requérant ne peut se prévaloir de la qualité d'habitant de Brioude, dans laquelle ne se trouve pas son domicile, situé dans une commune voisine dont l'adduction d'eau potable ne peut être en lien avec les rejets de l'installation, et qu'il ne peut davantage se prévaloir de sa qualité de président d'une association environnementale créée près de 17 mois après l'autorisation en litige ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 septembre 2010, présenté pour M. A, qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mars 2011 :
- le rapport de M. Seillet, premier conseiller ;
- les observations de Me Chanon, pour M. A, et de Me Grisel, pour la société Compagnie des Fromages et RichesMonts ;
- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Chanon et Me Grisel ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres fins de non recevoir soulevées en défense ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance, que M. A, se prévalant de sa qualité d'ancien directeur, entre 1996 et 1999, de l'usine Riches-Monts, située à Brioude, a demandé au Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, par un mémoire enregistré au greffe de cette juridiction le 18 juillet 2008, d'annuler une décision de rejet, par le préfet de la Haute-Loire, d'une demande d' annulation de l'autorisation d'exploitation délivrée à cet établissement, au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ; qu'à cette demande, comportant également des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Loire de procéder au retrait de l'autorisation ICPE donnée à tort, était jointe, en particulier, la lettre, en date du 24 juin 2005, adressée au sous-préfet de la Haute-Loire, par laquelle M. A demandait aux services préfectoraux d'annuler l'autorisation d'installation classée illégale accordée en 2004 ; que par les mémoires produits devant la même juridiction, et enregistrés respectivement les 17 novembre 2008 et 18 février 2009, M. A a maintenu les conclusions de sa demande tendant à l'annulation d'une décision de rejet par la préfecture de la Haute-Loire d'une demande d'annulation de l'autorisation délivrée en 2004 ; qu'ainsi M. A s'est borné, en première instance, à solliciter l'annulation d'une décision préfectorale de rejet de sa demande tendant à l'abrogation ou au retrait de l'arrêté du 20 juillet 2004 du préfet de la Haute-Loire portant autorisation d'exploiter une unité de traitement du lait par Sodiaal International - les Fromageries Riches Monts, au motif de l'illégalité dudit arrêté, sans demander l'annulation de cet arrêté ; qu'ainsi, nonobstant la circonstance que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, après avoir constaté qu'il n'était pas besoin de statuer sur la recevabilité de la demande et sur les fins de non-recevoir opposées en défense, a rejeté les conclusions de la demande tendant à l'annulation de l'autorisation du 20 juillet 2004, au demeurant non visées, les conclusions, tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 juillet 2004 du préfet de la Haute-Loire portant autorisation d'exploiter une unité de traitement du lait par Sodiaal International - les Fromageries Riches Monts, sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de la requête aux fins d'injonction et de suspension, ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions de la société Compagnie des Fromages et RichesMonts tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance par la société Compagnie des Fromages et RichesMonts et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : M. A versera à la société Compagnie des Fromages et RichesMonts la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Claude A, au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement et à la société Compagnie des Fromages et RichesMonts.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2011, à laquelle siégeaient :
M. Fontanelle, président de chambre,
M. Givord, président-assesseur,
M. Seillet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 mars 2011.
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N° 09LY01295